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La Presse de Tunisie
- Restauration et ouverture du Palais Ahmed Bey : D’une demeure oubliée à un joyau culturel
4e édition de « Najaa El Fen » : Un souffle créatif au milieu des dunes
Le Festival de création artistique « Najaa El Fen » revient cette année pour sa quatrième édition, toujours au creux des plaines sablonneuses. Les grandes lignes de cet événement unique, tant par sa richesse que par son emplacement, ont déjà été dévoilées. Musique, arts plastiques et rencontres inspirantes… tout est réuni pour une semaine mémorable.
La Presse — Du 21 au 26 octobre, le Sahara de Douz accueillera donc un campement artistique, fidèle à son nom, avec toujours la même vocation : « Quand le Sahara rencontre et fait vivre l’art et la créativité ». Le fondateur et directeur de « Najaa El Fen », M. Ridha Mansouri, est professeur universitaire en musique et enseignant à l’Université Lyon 2.
Il est à l’origine de la musique de nombreuses pièces de théâtre, dont « Om el Boldane », récemment présentée au Festival international de Hammamet. Il travaille également sur un livre, L’initiation musicale, à paraître prochainement.
C’est en artiste et en pédagogue qu’il a conçu cet événement, en puisant dans ses racines bédouines. « Je voulais créer un campement, à la manière du rassemblement des bédouins dans le désert. Quand j’étais enfant, nous vivions en communauté dans des tentes déplaçables. J’ai donc grandi dans un véritable najaa. J’ai transformé ce souvenir d’enfance en un concept artistique », nous a-t-il confié.
Le Centre des stages et des vacances de Douz s’apprête à recevoir les participants et les festivaliers. L’accès au site se fera facilement par transport public depuis le centre-ville. Le nombre d’artistes présents sur place est estimé à 100, et l’événement touchera entre 5000 et 10 000 personnes, selon le directeur.
Le festival ne se limite pas à des concerts musicaux, comme l’a précisé M. Mansouri. La musique constitue un composant essentiel du line-up, mais elle n’est pas l’unique focus pour les participants. « Nous accueillerons des artistes et les accompagnerons dans le développement de leurs projets. Le festival s’adresse aussi au grand public en offrant un volet touristique. Ceux qui souhaitent explorer le désert ou observer les ateliers artistiques de près sont les bienvenus. ».
Des appels à participation ont déjà été lancés sur les réseaux sociaux, via la page officielle de « Najaa El Fen » et celle de l’Orchestre Philharmonique des Solistes, leur partenaire pour cette édition. Trois groupes musicaux seront pris en charge, offrant une opportunité unique à ceux qui souhaitent effectuer une résidence artistique en plein désert pour créer, finaliser un projet musical ou préparer un concert ou un album.
Trois ateliers musicaux sont déjà annoncés. Une session de formation à la direction d’orchestre sera animée par le maestro français Patrice Pinero, abordant les techniques du geste et l’analyse des partitions. Un stage de chant et de techniques vocales sera dirigé par Aida Nyati. Un autre atelier sur la musique de films sera assuré par le compositeur Rabii Zammouri. Des diplômes seront remis aux participants.
Une compétition nationale pour les jeunes musiciens est également prévue. « Nous tenons à rappeler la vocation engagée de « Najaa El Fen », souligne M. Mansouri qui insiste sur le rôle du festival en tant que plateforme d’échange, de valorisation du patrimoine immatériel et de soutien à la création artistique dans des territoires souvent marginalisés.
La clôture du festival se fera avec un grand concert du célèbre chanteur libanais Marcel Khalifa qui sera accompagné par des musiciens tunisiens sous la direction d’Achref Bettibi. Il est important de noter que les éditions précédentes se sont déroulées en collaboration avec Mohamed Ali Kamoun et Zied Zouari. Un projet « Ramla » est prévu en collaboration avec Zied Zouari et Karim Thlibi pour la direction artistique, comme nous l’a indiqué M. Mansouri.
Une projection visuelle sera réalisée en mapping sur les dunes et portera sur des symboles de la culture bédouine. « Nous avons initialement envisagé un court-métrage reproduisant la vie des bédouins, avec une musique jouée en live. Mais, en raison d’obstacles financiers, nous avons dû remplacer cette idée par un autre concept profond qui meublera toute une soirée », a précisé M.Ridha Mansouri.
Un grand intérêt sera porté aux arts plastiques. Le festival accueillera l’artiste saoudien Houssein Hebil. Un appel à projets a été récemment lancé pour les plasticiens spécialisés dans les œuvres monumentales destinées aux espaces publics. Les artistes travailleront sur des créations inspirées des éléments du désert, des oasis et de la vie locale. Des activités seront organisées avec les jeunes habitants locaux, en dehors des murs du festival.
Enfin, pour dynamiser la création et approfondir la quête artistique, M. Mansouri nous a informés qu’une compétition est prévue. « Les participants seront invités à passer trois jours avec nous dans le désert et à sortir de cette expérience avec une œuvre conçue à partir de l’inspiration puisée sur place».
Loin de se limiter à un rendez-vous festif, ce campement artistique se veut donc une aventure humaine à part entière, en lien étroit avec les richesses culturelles et patrimoniales de la région. Le fondateur ambitionne d’exporter le concept : « L’idée n’est pas spécifique à une ville ou à un pays. Nous serons à Tataouine l’année prochaine et nous envisageons une édition à l’étranger, notamment aux Émirats arabes unis. ».
Plus de détails sur la programmation et les artistes invités seront annoncés prochainement lors de la conférence de presse. Nous y reviendrons.
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La Presse de Tunisie
- Vient de paraitre – « Cinq nuits à Varsovie » de Hatem Bourial : Entre déambulations et rêveries
Vient de paraitre – « Cinq nuits à Varsovie » de Hatem Bourial : Entre déambulations et rêveries
Le livre est né de l’idée d’un reportage effectué en novembre 2021. D’ailleurs, la couverture affiche la statue de la Sirène de Varsovie, un célèbre monument en bronze situé sur la place de la Vieille Ville et considéré comme un des symboles de la ville.
La Presse — « L’arrivée à Varsovie est toujours parée de tonalités musicales ». C’est ainsi que Hatem Bourial a installé, dès la toute première phrase, le décor et la cadence de son dernier livre « Cinq nuits à Varsovie » paru aux éditions Le Naf. De Chopin à Gilbert Bécaud, il a introduit le récit d’un séjour de cinq nuits blanches à Varsovie, la capitale polonaise riche en découvertes historiques et culturelles.
Une séance de présentation et de dédicaces de ce livre s’est tenue le 14 septembre au Palais Ahmed Bey de La Marsa. Cette résidence beylicale classée monument historique a été sauvée de la démolition et restaurée pierre par pierre par son propriétaire Mahmoud Redissi. C’est après de longues années de travaux qu’elle a enfin ouvert ses portes pour accueillir le premier évènement littéraire dans un espace dédié à la culture.
Chroniqueur, journaliste et animateur à la radio, Hatem Bourial est également auteur de plus d’une dizaine d’ouvrages en majorité sur le patrimoine tunisien et sur ses voyages en Europe centrale. La rencontre autour de « Cinq nuits à Varsovie » a été inaugurée par le mot d’ouverture de SEM l’ambassadrice de la République de Pologne à Tunis, en présence de nombreux représentants diplomatiques de l’Autriche, l’Allemagne et la Wallonie-Bruxelles.
Le livre est né de l’idée d’un reportage effectué en novembre 2021. D’ailleurs, la couverture affiche la statue de la Sirène de Varsovie, un célèbre monument en bronze situé sur la place de la Vieille Ville et considéré comme un des symboles de la ville. En cinq chapitres correspondant à cinq nuits blanches passées entre rêveries et déambulations, l’auteur reconstruit les souvenirs de ses voyages en Pologne sur une trentaine d’années.
Des endroits fameux et d’autres moins connus ainsi que des rencontres défilent devant ses yeux dans « une échappée dans Varsovie et une échappée dans la rêverie », comme il l’a indiqué dans la présentation. Hatem Bourial a expliqué le recours à cette évasion de l’esprit, comme un voyage intérieur pour rapporter des pensées du passé et les relier à une expérience présente.
La rêverie est, selon lui, un procédé littéraire emprunté à Nerval, notamment dans son recueil « Les Filles du feu » ou encore à Samuel Beckett. À travers cette méthode de narration, Bourial se réfère en continu à sa ville natale, Tunis, et va jusqu’aux oasis du Sud pour retrouver des impressions liées.
Au fil des pérégrinations et des pages, des rues, des quartiers, des églises et des monuments se dessinent, évoquant « une terre de haute mémoire ». L’écrivain revient sur des lieux, mais aussi sur des clins d’œil historiques, des traditions culinaires, des rencontres humaines et des échos culturels qui font le portrait d’une « inépuisable Varsovie ».
Le texte se lit donc comme une invitation à explorer la Capitale, à l’arpenter avec les « pas fascinés » et les yeux émerveillés du narrateur qui n’a pas également manqué de souligner « la légendaire convivialité polonaise ».
L’auteur a cherché des liens historiques entre nos deux peuples. « Les traces sont nombreuses, mais éparpillées », écrit-il dans le quatrième chapitre. Entre poèmes empreints d’inspirations carthaginoises et une statue d’Hannibal croisée au détour d’une visite, une proximité subtile se dessine, accessible à ceux qui savent la discerner.
Ces influences s’avèrent en effet croisées. « Comment réciter, plus précisément comment restituer ce qu’une culture a priori étrangère vous a appris ? », écrit Bourial avant de relater les marques de la ville de Chopin dans le répertoire artistique qui nous est familier.
Dans ce rapport bilatéral entre les deux civilisations, Hatem Bourial s’est déjà intéressé à promouvoir la culture de l’Europe centrale et de l’Est, et leur rapprochement avec la Tunisie. Cet effort lui a valu la médaille d’honneur décernée par le ministère des Affaires étrangères de la République tchèque.
Ce livre dédié à Varsovie est, selon lui, une continuité de « Les Digressions pragoises » paru l’année dernière et qui est bien plus qu’un simple carnet de voyage. « Il y a toujours quelque chose qui me lie à l’Europe centrale », explique-t-il à la foule présente. Il a raconté que cet engouement remonte à son enfance.
« J’ai eu des camarades de classe polonais et tchèques. On les trouvait exotiques à l’époque ». Cette expérience de l’altérité a fait qu’il devienne le grand voyageur reconnu et a fortement nourri ses écrits. « Il y a encore de choses à voir», a lancé Bourial à l’audience à la fin de la présentation. Le récit s’achève dans le taxi vers l’aéroport, clôturé avec une promesse que le narrateur s’est faite « De toute façon, je reviendrai. »
Lors de la présentation de « Cinq nuits à Varsovie », l’auteur a abordé l’absence de récits de voyage dans la littérature tunisienne et même à une plus large échelle. En effet, depuis Ibn Batouta, il n’y a pas eu une génération de voyageurs qui relatent leurs itinéraires. Bourial a expliqué la valeur qu’il faut accorder à cette littérature, ainsi que l’importance de tisser dans les textes notre relation historique avec chaque pays visité.
D’après lui, cette littérature jouerait un rôle essentiel dans la compréhension de pays dont la langue demeure peu accessible pour nous, ce qui contribuerait au déficit de recherches universitaires sur des traces historiques communes.
Au final, Hatem Bourial a annoncé que son prochain livre « Fragments viennois » sera bientôt prêt. Encore une invitation à explorer une ville somptueuse, avec un nouveau concentré de souvenirs et de découvertes culturelles passionnantes.
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La Presse de Tunisie
- « Et si la planète du Petit Prince était La Marsa ? » : Réclamer notre part de Saint Exupéry
« Et si la planète du Petit Prince était La Marsa ? » : Réclamer notre part de Saint Exupéry
À travers une enquête passionnée, l’écrivain et éditeur Samy Mokadem retrace le passage oublié d’Antoine de Saint-Exupéry en Tunisie. De cette mémoire effacée, il propose de faire naître un projet culturel et patrimonial unique : un mémorial dédié au créateur du «Petit Prince», pour offrir à La Marsa une nouvelle lumière littéraire et touristique.
La Presse — Écrivain, éditeur et reporter français, Antoine de Saint-Exupéry est porté disparu au large de la Méditerranée le 31 juillet 1944. Son influence s’est étendue à travers le monde avec ses récits d’aventures et ses réflexions humanistes, continuant toujours à inspirer des générations de lecteurs, et même d’écrivains !
Féru de Saint-Exupéry, l’écrivain et éditeur Samy Mokadem a publié en 2021 un roman intitulé «Il était deux fois le Petit Prince», dont le titre fait écho au célèbre conte philosophique paru en 1943. Ce «récit pour tous les âges et pour tous les temps» détient le record du monde en traductions avec 600 langues et dialectes.
Une version en dialecte tunisien existe, avec un audiobook porté par la voix de l’acteur Jamel Madani. Pourtant, ce dont on parle peu, c’est que cet écrivain mythique a séjourné en Tunisie en 1935. De sa résidence à La Marsa, il a effectué des missions en reporter dans le sud tunisien. Cette expérience a été racontée dans ses correspondances regroupées et publiées et lui aurait inspiré des passages de son œuvre «Terre des hommes».
En partant de ces informations, Samy Mokadem a enchaîné, depuis quelques années, des recherches minutieuses des traces concrètes de son passage, de «sa planète perdue». Il est parvenu à localiser avec précision la demeure tunisienne de Saint-Exupéry en se basant sur la biographie du capitaine René Gavoille qui l’a accueilli.
Ce récit comprend une photo de la villa «Rubens» à La Marsa Plage et indique que l’écrivain y a travaillé sur son œuvre «Citadelle» pendant sa résidence. La recherche s’est poursuivie avec un appel à témoignages lancé sur les réseaux sociaux. Les informations collectées ont été derrière l’idée du projet déposé par Samy Mokadem à la municipalité de La Marsa «Et si la planète du Petit Prince… était La Marsa?».
La villa en question n’existe plus, mais l’emplacement est connu. Mokadem propose alors «d’ériger un mémorial en hommage à son passage, représentant idéalement le Petit Prince». Il nous a décrit les détails comme il les imagine et tels qu’ils figurent sur la demande officielle.
« L’intérieur serait des éléments qui racontent sa biographie et des détails de son expérience tunisienne avec une exposition d’audiobooks, d’aquarelles, d’objets pour collectionneurs dont des timbres de la Poste…». Selon lui, «La Marsa brillera sous les projecteurs des fans du «Petit Prince» à travers le monde et plusieurs voudront venir visiter cette ville si chère au cœur de l’auteur.» Il aspire même à une possible «opportunité de jumelage avec Lyon, sa ville natale.»
Ce projet ambitieux aura certainement des retombées culturelles et touristiques importantes. Rappelons que l’année dernière, une exposition a été dédiée à Flaubert qui a également séjourné en Tunisie, avec des conférences et tout un bouillonnement culturel en marge de l’événement principal.
Pourquoi donc ne pas remettre en surface tout ce que nous savons aujourd’hui et réclamer notre «part de Saint-Exupéry»? Avant de passer à la concrétisation du projet de construction, on pourrait peut-être commencer par annoncer les informations, organiser des activités qui favorisent leur diffusion, inviter universitaires, chercheurs et écrivains à s’impliquer dans des articles qui relèvent l’impact de la Tunisie sur l’œuvre de Saint-Exupéry.
Une piste est ouverte pour que ce grand nom de la littérature mondiale soit désormais relié à des indices réels. Reste à faire une recherche de témoignages plus poussée et le travail de documentation des traces avant qu’elles ne se perdent avec le temps.