Le travail humanitaire à l’épreuve de la «justice» tunisienne
Le procès des membres de la branche tunisienne de l’Ong française Terre d’Asile a suscité beaucoup d’interrogations, d’incompréhension et même de colère, et pas seulement dans les cercles du travail humanitaire. L’onde de choc suscitée par ce procès presque incroyable a été relayée par la plupart des médias à travers le monde. Et cela n’a pas fait une bonne publicité pour la Tunisie, c’est un euphémisme.
Le procès des responsables de l’Ong, accusés d’aide illégale aux migrants, lundi 15 décembre 2025, à Tunis, a été dénoncé par Amnesty International comme une «criminalisation de la société civile».
Six travailleurs humanitaires de Terre d’Asile Tunisie, dont Sherifa Riahi, ancienne directrice de l’organisation, et un autre responsable, Mohamed Joo, ainsi que des employés de la municipalité de Sousse, ont comparu en audience préliminaire pour «facilitation de l’entrée et du séjour illégaux» de migrants en Tunisie.
Riahi et Joo sont détenus depuis plus de 19 mois, tout comme deux autres employés de Terre d’Asile et deux des 17 prévenus travaillant pour la ville de Sousse, selon l’avocat de Riahi, Seifallah Ben Meftah. D’après Hayet Jazzar, une autre avocate, le tribunal a rejeté la demande de libération conditionnelle des six prévenus incarcérés et a fixé la prochaine audience au 5 janvier.
Les accusés sont également poursuivis pour «complot en vue d’héberger ou de dissimuler des personnes entrées illégalement sur le territoire» et encourent des peines de prison allant jusqu’à 10 ans. AI a appelé les autorités tunisiennes à «mettre fin à cette injustice» et à «abandonner les charges retenues contre les travailleurs humanitaires» lors de ce «procès spectacle». «Boucs émissaires» – «La solidarité n’est pas un crime», proclamait une grande banderole déployée devant le tribunal par les proches des accusés. «Toutes les actions de Mme Riahi ont été menées» dans le cadre d’un projet approuvé par l’État tunisien et en «coordination directe» avec le gouvernement, a expliqué Meftah à l’AFP, soulignant que «la protection et l’assistance aux migrants» sont prévues par des conventions internationales ratifiées par la Tunisie.
Les accusés emprisonnés ont été arrêtés en mai 2024, en même temps qu’une douzaine d’autres travailleurs humanitaires, dont la militante antiraciste Saadia Mosbah, dont le procès doit débuter fin décembre.
La Tunisie est un point de transit essentiel pour des milliers de migrants subsahariens qui tentent chaque année de rejoindre clandestinement l’Europe par la mer. Beaucoup d’Ong a vocation humanitaire y sont déployées pour apporter l’aide aux réfugiés, demandeurs d’asile et candidats à la migration vers l’Europe. Terre d’Asile Tunisie en fait partie.
I. B.
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