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Journées de l’Entreprise | Ambition mondiale, mais réformes en suspens

Au moment où l’économie mondiale réinvente ses lignes de force, la Tunisie cherche à s’y inscrire autrement : non plus comme un simple maillon, mais comme un acteur capable de peser sur les échanges, les normes et les innovations. Vaste ambition pour un pays qui a du mal à relancer sa croissance économique atone depuis 2011.

Envoyé spécial

C’est dans ce climat de recomposition globale que la 39ᵉ édition des Journées de l’Entreprise s’est ouverte, ce vendredi 12 décembre 2025 à Sousse, sous l’impulsion du ministre de l’Économie et de la Planification, Samir Abdelhafidh.

Dès l’ouverture, les débats se sont orientés vers une lecture stratégique des mutations à l’œuvre, portée notamment par l’intervention dense et volontariste de Dominique de Villepin. L’ancien Premier ministre français y a esquissé les trajectoires possibles d’un pays qu’il estime «mieux préparé qu’il n’y paraît» pour s’affirmer dans le nouvel ordre économique mondial.

De Villepin a livré une analyse dense et ambitieuse du rôle que la Tunisie peut jouer dans un nouvel ordre mondial en recomposition. Il a insisté sur trois paris stratégiques qui, selon lui, permettront au pays de consolider sa place au sein des réseaux économiques internationaux : le pari du comptoir, le pari de l’arrimage, et le pari de l’innovation.

Renouer avec l’esprit méditerranéen

L’ancien Premier ministre français a rappelé que la Tunisie possède un héritage historique qui peut se transformer en avantage compétitif. «De toutes les stratégies qui marchent dans le nouvel ordre mondial, il y a d’abord le pari du comptoir», a-t-il affirmé. En référence à l’histoire phénicienne et au rôle traditionnel d’intermédiation du pays, il a expliqué que cette stratégie repose sur la médiation, l’agilité et l’attractivité.

Selon lui, la Tunisie a la capacité de devenir un lieu de rencontre entre commerce, culture et finance, à condition de poursuivre son ouverture économique. Il a notamment souligné le rôle décisif du secteur financier. «La Banque centrale de Tunisie a récemment renforcé la réglementation prudentielle avec trois nouvelles circulaires en 2025 pour améliorer la résilience du secteur», a-t-il rappelé.

De Villepin a aussi évoqué les efforts de la BCT pour encourager l’innovation dans les services financiers, en particulier à travers la mise en place d’un bac à sable réglementaire destiné à tester les solutions de paiements innovants. Cette orientation pourrait, selon lui, faire passer la place financière de Tunis à la vitesse supérieure, en attirant davantage d’acteurs régionaux.

Le second pari évoqué par l’ancien chef du gouvernement français est celui de l’arrimage aux chaînes de valeur européennes. La Tunisie, a-t-il rappelé, exporte déjà 70 % de ses produits vers l’Union européenne, tandis que 43 % de ses importations proviennent principalement de la France, de l’Allemagne et de l’Italie. «Les chaînes de valeur euro-tunisiennes se sont fortement intégrées depuis la fin des années 1990», a-t-il observé, suite à la signature d’un accord d’association ayant permis de mettre en place d’une zone de libre-échange.

De Villepin estime que la période d’instabilité ayant marqué les quinze dernières années (de la crise des subprimes au choc du Covid-19) doit désormais appartenir au passé. «La stabilisation économique et sociale pourrait ouvrir la voie à un cercle vertueux fondé sur l’attraction des entreprises européennes et la montée en gamme industrielle. Pour ce faire, il faut enclencher la remontée de la productivité et de l’investissement», a-t-il insisté.

Le troisième pari, celui de l’innovation, repose selon lui sur l’un des principaux atouts du pays : la qualité de son enseignement supérieur et le potentiel de sa jeunesse. Il a cité l’exemple emblématique d’InstaDeep, start-up tunisienne rachetée en 2023 par BioNTech pour un demi-milliard de dollars, preuve selon lui que la Tunisie est déjà un hub régional de l’innovation qui ne demande qu’à croître. Le pays consacre, en effet, plus de deux fois plus de ressources à l’innovation que ses voisins du Maghreb, et compte plus de 1 500 startups ainsi que 17 scale-ups prometteuses.

Pour réussir ce pari, De Villepin a insisté sur la nécessité d’un passage à l’échelle, rendu possible par la mobilisation de capitaux internationaux et par la création de cadres de coopération plus ambitieux entre l’Europe, le Maghreb, l’Afrique et le Moyen-Orient.

Des impasses mondiales aux alliances de voisinage

Par la même occasion, l’ancien Premier ministre français a livré une analyse géopolitique dense, marquée par une mise en garde contre trois impasses stratégiques qui, selon lui, menacent la stabilité mondiale autant qu’elles brouillent la capacité des États et des entreprises à se projeter.

La première est l’impasse de l’autarcie. Dans un monde secoué par des crises successives (sanitaires, énergétiques, sécuritaires), la tentation du repli se renforce. Mais il estime que cette voie est en contradiction totale avec la réalité actuelle des chaînes de valeur mondiales : aucune économie, même puissante, ne peut prospérer durablement en s’isolant. L’interdépendance est un fait structurel, non une option politique. Renoncer à cette réalité revient, selon lui, à s’exposer à l’asphyxie économique et à la marginalisation stratégique.

La deuxième impasse identifiée est la logique impériale, qu’il illustre notamment par les politiques menées sous l’administration Trump. Il y voit un réflexe d’hyperpuissance cherchant à imposer ses règles plutôt qu’à construire des partenariats équilibrés. Or, cette approche, jugée contre-productive, alimente les tensions, fragilise les alliances traditionnelles et génère, à terme, plus d’instabilité que de sécurité. 

La troisième impasse est celle des batailles identitaires, ces affrontements idéologiques qui transforment les zones de contact (culturelles, économiques, migratoires) en véritables lignes de fracture. Selon De Villepin, la crispation identitaire enferme les nations dans une logique d’opposition permanente et nourrit une conflictualité diffuse qui fragilise les coopérations essentielles. Elle empêche aussi d’aborder sereinement des enjeux transnationaux comme la migration, la transition énergétique ou la sécurité.

Face à ces dérives, le Français propose une refondation pragmatique et ambitieuse des relations entre l’Europe et son voisinage sud, articulée autour de cinq orientations structurantes.

D’abord, sortir de la logique de l’aide. «Le modèle vertical, hérité de l’après-guerre, n’est plus adapté : il crée dépendance et incompréhensions», a-t-il précisé, tout en appelant à une relation d’égal à égal, fondée sur des projets partagés et une vision commune.

Deuxième orientation : bâtir des infrastructures communes. Pour lui, infrastructures physiques (énergie, transport), numériques ou éducatives constituent le socle d’un destin euro-méditerranéen intégré. Elles permettent aux économies des deux rives de se renforcer mutuellement et de réduire les vulnérabilités.

Il propose aussi d’associer pleinement les entreprises aux grandes stratégies de coopération. «Elles disposent de l’agilité, de l’innovation et de l’expertise opérationnelle nécessaires pour transformer les ambitions politiques en résultats concrets», a-t-il souligné.

S’agissant de la quatrième orientation, il a proposé de mobiliser les territoires et les diasporas. Les diasporas sont, selon lui, des acteurs de connexion culturelle, économique et technologique sous-exploités. Elles peuvent devenir des vecteurs puissants de co-développement et d’intégration régionale.

Finalement et non moins important, il appelle à articuler maîtrise des frontières et circulation des talents. «Il ne s’agit pas d’opposer sécurité et mobilité, mais de concevoir un cadre clair, ordonné, où la gestion migratoire devient un outil de développement partagé plutôt qu’un facteur de tension», a-t-il souligné.

Un horizon ambitieux, mais tributaire de réformes profondes…

Si la vision présentée par Dominique de Villepin situe la Tunisie dans un rôle central, sa réalisation dépendra de la capacité du pays à stabiliser son cadre économique, simplifier ses procédures, assurer une justice prévisible et accélérer les réformes structurelles. Les ambitions d’innovation, d’intégration régionale et d’ouverture financière nécessitent un environnement où l’investissement est protégé, les règles sont claires, et l’administration accompagne plutôt qu’elle n’entrave.

Ceci pour dire aussi que la Tunisie dispose effectivement d’atouts réels (position géographique, capital humain, dynamisme entrepreneurial) mais leur valorisation passe désormais par une mise à niveau institutionnelle et opérationnelle. C’est à cette condition que les trois paris proposés pourront devenir les trois piliers d’un nouveau cycle de croissance.

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Dominique de Villepin : « La Tunisie a de nombreux atouts pour devenir un lieu de rencontre et d’interconnexion entre Europe, Afrique et mondes émergents »

La mondialisation libérale vacille sur ses fondations, minée par quatre disruptions majeures. Face à cette reconfiguration en pôles d’influence, la Tunisie dispose d’atouts uniques et de compétences humaines, avec un tissu économique diversifié et une position géostratégique méditerranéenne, pour devenir un lieu de rencontre et d’interconnexion entre Europe, l’Afrique et les mondes émergents. Tels sont les mots d’ordre de Dominique de Villepin, l’invité d’honneur des 39èmes Journées de l’Entreprise. Lesquelles se déroulent, du 11 au 13 décembre 2025, à Sousse, sur le thème du « Nouvel ordre économique ».

Lors de son allocution, Dominique de Villepin a mis l’accent sur quatre piliers en péril. Il rappelle à cet effet la suprématie technologique américaine qui est contestée. Tout en soulignant : « La Chine a progressé dans la recherche en IA de 76 % contre 6% pour les États-Unis, en communications optiques avancées de 29 % contre 12 % (USA), et 45 % contre 8 % en aimants et supraconducteurs. Pékin progresse à vive allure dans la métrologie quantique, les capteurs quantiques et le calcul quantique ».

Puis évoquant la guerre commerciale trumpienne, relancée par des traités bilatéraux inégaux, Dominique de Villepin souligne qu’il s’agit d’un « empire économique » américain. Depuis janvier 2025, 8 000 milliards de dollars d’investissements ont été rapatriés aux États-Unis, capturant les ressources minières, les capitaux et les rentes numériques auprès de consommateurs captifs. L’essor des crypto-actifs et stablecoins révolutionne la politique monétaire, érodant la souveraineté des banques centrales et transformant les banques et les paiements. Enfin, les énergies fossiles s’essoufflent : pic pétrolier imminent, réchauffement climatique et cours contraints mettent fin à un siècle de commerce maritime massif et de production de masse ouvrant de nouveaux marchés.

Il estime que « le trumpisme est une logique impériale de reconquête. Ces chocs provoquent une réaction impérialiste avec l’accaparement de ressources minérales et énergétiques via des accords miniers (protection américaine contre accès au sous-sol), des asymétries économiques et le recours à la force. L’objectif étant la suprématie technologique et le contrôle des services numériques mondiaux.

Et de poursuivre : « La bataille de l’IA cible la Chine, mais aussi l’Europe, accusée par l’administration Trump d’excès de souveraineté économique. Ce sont des risques contagieux pour l’économie mondiale. Et ces turbulences menacent  avec une stagnation inflationniste liée à la hausse des droits de douane qui comprime la croissance et la production tout en gonflant les prix. Aux États-Unis, on note une inversion de la baisse des prix à l’été 2025, avec des pressions persistantes (politique monétaire relâchée, chèques aux ménages, nouvelle offensive contre la Chine dès novembre). La spéculation est circulaire, rendant la finance vulnérable, comme Nvidia investissant dans OpenAI via GPU, créant un cercle auto-alimenté. Ainsi, un crack du dollar est envisageable : des déficits abyssaux (7 000 milliards de dettes supplémentaires sous Trump) signalent une fragilité croissante, accélérant une multipolarité en pôles et aires d’influence. »

Dans cette « géographie économique réorganisée », comme l’évoque Dominique de Villepin, « la Tunisie peut jouer un rôle pivot. Et ce, en matière de diplomatie proactive, diversification des partenariats, attraction des investissements en IA et énergies vertes. Ses atouts humains et sectoriels en font un hub naturel d’interconnexion », conclut-il.

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Samir Abdelhafidh : relier les entreprises aux centres de recherche, de formation professionnelle et universitaire, un impératif

Dans un contexte économique en quête de relance, comment  mettre en place ce nouvel ordre économique pour booster l’investissement et les entreprises ? Plongeons au cœur des priorités.  Tel est le thème du coup d’envoi de la 39ème édition des Journées de l’entreprise, qui se tient en ce moment à Sousse. Elle s’y déroule du 11 au 13 décembre 2025.

Présent lors de la deuxième journée, Samir Abdelhafidh, le ministre de l’Economie et de la Planification, a fait savoir lors de son allocution que les dernières années ont démontré la capacité de l’économie nationale à résister, avec une amélioration progressive de la plupart des indicateurs.

Il rappelle que le taux de croissance a ainsi progressé pour atteindre 2.4 % sur les neuf premiers mois de l’année en cours. Parallèlement, le déficit de la balance commerciale a été maîtrisé. Tandis que le niveau des réserves en devises étrangères s’est maintenu à un niveau acceptable, équivalant à 105 jours d’importations au 11 décembre 2025.

À cela s’ajoute la poursuite de la tendance baissière de l’inflation, stabilisée autour de 4,9 % sur les deux derniers mois. Avec une progression de 28 % des investissements directs étrangers sur la même période. Ce qui augure d’un impact positif sur la notation souveraine et d’un bon engagement pour l’avenir.

Ainsi, il souligne que tous ces facteurs, combinés à la stabilité politique et sociale, ont eu un impact positif direct sur la notation souveraine de notre pays. « Aussi satisfaits que nous soyons de ces résultats encourageants, nous restons déterminés à faire mieux. Et ce, compte tenu de l’ampleur des défis d’un côté, et des immenses potentialités dont regorge la Tunisie, d’un autre côté », précise-t-il.

Et de poursuivre : « Ces atouts incluent particulièrement nos compétences humaines, la diversité de notre tissu économique, l’expérience du secteur privé. Ainsi que la volonté ferme du gouvernement de poursuivre les réformes et d’améliorer le climat des affaires, sous le suivi attentif du président de la République. »

En outre, il met en lumière le plan de développement en cours (2026-2030). Lequel représente une opportunité majeure de soutenir ces réformes, en visant une croissance plus soutenue, un développement inclusif et équitable, répondant aux aspirations des Tunisiennes et des Tunisiens, estime-t-il.

Partenariat public-privé : pilier de la prospérité nationale

Et d’ajouter : « La Tunisie considère l’entreprise économique privée comme un levier de la richesse nationale et un moteur de croissance. Elle s’engage à poursuivre les réformes pour améliorer le climat des affaires et lever les obstacles devant les investisseurs, qu’ils soient locaux ou étrangers. Cette conviction repose sur la nature complémentaire des relations entre le secteur public et le secteur privé, au service des intérêts nationaux et transformant les défis en opportunités. Il est essentiel de rappeler ici l’article 17 de la Constitution tunisienne, qui stipule que l’État garantit la coexistence entre les secteurs public et privé, et œuvre à leur intégration sur la base de la justice sociale. Nous appelons et encourageons, depuis cette tribune, le secteur privé à investir, convaincus que chaque investissement dans les entreprises est un investissement dans l’avenir. Il ouvre des perspectives à notre jeunesse, lui permettant de contribuer plus efficacement au développement de la patrie et à l’enrichissement de ses acquis. »

Innovation, recherche et transformation numérique

Samir Abdelhafidh souligne encore : « Dans un monde où l’innovation est le moteur principal de la croissance et un élément clé pour remporter les paris stratégiques, comme l’illustre l’attribution du Prix Nobel d’économie cette année à des travaux soulignant l’impact positif de l’innovation sur la croissance , il est aujourd’hui impératif de relier les entreprises aux centres de recherche, de formation professionnelle et universitaire. »

Alors, il conclut : « Ces partenariats doivent s’inscrire dans un cadre d’objectifs communs et complémentaires. C’est dans cette direction que s’inscrit l’action du gouvernement, à travers des programmes soutenant la croissance duale, renforçant les partenariats entre entreprises, centres de recherche et d’innovation, et encourageant les initiatives liant les startups aux entreprises industrielles et de services. Il est impératif que toutes les parties redoublent d’efforts pour que les entreprises tunisiennes deviennent des acteurs centraux de la transformation technologique et énergétique. »

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