Tunisiens et séjours hôteliers : Flambée des prix et bien des imperfections…
Vivent les vacances ! Le temps des baignades, des soirées jusqu’à l’aube, des loisirs et du farniente arrive enfin, après une année de labeur. En Tunisie, les vacances sont considérées comme étant essentielles aux familles. Elles riment, néanmoins, avec de grandes dépenses. Les séjours aux hôtels deviennent, de plus en plus, inaccessibles aux salariés dont le budget reste assez limité pour suffire aux besoins primordiaux. Cela dit, pour ceux qui peuvent, tout de même, se permettre un séjour de vacances dans un hôtel, la satisfaction n’est pas toujours au rendez-vous !
La Presse — Il faut dire que passer un séjour dans un hôtel obéit à certains critères restrictifs. Depuis quelques années, les responsables des hôtels optent pour une organisation inappropriée aux budgets des salariés. Une fois que la saison des vacances pointe son nez, la planification des éventuels séjours se fait selon une durée minimale bien déterminée, soit un minimum de trois nuitées, ce qui place la barre haut pour certains pères de famille.
«Franchement, vu la hausse des tarifs et la fixation d’une durée minimale de trois nuitées, il devient impossible, pour un simple salarié, de se payer des vacances en famille. Pour ce qui est de mon cas, par exemple, j’ai deux enfants âgés de onze et de huit ans. Si la nuitée ne coûte pas moins de trois cents dinars par personne, cela veut dire qu’il me faudrait au moins mille cinq cents dinars la nuitée, et ce, sans compter les sorties et les extras ! Soit plus de trois mille dinars dépensés en trois jours sans pour autant être satisfait à cent pour cent de la qualité des services», indique Mahmoud, gérant dans une grande boutique de produits électroniques.
Points faibles : buffet, animation et personnel
Et en évoquant la qualité des services, il pointe du doigt la qualité du buffet, le manque d’activités de loisirs pour enfants ainsi que le tempérament parfois irritant du personnel. «Pour le buffet, mes attentes ne tournent pas autour des produits de luxe et des ingrédients coûteux.
En revanche, proposer une bonne bouffe aux clients, des plats préparés dans les règles de l’art revient aux performances du chef cuisinier et à son souci de perfection», fait-il remarquer. S’agissant des loisirs, Mahmoud trouve que certains hôtels classés quatre étoiles ne programment pas d’activités à même de faire la différence, d’égayer le séjour et de le rendre inoubliable, surtout au regard des enfants qui passent le plus clair de leur temps au bord de la piscine ! «L’animation se limite à une heure dans la matinée, une heure dans l’après-midi ainsi que des numéros de «fékir» le soir ! Le pire, poursuit-il, c’est que la même animation reprend tous les jours avec les mêmes chansons, les mêmes mouvements et les mêmes animateurs».
Mahmoud saisit l’occasion pour lancer un insistant appel aux responsables des hôtels afin qu’ils portent plus d’intérêt à la sensibilisation du personnel sur les abc de la courtoisie. «Parfois, les serveurs ne daignent même pas dire bonjour ! Ils n’affichent ni sourire ni aucune expression bienveillante au point que le client se sent de trop dans l’endroit où il dépense pourtant les économies de toute une année», ajoute-t-il.
Manque d’hygiène, d’organisation et de professionnalisme
Il semble que le professionnalisme du personnel dans certains hôtels laisse à désirer. Olfa Hamza, professeur universitaire résidant au Canada depuis plus de vingt ans, retourne à Tunis pour y passer les vacances comme à l’accoutumée. Chaque été, elle rentre au pays natal pour se ressourcer et ancrer chez ses enfants l’amour de la patrie, des traditions et de la famille… «Chaque été, nous passons une semaine dans un hôtel classé quatre ou cinq étoiles.
Mais ce que j’ai constaté durant mes séjours, c’est que le classement quatre étoiles en Tunisie n’est pas vraiment conforme aux standards internationaux, surtout en matière d’hygiène et d’organisation», indique-t-elle.
Elle reproche, en effet, à certains hôteliers les détails qui ont l’effet du cheveu dans la soupe ! «Les couverts ne sont pas toujours très propres… Quant à l’entretien de la piscine, il ne semble point optimal. D’ailleurs, continue-t-elle, nous nous privons, mes enfants et moi, de la baignade en piscine vu qu’à chaque fois, nous endurons des problèmes cutanés, des diarrhées et autres malaises». Elle attire, par ailleurs, l’attention sur le personnel qu’elle trouve mal informé.
«Le personnel manque souvent de professionnalisme et d’information. Non avisé, il éprouve du mal à répondre favorablement aux attentes des clients», ajoute-t-elle. Olfa évoque un autre point faible qui, à son sens, pose problème, soit la quantité limitée du buffet qui disparaît au bout d’une heure. «Si on accuse un petit retard, on risque de rester sur notre faim ! C’est la responsabilité de l’hôtel mais aussi des clients qui gaspillent la nourriture en se servant plus qu’il n’en faut», note-t-elle.
Le luxe se paie cher !
Si les Tunisiens qui se permettent des séjours de vacances dans des hôtels quatre étoiles dénigrent moult détails, ceux qui tablent sur les séjours dans les hôtels de luxe, eux, semblent payer cher la facture de la satisfaction. C’est le cas de Raghda Boubaker, esthéticienne. Elle choisit toujours les hôtels classés cinq étoiles pour y séjourner durant les vacances en optant pour les offres minimales dont le tarif n’excède pas les 300 ou les 400dt par nuitée.
Son choix revient à son souci de perfection mais aussi à son budget. Célibataire, elle n’est pas dans l’obligation de faire beaucoup d’économies afin de se permettre le luxe. «Je trouve que les tarifs des hôtels cinq étoiles ne conviennent pas aux familles des salariés. Ces derniers pourraient se permettre des séjours à tarifs compétitifs tout au plus, sinon des programmes de baignade dans des plages privées», pense-t-elle. Raghda apprécie la qualité des prestations dans lesdits hôtels.
«La qualité des prestations dans les hôtels classés cinq étoiles est souvent irréprochable. Elle est garantie surtout dans les zones touristiques. Cela dit, les hôtels cinq étoiles situés à Tunis et dans la zone touristique de Gammarth sont hors-budget ; la nuitée coûte jusqu’à 800dt…
Du coup, je me déplace dans les villes côtières, soit à Hammamet, Sousse ou Monastir», indique-t-elle. Cependant, elle juge que la qualité des services — bien que bonne — est nettement moindre par rapport aux hôtels du même classement dans des destinations concurrentes. «J’ai passé des séjours à Dubaï, en Turquie, au Liban, en Egypte et au Maroc, et je peux vous assurer que la comparaison n’est point en notre faveur, surtout en matière de qualité de service», renchérit-elle.
Manifestement, les avis convergent vers les volets qui pourraient, en la présence d’une volonté confirmée de hisser le niveau et la qualité des services et du professionnalisme du personnel hôtelier, se convertir en atouts. Il suffit de voir non pas la partie remplie du verre mais plutôt celle vide, pour tenter de combler les lacunes et optimiser les chances du secteur.
Il convient, aussi, de soutenir le tourisme local en prenant en considération les moyens souvent limités des estivants tunisiens et de leur permettre de tirer profit, eux aussi, des services hôteliers en supprimant la durée minimale du séjour, laquelle — avouons-le — acquiert l’aspect d’une « vente conditionnée », d’une contrainte qui joue au détriment du client. La Tunisie figure parmi les plus belles et les plus tentantes destinations touristiques de la Méditerranée. Faisons en sorte qu’elle décroche sa place sur le podium des meilleures !