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Tunisie l La montée des protestations face au déni des autorités

Dans cet article traduit de l’arabe, l’auteur tire la sonnette d’alarme : la politique consistant à fuir les problèmes, par la procrastination ou la rhétorique publique non suivie d’actions concrètes, risque d’aggraver le mécontentement dans une Tunisie où le coût de la gestion des crises augmente et les possibilités de lendiguement des colères diminuent.

Fahem Boukaddous *

Le pays est le théâtre, ce matin, jeudi 25 décembre 2025, de mouvements de protestation simultanés à Tunis, Gabès (photo) et Redeyef, témoignant de la montée des tensions sociales et environnementales.

Dans la capitale, des personnels du secteur de l’éducation organisent un sit-in devant le ministère de l’Éducation, une action sans précédent qui rassemble neuf secteurs différents.

Parallèlement, à Gabès, un mouvement écologiste se mobilise pour exiger le démantèlement des usines polluantes, alors que se tenait, en même temps, l’audience du tribunal devant se prononcer sur cette revendication, fondée sur un large mandat populaire.

Dans la capitale, des personnels de l’éducation ont manifesté devant le ministère de l’Éducation, un mouvement exceptionnel qui a rassemblé neuf   corps enseignants.

Parallèlement, à Redeyef, une marche de protestation a été organisée contre la négligence, suite à l’accident d’une infirmière brûlée dans l’exercice de ses fonctions.

L’action syndicale exceptionnelle du secteur de l’éducation, qui a réuni pour la première fois neuf secteurs différents au sein d’un même mouvement, n’aurait pas été possible sans un large mandat sectoriel exprimant une volonté collective au sein du système éducatif.

Ce mandat témoigne de l’ampleur de l’érosion de la confiance dans les réformes annoncées et dans les promesses répétées restées lettre morte. Il révèle également que la crise n’est plus seulement technique ou limitée aux revendications, mais bien structurelle, touchant au cœur même des choix de politiques publiques dans la gestion d’un secteur stratégique comme l’éducation.

À Gabès, le mouvement écologiste dépasse la logique de la protestation traditionnelle pour acquérir une dimension souveraine, puisqu’il repose sur un large mandat populaire de plus de cent mille citoyens, qui exigent explicitement le démantèlement des unités polluantes et la protection du droit à la vie et à un environnement sain.

Ce mandat populaire non seulement légitime le mouvement, mais met également le pouvoir exécutif à l’épreuve en ce qui concerne le respect de la volonté des citoyens et l’engagement envers les exigences de la justice environnementale, au lieu de simplement gérer la crise ou de la repousser.

Ce qui se passe à Redeyef nous rappelle que la négligence accumulée, notamment dans les secteurs de la santé et de l’environnement, n’est plus seulement une défaillance administrative, mais constitue une menace directe pour la sécurité des travailleurs et des citoyens. Cela révèle le lien intrinsèque entre les politiques environnementales, sanitaires et sociales, et dissipe l’illusion que chaque problème peut être traité isolément.

Le danger de la situation actuelle réside non seulement dans l’ampleur des manifestations, mais aussi dans leur caractère nécessaire. Lorsqu’un secteur entier se mobilise et que les citoyens agissent en vertu d’un large mandat populaire, ignorer ou minimiser ce phénomène revient à se déconnecter dangereusement de la réalité.

En persistant dans sa politique consistant à fuir les problèmes, par la procrastination ou une rhétorique publique non suivie d’actions concrètes, le pouvoir exécutif ne fait qu’exacerber le ressentiment et élargir le cercle du rejet.

Le mandat, qu’il soit sectoriel ou populaire, n’est pas simplement un mécanisme organisationnel, mais un message politique clair : la société n’accepte plus la gestion de crise, mais exige des solutions radicales, participatives et responsables.

Toute obstination à ignorer ce message pourrait entraîner le pays sur une voie d’escalade, où le coût de la gestion de la situation augmente et les possibilités d’endiguement diminuent, à un moment où la situation nationale ne peut supporter davantage de déni ou de report.

* Journaliste.

Page Facebook de l’auteur.

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Fembiotec au service des femmes dans l’agriculture bio

L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) vient de lancer à Tabarka, au nord-ouest de la Tunisie, la plateforme Fembiotec permettant un accès direct à toute source d’information en mesure de renforcer l’autonomisation économique et les connaissances dans le secteur de l’agriculture biologique en Tunisie.

L’événement a réuni près de 70 participantes et participants, parmi lesquels des femmes agricultrices ainsi que des représentants d’institutions publiques nationales, notamment la Direction générale de l’agriculture biologique (DGAB), le Centre technique de l’agriculture biologique (CTAB), le Bureau d’appui à la femme en milieu rural (BFAR) et l’Agence de vulgarisation et de formation agricoles (AVFA).

À cette occasion, la FAO a présenté la démarche ayant conduit à la conception et au développement de la plateforme Fembiotec. Cette démarche s’appuie sur une approche participative, fondée sur l’identification des besoins exprimés par les femmes en milieu rurale, la co-construction des contenus et des fonctionnalités, ainsi que l’intégration d’outils numériques adaptés aux contextes locaux.

La plateforme Fembiotec a pour objectif d’améliorer l’accès à l’information technique, aux ressources de formation, aux opportunités de mise en marché et aux réseaux professionnels, en lien avec l’agriculture biologique. Elle s’inscrit dans l’action de la FAO en faveur de systèmes agroalimentaires plus inclusifs, durables et résilients, conformément à son mandat en Tunisie.

Les échanges ont permis d’aborder les perspectives de développement de la plateforme, notamment l’enrichissement progressif des contenus, le renforcement des capacités des utilisatrices, l’élargissement à d’autres régions et filières, ainsi que les possibilités de synergies avec des initiatives nationales et internationales liées à l’agroécologie et à la biodiversité.

Le lancement de la plateforme Fembiotec illustre l’importance d’intégrer les besoins et les savoirs des femmes en milieu rurale dans les processus d’innovation agricole.

En facilitant l’accès à l’information et aux réseaux, cette initiative contribue aux efforts visant à soutenir des moyens de subsistance durables et inclusifs.

La FAO poursuivra son accompagnement technique dans le cadre de la mise en œuvre de Fembiotec, en coordination avec les partenaires institutionnels concernés.

Les prochaines étapes porteront notamment sur le suivi de l’utilisation de la plateforme, l’adaptation continue des contenus et l’exploration de complémentarités avec d’autres programmes soutenant le développement rural durable en Tunisie.

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Le CRDHT réaffirme son soutien à Mondher Zenaidi

Commentant la condamnation de Mondher Zenaidi par contumace à 19 ans de prison, avec exécution immédiate, le Centre pour le respect des libertés et des droits de l’homme (CRLDHT) a estimé, dans un communiqué publié mercredi 24 décembre 2025,  que cette condamnation est «grotesque» car elle n’est pas «proportionnée à des faits, puisqu’ils sont inexistants, ni même aux éléments à décharge pourtant manifestes dans le dossier.»

L’organisation tunisienne basée à Paris a aussi qualifié la longue liste d’accusations à la base de cette condamnation d’«absurde». Et d’énumérer le «cocktail d’infractions fourre-tout, devenu la norme dans les procès politiques» :

«- Constitution d’une entente terroriste en lien avec des crimes terroristes ; fourniture de fonds, matériel, moyens de transport, documents, sites électroniques, au profit d’une organisation terroriste.

«- Publication ou transmission d’informations sensibles au bénéfice de groupes terroristes.

«- Complot en vue de commettre des attentats contre les personnes et les biens.

«- Complot contre la sûreté intérieure et extérieure de l’État.

«- Incitation à la violence, à la guerre civile, à la division nationale.

«- Expression d’un avis favorable à un complot contre la sécurité intérieure.

«- Nuisance délibérée via les réseaux de télécommunication.

«- Utilisation des réseaux numériques pour produire et diffuser de fausses rumeurs, documents falsifiés ou attribués à autrui, dans l’objectif de porter atteinte à la sûreté publique et semer la terreur.»

Tout en réaffirmant son soutien à l’ancien ministre (sous Ben Ali) et ancien candidat à la présidentielle de 2014, le CRLDHT a dénoncé «l’exclusion politique», les «détentions arbitraires» et les «violations du droit à un procès équitable.»  

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Tunisie l Kais Saïed veut «passer à la vitesse supérieure»

Lors de son entretien, mercredi 24 décembre 2025, au palais de Carthage, avec la cheffe du gouvernement, Sarra Zaafrani Zenzeri, le président de la République, Kais Saïed, s’en est pris, comme à son habitude, aux «conspirateurs qui continuent de cibler la Tunisie», tout en rendant hommage au peuple tunisien pour sa conscience élevée et la maturité dont il fait preuve, et qui constitue, selon le communiqué du Palais de Carthage, un «rempart inexpugnable» face aux manœuvres des parties ayant choisi la duplicité. 

Latif Belhedi

Depuis son accession à la magistrature suprême en 2019, le locataire du palais a toujours fustigé des «conspirateurs ennemis du peuple» qu’il n’a jamais clairement nommés, laissant entendre qu’il désigne ainsi ses opposants, dont plusieurs dizaines sont incarcérés et poursuivis pour des délits aussi graves que l’atteinte à la sûreté de l’Etat.

Hier, Saïed s’en est pris aussi, pour énième fois, aux responsables de ce même Etat qui ne servent pas loyalement le citoyen, les menaçant d’une «réplique qui ne serait pas un simple discours ou un simple communiqué.» Une réplique qui, a-t-il expliqué, aura nécessairement un impact sur la réalité, afin de concrétiser les objectifs de la révolution en matière d’emploi, de liberté et de dignité nationale.

«Plébiscite populaire» et «gifle historique»

Le chef de l’Etat a souligné, dans ce même contexte, la nécessité de «passer à la vitesse supérieure dans les différents domaines», notamment, après les manifestations 17 décembre dernier organisées en soutien à sa personne et au processus politique qu’il a initié en proclamant l’état d’exception, le 25 juillet 2021, y voyant «un plébiscite populaire», à travers lequel les Tunisiens, toutes franges confondues, ont infligé «une gifle historique» à l’endroit des «conspirateurs ennemis du peuple».

«Passer à la vitesse supérieure», a dit le président, et il était temps, six ans après son accession à la magistrature suprême, mais il reste à savoir dans quel domaine : celui de la relance économique et de l’amélioration du niveau de vie des Tunisiens, ou celui de la lutte contre les conspirateurs et les opposants ?

Selon le communiqué, le président Saïed a promis de répondre aux attentes des citoyens dans le cadre d’une vision globale qui rompt frontalement avec les solutions sectorielles. En rappelant qu’un bon responsable est celui qui fait prévaloir l’intérêt de la patrie sur toute autre considération et qui veille scrupuleusement à la préservation de la souveraineté nationale.

Ce «bon responsable» doit aussi, a-t-il poursuivi, faire preuve d’intégrité et de loyauté, et ne ménager aucun effort pour aplanir les difficultés auxquelles fait face le citoyen. 

La relance se fait attendre

Ce sont là, bien sûr, des orientations politiques et des recommandations un peu trop générales que la cheffe de gouvernement et son équipe sont censées traduire en programmes et en actions concrètes. Mais c’est là, justement, où le bât blesse, car, la situation générale dans le pays ne donne toujours pas l’impression d’évoluer dans le sens de la relance économique, de la création d’emplois, de l’amélioration du niveau de vie des citoyens et du retour de la confiance en l’avenir. Et, face au désespoir et au désarroi ambiants, Mme Zaafrani Zenzeri maintient un silence inquiétant. N’a-t-elle rien à dire et à expliquer aux Tunisiens, en dehors des communiqués soporifiques diffusés après chaque conseil ministériel aux thématiques ennuyeusement vides et redondantes, où l’on parle de visions, de stratégies et de plans, dont la réalisation est souvent renvoyée aux années… 2050.

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Les cinéastes appellent à «reconstruire les JCC»

La Syndicale indépendante des réalisateurs et producteurs a publié, mercredi 24 décembre 2025, le communiqué que nous reproduisons ci-dessous où elle dénonce «les dysfonctionnements organisationnels et les manquements administratifs» qui ont entaché la 36e édition des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC) qui se sont tenues  du 13 au 21 décembre à Tunis.

Depuis sa création, les Journées Cinématographiques de Carthage (JCC) se sont toujours voulues un bien collectif appartenant aux professionnels du cinéma, fondées sur le principe d’une participation effective des associations cinématographiques et des structures professionnelles à leur gouvernance et à la définition de leur vision. Elles n’ont jamais été conçues comme une institution bureaucratique pilotée d’en haut, mais sont nées dans le giron des ciné-clubs, en tant qu’espace de résistance et de liberté, célébrant le cinéma du Sud, défendant les causes de la libération et de la justice, et plaçant l’art au service de la conscience et de l’émancipation.

Dans cette continuité, tout écart à ce principe de cogestion, tout effacement de ces structures constitutives, constitue une trahison manifeste de l’esprit fondateur du festival.

Cela étant dit, les dysfonctionnements organisationnels et les manquements administratifs ayant entaché la présente édition ne sauraient occulter les réelles avancées artistiques qu’elle a également portées : une programmation de grande qualité, un renouveau de la cinéphilie, une forte mobilisation du public, ainsi qu’un engagement clair en faveur d’une identité arabo-africaine dans le choix des œuvres. Ces acquis méritent d’être consolidés, non compromis par les défaillances de gestion.

Parmi les manifestations les plus criantes de ce désordre figure l’attribution exclusive au Centre national du cinéma et de l’image (CNCI) de la charge logistique, sans véritable articulation avec la vision artistique, ayant engendré confusion et désarroi au détriment de la réputation même du festival.

De même, la cérémonie de clôture, marquée par l’absence des jurys et le refus de communiquer leurs rapports au public, a offert un triste exemple de prise de décision unilatérale et d’une propension aux célébrations superficielles, en totale contradiction avec l’âme militante des JCC.

C’est pourquoi nous appelons à une évaluation sérieuse, globale et transparente, réunissant toutes les associations cinématographiques, les structures professionnelles et les acteurs authentiques du secteur, afin de reconstruire les JCC sur leurs fondations historiques : un véritable phare artistique et intellectuel, affranchi de toute tutelle, et jamais réduit à un instrument au service d’un agenda étranger à sa vocation culturelle et émancipatrice.

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Tahar Bekri l À la recherche du temps perdu

Chaque nouveau recueil de poésie de Tahar Bekri reste un véritable évènement littéraire. Alors que l’on assiste, chez nous, au tarissement des vocations et à la raréfaction des œuvres poétiques en langue française, notre poète reste constant, toujours fidèle à ses lecteurs, aussi bien en Tunisie qu’à l’étranger. Auteur d’une trentaine d’ouvrages, essentiellement, des recueils de poésie, souvent traduits en plusieurs langues, il a toujours été à l’écoute de son état d’âme et des troublantes questions qui secouent son époque.

Salah Gharbi *

Bilingue confirmée, fort d’une double culture, ce «citoyen du monde», comme il aime à se présenter, n’a jamais cessé de nous surprendre, nous étonner et nous enchanter avec sa voix qui s’élève, tantôt pour chanter Gaza, la meurtrie, dans ‘‘Salam Gaza’’ (El Manar), ou pour célébrer le Printemps arabe, dans ‘‘Je te nomme Tunisie’’ (El Manar), tantôt, pour nous parler de l’Homme dans tous ses états ou pour se laisser enivrer par les merveilles de la nature.

Et dans chacune des multiples œuvres de Bekri, on est, toujours, surpris et séduit, aussi par les associations inattendues des images et les mélodieux versets, que par l’association des mots insolites. Avec lui, on est, souvent, dans la suggestion, dans une sorte d’écriture qui privilégie l’ellipse. On retrouve chez lui cette sobriété verbale qui fait échos à un grand poète comme Saint-John Perse qui dans ‘‘Vents’’ nous exhorte à la «purification», à écrire dans langue qui se veut âpre, et essentielle. «S’émacier, s’émacier jusqu’à l’os ! Parole de vivant !» (Cf. ‘‘Vents’’, Gallimard, 1940).

Le fleuve à rebours

Pour notre poète, l’année 2025 a été une année féconde avec la publication de deux recueils ‘‘Le battement des années’’ et ‘‘Mon pays, le braise et la brûlure’’, parus, comme la plupart des œuvres de Bekri, aux éditions El Manar et Edern, avec des couvertures éminemment illustrées par les peintures d’Annick Le Thoër.

Dans ces deux recueils, septuagénaire, notre poète s’arrête pour regarder derrière lui et se met à méditer sur la fuite du temps, cherchant à sauver de l’oubli le souvenir des moments, de lieux ou des êtres qui ont croisé, un jour, son chemin.

Il s’agit de remonter «le fleuve à rebours», de faire, en quelque sorte, un voyage à contre-courant, «à la recherche du temps perdu».

Ainsi, face au passage inéluctable du temps, le poète jette un regard lucide sur le vécu, fait le bilan d’un long parcours, cherchant à lui donner du sens, à en dénicher la quintessence et à lui redonner vie. Chez lui, il n’y ni regret ni trop de nostalgie, rien qu’une tentative de sublimer le temps qui fuit.

Pour évoquer un moment aussi solennel, le ton, à la fois grave et mélodieux, donne à la succession des tableaux vivants une certaine saveur exquise et une vitalité assurée par la présence du «tu» qui donne du sens au parcours du «je». Aussitôt, le voyage à rebours devient un chant qui exalte le partage, la complicité et la constance malgré les aléas de la vie.

Au centre de toutes ces réminiscences, l’image obsédante de Paris trône. C’est elle qui alimente l’imaginaire du poète. Chez elle, tout est source d’inspiration. Ainsi, bastion de création culturelle, elle est synonyme de dynamisme, avec son histoire, ses monuments, ses rues, ses mirobolants paysages changeant à travers les saisons. Rien n’échappe aux souvenirs parisiens de notre poète, ni les lieux et leurs les atmosphères, ni les êtres qu’on y a croisés, ni la végétation, ni les sons et les odeurs…

Pour notre poète, un tel voyage dans le temps serait incomplet et injuste à l’égard de deux autres endroits qui lui sont chers. Il s’agit de la Bretagne, dont il trouve du plaisir à évoquer les moments passés au bord de la mer, mais aussi de Gabès, sa ville natale, dont l’émouvant souvenir se traduit à travers le ton nostalgique du récit. 

Une poésie frondeuse

Cette tentation de trouver refuge dans le passé semble obsédait tellement notre poète que, quelques mois après la parution de ‘‘Battements…’’, il se décide à nous convier à remonter encore plus le temps pour être témoins des deux premières décennies de sa vie. Et nous voilà, avec le nouveau recueil, ‘‘Mon pays, la braise et la brûlure’’, (Ed. Al Manar), plongé dans un univers où la vive nostalgie côtoie la mélancolie et où l’émotion domine traduisant le degré d’attachement du poète à cette terre qui l’avait vu naître.

Certes, parfois, il arrive que le ton soit marqué par l’amertume, dès que le poète évoque les injustices subies alors qu’il était étudiant militant. Alors, la poésie devient frondeuse fustigeant l’arbitraire et l’injustice et exprimant cette soif de justice et de liberté pour lesquelles il s’était battu.

«Vers la prison du 9 avril

Ensuite vers Borj Erroumi dit le Nadhour

La cellule et le petit coin

Tu connaîtras Habib et Habib et Sliman

Fèves avec bestioles dans la gamelle.»

Néanmoins, malgré ces épisodes peu joyeux du passé, on sent à travers cette évocation du pays, le cœur du poète vibrer pour sa Tunisie. Et le voilà notre poète qui prête la voix à l’enfant qui est en lui pour nous restitue, avec beaucoup de tendresse et de nostalgie, des pans d’une vie mouvementée.  

Dans cette double rétrospective, réussit à relever un défi, celui de se saisir du thème de la «fuite du temps», pour lui donne un accent particulier. Son souci est d’insuffler à ce thème universel, un souffle nouveau.

Ainsi, dans les deux recueils, on ressent chez  Bekri, cette exigence qui consiste à surprendre le lecteur, à l’étonner et l’enchanter en multipliant les associations des images insolites, en renouvelant les jeux de sonorités, et transformant les versets en tableaux frétillants de vie. 

‘‘Le battement des années’’, éd. Al Manar, Paris, 2025.

‘‘Mon pays, la braise et la brûlure’’, éd. Asmodée Edern, Paris 2025.

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Pour relancer le secteur du textile en Tunisie

Certains spécialistes du textile estiment que la Tunisie n’a pas la compétence nécessaire pour monter en gamme et que la main d’œuvre locale est relativement chère par rapport à plusieurs pays concurrents en Asie. C’est là une vérité partielle, car toutes les conditions existent dans notre pays pour assurer une production qui satisfait les exigences internationales.

Nouredine Ben Mansour *

En fait, certains soi-disant des spécialistes ne connaissent pas les vrais problèmes de la branche et encore moins la réalité du pays. Les analyses faites en Europe sans la participation des opérateurs et stratèges locaux aboutissent à des vues théoriques pleines de suppositions et de scénarios parfois inopérants.

C’est grâce à l’intervention opportune de l’Etat que l’industrie textile a pris un certain élan en Tunisie. Et c’est aussi l’Etat qui a mis en place un mécanisme de modernisation du secteur pour améliorer sa compétitivité et assurer sa pérennité. Des sommes colossales ont été mises à la disposition des industriels sous formes d’appui et d’encouragement, qui ont permis de redresser la situation de nombreuses entreprises. Les bases de la mise à niveau ayant ainsi été mises en place, c’est l’action des chefs d’entreprises qui a fait le reste en modernisant les méthodes et les process de production dans les entreprises. Cette intervention publique s’est arrêtée nette depuis 2011 dans tous les secteurs de l’industrie. La suite on la connaît.

De nouvelles voies

Les chefs d’entreprises assument eux aussi une grande partie de la responsabilité dans les difficultés de leurs entreprises, car ils n’ont pas réagi à temps pour répondre aux défis posés par la concurrence internationale. Ils se contentaient d’agiter la «menace» du textile chinois sans élaborer ni mettre en œuvre des réponses adéquates pour y faire face. Aujourd’hui, il n’y a plus de «menace» du textile chinois qui a déjà occupé des positions importantes, notamment sur le marché européen qui, faut-il le rappeler, est le principal débouché produits tunisiens.

Là où nous en sommes aujourd’hui, il s’agit de revoir radicalement le modèle suivi jusque-là par cette industrie basée essentiellement sur la sous-traitance.

Il est plus réaliste aussi de suivre le développement du secteur non pas en termes d’évolution du chiffre d’affaires (qui est ô combien trompeur) mais en termes de volumes et de pièces exportées chaque année, sans perdre de vue l’évolution du taux de change.

Ces indicateurs de mesure sont plus sûrs et donnent une vue plus précise de l’évolution quantitative et qualitative du secteur.

Le textile tunisien est obligé d’emprunter de nouvelles voies pour assurer sa pérennité. Il doit éviter de se bloquer dans le concept classique de filière et d’être plus attentif aux besoins des différents marchés. Il sera sauvé par une nouvelle dynamique commerciale qui accroît ses exportations. Et par l’amélioration de la valeur compétitive de ses ressources humaines grâce à une meilleure formation sur les nouvelles technologies.

Autres axes stratégiques pour développer cette industrie : l’innovation pour créer de nouveaux produits plus adaptés aux besoins évolutifs du marché et la modernisation de la chaine logistique qui laisse beaucoup à désirer.

Marketing moderne

Face à un consommateur qui devient de plus en plus imperméable à la publicité de tapage et de matraquage, il s’agit aussi de moderniser les méthodes de marketing pour cibler plus directement les clients et de voir s’il faut raisonner en termes de produits, de créneaux ou de prix ?

Actuellement une nouvelle tendance de publicité et de communication a pris le devant. Ce sont les blogs animés par des influenceurs et influenceuses, qui sont plus proches des consommateurs et dictent les tendances de la mode surtout auprès des jeunes. Ces indicateurs de tendances apportent une approche marketing différente, simple, diversifiée et souvent efficace.

Pour faire face à la concurrence chinoise en matière de textile, l’entreprise tunisienne est censée s’éloigner de la production de masse, à diversifier sa production et à se spécialiser dans des micro-segments porteurs et à plus forte valeur ajoutée, qui demandent un savoir-faire particulier et une main d’œuvre très qualifiée.

Bref, la recherche et développement, le marketing offensif et la délocalisation d’une partie de la production, y compris en Chine, font partie d’une stratégie de relance de l’industrie textile tunisienne.

* Conseiller en logistique et commerce international.

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Les nouveaux défis du secteur du textile tunisien

Le secteur du textile en Tunisie a réussi à résister et à préserver ses performances au cours des trois dernières années, malgré un contexte économique difficile et les fluctuations géopolitiques mondiales, démontrant ainsi sa capacité de résilience et sa pérennité. Cependant, ce pilier historique de l’industrie tunisienne doit faire face à des défis majeurs qui menacent son développement et le maintien de son positionnement sur le plan international.

C’est ce qu’a indiqué le président de la Fédération tunisienne du textile et de l’habillement (FTTH), Haythem Bouajila, au micro d’Expresso sur Express FM, mardi 23 décembre 2025, ajoutant que ce secteur est essentiellement tourné vers l’exportation, avec un taux d’entreprises totalement exportatrices compris entre 85 % et 88 %, qu’il repose sur une forte valeur ajoutée, dans le cadre d’une stratégie axée sur la croissance, la conquête de nouveaux marchés et l’adoption des technologies modernes.

En revanche, Bouajila a mis en garde contre des facteurs qu’il a qualifiés de «secondaires», mais qui menacent l’existence des entreprises et des milliers d’emplois : entraves bureaucratiques, accès difficile au financement, cadre législatif et réglementaire contraignant et obsolète, instabilité fiscale, prix élevé de l’énergie, marché informel, exacerbation de la concurrence mondiale…  

Il a également exprimé son étonnement face à la non-ratification, à ce jour, de la convention des règles d’origine euro-méditerranéennes, laquelle prévoit des exonérations douanières et offre des avantages majeurs aux industries tunisiennes. Ce qui risque d’assujettir les exportations tunisiennes, y compris les produits textiles, à des droits de douane de 12 % à partir de janvier 2026, en raison de l’absence de certificats d’origine, réduisant ainsi la marge bénéficiaire à moins de 10 %. Cette charge supplémentaire portera atteinte à la compétitivité du secteur et nuira au climat de confiance avec les partenaires étrangers, a averti Bouajila en appelant les autorités (gouvernement et assemblée) à accélérer la gestion de ce dossier, en rappelant que la Fédération a contacté l’autorité de tutelle à ce sujet sans obtenir de réponse à ce jour.

Malgré tous ces défis, le secteur du textile a réalisé des exportations d’une valeur de 3 milliards d’euros, soit environ 10 milliards de dinars, au cours des années 2023, 2024 et 2025, en plus d’échanges internes estimés à 4,5 milliards de dinars, a rappelé Bouajila.

I. B.

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Affaire Belaid l Le juge Bechir Akremi restera en prison  

La chambre criminelle spécialisée dans les affaires de terrorisme du tribunal de première instance de Tunis a rejeté la demande de libération provisoire de l’ancien procureur général de la république Bechir Akremi, accusé de «faux, possession et usage de faux» en lien avec l’affaire de l’assassinat de l’ancien dirigeant de gauche Chokri Belaïd, le 6 février 2013.

L’enquête sur cette affaire a été ouverte suite à une plainte déposée par le collectif de défense de Belaid, dans laquelle il accusait Akremi d’avoir manipulé le dossier de l’affaire et falsifié des documents y afférents.

Akremi, qui était suspecté d’accointance sinon d’allégeance au mouvement islamiste Ennahdha, associé au pouvoir en Tunisie entre 2011 et 2021, est poursuivi dans plusieurs affaires à caractère terroriste. Ses adversaires l’accusent d’avoir cherché à blanchir certains dirigeants de la mouvance islamiste, qu’il s’agisse d’Ennahdha ou de l’organisation Ansar Charia, classée terroriste, qui seraient impliqués dans des actes terroristes.

Ces accusations sont rejetées en bloc par les avocats du prévenu, lequel affirme, pour sa part, avoir géré les dossiers qui lui étaient confiés selon les règles et les procédures en vigueur, ajoutant que les décisions judiciaires ne dépendent pas seulement du procureur de la république mais qu’elles sont l’aboutissement d’un long processus où sont impliqués, simultanément ou successivement, plusieurs juges.

I. B.

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Rejet des demandes de liberté provisoire dans l’affaire du Dr Daboussi  

La Chambre criminelle du Tribunal de première instance de Tunis a rejeté mardi 23 décembre 2025 toutes les demandes de mise en liberté provisoire des accusés dans l’affaire liée au décès de l’ancien député et homme d’affaires Jilani Daboussi.

Les demandes ont été déposées par les avocats du vice-président du mouvement Ennahdha, Mondher Ounissi, de l’ancien ministre de la Justice, Noureddine Bhiri, d’un ancien médecin de la prison civile de Mornaguia et d’un ancien procureur général retraité de la Cour d’appel de Tunis, qui sont également impliqués.

Les avocats de la défense ont plaidé des questions de procédure avant de déposer des requêtes en libération des détenus et de demander un report afin de mieux préparer la défense.

Cependant, le tribunal a rejeté ces requêtes et a fixé la date du procès au 26 décembre, rapporte Diwan FM, citant une source judiciaire.

Rappelons que le Dr Jilani Daboussi est un ancien député et maire de Tabarka qui a été emprisonné au lendemain de la révolution tunisienne de 2011 et poursuivi dans des affaires de corruption.

Atteint de plusieurs maladies chroniques dont une insuffisance rénale nécessitant des séances de dialyse, son état s’est beaucoup détérioré en prison où il ne reçut pas les soins exigés par son état. Il mourut quelques heures après avoir bénéficié d’une liberté provisoire.

Sa famille a déposé plainte contre les autorités et, notamment, les responsables qui étaient directement impliqués, selon eux, dans le sort réservé au détenu malade.

I. B.      

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Ghar El Melh l Le rôle écologique des dunes expliqué aux enfants

L’association TunSea pour la science participative a organisé un atelier à Ghar El Melh (Bizerte) visant à faire mieux comprendre aux enfants le rôle écologique des dunes en tant que barrière naturelle, grâce à une approche pédagogique, et de souligner l’importance de préserver les écosystèmes côtiers par des solutions fondées sur la nature.

Selon l’association, cette initiative s’inscrit dans le cadre du projet «TunSea Restore», lancé en 2025 et axé sur la protection du littoral et la restauration des dunes, avec un accent particulier sur la protection des terres agricoles «ramli» et l’amélioration de la biodiversité de la lagune de Ghar El Melh.

«TunSea Restore» s’inscrit dans le cadre du programme de soutien plus large du Consortium méditerranéen pour la Biodiversité, au sein du projet Rescom. Ce programme comprend également un appel à projets de micro-subventions destiné aux organisations de la société civile de plusieurs pays méditerranéens, dont la Tunisie, l’Albanie, l’Italie, le Monténégro, le Maroc et la Turquie.

TunSea se présente comme une plateforme tunisienne de sciences participatives et citoyennes, visant à promouvoir des activités éducatives et la coopération entre les mouvements de jeunesse, les associations, les pêcheurs, la communauté scientifique et les citoyens sur les questions relatives aux sciences marines.

I. B.

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Saadia Mosbah ou quand la lutte antiraciste mène à la prison  

«L’injustice se répète, la douleur s’intensifie et la patience est mise à rude épreuve», a écrit Fares Gueblaoui, le fils de Saadia Mosbah, la célèbre militante antiraciste, présidente de l’association Mnemty, emprisonnée depuis plus d’un an et demi.

Fares commentait ainsi sur Facebook le rejet de la demande de libération sous caution présentée par les avocats de sa mère, lors de son procès, ouvert le 22 décembre 2025, devant le tribunal de première instance de Tunis. Lequel a finalement reporté l’audience au 26 février.

Saadia Mosbah, 65 ans, qui dirige l’association antiraciste Mnemty depuis 2013, a été arrêtée en mai 2024 et fait l’objet d’une enquête pour blanchiment d’argent et d’enrichissement illicite, délits passibles, respectivement, de 10 et 6 ans d’emprisonnement.

Mnemty a déclaré dimanche dernier, dans un communiqué, qu’elle opère en toute légalité et rejette «toute allégation de financement provenant de sources suspectes».

L’enquête ouverte l’année dernière s’est déroulée dans le contexte d’une campagne sur les réseaux sociaux visant à «associer faussement le travail en faveur des droits de l’homme à des théories du complot et à des accusations de ‘‘remplacement démographique’’», affirme-t-on dans les cercles associatifs tunisiens.

Mosbah, qui avait joué un rôle déterminant dans l’adoption, en 2018, d’une loi interdisant la discrimination raciale, est une militante engagée pour les droits des migrants subsahariens en Tunisie, notamment depuis le discours du président Kaïs Saïed en 2023, qui dénonçait les «hordes de migrants illégaux» comme une menace démographique.

Selon son avocate, Me Monia El Abed, Mosbah «souffre de maladies chroniques et ne représente aucune menace pour quiconque. Nous demandons sa libération sous caution et garantissons sa présence aux prochaines audiences.» Ces garanties n’ont pas suffi pour que les juges ordonnent sa libération sous caution. L’ancien bâtonnier, Me Chawki Tabib, qui fait partie de son collectif de défense, a quant à elle souligné que Mosbah avait dépassé la durée maximale de détention provisoire de 14 mois. «Qui réparera cette injustice ?», a-t-il demandé.

Neuf personnes sont jugées dans cette affaire, dont 8 membres de Mnemty parmi lesquels le fils de Mosbah, Fares Gueblaoui, et le propriétaire des locaux de l’ONG.

À la fin de l’audience à Tunis, Gueblaoui a demandé la permission d’embrasser sa mère avant de s’effondrer dans ses bras, provoquant une vive émotion dans la salle d’audience.

Plusieurs autres défenseurs des droits humains sont jugés en Tunisie pour avoir apporté une aide aux migrants en situation irrégulière.

Depuis l’arrivée au pouvoir du président Saïed en 2021, des figures de l’opposition et des organisations de défense des droits humains dénoncent l’érosion des droits et libertés en Tunisie, qui vient de célébrer, le 17 décembre, le 15e anniversaire de la «révolution de la liberté et de la dignité», qui avait déclenché, en son temps, le fameux «Printemps arabe» qui est aujourd’hui un champs de ruines.

I. B.

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Les Américains ont-ils sonné le glas des milices irakiennes ?

Alors que la République islamique d’Iran se morfond dans ses propres crises, que l’Axe de la Résistance agonise, que les États-Unis veulent en finir avec les milices pro-iraniennes en Irak et qu’Israël menace de les bombarder, celles-ci sont divisées entre celles qui ont compris que les temps ont changé et celles -comme le Hezbollah irakien- qui s’obstinent à se maintenir. Pendant plus de deux décennies, les sulfureuses milices qui ont commis beaucoup d’exactions ont soufflé le chaud et le froid sur le pays mais aujourd’hui la donne a incontestablement changé. 

Imed Bahri

Le quotidien londonien arabophone Asharq al-Awsat est revenu sur la crise existentielle que vivent aujourd’hui les milices irakiennes et indique que Bagdad attend la visite prévue de l’envoyé spécial du président américain, Mark Savaya, qui arrivera avant la fin de l’année à la tête d’une délégation de l’administration américaine. En parallèle, les opinions et les positions divergent quant aux appels à ce que l’État ait le monopole de la possession des armes, appels qui, pour la première fois, ont reçu une réponse rapide de la part d’un grand nombre de factions armées. 

Des sources gouvernementales irakiennes ont confirmé aux médias locaux que l’envoyé spécial américain Mark Savaya, accompagné de plusieurs responsables américains, se rendra prochainement à Bagdad pour rencontrer des représentants du gouvernement irakien et divers dirigeants politiques afin de discuter de questions importantes concernant l’évolution de la situation au Moyen-Orient et sa stabilité, ainsi que des relations économiques, des partenariats, des investissements américains et des priorités de la phase actuelle, notamment les questions politiques et sécuritaires auxquelles sont confrontés l’Irak et la région en général.

Les pressions américaines

Selon ces mêmes sources la délégation abordera également les mécanismes permettant d’élargir le champ du partenariat et le consensus politique concernant certaines visions de la situation régionale, ainsi que les solutions proposées pour faire face aux crises et aux défis.

Des sources ont indiqué que Savaya transmettra aux forces irakiennes les messages américains, notamment les résultats des travaux menés sur plusieurs dossiers et points faisant l’objet d’un accord entre Bagdad et Washington, ainsi que les perspectives d’un véritable partenariat, en particulier concernant le retrait des forces américaines selon le calendrier établi, la gestion de la prochaine phase fondée sur le principe du partenariat de sécurité, et les plans d’armement des forces irakiennes.

Depuis sa nomination, Savaya, d’origine irakienne, a suscité une vive polémique en raison de ses écrits. Il y appelle explicitement à mettre fin à l’existence des milices armées et à empêcher leur participation au gouvernement et met en garde l’Irak contre un retour à un «cycle de complications»

Les forces politiques irakiennes sont engagées dans d’ardues négociations au sein des trois principaux blocs (chiite, sunnite et kurde) afin de s’entendre sur les candidats aux trois présidences (république, gouvernement et parlement), dans un contexte de profonds désaccords au sein de chaque bloc.

Parallèlement, le président du Conseil supérieur de la magistrature, Faiq Zaidan, a déclaré que les délais constitutionnels pour la désignation des présidents, dont le compte à rebours débute le 29 de ce mois, date de la première session parlementaire, ne sont pas susceptibles de prolongation. 

Malgré les réunions en cours entre les partis ayant obtenu gain de cause au sein des trois blocs, les désaccords persistent. Dans le même temps, la pression américaine s’intensifie, non seulement concernant la formation rapide du prochain gouvernement mais aussi concernant l’exclusion des milices armées. Cette situation a incité plusieurs forces politiques chiites, représentées au Parlement depuis plusieurs mandats et disposant de branches armées, à revoir leur discours politique.

À Bagdad, les observateurs politiques estiment que les tentatives de certaines de ces forces –qui disposent encore de branches armées ou de brigades au sein des Forces de mobilisation populaire– de modifier leur discours pour mieux s’aligner sur l’État et les politiques gouvernementales arrivent trop tard, compte tenu des exigences croissantes des États-Unis. Ces exigences incluent la possibilité de frappes contre ces factions et leur exclusion du prochain gouvernement.

L’exclusion de ces factions constitue l’un des défis majeurs auxquels sera confronté tout futur Premier ministre, étant donné qu’ils ont 80 sièges au Parlement actuel. Les exclure par la force pourrait donc les inciter à adopter une position d’opposition farouche envers tout futur gouvernement.

Tandis que les services de renseignement irakiens niaient l’existence de tels avertissements aux forces politiques irakiennes et qu’un responsable gouvernemental irakien confirmait que des mises en garde avaient été émises concernant la possibilité d’une frappe militaire contre les sites, les personnalités et les dépôts d’armes des milices, la réaction rapide de certaines de ces factions aux appels à la confiscation des armes par l’État, selon les observateurs, allait des pressions américaines aux conseils du président du Conseil supérieur de la magistrature, Faiq Zaidan, qui remercia les factions d’avoir suivi ses recommandations.

Rendre les armes à l’État

Les observateurs politiques estiment que les pressions américaines sont la cause directe du changement de position des groupes armés en Irak, d’autant plus que les chefs religieux, notamment l’establishment religieux de Najaf représenté par le grand ayatollah Ali al-Sistani, ainsi que des figures politiques clés, avaient appelé à plusieurs reprises, au fil des ans, les factions armées à rendre leurs armes à l’État, sans obtenir de réponse similaire. Sayyed Ammar al-Hakim, figure chiite religieuse et politique de premier plan, a réitéré samedi 20 décembre un appel dans ce sens. Des déclarations officielles en faveur du désarmement ont été publiées par Shibl al-Zaidi, secrétaire général des Brigades de l’Imam Ali, suivies d’appels de Qais al-Khazali, secrétaire général d’Asa’ib Ahl al-Haq ainsi que de la faction Ansar Allah al-Awfiya et du porte-parole des Brigades Sayyid al-Shuhada.

Par ailleurs, le revirement rapide des factions armées ou des forces politiques dotées d’une branche armée concernant leurs positions antérieures sur la question des armes a engendré une profonde division au sein de ces factions. Cette division s’est traduite par une acceptation conditionnelle, subordonnée à des garanties relatives au mécanisme de désarmement et à la remise des armes au gouvernement, et par un rejet catégorique de la part des factions Kataïeb Hezbollah et Harakat al-Nujaba, qui ont publié des déclarations officielles s’opposant à cette initiative. Kataïeb Hezbollah (le Hezbollah irakien) a réaffirmé dans un communiqué son refus du désarmement soulignant que «la souveraineté, le maintien de la sécurité en Irak et la prévention de toute ingérence étrangère sont des conditions préalables à toute discussion sur le monopole de l’État sur les armes», ajoutant : «Notre position est conforme aux directives de nos autorités religieuses, une fois ces conditions remplies».

Pour sa part, Harakat al-Nujaba, la seule faction armée sans représentation parlementaire ou gouvernementale, a affirmé poursuivre sa résistance contre les Américains par tous les moyens.

Il est à signaler que des sources bien informées ont indiqué à Asharq Al-Awsat que des responsables irakiens avaient reçu ces derniers jours une base de données de sécurité israélienne très détaillée sur les factions armées irakiennes. Transmise par l’intermédiaire d’un service de renseignement occidental, cette base de données contenait des informations exhaustives sur la direction, la structure militaire, les réseaux financiers et les entités gouvernementales liées à ces groupes.

Les sources ont précisé que le volume et la précision des données avaient stupéfié les responsables et constituaient un avertissement clair quant à une possible opération militaire imminente.

La transmission de ce fichier massif de données fait suite à un avertissement d’un État arabe ami, informant Bagdad qu’Israël cherchait à obtenir le feu vert des États-Unis pour agir unilatéralement en Irak, Washington se montrant de plus en plus impatient concernant la question des armes hors de contrôle étatique. Un responsable irakien a confirmé que les messages étaient bien parvenus à Bagdad.

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‘‘Carthage’’ l L’épopée revisitée par Irene Vallejo

Roman poétique et historique, ‘‘Carthage’’ (éd. Albin Michel, Les Belles Lettres, Paris, août 2025) d’Irene Vallejo raconte la survie d’Énée et de ses compagnons après la chute de Troie, mêlant aventure, amour et réflexion sur le destin. «Cette nuit-là, j’ai cru que mer et ciel se confondaient. J’ai cru que nous chutions dans les zébrures des éclairs et dans les précipices des vagues.» Ces mots, prononcés par Énée, donnent le ton d’un récit où poésie et épopée se rejoignent, transformant le mythe antique en une expérience profondément humaine.

Djamal Guettala

Après le pillage de Troie, Énée et les survivants affrontent une mer déchaînée et des vents furieux. Mais la tempête, loin d’être un simple obstacle, devient un personnage à part entière, révélant la peur, la fragilité et le courage des hommes.

Énée n’est pas l’héroïque conquérant que l’on pourrait attendre : il est père, chef et survivant, oscillant entre responsabilité et inquiétude, chaque geste, chaque décision étant un acte de survie. Allumer un feu, organiser le camp, veiller sur son fils lule : autant de gestes quotidiens transformés en véritables rituels héroïques par la plume lyrique de Vallejo.

Le pouvoir féminin

Au cœur de ce roman, Elissa, reine de Carthage, s’impose comme une figure féminine puissante et stratégique. Face aux naufragés, elle doit protéger sa jeune cité tout en évaluant les intentions de ses conseillers et soldats. Entre vigilance, prudence et empathie, Elissa incarne le pouvoir féminin dans un monde dominé par la guerre et l’ambition : «Les étrangers peuvent être des marchands pacifiques ou des pirates impitoyables», dit-elle, consciente que chaque décision peut mettre en jeu la survie de son peuple. Avec intelligence et autorité, elle gère son Conseil, déjoue les intrigues, et garde sa liberté intacte, incarnant une force et une clairvoyance exceptionnelles dans un univers en constante turbulence.

La poésie de Vallejo est omniprésente. La mer, le sable, le vent et le feu ne sont pas seulement des décors : ils traduisent les émotions et les états d’âme des personnages. La fumée d’un feu devient «un oiseau qui ouvre ses ailes», les vagues «rugissent dans les zébrures des éclairs». Chaque élément naturel est mis au service d’une musicalité narrative, une immersion sensorielle qui donne au lecteur la sensation de vivre la tempête, la peur et l’émerveillement avec les naufragés.

Le roman se distingue par une polyphonie des voix. Énée raconte la peur et l’espérance, Ana, fille de la magicienne, observe avec lucidité les nuages et les navires, et Elissa réfléchit aux enjeux politiques et humains. Ces perspectives multiples enrichissent le récit et offrent une réflexion moderne sur le pouvoir, la guerre, l’amour et la fidélité, tout en restant profondément ancrées dans le mythe antique.

L’épique et le quotidien

‘‘Carthage’’ explore également le thème de la survie et de l’exil. La relation entre Énée et son fils Lule, séparés puis réunis, devient le fil émotionnel du récit. La crainte de perdre l’enfant, le désir de protéger les survivants et la responsabilité écrasante de diriger un groupe d’hommes affaiblis et blessés confèrent à cette épopée une dimension humaine et universelle. La guerre, la mer et les éléments deviennent autant de métaphores de la vie, de la mémoire et du destin.

L’écriture de Vallejo, riche et sensorielle, transforme chaque geste en acte de grandeur : moudre le blé, préparer le feu, veiller sur le campement. Chaque détail participe à créer un univers où l’épique et le quotidien se mêlent pour produire une expérience de lecture unique.

La traduction française de Bernadette Engel-Roux restitue avec fidélité cette musicalité et cette intensité, permettant aux lecteurs francophones de s’immerger totalement dans l’univers de Carthage.

Sélectionné pour le Prix Femina étranger, ‘‘Carthage’’ a aussi été distingué dans le palmarès Livres Hebdo des livres préférés des libraires. Ce roman est une invitation à redécouvrir les mythes antiques avec un regard contemporain, sensible et poétique. Entre la fascination pour l’histoire, la tension dramatique et la réflexion sur le rôle des femmes, Vallejo réussit à captiver autant les amateurs de mythologie que les lecteurs sensibles à la profondeur psychologique des personnages.

Rigueur historique et modernité narrative

Avec ‘‘Carthage’’, Irene Vallejo montre que l’épopée antique peut renaître à travers la poésie et la modernité narrative. La tempête et le naufrage deviennent des métaphores du destin et de la mémoire, et la survie, l’amour filial et la fidélité apparaissent comme les véritables héros du récit. Comme le rappelle Énée : «Père Énée… nous sommes sauvés» – un souffle d’humanité qui traverse les siècles et donne au mythe une nouvelle vie, profondément contemporaine.

Irene Vallejo, née en 1979 à Saragosse, est écrivaine et philologue. Passionnée par l’Antiquité et la littérature classique, elle est notamment l’autrice de ‘‘L’Infini dans un roseau’’, ouvrage salué pour sa capacité à relier l’histoire ancienne au monde contemporain à travers une écriture poétique et érudite. Dans ‘‘Carthage’’, Vallejo allie rigueur historique, lyrisme et modernité narrative pour offrir une relecture unique du mythe d’Énée et d’Elissa.

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Démission de Noureddine Taboubi l Entre adieu et au revoir

En cas de confirmation des informations à ce sujet relayées ce mardi 23 décembre 2025 dans les cercles syndicaux à Tunis, la démission de Noureddine Taboubi serait un abandon en rase campagne du leader syndicaliste le plus controversé que la Tunisie ait eu dans toute son histoire.

Selon des sources habituellement bien informées, le secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) a déposé sa démission auprès du bureau d’ordre de la puissante centrale syndicale. Il faut dire que des rumeurs de démission du dirigeant syndical ont déjà circulé avant d’être démenties par l’intéressé le 10 décembre courant.

S’agit-il d’une nouvelle manœuvre pour mettre fin à la crise sévissant au sein de l’UGTT depuis plusieurs mois et faire taire les voix de ceux, de plus en plus nombreux, qui exigent sa démission avant même le prochain congrès prévu en février 2026 ?

S’attend-il, plutôt, à ce que ses troupes, ainsi abandonnées, se mobilisent et le rappellent aux commandes, qui plus est à un mois d’un important rendez-vous syndical : la grève générale nationale fixée pour le 21 janvier prochain ?

A moins que, face à une opposition syndicale de plus en plus forte et déterminée à en finir avec son règne et ses pratiques antidémocratiques, il se soit résigné à jeter l’éponge, quitte à sortir par la petite porte. Ce qui ferait le bonheur de beaucoup de Tunisiens, à commencer par le président de la république Kaïs Saïed, qui ne l’a pas reçu depuis 2022. Et l’a souvent accusé, lui et les autres dirigeants de l’UGTT, de corruption.

Wait and see…

I. B.  

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CAN 2025 l Onze rentant de la Tunisie face à l’Ouganda

L’équipe de Tunisie de football jouera ce mardi 23 décembre 2025, à 21 heures, à Rabat, son premier match de groupe (3) de la Coupe d’Afrique des nations (CAN Maroc), contre son homologue de l’Ouganda.

Les Tunisiens, qui ont raté leurs deux premiers matchs lors des deux précédentes éditions de cette compétition, espèrent se racheter ce soir en remportant le match et en affichant d’emblée leurs ambitions aux côtés des Cadors de la compétition, notamment le Maroc, l’Algérie, l’Egypte, le Sénégal et la Côte d’ivoire.

Selon des informations en provenance de Rabat et sur la base des derniers entraînements effectués lundi sous la férule du coach Sami Trabelsi, le onze rentrant sera composé comme suit : Aymen Dahmen (gardien de but), Montassar Talbi, Dylan Bronn, Yan Valery et Ali Abdi (défense), Ferjani Sassi, Ellyes Skhiri, Hannibal Mejbri (milieux), Ilyas Saad, Elias Achouri et Hazem Mastouri (attaquants).

Mohamed Ali Ben Romdhane et Ismaël Gharbi pourraient entrer en cours de jeu pour aider à déverrouiller la défense adverse qui jouera sans doute groupée en procédant par des contres rapides.

I. B.

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Nouveau report du procès de Ridha Charfeddine

La chambre criminelle spécialisée dans les affaires de corruption financière du tribunal de première instance de Tunis a décidé, lundi 22 décembre 2025, de ne pas libérer Ridha Charfeddine, ancien député et ancien président de l’Etoile sportive du Sahel. L’affaire dans laquelle est poursuivi un autre homme d’affaires en fuite, sera examinée en février prochain…

Selon les informations diffusées par la radio Mosaique FM, Charfeddine a comparu en état de détention. Il était accompagné d’un de ses proches, libéré sous caution, tandis qu’un ancien président d’une association sportive a été déféré par contumace pour être jugé pour des accusations liées au blanchiment d’argent et aux délits bancaires.

M. Charfeddine est poursuivi pour constitution d’avoirs à l’étranger sans l’autorisation de la Banque centrale de Tunisie, ce qui est interdit par le Code de change, dont l’amendement envisagé depuis plus d’une dizaine d’années, est toujours en cours d’examen et tarde encore à être adopté par le gouvernement et promulgué par le parlement. Entre-temps, beaucoup de Tunisiens sont poursuivis en justice sur la base de certains de ses articles jugés obsolètes par plusieurs experts financiers.

I. B.

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«Rien n’a changé» à Sidi Bouzid l Le printemps trahi

Nous reproduisons ci-dessous la traduction du reportage signé par l’envoyée spéciale de l’agence publique italienne Ansamed, sur la célébration des événements du 17 décembre 2010 à Sidi Bouzid, berceau de ce qui sera appelé Révolution tunisienne et déclenchera le Printemps arabe de 2011. 15 ans après le sacrifice de Bouazizi, la désillusion persiste dans la ville tunisienne. (Ph. Des parents de Mohamed Bouazizi se recueillent sur sa tombe.)

Valentina Brini

À Sidi Bouzid également, l’artère principale porte le nom du premier président tunisien.

L’avenue Habib Bourguiba, large et rectiligne, s’étend sur environ 265 kilomètres depuis la capitale, loin de la mer et des circuits touristiques.

Des cafés bordent les façades basses et défraîchies, avec leurs chaises en plastique. Des hommes, accoudés aux tables, semblent contempler le temps qui s’écoule. Gravé sur la façade de la poste, le visage de Mohamed Bouazizi se dresse à quelques dizaines de mètres du commissariat. Aucune plaque ne le commémore, mais chacun sait où regarder.

Une saison de trahison

Le 17 décembre 2010, ce vendeur ambulant de vingt-cinq ans – Basboosa, son surnom – s’est immolé par le feu après une nouvelle humiliation de la part des autorités locales, allumant la mèche d’un incendie qui a embrasé le monde arabe tout entier. Quinze ans plus tard, ce printemps résonne comme une saison de trahison.

«Rien n’a changé» déclare Abdelkader Moussa, 58 ans, marié et père de deux enfants. Ses paroles sont sèches, sans emphase ni colère. Sidi Bouzid, observe-t-il, «continue de souffrir des mêmes maux qu’avant 2010 : érosion du pouvoir d’achat, coût de la vie toujours plus élevé, revenus en berne.» Il secoue légèrement la tête et s’éloigne sur l’avenue, engloutie par la nuit.

Dans les commerces du quartier, parmi des étagères de fortune et des réfrigérateurs qui bourdonnent sans cesse, de petits drapeaux canadiens apparaissent à côté des prix écrits au marqueur. C’est là que la famille Bouazizi a choisi l’exil. Même l’âme de celui qui est devenu le symbole de la Révolution du Jasmin a laissé derrière elle un pays – et une ville – perçus comme invivables : une économie écrasée par une dette publique avoisinant les 80 % du PIB, un climat de suspicion et de surveillance où la corruption demeure un fléau, et peu de perspectives d’emploi. L’arrivée de la saison des olives devrait ramener des emplois et un peu de répit. Il y a plutôt la crainte d’une issue inéluctable, avec des conséquences dévastatrices pour les familles déjà en difficulté.

Parmi des caisses de dattes, de bananes et de légumes, Charfeddine Hamda, 42 ans, exerce le même métier que Bouazizi. Son quotidien, explique-t-il, est marqué par la même étouffante atmosphère : contrôles incessants, restrictions arbitraires, routes barrées. Les forces de l’ordre l’empêchent de travailler là où passent les clients ; il n’a pas sa place sur les marchés publics. «Ma vie est en suspens, j’attends toujours une amélioration qui ne vient jamais», se lamente-t-il. «Les véritables revendications de la révolution n’ont jamais été satisfaites», affirme-t-il.

À côté de la charrette de Bouazizi – un autel profane érigé sur un socle de pierre à quelques pas de la fresque – se côtoient les récits du présent. Deux roues robustes, des essieux bruts, une structure réduite à l’essentiel, et, sur le côté, une inscription arabe noire : «Je ne pardonne pas, je n’oublie pas.»

Quinze ans plus tard, une immense déception

Ichrak, 46 ans, originaire de Sabbala et mère de quatre enfants vivant avec son père à Sousse, marche d’un pas vif. Après son divorce, elle a repris ses études universitaires pour s’occuper l’esprit et ne pas se laisser abattre par une réalité qu’elle juge «plus dure qu’avant». Elle s’attendait à ce que la révolution apporte des droits sociaux, des emplois, et même des loisirs aux jeunes de Sidi Bouzid. «Quinze ans plus tard, c’est une immense déception», dit-elle, même si elle espère que «les choses s’amélioreront avec le temps».

Un peu plus loin, un chauffeur de taxi attend pour partir vers le nord, en direction d’Hammamet. Avant de démarrer, il se résigne : «C’était mieux avant, quand Ben Ali était au pouvoir», songe-t-il, évoquant également «son grand ami Bettino Craxi». De son point de vue – assis sur un siège en cuir usé – la comparaison avec le gouvernement de Kaïs Saïed est frappante : «Les routes étaient mieux entretenues, la Tunisie était plus sûre et les ressources étaient accessibles à tous.»

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Face à la multiplication des crises, le président iranien se dit impuissant !

«Je ne peux rien faire, ne me maudissez pas», ces mots sont du président iranien Massoud Pezeshkian à son peuple. Guerres, récession économique, inflation record, sécheresse très grave, pénuries d’eau et d’électricité, impasse dans les négociations avec les États-Unis, face à ce contexte très difficile le président iranien a préféré l’aveu d’impuissance. D’autant plus que dans le système politique iranien, les prérogatives du président sont limitées, le pouvoir reste entre les mains du Guide suprême. Cette approche de vérité change de la langue de bois et des dirigeants qui vendent des chimères toutefois, ceci accentue le malaise et l’angoisse des Iraniens. 

Imed Bahri

Le New York Times a publié une enquête analysant la présidence de Massoud Pezeshkian en Iran, un pays englué dans des crises économiques et politiques étouffantes. Cette période a été marquée par des aveux publics sans précédent d’une incapacité à proposer des solutions, compte tenu des contraintes du régime, des sanctions et des conflits extérieurs. Sa franchise, que certains jugent réaliste, exacerbe chez d’autres un sentiment de vide et d’angoisse, l’Iran craignant une explosion sociale sans perspective de sortie.

Farnaz Fassihi et Leily Nikounazar affirment dans leur enquête que dans un contexte d’inflation record, de graves pénuries d’eau et d’électricité et l’impasse dans les négociations avec les États-Unis, le président iranien Massoud Pezeshkian semble avoir choisi une vérité qui choque: il n’a pas de solutions.

La première année de mandat de Pezeshkian est unanimement qualifiée de désastreuse. Cette période a été marquée par des assassinats de dirigeants régionaux et d’alliés, des frappes aériennes israéliennes et américaines, la destruction d’installations nucléaires, une récession économique persistante et des conditions de vie déplorables qui pèsent sur le quotidien des Iraniens. Et si ces derniers attendaient des réponses ou des solutions de leur président, Pezeshkian a été d’une clarté inhabituelle : «N’attendez pas de miracles de ma part»

Des aveux d’impuissance sans précédent

Au cours de ses interventions publiques ces dernières semaines, le président iranien a semblé plus enclin à admettre son impuissance qu’à rassurer. S’adressant à des étudiants et des universitaires début décembre, il a déclaré sans ambages : «Si quelqu’un peut faire quelque chose, qu’il le fasse. Je ne peux rien faire, ne me maudissez pas»

Lors d’autres rencontres avec des responsables gouvernementaux, il a décrit la situation du pays comme «bloquée, complètement bloquée», ajoutant: «Depuis notre entrée en fonction, les catastrophes s’accumulent et ne cessent de s’aggraver»

Il est allé encore plus loin, blâmant le peuple iranien lui-même –et non les États-Unis ou Israël– pour la crise, arguant que la corruption, les conflits internes et des décennies de politiques de dépenses inconsidérées étaient à l’origine du problème. Il a déclaré sans ambages : «Le problème, c’est nous»

Ce mois-ci, Pezeshkian a demandé aux gouverneurs et aux responsables locaux d’agir «comme si le gouvernement central n’existait pas et de régler leurs propres problèmes», ajoutant: «Pourquoi devrais-je les régler? Vous ne devez pas croire que le président est capable de faire des miracles».

Colère et inquiétudes au sein du régime

Des extraits de ces propos ont largement circulé en Iran, déclenchant un vif débat. Le journaliste Ali Zia a déclaré dans une vidéo largement partagée: «Pezeshkian ne dirige pas le gouvernement. Il l’a mis en pilotage automatique et a abandonné tout contrôle. C’est le sentiment général»

Selon des responsables gouvernementaux et deux membres de l’aile conservatrice, alliés et opposants du président ont exprimé en privé leur mécontentement, estimant que cette rhétorique donne une image d’un État faible et impuissant à un moment particulièrement délicat.

Dans le système politique iranien, le président dispose d’une influence limitée sur la politique, la décision finale revenant au Guide suprême Ali Khamenei âgé de 86 ans. Les précédents présidents ont rarement reconnu publiquement les limites de leur marge de manœuvre.

Toutefois, Pezeshkian ne s’en est jamais caché. Il a déclaré à plusieurs reprises être lié par les décisions du Guide suprême sur les questions cruciales, notamment le programme nucléaire et les relations avec Washington. Il a également reconnu ne pas avoir pu tenir ses promesses de lever les restrictions sur les réseaux sociaux comme Instagram, malgré l’utilisation massive de VPN par les Iraniens pour contourner la censure.

Honnêteté ou dissimulation ?

Certains réformateurs voient dans la franchise de Pezeshkian une approche novatrice. L’ancien vice-président Mohammad Ali Abtahi a défendu le président, déclarant : «Parler franchement au peuple est un phénomène nouveau. Ce n’est pas de la naïveté, c’est de la politique. Il ne veut pas susciter de faux espoirs et se trouver ensuite dans l’incapacité de les satisfaire».

Cependant, les conservateurs n’ont pas accepté ce raisonnement. Certains ont même réclamé sa démission. Le député d’extrême droite Kamran Ghazanfari a déclaré lors d’une émission télévisée: «Alors pourquoi êtes-vous devenu président ? Vous êtes censé résoudre les problèmes de la société, pas passer votre temps à dire: Nous n’avons pas ceci, nous n’avons pas cela»

Une présidence marquée par les crises

Pezeshkian, 71 ans, chirurgien cardiaque, ancien ministre de la Santé et ancien député, a accédé à la présidence en septembre 2014 suite au décès du président Ebrahim Raisi dans un accident d’hélicoptère. Et les crises n’ont pas tardé à se multiplier. Le jour de son investiture, Israël assassinait à Téhéran le chef politique du Hamas, Ismaïl Haniyeh. Puis, en juin, une guerre directe éclatait entre l’Iran et Israël durant douze jours et se terminant par des frappes américaines qui ont gravement endommagé les installations nucléaires iraniennes.

Pezeshkian lui-même a échappé de justesse à la mort lorsque Israël a bombardé une réunion secrète de sécurité nationale qu’il présidait dans un bunker souterrain.

En même temps l’économie s’effondre et la société suffoque. Les sanctions américaines imposées depuis 2018 continuent d’étrangler l’économie iranienne. Les perspectives d’un accord avec Washington pour un allègement de ces sanctions semblent sombres, tandis que la menace d’une nouvelle confrontation avec Israël plane.

«L’Iran est paralysé tant sur le plan intérieur qu’extérieur», a déclaré Sanam Vakil, directrice du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord à Chatham House avant d’ajouter : «Pezeshkian tente de mettre en lumière les contraintes qui pèsent sur lui mais cela résoudra-t-il la crise ? J’en doute».

La monnaie nationale, le rial, continue de chuter. Un dollar a atteint 1,3 million de rials sur le marché libre, soit plus du double de sa valeur lors de l’arrivée au pouvoir de Pezeshkian.

L’inflation est estimée à environ 60% et les prix de certains produits de première nécessité ont été multipliés plusieurs fois. Selon les rapports officiels, les prix des produits laitiers ont triplé en peu de temps.

«Sans les cartes bancaires, nous aurions besoin de transporter des sacs remplis d’argent liquide pour nos achats quotidiens», témoigne Soheil, un ingénieur d’Ispahan.

Un rapport du ministère des Affaires sociales indique que les Iraniens consomment actuellement 400 calories de moins que l’apport journalier minimum recommandé.

Mehshid, un enseignant retraité de Téhéran, confie : «J’ai dû vendre mon or et puiser dans mes économies. La viande et le poulet ne sont plus qu’un luxe, et bientôt, nous n’aurons même plus les moyens d’acheter des œufs».

Pas de solution miracle et des signes d’explosion

Les économistes insistent sur l’absence de solutions à court terme à ces crises imbriquées. Amir Hossein Khaleghi, économiste à Ispahan, affirme : «Sans un changement radical de la politique étrangère, aucune avancée intérieure ne sera possible».

Azar Mansouri, chef du mouvement réformateur, prévient que le pays est au bord de l’explosion : «Le peuple est en colère et gouverner de cette manière est intenable».

Pour l’instant, le Guide suprême Ali Khamenei continue d’apporter son soutien au président, le qualifiant récemment de «diligent» et d’«honorable», dans un message que les analystes ont interprété comme un avertissement à ses détracteurs contre toute tentative de déstabilisation du pays.

Malgré son ton grave, Pezeshkian insiste sur son maintien au pouvoir : «Je tiendrai jusqu’au bout»

Cependant, la question qui préoccupe de plus en plus les Iraniens n’est plus : Comment le président va-t-il résoudre les crises ? Mais plutôt : Que signifie l’affirmation du président lui-même selon laquelle il ne le peut pas ?

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