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Forex et Tunisie : entre glissement du dollar, prudence européenne et respiration du dinar

Les marchés des devises s’ouvrent cette semaine dans un climat marqué par la retenue, une prudence élevée et une forte sensibilité aux signaux de politique monétaire. Le mouvement récent de la paire EUR/USD, revenue à proximité du seuil symbolique de 1,1500 après deux séances de recul, illustre un marché en transition, hésitant entre la fermeté prudente de la Banque centrale européenne et la possibilité d’un assouplissement plus rapide de la Réserve fédérale américaine.

Durant les échanges asiatiques, l’EUR/USD s’est stabilisé autour de 1,1510, prolongeant une dynamique négative mais dépourvue de panique. L’euro glisse légèrement, mais ne décroche pas : c’est la posture mesurée de la BCE qui en constitue le principal amortisseur. Les membres du Conseil des gouverneurs maintiennent un discours prudent, évoquant un statu quo prolongé des taux directeurs probablement jusqu’à fin 2026, à mesure que l’inflation converge progressivement vers l’objectif de 2 %. Les données d’activité de novembre, en léger retrait mais conformes aux attentes, confortent cette stratégie de stabilité monétaire.

Christine Lagarde a rappelé, dans ses dernières interventions, que la BCE ne relâchera pas sa vigilance : toute dérive, même marginale, de l’inflation pourrait entraîner une adaptation des taux. Gabriel Makhlouf, gouverneur irlandais et membre influent du Conseil, insiste pour sa part sur la pertinence du taux actuel, écartant tout ajustement tant qu’aucune rupture macroéconomique n’apparaît. Cette stratégie permet à l’euro d’éviter un décrochage plus marqué, dans un environnement international encore incertain.

 

Gabriel Makhlouf, gouverneur irlandais et membre influent du Conseil, insiste pour sa part sur la pertinence du taux actuel, écartant tout ajustement tant qu’aucune rupture macroéconomique n’apparaît.

 

Face à cette prudence européenne, le dollar américain poursuit un mouvement opposé. Le billet vert s’affaiblit, plombé par une révision soudaine des anticipations sur la politique de la Fed. Les marchés intègrent désormais une probabilité de 69 % d’une baisse des taux dès la réunion de décembre, contre 44 % il y a seulement une semaine, selon les données du CME FedWatch. Ce retournement d’humeur traduit la montée d’un optimisme prudent quant à la capacité de la Fed à accompagner le ralentissement de l’inflation américaine. L’effet immédiat est une perte d’altitude du dollar, offrant à l’euro une fenêtre d’appréciation malgré sa phase de consolidation.

La parité EUR/USD navigue ainsi dans une zone charnière où s’articulent stratégies monétaires, signaux économiques et seuils techniques. Le niveau de 1,1500 agit comme un pivot psychologique majeur. Les investisseurs évoluent dans une période où les politiques monétaires se redéfinissent, et où chaque donnée d’inflation, chaque mot prononcé par Lagarde ou Powell, peut redessiner la courbe du forex.

 

Le niveau de 1,1500 agit comme un pivot psychologique majeur. Les investisseurs évoluent dans une période où les politiques monétaires se redéfinissent, et où chaque donnée d’inflation, chaque mot prononcé par Lagarde ou Powell, peut redessiner la courbe du forex.

 

Tunisie : un dollar en reflux, une respiration pour un dinar sous tension permanente

La dérive tendancielle du dollar n’est pas un phénomène lointain pour la Tunisie. Bien au contraire : elle produit des effets directs et immédiats sur la trajectoire du dinar, sur les équilibres macroéconomiques et sur les coûts supportés par l’État comme par les entreprises.

Une part considérable des transactions extérieures tunisiennes – hydrocarbures, matières premières industrielles, produits alimentaires stratégiques, fret international, technologies – est libellée en dollar. Lorsque le billet vert s’affaiblit, l’effet est quasi mécanique : la facture énergétique diminue, le coût des importations essentielles se contracte et la pression sur l’inflation importée s’allège. Dans une économie où plus de la moitié de l’inflation découle du renchérissement des importations, cette dépréciation du dollar constitue une véritable bouffée d’oxygène.

 

Une part considérable des transactions extérieures tunisiennes – hydrocarbures, matières premières industrielles, produits alimentaires stratégiques, fret international, technologies – est libellée en dollar. Lorsque le billet vert s’affaiblit, l’effet est quasi mécanique : la facture énergétique diminue, le coût des importations essentielles se contracte et la pression sur l’inflation importée s’allège.

 

À cela s’ajoute la dynamique de l’euro. Une légère appréciation de la monnaie européenne face au dollar se traduit par une détente du taux EUR/TND. Pour la Tunisie, reliée commercialement, touristiquement et financièrement à l’Union européenne, cette évolution est favorable : elle améliore la valeur des recettes touristiques et des transferts des Tunisiens à l’étranger, souvent libellés en euro. Elle agit également comme un stabilisateur sur les importations provenant de la zone euro, premier fournisseur du pays.

Un répit conjoncturel, mais aucun changement structurel

Pour autant, il serait illusoire d’y voir une amélioration durable de la situation du dinar. Si l’affaiblissement du dollar procure un soulagement, il ne corrige en rien les déterminants fondamentaux de la fragilité monétaire tunisienne : déficit commercial structurel, dépendance énergétique, faiblesse chronique du taux d’épargne, besoins massifs de financement extérieur, inflation persistante et croissance insuffisante pour régénérer les réserves de change.

La Banque centrale de Tunisie (BCT), contrainte par un environnement interne dégradé, ne peut capitaliser pleinement sur la faiblesse du billet vert. Elle reste enfermée dans une stratégie de défense graduelle du dinar, sans marge de manœuvre pour assouplir la politique monétaire ou relancer le crédit. En conséquence, la détente du dollar constitue un facteur conjoncturel de stabilisation, non un levier de valorisation durable.

 

La Banque centrale de Tunisie (BCT), contrainte par un environnement interne dégradé, ne peut capitaliser pleinement sur la faiblesse du billet vert. Elle reste enfermée dans une stratégie de défense graduelle du dinar, sans marge de manœuvre pour assouplir la politique monétaire ou relancer le crédit.

 

Une fenêtre stratégique pour atténuer les vulnérabilités

L’environnement monétaire international actuel ouvre toutefois une fenêtre d’opportunité : réduire temporairement la pression sur les importations stratégiques, lisser le profil de remboursement de certaines dettes en devises et contenir la transmission inflationniste. À condition que ces marges de respiration soient exploitées pour renforcer la balance extérieure, améliorer la gestion des subventions énergétiques, relancer l’exportation et accélérer les réformes structurelles.

La Tunisie évolue dans un système où les variables externes – Fed, BCE, marchés des matières premières – influencent directement sa trajectoire macroéconomique. La dérive tendancielle du dollar en est un exemple. Reste maintenant à transformer cette respiration passagère en une dynamique plus durable, ce qui suppose une stratégie cohérente de réformes, d’intégration commerciale et de renforcement de la productivité. 

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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