Célébration des 50 ans de la disparition d’Oum Kalthoum : « La Voix des femmes » de Zeid Hamdan
L’artiste a imaginé ce concert monumental autour de la langue arabe, comme un trait d’union musical entre passé et présent, fédérant des voix de femmes et d’hommes d’horizons musicaux éclectiques.
La Presse — Oum Kalthoum, surnommée : la « Quatrième Pyramide » ou « l’Astre de l’Orient », objet d’emphase et de dévotion, celle dont le vibrato déflagratoire procurait des «eargasm» à son audience et mettait à genoux les rois et les présidents, continue de chanter dans les échoppes du Caire, les taxis et le cœur de tout le monde arabe.
Elle continue de fasciner encore et ne cesse d’inspirer en agrémentant les répértoires des chanteurs arabes et même occidentaux. Ses chansons sont chantées à tous les registres, reprises en cover ou en mixtapes animant festivals et autres concerts.
Cette année marque le 50e anniversaire de la disparition de la diva qui nous a quittés le 3 février 1975 à 76 ans. Ses funérailles ont été un véritable événement national en Egypte. «Un demi-siècle s’est écoulé depuis que des millions de personnes lui ont dit adieu, mais au cours de ces cinq décennies, aucun chanteur, homme ou femme, n’a imaginé pouvoir s’approcher de sa place ou de son statut», écrit Al Araby Al Jadid le 3 février dernier.
Nombreuses sont les initiatives qui rendent hommage à l’icône éternelle Oum Kalthoum, à travers des expositions, des éditions spéciales ou encore des concerts. C’est dans cette dynamique que s’inscrit le projet musical «La Voix des femmes» du Libanais Zeid Hamdan : un concert monumental dévoilé en France, le 17 avril dernier au Printemps de Bourges, et programmé le 14 juillet prochain dans le cadre de la 79e édition du Festival d’Avignon.
Figure marquante de la pop arabe, Zeid Hamdan est un musicien et producteur libanais, connu comme le « Pape de l’underground du Moyen-Orient ». En Tunisie, il compte plusieurs ami.e.s de la scène musicale et s’est produit à différentes occasions. La dernière en date étant l’édition de 2024 du festival international de Hammamet, où il était en compagnie de la chanteuse syrienne Lynn Adib (Duo « Bedouin Burger »).
Zeid Hamdan a imaginé ce concert monumental autour de la langue arabe, comme un trait d’union musical entre passé et présent, fédérant des voix de femmes et d’hommes d’horizons musicaux éclectiques, toutes et tous situés à la croisée du monde arabe et occidental.
Parmi elles : la chanteuse française Camélia Jordana, qui revient à l’arabe avec le morceau Win Rak, l’Égyptienne Maryam Saleh, figure de la scène alternative, Natacha Atlas qui fusionne jazz et musiques orientales, ou encore Souad Massi, artiste franco-algérienne aux accents folk. Le concert accueille aussi le musicien, écrivain et comédien égyptien Abdullah Miniawy, et deux rappeurs : Danyl, Franco-Algérien nourri de raï, et Rounhaa, remarqué avec Möbius en 2022.
Revisiter l’œuvre d’Oum Kalthoum, connue pour sa complainte «Enta Omri» («Tu es ma vie»), n’est pas chose facile. Cela relève même du défi, car outre son puissant vibrato, la chanteuse donnait des concerts aux allures de récitals, où une chanson pouvait durer une heure.
«C’est une femme qui répète la mélodie avec groove comme les chanteurs de blues, dans un gimmick (courte formule rythmique ou mélodique, Ndlr) et puis ils l’accrochent et ils le hurlent avec tout leur cœur», a déclaré à l’AFP Hamdan.
Pour s’approprier cet héritage, il dit avoir passé des heures à s’imprégner de ses chansons, à en décortiquer les structures : «Les mélodies sont absolument géniales. C’est là où je vois l’immensité du talent, une fois retirée cette épluchure orchestrale classique arabe avec laquelle les gens ont du mal peut-être», a-t-il souligné.
Afin de mener à bien son ambitieux projet et d’éviter toute trahison de l’œuvre, le producteur libanais s’est entouré d’un spécialiste compatriote: le joueur d’oud Oussama Abdel Fattah, grand connaisseur d’Oum Kalthoum qui participe à la création aux côtés d’un ensemble acoustique (oud, percussions, violon, qanoun).
A l’annonce de sa création, il a fait la promesse de «ne pas tartiner de musique contemporaine» et que cela va se construire avec les chansons d’Oum Kalthoum auxquelles il a ajouté «ce petit twist contemporain».