Décryptage de la baisse du taux directeur : Une relance sous conditions ?
Le 26 mars 2025, la Banque centrale de Tunisie (BCT) a annoncé une réduction de son taux directeur de 50 points de base, le faisant passer de 8 % à 7,5 %. Cette décision, effective dès le 27 mars, vise à soutenir la relance économique dans un contexte de ralentissement de l’inflation. Reste à savoir si cette mesure sera suffisante pour relancer la croissance et atténuer les déséquilibres macroéconomiques du pays. Qu’en pensent les spécialistes ?
La Presse — Depuis le début de l’année 2025, l’inflation en Tunisie a montré des signes de ralentissement, atteignant 5,7 % en février. Par ailleurs, la croissance économique s’est établie à 2,4 % au quatrième trimestre de 2024, portée principalement par les secteurs des services et de l’agriculture. Cependant, le déficit courant s’est creusé à 1,654 milliard de dinars (0,9 % du PIB) en février 2025, principalement en raison d’un déficit commercial plus marqué.
Réactions des économistes et experts
La décision de la BCT a suscité de nombreuses réactions parmi les experts économiques tunisiens. Mohsen Hassan, économiste et ancien ministre du Commerce, estime que cette mesure enverra un signal positif aux investisseurs, en réduisant le coût des financements et en stimulant la croissance économique. Il ajoute que « cette baisse permettra aux entreprises d’accéder à des crédits moins coûteux, ce qui encouragera les investissements productifs et l’emploi ».
De son côté, Ridha Chkoundali, professeur en sciences économiques, juge cette réduction du taux directeur « importante mais tardive et insuffisante ». Il soutient que bien qu’elle puisse améliorer la situation financière des entreprises et des ménages, une réduction plus significative aurait été préférable pour relancer réellement l’économie.
L’économiste Ezzedine Saïdane partage un avis nuancé. Selon lui, « la baisse du taux directeur est une mesure attendue et nécessaire, mais elle doit s’accompagner de réformes structurelles pour être pleinement efficace. Sans une amélioration du climat des affaires et une stabilisation des finances publiques, l’impact de cette réduction pourrait rester limité ».
«La décision du Conseil d’administration de la Banque centrale de Tunisie (BCT) s’inscrit dans une politique d’ajustement progressif. Cette mesure vise à permettre à la BCT de maîtriser les prix tout en créant les conditions nécessaires au bon fonctionnement de l’économie », a déclaré l’analyste économique et financier, Bassem Ennaïfar
Effets sur l’investissement et la consommation
La baisse du taux directeur devrait encourager les entreprises à emprunter à des conditions plus favorables, stimulant ainsi l’investissement et l’emploi. Selon Hachemi Alaya, analyste financier, « une réduction du coût du crédit est bénéfique pour le tissu économique, en particulier pour les PME, qui peinent souvent à accéder au financement ».
Par ailleurs, la BCT a également abaissé le taux minimum de rémunération de l’épargne à 6,5 %, ce qui pourrait décourager l’épargne et favoriser la consommation. Cela pourrait avoir un effet stimulant sur la demande intérieure, bien que certains analystes, comme l’économiste Moez Joudi, alertent sur le risque d’une pression accrue sur la liquidité bancaire : « Moins d’épargne signifie moins de ressources pour financer l’investissement bancaire, ce qui peut à terme nuire à la croissance ».
Avec conditions !
La question clé reste de savoir si cette mesure sera suffisante pour relancer la croissance et atténuer les déséquilibres macroéconomiques du pays. Abdelkader Boudriga, spécialiste en finance et en banque, souligne que « cette décision est une étape, mais elle doit être suivie d’autres réformes, notamment en matière de fiscalité et d’amélioration du climat des affaires ».
Pour résumer les réactions de tous ces spécialistes en économie et en finance, on dira que la baisse du taux directeur par la BCT représente une tentative de relance économique en Tunisie, mais son efficacité dépendra de plusieurs facteurs. Si elle est bien accueillie par les investisseurs et les entreprises, son impact réel ne pourra être mesuré que dans les mois à venir, en fonction des évolutions du marché et des politiques économiques mises en place.