Tarak Triki : « L’Open Innovation doit devenir autonome sans financement systématique »
Lors de la première édition de LeBridge25, organisée par la Chambre de Commerce et d’Industrie Tuniso-Française (CCITF), Tarak Triki, Directeur général de Smart Capital, a révélé une tendance inattendue : 80 % des PME tunisiennes choisissent spontanément de collaborer avec des start-up pour leurs projets d’innovation. Cette dynamique de marché impose à l’institution un rôle de catalyseur temporaire plutôt que de financeur permanent.
L’Open Innovation soulève des enjeux qui dépassent la simple question de compétitivité selon Tarak Triki qui intervenait dans le pannel. Elle pose des défis d’organisation entre entités aux cultures différentes, de gestion du risque et de structuration entre deux types d’organisations fondamentalement distinctes. Smart Capital, qui promeut l’innovation et la digitalisation pour les start-up et les PME, a observé ces dynamiques à travers ses programmes d’accompagnement.
La découverte majeure concerne le comportement spontané des PME. Alors que Smart Capital avait initialement conçu ses programmes pour pousser les PME vers toutes sortes de structures; c’est la force du marché qui s’est exprimée avec cette préférence massive pour les start-ups. Cette statistique révèle que cette approche répond à un véritable besoin d’organisation complémentaire entre une entité ancrée dans son activité qui prend son risque sur son cœur de métier et une entité qui prend son risque sur l’innovation qu’elle développe.
Le positionnement de Smart Capital découle directement de cette observation. L’objectif n’est pas de financer de façon systématique l’Open Innovation, mais de démontrer que cela fonctionne pour que le marché puisse prendre le relais sans passer par des programmes d’appui. Tarak Triki souligne que lorsque les mécanismes de marché prennent le relais sur les mécanismes d’incitation, la bureaucratie diminue naturellement. Smart Capital intervient précisément parce que ces mécanismes ne couvrent pas encore totalement le besoin, mais son rôle demeure exceptionnel et temporaire.
L’institution a inversé la logique traditionnelle des programmes d’innovation. Au lieu de s’adresser aux prestataires comme les instituts de recherche ou les universités, Smart Capital va directement vers les bénéficiaires qui profiteront du fruit de la compétitivité du projet collaboratif. Le message est pragmatique : nous vous aidons à mettre en place vos premiers projets pour que vous constatiez par vous-mêmes l’augmentation de votre compétitivité. Une soixantaine de bénéficiaires ont déjà monté des projets collaboratifs selon ce modèle. La phase suivante consiste en un travail de vulgarisation pour encourager davantage d’entreprises à adopter cette démarche.
Cette approche s’appuie sur une collaboration stratégique avec l’Association des technopoles. Smart Capital a sollicité le savoir-faire de cette structure pour accompagner les projets collaboratifs et garantir leur réussite. Le réseau développé dans l’ensemble des technopoles offre un double vivier de projets et de compétences pour accompagner les bénéficiaires dans le choix de leurs partenaires et tout au long du processus jusqu’à son aboutissement.
Tarak Triki observe par ailleurs qu’une dynamique spontanée s’est développée entre start-up elles-mêmes. 40 % de leurs ventes se font vers d’autres start-up, une collaboration naturelle qui fonctionne parce que les cultures sont déjà rapprochées. Cette réussite permet à Smart Capital de concentrer ses interventions là où le marché ne fonctionne pas suffisamment bien; adoptant une approche contracyclique qui cible les défaillances de l’écosystème.
L’enjeu actuel porte sur la pérennisation des premières expériences et l’intégration durable de l’Open Innovation dans les pratiques des entreprises tunisiennes. L’approche de Smart Capital illustre une évolution dans les politiques publiques de soutien à l’innovation : amorcer la pompe sans créer de dépendance, pour permettre aux mécanismes de marché de fonctionner de manière autonome à terme.
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