Ăconomie circulaire: la gestion durable des plastiques, un objectif dâune stratĂ©gie nationale qui peine Ă sâimposer
La StratĂ©gie nationale de gestion circulaire globale et sectorielle des dĂ©chets 2035-2050 en Tunisie a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e Ă des journalistes maghrĂ©bins, tunisiens, algĂ©riens et marocains, lors dâun atelier rĂ©gional organisĂ©, dĂ©but dĂ©cembre 2024, Ă Tunis, par le RĂ©seau âAfrique 21â, en partenariat avec le ministĂšre de lâEnvironnement et du DĂ©veloppement durable, le Programme dâappui aux mĂ©dias tunisiens (PAMT2) avec lâappui financier de lâUE, lâambassade de Suisse Ă Tunis et la GIZ.
PrĂ©sentĂ©e par lâĂ©co conseillĂšre, juriste et membre du Forum national de lâadaptation aux changements climatiques en Tunisie (Fnacc), Sondes Fnaiech, dans le cadre dâune intervention sur le âPaysage tunisien de lâĂ©conomie circulaireâ, cette stratĂ©gie qui repose sur lâĂ©conomie circulaire, comme passage indispensable pour faire face au changement climatique, comporte trois volets sectoriels: la gestion des plastiques, le compostage Ă partir des dĂ©chets mĂ©nagers et assimilĂ©s et le recyclage des gravats et des dĂ©chets de dĂ©molition.
Pour le plastique, trois objectifs principaux ont Ă©tĂ© dĂ©finis. Il sâagit de limiter la consommation et la production dâobjets en plastique, de permettre une Ă©conomie circulaire de la production plastique en vue de protĂ©ger lâenvironnement et la santĂ© humaine et dâassurer une gestion et un recyclage Ă©cologiquement rationnels des dĂ©chets en plastique.
En effet, les plastiques non biodĂ©gradables sont une grande source de pollution de lâenvironnement ayant des impacts Ă moyen et long terme sur la santĂ© humaine, le sol et le milieu marin. En Tunisie, 4.2 milliards de sacs en plastique sont utilisĂ©s par an.
Selon un rapport de la Banque mondiale (BM), le pays génÚre 2.8 millions de tonnes de déchets ménagers par an, dont 9.4% sont des déchets plastiques.
La filiĂšre de la plasturgie en Tunisie est composĂ©e dâau moins 283 entreprises, dont 79 sont totalement exportatrices. La quantitĂ© annuelle des dĂ©chets plastiques mal gĂ©rĂ©e est estimĂ©e Ă 55,5 mille tonnes par an, selon le mĂȘme rapport de la BM. Toujours dâaprĂšs la BM, la pollution plastique est une menace importante pour lâĂ©conomie bleue de la Tunisie. LâĂ©conomie tunisienne subit une perte liĂ©e Ă la pollution par le plastique estimĂ©e entre 170 et 561 millions de dollars par an, selon le rapport sur âla stratĂ©gie littoral sans plastique et plan dâaction opĂ©rationnel Tunisie 2035â.
En dĂ©pit des initiatives rĂšglementaires (dĂ©cret du 16 janvier 2020) et gouvernementales, dont le projet Eco-Lef, premier systĂšme de gestion des dĂ©chets dâemballages mis en place par un pays africain visant Ă rĂ©duire la pollution et malgrĂ© la prĂ©sence dâentreprises qui traitent des milliers de tonnes de dĂ©chets par an, le secteur du recyclage en Tunisie souffre encore dâun manque dâorganisation et de lâabsence dâun cadre rĂ©glementaire clair, selon les intervenants au dĂ©bat dans le cadre de lâatelier rĂ©gional sur âlâĂ©conomie circulaire et les changements climatiques au Maghrebâ.
La plupart des initiatives se heurtent Ă des obstacles tels que la concurrence dĂ©loyale de lâinformel et le manque dâincitations pour les entreprises respectant les normes. RĂ©sultat: la majoritĂ© des dĂ©chets plastiques finissent dans des dĂ©charges ou dans le milieu naturel, aggravant la crise environnementale.
Selon lâĂ©co-conseillĂšre Sondes Fnaiech, gĂ©nĂ©ralement, le systĂšme public national de gestion des dĂ©chets a pour ambition de rĂ©duire la mise en dĂ©charge et de limiter lâimpact environnemental des dĂ©chets sans pour autant se doter dâune stratĂ©gie de sensibilisation efficace du large public, mettant en garde contre les sĂ©rieux risques de voir les initiatives ne pas atteindre leur plein potentiel.
âLâĂ©ducation et la sensibilisation sont ainsi essentielles pour promouvoir un comportement de consommation responsable et Ă©clairĂ©â, estime la responsable, qui reconnaĂźt que les barriĂšres rĂ©glementaires ainsi que la bureaucratie constituent un frein au vrai dĂ©collage de lâĂ©conomie circulaire en Tunisie.
Intervenant Ă distance sur le lâObjectif de dĂ©veloppement durable n°12 et les nĂ©gociations sur le plastique, Chantal Line Carpentier, chef du service Commerce, environnement, changement climatique et dĂ©veloppement durable, ConfĂ©rence des Nations unies sur le commerce et le dĂ©veloppement (Cnuced), a rappelĂ© que cet objectif vise Ă garantir des modes de consommation et de production durables, ce qui est essentiel pour prĂ©server les moyens de subsistance pour les gĂ©nĂ©rations actuelles et futures.
Selon la Cnuced, si la population mondiale atteint 9,8 milliards dâhabitants en 2050, lâĂ©quivalent de prĂšs de trois planĂštes sera nĂ©cessaire pour fournir les ressources naturelles essentielles au maintien des modes de vie actuels.
DâoĂč la nĂ©cessitĂ©, selon lâexperte onusienne, de rĂ©duire la production Ă la source des produits en plastique. Une tĂąche ardue Ă entreprendre pour une industrie rĂ©munĂ©ratrice. En 2021, 369 millions de tonnes de plastiques ont Ă©tĂ© Ă©changĂ©es pour une valeur de 1,2 trillion, soit une hausse de 30% depuis 2020.
Elle a soulignĂ©, Ă cet effet, que la Cnuced plaide en faveur de lâidentification dâune sĂ©rie dâalternatives ou de substituts biodĂ©gradables (Ă base de plantes, fibres, coton, alguesâŠ) au plastique (matiĂšres et produits) ou encore pour la circularitĂ© et le recyclage, car le plastique se dĂ©place via le commerce mais les dĂ©chets restent par manque de capacitĂ© de recyclage.
Ă lâĂ©chelle mondiale, si la tendance actuelle de la production mondiale de plastique se poursuit, les Ă©missions de GES dues Ă la production de plastique entre 2015 et 2050 sâĂ©lĂšveront Ă plus de 56 milliards de tonnes, ce qui Ă©quivaut Ă 10-13% des Ă©missions mondiales.
Cependant, une transition vers un modĂšle dâĂ©conomie circulaire du plastique considĂ©rant des approches comme lâĂ©co-conception, la rĂ©duction, la rĂ©utilisation, le recyclage tout au long du cycle de vie du produit, peut largement contribuer Ă la rĂ©duction des Ă©missions de GES dans lâenvironnement, amĂ©liorer la gestion des ressources, et stimuler Ă©galement lâinnovation et la crĂ©ation de nouveaux emplois directs et indirects.
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