Programme de Mise à Niveau de l’Industrie : 30 ans de succès et un nouvel élan
À l’occasion de son 30e anniversaire, le Programme de mise à niveau de l’industrie tunisienne amorce une nouvelle phase tournée vers l’innovation, la durabilité et la compétitivité. Une vision renouvelée, portée par le ministère de l’Industrie, qui mise sur l’industrie 4.0, la transition verte et l’intégration régionale pour affronter les défis du futur.
La Presse — Dans la foulée de ses 30 ans, le Programme de mise à niveau (PMN) de l’industrie tunisienne trace une nouvelle trajectoire axée sur l’innovation et la durabilité. C’est ce qu’a annoncé, hier, le ministère de l’Industrie, des Mines et de l’Énergie lors de la célébration de l’anniversaire dudit programme.
La manifestation, tenue en présence de la ministre Fatma Thabet Chiboub et du président de l’Utica, Samir Majoul, a été l’occasion de présenter les résultats économiques obtenus jusque-là grâce au programme, mais aussi d’afficher sa nouvelle orientation, qui consiste à poursuivre les efforts tout en plaçant les défis émergents au centre des priorités.
Dans son allocution d’ouverture, Chiboub a souligné que la tenue de cette manifestation traduit la volonté de la Tunisie d’aller de l’avant dans ce processus de modernisation et d’intégration de l’innovation, ainsi que sa conviction quant à l’importance de l’industrie en tant que levier majeur de son économie. Elle a ajouté que la mise à niveau continue de l’industrie tunisienne lui a permis de devenir une locomotive à l’échelle nationale, régionale et internationale, grâce à l’amélioration constante de sa compétitivité sur les marchés extérieurs.
Pour une montée en compétitivité
Évoquant le contexte industriel dans lequel le PMN a vu le jour en 1995, Chiboub a rappelé qu’à l’époque, le tissu industriel tunisien était précaire : il comptait quelque 2.000 entreprises disposant de peu de moyens et générant un faible volume d’exportations, ne dépassant pas les 4 milliards de dinars. La contribution de l’industrie au PIB était alors de 15 %.
Elle a ajouté que, grâce aux efforts déployés durant ces 30 dernières années, ainsi qu’à la complémentarité entre l’État et les entreprises, le secteur industriel occupe aujourd’hui une place importante dans l’économie tunisienne (20 % du PIB), avec plus de 5.000 entreprises, dont 1.700 totalement exportatrices, et un volume d’exportations ayant atteint 50 milliards de dinars en 2024.
Affichant un taux de croissance annuel de 7 %, le secteur n’a pas fléchi au cours des deux dernières décennies et a permis la création de plus de 550 mille emplois directs en 2024.
« Le programme a constitué un cadre stratégique pour le développement des entreprises industrielles tunisiennes, le renouvellement de leurs capacités, ainsi que l’ancrage d’une culture de la qualité, de l’innovation et de la gouvernance. Ces transformations leur ont permis de monter en compétitivité, d’intégrer les chaînes de valeur mondiales et d’assurer la pérennité de leurs systèmes de production », a-t-elle indiqué.
Selon la ministre, le Programme de mise à niveau a mobilisé plus de 14 milliards de dinars au profit de 5.000 projets, notamment pour la modernisation des équipements et l’intégration des nouvelles technologies, des systèmes de qualité et de gouvernance. Des projets qui, en somme, ont contribué à la métamorphose du tissu industriel tunisien.
Dans ce programme, la part du lion a été attribuée aux industries électroniques, mécaniques et du textile-habillement, qui ont capté plus de 60 % des investissements. Il a également favorisé l’émergence de zones industrielles dans toutes les régions du pays, lesquelles ont attiré plus de 40 % des financements.
« Ce programme a été financé par les entreprises industrielles elles-mêmes grâce au mécanisme d’ajustement, consistant en une contribution de 1 % de la valeur de leur chiffre d’affaires. C’est un programme qui incarne, depuis sa création en 1995, le principe de compter-sur-soi », a-t-elle expliqué.
Un savoir-faire et une expertise acquise
L’impact de ce programme se ressent aussi sur le climat des affaires, qui a connu une amélioration grâce au développement des infrastructures liées à la qualité. Selon les données disponibles, 800 entreprises tunisiennes ont obtenu des certificats de conformité et ont bénéficié d’un appui pour intégrer les chaînes de valeur internationales.
Ce programme, affirme la ministre, a incité les entreprises à s’engager dans la spécialisation et l’exportation, notamment dans les secteurs de conseil, de l’ingénierie et du diagnostic industriel. Il s’agit d’un savoir-faire qui s’exporte désormais vers les pays africains.
Dans ce contexte, Chiboub a renouvelé l’engagement du ministère à accompagner les entreprises vers un avenir industriel prospère. Elle n’a pas manqué de souligner le rôle des banques dans ce processus de modernisation, en facilitant l’accès aux financements adéquats et en mobilisant les ressources nécessaires.
« La célébration du 30e anniversaire du programme de mise à niveau de l’industrie tunisienne ne représente pas uniquement une occasion pour revenir sur les succès réalisés mais c’est principalement une occasion pour se tourner vers l’avenir avec une nouvelle vision. Une vision qui se base sur la confiance en la capacité de notre pays et de nos jeunes mais aussi sur notre engagement à poursuivre le processus de construction et d’édification, tout en étant en phase avec les grandes orientations nationales annoncées par le Président de la République et consistant à construire une Tunisie industrielle grâce à la compétence et l’expertise de ses enfants », a affirmé la ministre.
Pour ce qui est des nouveaux défis qui mettent aujourd’hui à l’épreuve la compétitivité de l’industrie tunisienne, Chiboub a affirmé que dans un esprit de travail collectif, ces efforts de modernisation vont être maintenus tout en adhérant à des processus de numérisation, de verdissement de l’énergie et d’inscription à l’économie circulaire. Cette nouvelle orientation vise, selon ses dires, à préserver le positionnement de l’économie tunisienne à l’échelle internationale et à renforcer la capacité du pays à soutenir l’investissement et la création d’emplois hautement qualifiés.
Elle a, par ailleurs, appelé tous les acteurs de l’écosystème économique et social, à leur tête les instituts de recherche, d’innovation ainsi que le secteur privé à jouer leur rôle dans ce processus pour que la Tunisie soit une terre d’excellence et d’innovation et un modèle de développement industriel durable.
Stimuler la croissance
Après avoir présenté les résultats positifs du PMN, le président de l’Utica, Samir Majoul, a mis l’accent sur les défis auxquels l’industrie tunisienne est confrontée. Selon ses propos, elle fait face à de nombreuses contraintes, notamment la montée des coûts, la pression concurrentielle, le dumping, les barrières tarifaires et non tarifaires instaurées par les économies libérales, les défis logistiques, l’accès au financement, la lourdeur réglementaire, la transformation numérique et l’impératif écologique.
« En 2025, de nouveaux défis s’imposent : la transition numérique, l’intelligence artificielle, la digitalisation des chaînes de valeur, mais aussi la transition énergétique, la montée des exigences environnementales et tout ce qui est lié au changement climatique. Ces transformations ne sont pas des menaces, mais des opportunités de repositionnement stratégique, à condition de disposer des bons outils d’accompagnement.
C’est pourquoi nous appelons, à l’occasion de cette célébration symbolique, à la mise en place d’une nouvelle génération 2.0 du programme de mise à niveau plus ciblée, plus flexible, plus réactive, avec une gouvernance transparente, des indicateurs d’impact et une évaluation régulière », a-t-il fait remarquer.
Il a ajouté que cette nouvelle génération devrait être centrée sur l’industrie 4.0 et la digitalisation, tout en intégrant les priorités de l’économie bleue, de l’économie verte, de la transition d’un modèle économique linéaire vers une économie circulaire, ainsi que le renforcement de la résilience des PME, la conquête de nouveaux marchés et, surtout, l’intégration de la jeunesse, des startups et des régions dans cette dynamique renouvelée.
Samir Majoul a également exprimé le vœu de voir la loi de finances 2026 et un plan de relance économique baliser la voie vers une entreprise tunisienne du futur : ouverte, responsable, performante et solidement ancrée sur la scène internationale.
« Pour cela, nous avons besoin d’un cadre réglementaire souple et incitatif, d’un climat des affaires stable, attractif et compétitif, d’une politique industrielle cohérente, alignée sur les défis du 21e siècle, ainsi que d’une continuité dans les politiques de soutien à l’investissement et à la compétitivité, avec une fiscalité de croissance », a-t-il souligné.