Depuis la Tunisie, l’Italie, l’Espagne et la Grèce : Briser le silence, briser le siège : la flottille Soumoud en route vers Gaza
Gonflés à bloc, les militants de la Flottille internationale Soumoud sont actuellement en route vers Gaza, déterminés à briser le blocus sioniste qui étouffe la bande côtière depuis près de deux décennies. Depuis le samedi 13 septembre 2025, les navires de la Flottille Soumoud poursuivent progressivement leur départ à partir des ports de Bizerte, Gammarth et Sidi Bou Saïd pour briser le blocus sur Gaza.
Au total, jusqu’à hier matin, 18 navires ont quitté les côtes tunisiennes.
La Presse -— Depuis la marina de Bizerte, 14 bateaux ont mis le cap sur la bande de Gaza. Le «Soltana» a été le dernier bateau à quitter ce port hier après-midi, embarquant à son bord notamment des militants algériens et sud-africains, en route vers Gaza. Plus tôt dans la journée, les bateaux «Alma» et «Family» avaient déjà levé l’ancre depuis le même port. Deux autres embarcations prévues initialement n’ont pas pu rejoindre la flottille en raison de problèmes techniques. En parallèle, quatre navires ont quitté le port de Gammarth ce même jour.
La flottille a également confirmé que les navires ont commencé à se regrouper en haute mer après avoir quitté les ports tunisiens. Les bateaux espagnols et tunisiens devraient se rejoindre dans les eaux internationales avec ceux en provenance d’Italie et de Grèce, pour poursuivre ensemble leur route vers Gaza. Par ailleurs, d’autres embarcations ont pris la mer depuis l’Italie et la Grèce. Selon les organisateurs, la traversée pourrait durer entre sept et dix jours, selon les conditions en mer et les éventuels obstacles rencontrés en cours de route.
La Flottille Soumoud compte plus de 40 navires. Elle embarque à son bord des participants tunisiens et maghrébins, ainsi que des militants venus de plusieurs pays d’Europe, d’Amérique latine, des États-Unis, du Pakistan, d’Inde, de Malaisie, d’Afrique du Sud du Koweït et du Bahreïn.
Alors que l’initiative mobilise des centaines de volontaires et attire l’attention de la société civile, elle se heurte bizarrement à une hostilité croissante dans certains pays européens et à un silence médiatique pesant. La peur semble avoir changé de camp. Sinon, comment expliquer les tentatives de boycott, le silence complaisant de certains médias occidentaux, et surtout l’hostilité affichée envers les militants pro-palestiniens dans des États qui se présentent pourtant comme des défenseurs des droits humains et des peuples.
Le message immortel de Nelson Mandela
La présence de Mandla Mandela, petit-fils de Nelson Mandela, a marqué les esprits à Sidi Bou Saïd. Devant les médias tunisiens, il a rappelé les mots de son grand-père lors de sa visite à Gaza en 1995. «Notre liberté est incomplète sans la liberté du peuple palestinien». Il a ajouté «Nous sommes devenus cette génération qui a repris le flambeau.
Nous appelons tous ceux qui prennent la mer à bord de la flottille Soumoud à faire en sorte que le blocus et le siège prennent fin. Même ceux qui restent à terre peuvent participer, en utilisant l’intifada électronique pour diffuser ce message à grande échelle».
De son côté, l’activiste brésilien Thiago Avila, arrêté en juin dernier dans les territoires occupés à bord du Madleen, a lui aussi pris la parole depuis le port tunisien, adressant un message aux peuples d’Afrique du Nord : «La lutte pour la Palestine est une cause commune. Ce combat est un effort que nous devons mener collectivement. » Il a rappelé que cette mobilisation internationale répond à un appel clair du peuple palestinien à la solidarité mondiale.
Rima Hassan : Une longue tradition de solidarité entre la Tunisie et la Palestine
Parmi les membres de la flottille actuelle, figurent l’actrice française Adèle Haenel et la députée franco-palestinienne Rima Hassan. Les deux ont adressé un message vidéo aux participants de la Fête de l’Humanité, organisée le 14 septembre en France depuis le port de Sidi Bou Saïd. Pour Rima Hassan, cette participation à une deuxième flottille s’inscrit dans une continuité militante : «Nous étions vulnérables en juin dernier sur un seul bateau (Madleen), mais c’est notre devoir, en tant que citoyennes et responsables politiques, de participer à des actions concrètes de solidarité.
On ne peut pas tout faire depuis un bureau. Être physiquement présente sur les bateaux est une manière de porter protection, mobilisation et visibilité à cette cause ».
Elle a également évoqué sa propre histoire familiale, marquée par l’exil en 1948, et la longue tradition de solidarité et d’histoire d’amour entre la Tunisie et la Palestine.
«Lors d’une précédente arrestation, une juge israélienne nous a dit: “Vous serez interdits d’entrée pendant cent ans“. Nous lui avons répondu: “Votre État ne tiendra pas cent ans“».
L’actrice française Adèle Haenel, dans une interview accordée à Franceinfo, a souligné «le caractère pacifiste de la flottille. Face aux images insoutenables en provenance de Gaza ». Elle dénonce l’inaction des gouvernements occidentaux et insiste sur la portée collective de l’initiative en soulignant que «Les personnes qui se sont réunies ici l’ont fait dans un idéal de dignité humaine ».
De son côté, Zaher Birawi, journaliste palestino-britannique et président du Comité international pour la levée du blocus, a rappelé que cette initiative s’inscrit dans le cadre des actions populaires destinées à mettre fin à l’occupation et aux crimes sionistes. Selon lui, la flottille adresse un message clair : les peuples du monde sont unis dans leur rejet de l’injustice.
Des acteurs et des intellectuels pointés du doigt
Depuis les ports de Tunis, plusieurs figures tunisiennes ont exprimé leur soutien. L’acteur Mohamed Mourad a salué la conscience politique et la mobilisation de la jeunesse tunisienne et arabe: «Chacun est libre de ses convictions, mais je demande aux réticents de ne pas minimiser nos efforts. Nous sommes plus de 800, et cette fois, nous ne reculerons devant rien. » Le chanteur Mounir Troudi a, pour sa part, regretté l’absence de nombreux artistes tunisiens. Il explique que ces derniers sont souvent disponibles pour des spectacles à l’étranger, mais absents quand il s’agit de soutenir une cause humanitaire majeure.
Il est vrai que le silence de certains intellectuels suscite l’incompréhension. Alors que le monde est témoin d’un génocide à Gaza, beaucoup choisissent de ne pas s’exprimer, même sur les réseaux sociaux. Cette attitude soulève des questions sur l’universalité des principes qu’ils prétendent défendre. Certes, chacun est libre de ses opinions. Mais lorsqu’un peuple subit massacres, famine et déportation, le silence devient une forme de complicité. Et l’indifférence, un renoncement à l’humanité