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Au-delà des sommets, l’Afrique en quête d’un rôle au XXIe siècle

Trois ans après le précédent sommet entre l’Union européenne et l’Union africaine (organisé en février 2022 à Bruxelles), les dirigeants des États membres des deux organisations régionales se sont réunis en Angola (les 24 et 25 novembre), célébrant ainsi le 25ème anniversaire de leur partenariat.

Si les Européens se trouvent plongés dans un profond questionnement existentiel au regard du nouvel ordre mondial émergeant (dans lequel leur propre sécurité n’est plus garantie), le continent africain semble encore y chercher sa place. La reconfiguration des équilibres mondiaux questionne la place de l’Afrique dans la compétition internationale. 

La superficie de l’Afrique (plus de 30 millions de km², soit plus que la taille cumulée de la Chine, des Etats-Unis, de l’Inde et d’une partie de l’Europe) et son poids démographique (près de 1,5 milliard d’habitants, soit environ 20 % de la population mondiale) contrastent avec sa faible puissance politico-diplomatique et économique. Après une longue période coloniale, les indépendances nationales n’ont pas permis de rendre véritablement audible la voix des nouveaux Etats africains.

Sur le plan géopolitique, à défaut d’intégration continentale politique et économique, il est difficile de considérer l’Afrique comme une unité ou actrice globale, un « continent-puissance », des relations internationales parlant d’une seule voix. Les 54 Etats africains sont relativement marginaux sur la scène internationale (aucun n’est membre du Conseil de sécurité de l’ONU et seule l’Afrique du Sud fait partie du G20 et des BRICS) comme dans l’économie mondiale (même si certains d’entre eux occupent une position non négligeable dans des secteurs stratégiques comme les hydrocarbures : Algérie, Libye, Nigéria, etc.).

De même, les puissances africaines sont limitées dans leur influence régionale par de profondes faiblesses intérieures, qui exposent à l’influence de puissances non africaines.

Le continent est souvent considéré comme un simple objet du jeu de puissances, qui visent le contrôle de points géostratégiques et de ressources naturelles. Une politique de puissance qui se traduit par une répartition des zones d’influence étrangères sur le continent et par la multiplication des sommets du type Chine-Afrique, Turquie-Afrique ou Afrique-France.

Cela n’exclut cependant jamais une marge d’autonomie des acteurs politiques africains et une importante variété de leurs interactions avec ces puissances.

Sur le plan géoéconomique, l’Afrique est le continent le moins développé au monde et ne représente qu’environ 3 % du PIB mondial. Avec l’échec des projets de développement post-indépendance, l’Afrique compte trente-deux des quarante-six pays les moins avancés (PMA), tels que définis par les Nations unies. Et les données du développement y sont, quels que soient les indicateurs, les plus faibles du monde. La pauvreté est d’autant plus mal acceptée par les sociétés que celles-ci sont de plus en plus inégalitaires.

Un retard de développement socio-économique accru dans les pays d’Afrique subsaharienne et dont les causes sont liées : au poids de l’héritage colonial (avec des cadres étatiques et institutionnels relativement fragiles); à des défaillances de la gouvernance publique (avec en particulier le fléau de la corruption au sein de l’appareil politique et administratif); des infrastructures insuffisantes ou défaillantes; des situations politiques instables; des foyers de tensions et de conflits (intra-étatiques ou interétatiques) persistants ou récurrents (au Sahel, en Afrique centrale, dans la Corne de l’Afrique); des ressources naturelles (à l’origine d’industries extractives) exportées sans transformation et donc avec une faible plus-value; des richesses inégalement réparties et captées par une oligarchie (sur fond de corruption endémique); une transition démographique inachevée; l’impact du réchauffement climatique (alors que le continent contribue de façon marginale aux émissions de gaz à effet de serre), etc.

Les pays africains demeurent globalement, soixante ans après les indépendances, tributaires de l’exportation de matières premières brutes et sont très vulnérables aux variations de leurs prix.

Une réalité structurelle qui n’empêche pas les Etats africains de faire montre de leur volonté d’autonomie vis-à-vis des anciennes puissances coloniales et de rompre ainsi avec l’hégémonie occidentale.

Dès lors, face aux partenariats alternatifs (sur les plans militaires et économiques) qu’offrent la Chine et la Russie (mais aussi des puissances régionales comme la Turquie, l’Inde et le Brésil), la question est de savoir si le continent sera un simple terrain des rivalités entre les puissances ou s’il va s’affirmer comme un acteur majeur du monde multipolaire.

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Le Maire de New-York, Zohran Mamdani, et la figure du musulman d’Occident

L’élection de Zohran Mamdani à la tête de New-York a eu une onde de choc mondiale qui continue de produire ses effets. Face aux profonds clivages qui traversent une société américaine éclatée, son discours a su conjuguer et incarner multiculturalisme et progrès social. Son dynamisme a eu raison, le temps d’une élection, d’une oligarchie financière, médiatique et politique qui a fait bloc face à sa candidature. Un front animé par une islamophobie occidentale ciblant la figure d’un ennemi de l’intérieur et de l’extérieur.

 

Musulman et occidental

 

En Occident, la problématique de l’immigration et la montée d’un néonationalisme visent en particulier les nationaux de culture ou de confession musulmane, dont l’identité complexe contribue à un sentiment d’insécurité identitaire.

 

Pourtant, contrairement aux thèses culturalistes encore en vogue, il y a nulle incompatibilité entre le fait d’être musulman et l’adhésion au « modèle républicain » à la française ou à l’American way life ; des concepts structurels mais non figés.

 

Comme en Europe, l’islam est en effet devenu aux États-Unis une question de politique intérieure. La présence arabe et plus largement musulmane est perçue comme une menace sécuritaire et identitaire. Dans ce contexte, les citoyens « Arabes d’Occident » ou « Araboccidentaux » se trouvent piégés dans une sorte de chaîne de de soupçons : Arabes/musulmans, musulmans/islamistes, islamistes/terroristes. D’où vient une telle construction ?

 

La construction d’une représentation

 

Si la Bible mentionne l’existence des Arabes, qu’elle identifie comme les descendants d’Ismaël (premier fils du prophète Abraham), leur représentation se forge à partir de l’expansion de l’Empire islamique (jusque dans le sud de l’Europe), à travers les récits des conquêtes islamiques et des reconquêtes européennes (espagnole et française).

 

Renforcée par les chroniques des Croisades, la figure de l’Arabo-musulman domine au-delà des origines ethniques, entre Sarrasins et Maures par exemple ; dépeint sous les traits de l’ennemi envahisseur et de l’infidèle violent, il est néanmoins doté d’un esprit noble et animé par des valeurs chevaleresques qui faisaient encore défaut aux guerriers Francs.

 

Mieux, la figure du « transmetteur » s’impose dans l’Europe du Moyen-âge et de la Renaissance, lorsque celle-ci redécouvre la pensée grecque grâce aux traductions de l’arabe vers le latin des œuvres d’Aristote.

 

Les Arabes sont progressivement éclipsés par les Ottomans, dont la domination a signifié le monopole dans la représentation du monde musulman par les Européens (Ali Kazancigil). Le développement des relations diplomatiques entre le royaume de François Ier et la Sublime Porte de Suleyman Le Magnifique, au début du XVIe siècle, annonce l’ère de l’orientalisme scientifique et artistique.

 

Les Vénitiens forgent le concept de « despotisme oriental », despotisme absolu qui fait office de repoussoir pour les philosophes des Lumières (pour Montesquieu notamment).

 

Malgré sa richesse et son apport (y compris à la culture arabe), l’orientalisme esthétique est aussi à l’origine de la diffusion de stéréotypes sur un Orient fantasmé et décadent.

 

Le monde arabe moderne est encore prisonnier de ces images et archétypes construits au début du XIXe siècle, où l’Autre est relégué dans un exotisme anhistorique résumé à cette image : en son palais exotique orné d’or, le despote oriental est flanqué de son harem, de ses esclaves et de ses cavaliers enturbannés. Les Arabes n’apparaissant que « sous l’angle du voyage pittoresque ou d’un vague mysticisme teinté d’initiatique » (Jacques Berque).

 

La figure d’un ennemi

 

Des Croisades à la (dé)colonisation, la figure de la menace musulmane s’est cristallisée dans la représentation occidentale. Depuis la fin de la guerre froide, la montée de l’intégrisme islamique a coïncidé avec la recherche d’un nouvel ennemi stratégique et symbolique en Occident.

 

Partant, la critique de l’islam (isme) a pris la place du communisme.Une lecture culturaliste et essentialiste vient figer la représentation des musulmans dans l’image d’une masse archaïque, rétive à la modernité, à la fois soumise et incontrôlable (si ce n’est par la force). Cette perception a justifié le soutien des régimes occidentaux à des régimes arabes autoritaires, qui avaient le mérite de maintenir l’ordre et la stabilité…

 

Après les attentats du 11 septembre 2001 à New York, la figure de l’Arabo-musulman incarne définitivement cet ennemi symbolique de l’Occident. Cette perception est étayée par la thèse du « choc des civilisations », développée par le politologue américain Samuel Huntington, selon laquelle l’ordre du monde tient à un conflit de systèmes de valeurs dans lequel la civilisation islamique menace l’Occident.

 

Enfin, les soulèvements de peuples arabes en 2011 ont fait resurgir l’obsession islamiste. Preuve de la persistance des vieux réflexes, des notions superficielles ou fantasmagoriques ont (re)surgi pour mieux réduire les Arabes à un bloc monolithique écrasé par le poids de la religion musulmane.

 

L’élection du nouveau Maire de New-York, Zohran Mamdani, vient rappeler que l’identité musulmane n’est pas incompatible avec la réussite d’un parcours personnel dans une société occidentale. La question est de savoir si au-delà des destins individuels, il est encore possible de reconstruire la représentation collective des musulmans en Occident près des décennies, voire des siècles de discours avilissant et dénigrants.

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