Voici comment la BERD finance vos projets ?
Plus de 2,7 milliards d’euros injectés dans l’économie tunisienne depuis 2012, dont 240 millions d’euros en 2024. C’est le bilan dressé par Firas Moalla, Associate Banker au secteur privé de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), lors de la deuxième édition de « La Rencontre du Financement » organisée à Tunis, ce 21 octobre 2025. Sur ces 240 millions investis l’année dernière, environ 13 % ont été orientés vers le secteur privé, s’inscrivant dans une dynamique mondiale de 160 milliards d’euros mobilisés à travers 6000 projets dans 38 pays, de l’Europe centrale à l’Asie centrale, en passant par le bassin méditerranéen et l’Afrique subsaharienne.
L’intervenant est revenu sur un arsenal financier structuré autour de quatre mécanismes complémentaires, pensés pour répondre aux besoins de financement des entreprises tunisiennes, particulièrement dans leur transition énergétique. De l’assistance technique subventionnée aux garanties bancaires innovantes, en passant par les prêts directs et les investissements en capital, chaque instrument répond à une logique précise d’intervention.
Premier mécanisme : l’assistance technique subventionnée à hauteur de 70 %
Le premier pilier repose sur l’assistance technique subventionnée aux PME, un dispositif porté par l’équipe ASB (Advisory for Small Businesses). Ce mécanisme permet aux entreprises tunisiennes de bénéficier d’un accompagnement dont 70 % du montant est financé par la BERD. L’objectif consiste à aider les bénéficiaires à améliorer leurs processus de production, à atteindre des standards internationaux ou à obtenir des certifications de qualité. Cette assistance technique couvre également le financement d’audits énergétiques préalables à l’installation de systèmes photovoltaïques ou à la mise en œuvre de programmes d’efficacité énergétique. Créant ainsi les conditions d’investissements verts plus structurés.
Deuxième mécanisme : le financement par la dette, de 1 à 10 millions d’euros et plus
Le deuxième instrument repose sur le financement par la dette. La BERD propose des prêts directs, généralement à partir de dix millions d’euro. Mais elle a développé un mécanisme de garantie innovant pour élargir son champ d’intervention aux montants plus modestes, dès un million d’euros. Firas Moalla, qui dirige l’équipe AF en charge de ce dispositif, a expliqué que ce processus allégé permet de contourner les lourdeurs administratives habituelles de la banque. Contrairement aux prêts directs qui nécessitent le recours à des avocats à Londres et locaux, le mécanisme de garantie s’appuie sur le contrat standard d’une banque tunisienne partenaire, auquel sont ajoutées quelques clauses spécifiques à la BERD. La banque locale finance directement l’entreprise, tandis que la BERD garantit une partie du prêt. L’entreprise bénéficiaire devient ainsi cliente de la BERD, accédant à l’assistance technique et, dans certains cas, à des subventions complémentaires qui viennent bonifier le package financier.
L’intervenant a illustré cette approche intégrée par trois dossiers concrets sur lesquels il a personnellement travaillé depuis son arrivée à la BERD en janvier 2023. Une société de packaging a acquis un équipement dont il a été démontré, en collaboration avec les équipes techniques de la banque, qu’il offrait une meilleure productivité par rapport aux modèles comparables tout en consommant 15 % d’énergie en moins. Cette performance a permis de débloquer une subvention. Dans le secteur agroalimentaire, une entreprise réglementée spécialisée dans le pré-export a bénéficié d’un financement pour l’installation de panneaux photovoltaïques et d’un système adiabatique permettant la récupération d’eau, générant une économie de 90 % de la consommation hydrique. Ce projet a également mobilisé une subvention. Enfin, une troisième société vient d’obtenir un financement pour déployer une installation photovoltaïque d’une capacité de 5 mégawatts, assortie elle aussi d’une subvention.
Troisième mécanisme : les investissements directs en capital
Au-delà de ces mécanismes de dette et de garantie, la BERD intervient également par des investissements directs en capital dans les entreprises. L’institution est présente dans plusieurs fonds d’investissement tunisiens, aux côtés d’autres acteurs du capital-investissement. Le portefeuille tunisien comprend des participations dans des entreprises publiques telles que l’Office des céréales, la Compagnie des services du textile et d’autres structures du secteur de la défense. Dans le segment des PME, Firas Moalla a mis en avant la réussite de Landor, une entreprise que la BERD a accompagnée et qui a développé une unité industrielle au Maroc. Il a également mentionné des financements accordés par le passé à Telnet, illustrant la diversité sectorielle des interventions.
Quatrième mécanisme : le financement des institutions financières pour démultiplier l’impact
Le financement des institutions financières constitue un quatrième levier stratégique majeur. La BERD collabore avec les banques locales à travers les mécanismes de garantie et de partage de risque. Tout en ciblant particulièrement les institutions de microfinance et les sociétés de leasing. Cette approche permet de démultiplier l’impact des financements en s’appuyant sur les réseaux de distribution des partenaires locaux. Illustration concrète de cette stratégie, la semaine précédant l’événement, deux lignes de financement ont été signées avec deux banques. Ces lignes sont destinées à permettre aux clients de ces établissements d’accéder directement à des prêts pour leurs investissements verts. Elargissant ainsi la portée des financements verts au-delà des interventions directes de la BERD.
Six critères stratégiques guident chaque investissement
Il affirme que les fondements stratégiques qui orientent les choix d’investissement de la banque depuis l’ouverture de son bureau tunisien en 2012 sont six :
- la compétitivité, qui vise à favoriser des marchés encourageant la concurrence;
- la gouvernance d’entreprise pour soutenir des structures transparentes adoptant les meilleures pratiques;
- l’inclusion économique;
- la résilience;
- et la dimension environnementale. Cette dernière occupe une place centrale, la BERD accompagnant les entreprises dans leur transition énergétique par le déploiement de technologies vertes et l’amélioration de l’efficacité énergétique.
L’intervenant a clairement positionné l’institution en complément des banques locales, précisant qu’elle intervient pour financer des projets que ces dernières ne peuvent prendre en charge seules.
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