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France | Nicolas Sarkozy incarcéré à la prison de la Santé

Ce mardi 21 octobre 2025 restera dans les annales de la Ve République française. L’ancien président Nicolas Sarkozy a été incarcéré à la prison de la Santé, à Paris, près d’un mois après sa condamnation à cinq ans de prison ferme pour association de malfaiteurs dans le dossier du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007.

Djamal Guettala

L’ancien chef d’Etat a quitté son domicile à pied, main dans la main avec son épouse Carla Bruni. A l’appel de sa famille, une centaine de partisans se sont réunis devant sa demeure pour venir le soutenir. La foule l’a acclamé à sa sortie, scandant «Nicolas ! Nicolas !» ou «Libérez Nicolas !».

Une image inédite : celle d’un ex-chef d’État ouvrant lui-même la portière d’un véhicule officiel, direction la prison, où il est arrivé vers 10 heures locale, sous l’œil des caméras.

Un important dispositif de sécurité avait été mis en place et une cinquantaine de surveillants s’étaient réunis en début de matinée pour dénoncer la surpopulation carcérale.

Une demande de mise en liberté a été formulée par les avocats de l’ancien chef d’Etat dès son incarcération. La justice aura deux mois pour trancher, même si le délai devrait être plus court. «Quoi qu’il arrive», ce sera «trois semaines, un mois de détention», a estimé son avocat Christophe Ingrain

Le symbole de la prison de la Santé

Le 25 septembre, le tribunal correctionnel de Paris avait prononcé un jugement d’une sévérité rare : cinq ans ferme, dont trois assortis d’un mandat de dépôt provisoire. Sarkozy devient ainsi le premier président français de la Ve République à être incarcéré.

Il a été reconnu coupable d’avoir sciemment laissé ses collaborateurs rencontrer à Tripoli un dignitaire du régime de Mouammar Kadhafi pour discuter d’un financement occulte de sa campagne présidentielle de 2007. L’ancien chef de l’Etat a fait appel et se dit innocent.

Le choix de la prison de la Santé n’est pas anodin : c’est là que furent enfermés, jadis, les figures du grand banditisme, mais aussi des politiques condamnés pour corruption.

Sarkozy a été placé dans le quartier d’isolement, sous haute surveillance. Selon l’administration pénitentiaire, il bénéficiera de «conditions sécurisées adaptées à son statut», c’est-à-dire une cellule individuelle, des promenades séparées, et un régime de visites encadré.

Cette incarcération s’effectue malgré l’appel interjeté par ses avocats, puisque le tribunal a ordonné l’exécution immédiate de la peine.

Une onde de choc politique

Cette entrée en détention provoque un séisme dans la classe politique française. Les partisans de l’ancien président dénoncent un «acharnement judiciaire» et un «procès politique».

À l’inverse, une partie de l’opinion publique y voit la preuve que la justice peut atteindre les puissants, signe d’une démocratie capable de juger ses dirigeants.

Le contraste est saisissant entre l’homme qui fut le symbole du pouvoir fort et celui qui doit aujourd’hui répondre comme un citoyen ordinaire devant la loi.

L’affaire Sarkozy dépasse les frontières françaises. Dans les pays du Maghreb, notamment en Tunisie et en Algérie, où la relation franco-libyenne et le rôle de la France dans la chute de Kadhafi restent sensibles, cette incarcération réactive de nombreux débats.

Beaucoup y voient une «revanche posthume» de Kadhafi et le retour de la mémoire du «dossier libyen», marqué par les promesses financières et les complicités politiques entre Paris et Tripoli dans les années 2000.

Le cas Sarkozy rappelle aussi les affaires qui ont entaché d’autres dirigeants européens, de Silvio Berlusconi à Mariano Rajoy, témoignant d’un temps nouveau où la justice rattrape le pouvoir.

Un président déchu, une République éprouvée

L’image de Sarkozy entrant à la Santé restera celle d’une chute spectaculaire. Mais elle marque aussi un tournant : celui d’une justice française qui, après des décennies de prudence vis-à-vis des «grands», affirme désormais son indépendance.

Reste à savoir si cette page ouverte par la «détention Sarkozy» relèvera de la purge morale d’une démocratie ou du règlement de comptes d’un système qui se défend.

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‘‘Nos muses les murs’’ | Une anthologie de poètes francophones

‘‘Nos muses les murs’’ est le titre d’une anthologie d’écrits engagés et puissants de poètes francophones dirigée par Arwa Ben Dhia (Photo) et préfacée par Alexandra Cretté. Ce recueil, qui paraîtra à la fin de ce mois aux éditions Mindset, se veut une réponse aux aspirations de la poésie francophone moderne : internationaliste, engagée, tout en restant intime et contemplative.

Les poètes de ce bouquet singulier n’écrivent pas seulement des mots, mais peignent aussi les murs du monde avec leurs vers, offrant une restitution poétique de la complexité humaine.

« La présente anthologie est (…) le troisième ouvrage collectif publié sous l’égide d’Apulivre [association qui promeut la lecture et le livre, Ndlr], s’inscrivant dans le cadre du lancement de la revue Térence Lettres, dans lequel des poètes de tous horizons ont pu s’exprimer sur des murs inspirants», écrit Arwa Ben Dhia.

«Les murs sont-ils les pages publiques de nos âmes ? En ce siècle d’écrans et ces décennies de plates machines quadrangulaires, doubles permanents de nos paumes, ce livre propose des chemins de mots — relations nécessaires entre nos espaces. Intérieurs. Extérieurs. Intimes. Politiques», ajoute Alexandra Cretté, directrice de la revue Oyapock en Guyane française, dans la préface.

Le recueil présente des écrits de 40 poètes d’Afrique, d’Europe, d’Amérique et d’Asie, dont six de Tunisie : Monia Boulila, Kaïs Ben Farhat, Nasser Kefi, Myriam Soufi, Emna Louzyr et Arwa Ben Dhia.

Chaque auteur(e) tisse un canevas où les mots résonnent avec les murs, brisant les enclos et peignant les pierres avec les couleurs de la liberté.

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La catastrophe de Gabès marque la fin d’un modèle économique

Le désastre écologique et sanitaire de Gabès et de nombreux autres sites industriels dégradés par de mauvais choix d’activités polluantes et non créatrices d’emplois suffisamment rémunérateurs car nécessitant une main d’œuvre inférieure à ce qu’offre le pays, ont fait de nombreuses zones industrielles tunisiennes des cimetières d’entreprises ou carrément pour les citoyens en raison d’un environnement sérieusement dégradé ou carrément morbide. Ce désastre est aussi le signe de la fin d’un modèle économique qui a montré ses limites et ses nocivités.

Elyes Kasri *

Lorsqu’on parle de la nécessité de changement de modèle économique en Tunisie, ce n’est pas en termes éthiques pour chasser les incompétents, véreux et corrompus présumés coupables de déviance et d’abus de situation et de pouvoir, mais plutôt pour se débarrasser du régime hybride et oxymorique social-libéral de la deuxième moitié du siècle dernier qui présentait la Tunisie comme un site d’activités économiques et d’investissement extérieur «low skills-low wages» soit à compétences basses et salaires bas.

D’où la prolifération des mécanismes étatiques de compensation directe et indirecte avec une bureaucratie disproportionnée et les tentacules du syndicalisme infiltrées partout y compris dans les institutions de souveraineté avec tous les errements et abus constatés au cours de la décennie noire.

Erosion de la compétitivité et marginalisation internationale

Au cours des années 80 du siècle dernier, l’état social-libéral a commencé à montrer de sérieux signes d’anachronisme et l’économie était à bout de souffle à la faveur de l’émergence de l’Asie en tant que site de production low cost en même temps que l’augmentation des attentes sociales et salariales de la main d’œuvre tunisienne qui avait commencé à voir ses rangs renforcés par des compétences issues de l’éducation bourguibienne qui refusaient le paradigme low skills-low wages.

Ben Ali a cru répondre au besoin de changement et de passage de l’économie et de l’administration à un stade supérieur de désengagement de l’Etat et de libération de l’initiative mais a fini par avoir peur du changement qui risquait à ses yeux de l’entraîner avec lui et n’a pas résisté à la tentation de la manipulation et de népotisme suscitée par les programmes de désengagement de l’Etat et de privatisation du secteur public.

Le détournement de l’Europe, principal partenaire économique et investisseur étranger en Tunisie, vers l’Europe de l’est à la suite de la chute du mur de Berlin et les errements de la diplomatie tunisienne qui n’a pas su négocier avec suffisamment de tact et de vision ce virage géostratégique, ont accéléré le processus d’érosion de la compétitivité et de marginalisation internationale de la Tunisie.

L’engouement international suscité par la pseudo «révolution de la liberté et de la dignité» ou plus romantiquement «la révolution du jasmin» n’a été qu’un bref intermède éphémère et sans effet palpable car la réalité bureaucratique et socio-économique était restée figée malgré les nombreux slogans de «start up economy» ou «invest in democracy» pour révéler un environnement des affaires en dégradation continue et même, à certains égards, accélérée.

Le désastre écologique et sanitaire de Gabès et de nombreux autres sites industriels dégradés par de mauvais choix d’activités polluantes et non créatrices d’emplois suffisamment rémunérateurs car nécessitant une main d’œuvre inférieure à ce qu’offre la Tunisie (l’exode de dizaines de milliers d’ingénieurs n’en est qu’un symptôme), ont fait de nombreuses zones industrielles tunisiennes des cimetières d’entreprises ou carrément pour les citoyens tunisiens en raison d’un environnement sérieusement dégradé ou carrément morbide.

Inertie et résistance au changement

Le paradoxe de la Tunisie, c’est une volonté de changement brouillée et contrecarrée par la mainmise de l’administration et de quelques familles sur l’économie profitant du statu quo et représentant un formidable facteur d’inertie et de résistance au changement.

La classe politique n’a malheureusement pas été au rendez-vous car motivée par les attributs du pouvoir et non par un changement rationnel, durable et inclusif.

Comment faire sauter ce verrou et instaurer le changement vers une économie innovante et vibrante avec des coûts socio-économiques tolérables pour instaurer une dynamique d’innovation, d’entrepreneuriat et d’équité sociale durable et inclusive ?

Telle sera la question à laquelle devra répondre tout candidat à la direction du pays et non pas un quelconque tour de passe-passe idéologique ou sentimental pour nous entraîner vers l’inconnu ou nous faire revenir à un passé qui a montré ses limites et son anachronisme.

Malheureusement, l’offre politique de tout bord ne semble pas répondre depuis un quart de siècle, de manière suffisamment rationnelle et convaincante, à cette exigence fondamentale et existentielle, dans une Tunisie considérée comme l’ombre d’elle-même et des fois, peut être avec un brin d’exagération, comme une embarcation en perdition à la merci des courants et des vents, surtout ceux en provenance de l’ouest dont l’histoire regorge de souvenirs douloureux : de l’antiquité avec la destruction de Carthage à la vague rampante de la colonisation française, et plus récemment, les réseaux de contrebande et de terrorisme rejoints par les vagues de migrants en provenance d’Afrique subsaharienne.

* Ancien ambassadeur.

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Peuple pur contre élite corrompue | Du démon au complot 

Dans un jardin, chaque plante a ses besoins en eau. Le jasmin réclame de l’attention, l’olivier résiste à la sécheresse, le cactus vit là où la rose se flétrit. Si le jardinier oublie cela, certaines plantes se fanent et d’autres pourrissent. La société, c’est la même chose : élites et peuple n’ont pas les mêmes attentes, mais leur destin est lié. Quand l’équilibre se perd, c’est tout le jardin qui s’abîme. 

Manel Albouchi *

Aujourd’hui, cet équilibre est menacé. Les élites parlent un langage compliqué, réservé à elles-mêmes. Le peuple, lui, se réfugie dans des slogans courts et rassurants. Entre les deux, le fossé s’élargit et la démocratie se fragilise. 

Bourguiba avait compris cette tension. Formé dans les grandes écoles en France, il aurait pu rester enfermé dans un langage d’élite. Mais il avait le talent rare de traduire les grandes idées en images simples. Il parlait du pain, de l’école, de la femme, de la santé. Il expliquait longuement, comme un instituteur patient. 

Il ne cherchait pas à séduire par des promesses faciles, mais à instruire pour que chacun comprenne. C’est ce qui a marqué son époque : il fut à la fois un père qui explique et un maître qui enseigne. Bien sûr, cette pédagogie avait aussi ses limites : le peuple restait souvent en position d’élève, sans vraie possibilité de répondre. 

Le raccourci des slogans 

Aujourd’hui, la logique est inversée. Le populisme ne cherche plus à élever, mais à séduire. Il ne donne pas des explications, il lance des slogans. Il flatte la colère, la peur, l’indignation. 

Comme le montre le politologue Christophe Jaffrelot, le populisme oppose toujours un «peuple pur» à des «élites corrompues», en utilisant un langage simple, émotionnel, direct. Mais il va plus loin : il mobilise la peur et la colère, moralise l’adversaire et personnalise à l’extrême le pouvoir via l’héroïsation du leader et sa relation «directe» au peuple. 

Là où Bourguiba essayait de rendre le peuple adulte par la pédagogie, le populisme tend à le maintenir dans l’illusion. 

Du démon au complot  

Il y a pourtant une continuité psychologique. Autrefois, quand une personne faisait une crise d’angoisse ou entendait des voix, on disait qu’elle était possédée par des djinns ou des démons. C’était une manière d’expliquer ce que l’on ne comprenait pas. 

Freud, dans ‘‘Totem et Tabou’’ (1913), expliquait déjà que les sociétés anciennes donnaient un visage invisible à ce qui leur faisait peur. Elles projetaient leurs angoisses sur des forces surnaturelles, pour transformer l’incompréhensible en récit. 

Aujourd’hui, la même structure existe encore. Quand une décision politique paraît injuste ou une crise difficile à comprendre, beaucoup se tournent vers la théorie du complot. Ce ne sont plus les djinns qui manipulent, mais des «puissances cachées»

Les chercheurs en psychologie (Karen M. Douglas, Alexandra Cichocka et Robbie M. Sutton2017) montrent que ces croyances ne sont pas anodines : elles répondent à trois besoins fondamentaux  

  • comprendre ce qui échappe; 
  • reprendre un sentiment de contrôle, et; 
  • se sentir appartenir à un groupe qui «sait»

Mais cette explication ne résout rien : elle rassure un instant, tout en alimentant la méfiance et la division. 

La Tunisie miroir vivant de ces mécanismes 

Ces recherches ne sont pas seulement théoriques. Elles se vérifient chaque jour sur le terrain tunisien. 

Quand la population, face à la crise économique ou politique, cherche des explications simples et rassurantes, elle illustre exactement ce que décrivent Douglas et ses collègues : le besoin de sens, de contrôle et d’appartenance. Les rumeurs de complot circulent dans les cafés, sur les réseaux sociaux, comme autrefois les récits de djinns et de malédictions. 

De la même manière, les émotions politiques analysées par Jaffrelot (peur, colère, héroïsation du leader, relation «directe» et accolades avec le peuple) se lisent à ciel ouvert dans les discours quotidiens. 

La Tunisie est ainsi un laboratoire à vif de la psychologie politique contemporaine : un pays où se dévoilent sans fard les mécanismes universels de la peur collective, du besoin de figures protectrices et du risque de manipulation. 

Comment retrouver l’équilibre ? 

La liberté se perd quand les élites méprisent et que le peuple s’enflamme. C’est entre le mépris d’en haut et la colère d’en bas que naît le despotisme. 

La Tunisie a besoin aujourd’hui d’une nouvelle médiation vivante : 

  • des élites qui expliquent clairement sans jargon ni mépris; 
  • un peuple qui refuse les illusions faciles et accepte l’effort de compréhension. 

Sans cette médiation, le jardin se dérègle. Certaines plantes meurent de soif, d’autres se noient. Et dans ce déséquilibre, ce sont toujours les mauvaises herbes qui prospèrent. 

* Psychothérapeute, psychanalyste.

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Le pays de braise de Tahar Bekri

Exilé volontaire et éternel voyageur, Tahar Bekri ne s’est jamais lassé d’évoquer le pays natal qu’il porte désormais en lui, pays intérieur paré d’une beauté accentuée par la douleur de la séparation et l’éloignement des souvenirs. Après nous avoir gratifié du ‘‘Livre des souvenirs’’ (Elyzad, Tunis, 2014), sorte de Carnets de voyage où il évoque des souvenirs de retour au pays natal, le voici mettant ses mémoires en poèmes : représentation du pays dominée par une grammaire onirique où les souvenirs surgissent à travers des tableaux dont l’ordre d’apparition dit l’éclatement de la vision. (Photo: Anne Savale).

Ahmed Mahfoudh *

Et ce n’est pas des moindres de constater que les mémoires mis en poèmes, est un genre qui privilégie l’épaisseur du sujet sur l’intérêt de l’objet. De ce point de vue, le pays est une vision intérieure tapie au fond de son cœur, qui lui permet d’affronter l’exil, le froid et la solitude. Tout est donc vécu en termes de souvenirs brûlants, flots de mémoire qui l’envahissent au caprice des jours sans liens avec le temps objectif, mais au gré de cette mémoire affective, sorte de noyau aimanté qui capte les souvenirs tournoyants autour de lui : «Je te porte pays/ Haute vague dans les flots des mémoires/ Des rivages miens/ Les voiles résistant aux tempêtes/ Je n’oublie pas…»

La geste mémorielle

Ainsi, le poète se met en scène en train de se souvenir, il devient lui-même objet de la quête et montre comment la geste mémorielle l’a transformé, l’amenant à accepter son destin et à se réconcilier avec la vie. Tel est le sens de cet hommage au dernier poème de Robert Desnos, à travers l’image d’un Sisyphe heureux : «Parfois je pensais à Robert Desnos/ Et à son dernier poème/Cette crainte installée dans le vers/Sisyphe je repoussais l’éclipse/ Pour voir ton soleil…»

On retrouve également dans ce poème à Desnos la signification de la métaphore de la braise et la brûlure qui constitue le titre : le souvenir du pays natal est une flamme qu’il faut entretenir si on veut survivre, même si paradoxalement la brûlure en est si vive qu’on risque d’y laisser la vie. Tel est le sens de la métaphore du papillon : «Je te disais la brûlure du papillon/ La lampe gardeuse de la flamme/ La vie tenant à quelques rayons.»

Une autre spécificité des mémoires écrits en poème est l’ordre dans lequel apparaissent les souvenirs. Nous avons d’abord, une structure ordonnée et cohérente à travers 55 poèmes. En ouverture, le poète rend hommage au pays, à travers la figure de répétition de «Je te porte pays» à laquelle répond en écho : «Tu me portais pays» comme si l’hymne au pays natal constituait une dette de reconnaissance.

Puis le poète évoque de manière linéaire trois périodes de sa vie au pays natal : l’enfance entre Sfax et Gabès (poèmes 5 à 15) ; la période estudiantine à Tunis (poèmes 16 à 29) et enfin l’exil entrecoupé de retrouvailles avec le pays (poèmes 30 à 53). En finale, deux poèmes (54 et 55) pour exprimer sa réconciliation avec la vie malgré les nombreuses ruptures et la douleur de l’exil : «Il y a des êtres/comme des rayon de soleil/Nécessaires à la vie/ Ouvre le jour/ Pour leur dire/ Le monde est une merveille.»

C’est une structure très équilibrée, close et à progression linéaire. Tahar Bekri après avoir évoqué les souvenirs du pays natal, exprime son émerveillement d’être, non seulement en vie, mais réconcilié avec la lumière malgré les péripéties douloureuses de sa vie faite de séparations et d’exil. A l’origine de sa résilience, l’activité poétique comme mode de survie et «le poème comme seul compagnon», p. 29.

Et pourtant l’ordre n’est que de surface, de temps en temps surgissent des souvenirs sauvages qui n’obéissent pas à l’ordre chronologique, tel le souvenir douloureux de la mort de la mère et de la séparation avec la maison natale, un exil intérieur avant l’exil proprement dit.

La métaphore du train

C’est que le poète est fils de cheminot, avec tous les aléas que comporte ce métier, ayant trainé son enfance de ville en ville, au gré des affectations professionnelles de son père. Le train lui-même devient métaphore d’une vision subie, non maitrisée, un défilement arbitraire des paysages que le voyageur appréhende le front contre la vitre («ces veilleurs de chagrin», Eluard) : «Il me souvient des trains cahoteux/ Châteaux sur les rails de fortune/ Lourdes roues klaxons et vitesse de tortue/ Et moi collé à la vitre reconnaissais tes paysages un à un/Je scrutais tes oliveraies à l’infini/ Leur disais mes départs difficiles…»

L’exil des poètes n’est jamais forcé («ghorba»). Il est converti en choix poétique et humaniste. Car Tahar Bekri a profité de son séjour français pour être au centre de la poésie francophone et mondiale. L’une des fonctions magiques de la poésie consiste à transformer les drames de vie en autant d’expériences enrichissantes et de réconcilier l’homme avec son destin. De ce fait, l’exil devient volontaire («taghrib») quête de symbiose et le poète se sent en paix avec lui-même, aussi bien dans sa patrie natale que dans celle qui l’a accueilli.

* Ecrivain et universitaire.

Tahar Bekri, ‘‘Mon pays, la braise et la brûlure’’, Paris, Asmodée Edern (poétiques), 2025.

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Pollution industrielle à Gabès | Le gouvernement annonce des travaux d’urgence

Il a fallu attendre plus de trois semaines de protestations quotidiennes de la population contre la pollution industrielle à Gabès pour qu’on apprenne enfin, ce lundi 20 octobre 2025, que cette crise est due au… non-parachèvement de six projets programmés dans ce gouvernorat et qui visent à maîtriser les rejets de gaz et améliorer la situation environnementale dans cette région qui s’énorgueillit d’abriter l’unique oasis maritime au monde. C’est bon à savoir, mais pourquoi avoir attendu si longtemps pour l’annoncer ?

Latif Belhedi

C’est le ministre de l’Equipement, Salah Zouari qui a fait cette déclaration aujourd’hui lors d’une séance à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) consacrée à la crise larvée à Gabès, à laquelle prenait part aussi le ministre de la Santé Mustapha Ferjani.

La crise, rappelons-le, a été déclenchée le 27 septembre par l’asphyxie de plusieurs élèves suite à des émissions de gaz toxiques des unités du Groupe chimique tunisien (GCT). On peut donc estimer que cette annonce gouvernementale est venue avec un retard que rien ne peut justifier.

Le ministre Zouari, qui a n’a pas cru devoir expliquer pourquoi l’exécution de ces 6 projets a-t-elle été retardée, s’est contenté de préciser que leur coût global s’élève à 200 millions de dinars, que les études et financements y afférents sont disponibles, tout en annonçant le démarrage immédiat des travaux pour leur finalisation, ajoutant qu’ils sont à divers états d’avancement.  

Outre les interventions immédiates prévues, il existe des projets complémentaires qui seront mis en œuvre au cours d’une seconde phase. Leur financement, estimé à 180 millions de dinars, est actuellement en cours de négociation avec la Banque africaine de développement (BAD), a aussi annoncé M. Zouari, le but étant d’«améliorer la situation environnementale dans la région et de garantir un environnement sain pour tous», selon ses termes.

Des mesures d’urgence exceptionnelles seront prises afin de relancer les travaux et c’est ce qui a fait l’objet de discussions lors de la réunion, samedi dernier, entre le ministre de l’Equipement et l’ambassadeur de Chine à Tunis, Li Wang.  Une équipe d’experts chinois se rendra d’ailleurs demain à cet effet aux usines du GCT à Gabès

Concernant les rejets de phosphogypse directement dans la mer Méditerranée, Salah Zouari a souligné la nécessité de mettre fin à cette pratique sans fixer une date ou un délai pour cela, se contentant de parler d’une aire de stockage de ces rejets pour leur revalorisation et leur réutilisation dans les travaux de bâtiment.

«Si ces projets programmés avaient été achevés dans les délais initialement impartis, on aurait pu en programmer d’autres pour l’amélioration de la situation environnementale et la réhabilitation totale des unités industrielles au profit du développement agricole et économique du pays», a conclu le ministre, sans préciser les causes exactes qui sont derrière le retard mis dans l’achèvement des projets en cours. Sont-elles bureaucratiques, financières ou autres ?

Il reste dépendant à espérer que ces annonces convaincront les habitants de Gabès, qui continuent de protester pour exiger la fermeture pure et simple des unités du GCT, et les rassureront sur les véritables intentions du gouvernement qui est resté, jusque-là, insensible à leurs souffrances et les a longtemps abandonnés à leur sort.

Cela dit, il reste une question que les habitants de Gabès, et pas seulement eux, se posent : pourquoi ces annonces ont-elles été faites à Tunis et non à Gabès ? Et pourquoi, à ce jour, aucun haut responsable de l’Etat n’a cru devoir aller à la rencontre des Gabésiens ?

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Stratégie | Les terres rares dans la course sino-américaine

La ruée mondiale vers les terres rares et autres minéraux critiques s’accélère, et le cabinet de conseil financier deVere Group estime qu’elle constituera l’un des thèmes d’investissement déterminants de 2026, alors que les États-Unis et la Chine intensifient leur lutte pour le contrôle des matières premières qui alimentent l’économie moderne.

Nigel Green, directeur général de deVere Group, déclare : «Les terres rares sont passées de la périphérie du marché des matières premières au cœur de la stratégie mondiale. La bataille pour leur sécurisation façonnera les décisions commerciales, technologiques et d’investissement pour les années à venir.»

Les minéraux, essentiels aux véhicules électriques, aux smartphones et aux systèmes d’armement avancés, ont longtemps été dominés par la Chine, qui contrôle actuellement environ 70 % de l’exploitation minière et près de 90 % des capacités de traitement, ce qui expose fortement les fabricants mondiaux aux décisions politiques de l’Empire du Milieu.

Une «guerre» larvée sino-américaine

Cette domination est aujourd’hui remise en question par l’administration Trump, qui a fait des terres rares une priorité nationale, investissant massivement dans la production aux Etats-Unis et dans les pays alliés.

Les Etats-Unis ont pris des participations dans des sociétés minières nord-américaines, proposé un prix plancher soutenu par le gouvernement pour stabiliser l’offre et élaboré des plans pour la constitution d’une réserve minérale stratégique. Les procédures d’autorisation sont accélérées et les règles environnementales ont été assouplies pour accélérer la construction de mines dans le cadre de la politique dite «mine, baby, mine».

La Chine contrôle actuellement environ 70 % de l’exploitation minière et près de 90 % des capacités de traitement.

«L’intervention de Washington marque le début d’un nouveau cycle industriel», estime Nigel Green. Il ajoute : «Les États-Unis veulent reprendre le contrôle de leurs chaînes d’approvisionnement et réduire leur vulnérabilité face à Pékin. Il ne s’agit pas seulement d’une mise en scène politique; il s’agit de la plus grande initiative coordonnée en faveur de la sécurité des ressources depuis une génération.»

Dans le même temps, la Chine a resserré son emprise. Pékin a imposé de nouveaux contrôles à l’exportation, obligeant les entreprises à obtenir une autorisation avant d’expédier des aimants contenant des traces de terres rares d’origine chinoise. Elle a également ajouté cinq éléments supplémentaires, à savoir l’holmium, l’erbium, le thulium, l’europium et l’ytterbium, à sa liste restreinte.

«La Chine démontre que le contrôle de l’offre implique le contrôle des marchés», déclare le PDG de deVere, estimant que «les États-Unis et leurs alliés sont désormais contraints de construire des chaînes d’approvisionnement alternatives, ce qui entraîne une vague d’investissements sans précédent en Australie, en Amérique du Nord et dans certaines régions d’Afrique». D’autant plus que, comme il l’explique, «les marchés financiers suivent la géopolitique.»

Changement de paradigme générationnel

«Les implications en matière d’investissement sont considérables. Il s’agit d’une transformation sur plusieurs années, et non d’un scénario à court terme. Les infrastructures et les capacités de raffinage ne se construisent pas du jour au lendemain. Les investisseurs qui se positionnent tôt bénéficieront des flux de capitaux soutenus vers les ressources stratégiques», expliquent encore les analystes de deVere, en prévoyant une volatilité persistante du secteur, des interventions des gouvernements et des annonces politiques influençant les prix.

«Ces marchés ne fluctueront pas uniquement en fonction des bénéfices. Ils fluctueront en fonction des politiques. Chaque restriction à l’exportation, chaque participation gouvernementale, chaque partenariat stratégique aura un impact sur le marché. Cette volatilité peut créer des opportunités pour les investisseurs disciplinés», analyse Nigel Green. Et de poursuivre : «La diversification de la chaîne d’approvisionnement, de l’extraction minière au raffinage en passant par les technologies de recyclage, sera essentielle. Il s’agit de sécuriser les systèmes qui assurent la continuité des économies. Les investisseurs qui en seront conscients seront les gagnants à long terme.»

Conclusion de l’expert économique et financier : «Les terres rares sont au carrefour de la politique industrielle, des énergies propres et de la sécurité nationale. La compétition pour leur contrôle sera déterminante en 2026. L’ampleur des investissements déjà en cours montre la rapidité avec laquelle le monde s’adapte à une nouvelle réalité économique. Il s’agit d’un changement de paradigme générationnel dans la création de valeur.»

Latif Belhedi (avec communiqué.)

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Kia teste un passeport numérique pour les cellules de ses batteries

Kia Europe mène le premier essai public d’un passeport numérique de batterie au niveau cellulaire, dans le cadre de recherches préliminaires. Cette avancée assure une transparence accrue sur la condition des batteries de véhicules électriques (VE) en fournissant des données de santé détaillées et en temps réel pour chaque cellule.

Un passeport de batterie permet le suivi en direct de l’état de santé (State of Health – SoH), des diagnostics de réparation en temps réel et une traçabilité sur l’ensemble du cycle de vie de la batterie.

Pour les clients, cela se traduit par une durée de vie prolongée des batteries, une maintenance plus abordable et une confiance renforcée lors de l’achat ou de la revente de VE d’occasion.

«Kia entend établir un nouveau standard pour ses clients en matière de transparence et de performance des batteries», déclare Marc Hedrich, président et Ceo de Kia Europe.

«En testant des passeports de batterie au niveau cellulaire, nous identifions les bénéfices concrets à offrir à nos clients. Au-delà d’une durée de vie prolongée des batteries, nous construisons aussi une relation de confiance», ajoute-t-il.

Parallèlement à ces recherches, Kia a créé une organisation interne dédiée, réunissant des experts de l’entreprise afin de développer son propre service de passeport de batterie en collaboration avec des partenaires de la chaîne de valeur des batteries et des réseaux associés.

Le passeport de batterie Kia ira au-delà des exigences réglementaires en intégrant des données supplémentaires liées à la sécurité, établissant un standard exemplaire pour l’industrie. Kia prévoit de proposer ce service sur l’ensemble des modèles électriques (VE) et hybrides (HEV) vendus en Europe d’ici à février 2027, conformément au règlement européen sur les batteries.

Expérimentation sur un véritable modèle Kia

Dans le cadre de cet essai, un Kia EV3 équipé d’un système de surveillance des cellules de batterie Dukosi a été acheminé jusqu’en Europe depuis la Corée du Sud. Arrivé en Allemagne en février dernier, ce véhicule d’essai est capable de contrôler et transmettre en temps réel les données propres à chaque cellule du pack de batterie et de les télécharger dans son passeport numérique.

Une fois les données téléchargées, les utilisateurs, les techniciens et les contrôleurs entre autres, pourront accéder en temps réel aux informations relatives à l’état de santé de la batterie via le système d’infodivertissement du véhicule.

Afin de garantir la précision et la traçabilité des données tout au long du cycle de vie de la batterie, le système effectuera une mise à jour automatique après chaque réparation. Pour accéder aux données du passeport de batterie collectées lors de l’essai, la TNO a développé un environnement pilote de partage de données spécialement prévu à cet effet.

La Delft University of Technology, en partenariat avec Hyundai Motor Group, a coordonné ce test de passeport collaboratif. Cette solution pourrait également être configurée pour d’autres applications, notamment pour être expérimentée sur un autre modèle de véhicule ou pour tester son interopérabilité avec une marque différente, voire à des fins d’utilisation dans un autre secteur d’activité.

Evaluer la maturité du passeport de batterie

Cette expérimentation sur le passeport de batterie est fondée sur une initiative de recherche collaborative de portée européenne visant à gérer et à appréhender les défis et opportunités liés à la mise en œuvre du passeport de batterie européen dans un contexte concret impliquant des partenaires multiples.

Pour garantir la sécurité de transfert des données entre les systèmes du véhicule et les partenaires concernés, l’intégration technique du passeport de batterie a été gérée par le distributeur mondial de pièces automobiles Hyundai Mobis et Hyundai Motor Group.

Un essai, mené en collaboration avec le projet Datapipe financé par l’Union européenne (UE), et l’ARN (l’organisation néerlandaise des producteurs responsables spécialisée dans le traitement en fin de vie des véhicules et de leurs batteries), a permis d’étudier la manière dont les passeports numériques pourraient s’avérer bénéfiques à l’avenir. Pour l’heure, le passeport de batterie européen comprend plus d’une centaine d’attributs de données.

Plus intelligent, plus abordable et plus propre

Contrairement aux systèmes de surveillance classiques qui mesurent uniquement l’état de santé du pack ou du module de batterie dans son ensemble, la nouvelle solution de Kia recueille et affiche les données pour chacune des cellules. Cette collecte de données approfondie offre divers avantages aux clients. Grâce aux informations en temps réel sur l’état de santé de la batterie, les clients peuvent identifier et résoudre les problèmes d’entretien à un stade précoce. Il en résultera un allongement de la durée de vie de la batterie et une réduction des coûts à long terme.

Cette surveillance plus précise de la batterie permet également de cibler les cellules à réparer. Il est ainsi possible de changer les cellules individuellement au lieu de remplacer les modules dans leur totalité, d’où un gain de temps et d’argent. Grâce aux données en temps réel sur l’état de la batterie, les propriétaires de VE d’occasion ont davantage confiance dans les performances de leur véhicule, ce qui contribue à accroître sa valeur de revente.

Ce niveau de transparence permet de prendre des décisions éclairées sur la réutilisation et le recyclage des batteries. Ainsi, les batteries des VE peuvent rester plus longtemps sur le marché, favorisant ainsi une réduction des déchets.

L’essai de Kia établit une nouvelle référence quant à la manière dont les constructeurs automobiles peuvent concilier conformité et valeur ajoutée pour leurs clients. Grâce à une parfaite transparence de l’état de santé des cellules, au diagnostic en temps réel et à une approche directe du partage de données, l’entreprise ouvre la voie à un écosystème des VE plus durable.

Communiqué.

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“Sérénité & Matière” | Aïda Bergaoui expose ses céramiques à Tunis

L’artiste Aïda Bergaoui invite les amateurs d’art à son exposition de céramique “Sérénité & Matière”, qui se tiendra du 24 octobre au 9 novembre 2025, à l’Hôtel Downtown Tunis (13 rue de Médine 1002, Tunis) : une immersion dans un univers à la fois vibrant et apaisant.

Réalisées dans son atelier L’Art Zen, les pièces murales et décoratives de Aïda Bergaoui participent d’une approche intuitive de la céramique. Chaque création témoigne d’une recherche d’équilibre, d’harmonie et de silence intérieur, où les formes, les textures et les couleurs deviennent le reflet d’un dialogue poétique entre l’artiste et la matière.

Pour appréhender et apprécier les œuvres de cette céramiste passionnée, qui explore depuis quelques années la dimension spirituelle et contemplative du geste artisanal, le public est invité à ralentir le regard et à ressentir la présence apaisante de la matière.

L. B.

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Le Pr Riadh Gouider élu vice-président de la WFN

Le Professeur Riadh Gouider, éminent neurologue tunisien, devient le premier neurologue exerçant en Afrique et dans le monde arabe à accéder au poste de Premier vice-président de la World Federation of Neurology (WFN).  

Le chef du Service de neurologie et du Centre de la sclérose en plaques et d’Alzheimer à l’Hôpital universitaire Razi a été élu à ce poste lors du dernier Congrès mondial de neurologie, tenu à Séoul du 12 au 15 octobre 2025, face à un candidat australien.

Le Professeur Gouider s’est distingué par son engagement constant en faveur du développement de la recherche, de la formation et de la coopération internationale, dans le domaine des neurosciences.

Il préside, également, le réseau tunisien des associations de neurologie et de neurosciences et est membre élu de l’Académie française de médecine, ce qui témoigne de sa reconnaissance au plus haut niveau scientifique.

 I. B.

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Trump ordonne à la CIA de mener des opérations secrètes au Venezuela

Après avoir encerclé le Venezuela le mois dernier par la marine américaine, Donald Trump a ordonné à la CIA d’y mener des opérations secrètes, révèle le New York Times. Trump accuse le président Nicolás Maduro d’avoir libéré de prison un dangereux gang et de l’avoir envoyé aux États-Unis. Il accuse même celui qui est qualifié de «narcoterroriste» par l’administration américaine d’être à la tête de ce gang. Maduro dénonce de faux prétextes pour faire tomber son régime. Dans tous les cas, l’opération de la CIA réveille de très mauvais souvenirs d’une époque où les États-Unis soufflaient le chaud et le froid sur l’Amérique latine qu’elle considérait comme son arrière-cour. 

Imed Bahri

Le New York Times cite des responsables américains affirmant que l’administration Trump avait autorisé la CIA à mener des opérations secrètes au Venezuela. Il s’agit d’une escalade dans la campagne de Washington contre le président Maduro, ajoutent ces responsables qui ont requis l’anonymat.

Ces nouveaux pouvoirs confèrent à la CIA la capacité de mener des «opérations meurtrières» au Venezuela, ainsi qu’une série d’activités dans les Caraïbes, soit unilatéralement, soit en coordination avec des opérations militaires plus vastes.

On ignore si l’agence de renseignement prévoit des opérations spécifiques ou si ces pouvoirs constituent une mesure de précaution. Cependant, ils interviennent dans un contexte de pression croissante menée par Washington contre le gouvernement Maduro.

Les documents de renseignement récélés par le journal indiquent que ces pouvoirs, connus sous le nom de «rapport présidentiel classifié», ont été signés après que Trump a ordonné la suspension des négociations diplomatiques avec le gouvernement Maduro, suite aux accusations croissantes des États-Unis concernant son implication dans le trafic de drogue et ses liens avec un groupe criminel connu sous le nom de «Train d’Aragua», allégations qui ont été remises en question par des évaluations du renseignement interne.

Si les opérations militaires américaines sont généralement rendues publiques, celles de la CIA restent secrètes, ce qui soulève des questions quant au contrôle parlementaire limité de ces décisions.

Des navires de guerre dans les Caraïbes

La semaine dernière, le Venezuela a demandé une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’Onu pour discuter de «l’escalade de l’agression» des États-Unis qui ont déployé des navires de guerre dans les Caraïbes.

Dans une lettre adressée aux Nations Unies, le Venezuela a décrit la situation comme «une dangereuse escalade de l’agression américaine et un déploiement militaire sans précédent des États-Unis dans les Caraïbes». Le gouvernement du président Maduro n’excluant pas une attaque armée américaine contre le Venezuela à très court terme.

Cette demande vénézuélienne intervient au lendemain du vote des membres du Congrès contre une loi qui aurait restreint la capacité du président américain à recourir à la force militaire létale contre les narcotrafiquants.

Il y a plus d’un mois, Washington a déployé huit navires de guerre et un sous-marin nucléaire dans le sud de la mer des Caraïbes, au large des côtes vénézuéliennes, dans le cadre d’une mission présentée comme visant à lutter contre le trafic de drogue.

À ce jour, l’administration Trump a lancé plusieurs frappes militaires contre des bateaux soupçonnés d’être utilisés dans ce trafic , tuant au moins 21 personnes.

Le président Maduro a dénoncé une «agression armée» accusant Washington d’utiliser le trafic de drogue comme prétexte pour «imposer un changement de régime» et s’emparer des richesses d’un pays possédant l’une des plus grandes réserves de pétrole au monde.

Le NYT précise que la CIA est habilitée depuis longtemps à collaborer avec les gouvernements d’Amérique latine sur les questions de sécurité et de partage de renseignements. Cela lui a permis de collaborer avec les autorités mexicaines pour cibler les cartels de la drogue. Cependant, ces autorisations ne lui permettent pas de mener des opérations létales directes.

Evincer Maduro du pouvoir

La stratégie de l’administration Trump concernant le Venezuela, élaborée par le secrétaire d’État Marco Rubio avec l’aide de John Ratcliffe, directeur de la CIA, vise à évincer Maduro du pouvoir.

M. Ratcliffe a peu parlé des activités de son agence au Venezuela. Il a toutefois promis que, sous sa direction, la CIA deviendrait plus agressive. Lors de son audition pout confirmer sa nomination, il a déclaré qu’il rendrait la CIA moins réticente au risque et plus disposée à mener des actions secrètes sur ordre du président et à aller là où personne d’autre ne peut aller et faire des choses que personne d’autre ne peut faire. 

La CIA a refusé de commenter cette autorisation de mener des opérations secrètes au Venezuela, cependant mercredi 15 octobre et après les révélations du NYT, M. Trump a déclaré avoir donné cette autorisation car le Venezuela avait vidé ses prisons pour envoyer les délinquants aux États-Unis, rapporte le NYT.

Le président semblait faire référence aux allégations de son administration selon lesquelles des membres du gang de la prison Tren de Aragua avaient été envoyés aux États-Unis pour commettre des crimes. En mars, M. Trump a proclamé que le gang, fondé dans une prison vénézuélienne, était une organisation terroriste menant une «guerre irrégulière» contre les États-Unis sous les ordres du gouvernement Maduro.

Une évaluation des services de renseignement réalisée en février a contredit cette affirmation, expliquant pourquoi les agences d’espionnage ne pensaient pas que le gang était sous le contrôle du gouvernement Maduro, bien que le FBI ait partiellement exprimé son désaccord. Un haut responsable de l’administration Trump a insisté pour que l’évaluation soit révisée. L’évaluation initiale a été confirmée par le Conseil national du renseignement. Par la suite, le directeur par intérim du Conseil, Michael Collins, a été démis de ses fonctions.

Les États-Unis ont offert 50 millions de dollars pour toute information menant à l’arrestation et à la condamnation de M. Maduro pour trafic de drogue.

M. Rubio, qui est également conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, a qualifié M. Maduro d’illégitime et l’administration Trump le qualifie de «narcoterroriste».

M. Maduro a empêché le gouvernement démocratiquement élu l’année dernière de prendre le pouvoir. Cependant, les accusations de l’administration Trump selon lesquelles il aurait profité du trafic de drogue et que son pays serait un important producteur de drogue pour les États-Unis ont été débattues.

Bien que l’administration Trump ait publiquement avancé des justifications juridiques peu convaincants pour sa campagne, M. Trump a déclaré au Congrès qu’il avait décidé que les États-Unis étaient en conflit armé avec des cartels de la drogue qu’ils considèrent comme des organisations terroristes. Dans une note au Congrès publiée à la fin du mois dernier, l’administration Trump a déclaré que les cartels de la drogue étaient des «groupes armés non étatiques dont les actions constituent une attaque armée contre les États-Unis».

La CIA intensifie ses efforts de lutte contre les stupéfiants depuis des années. Gina Haspel, deuxième directrice de la CIA sous M. Trump lors de sa première administration, a consacré davantage de ressources à la traque de drogue au Mexique et en Amérique latine. Sous William J. Burns, directeur de la CIA sous Biden, l’agence a commencé à faire voler des drones au-dessus du Mexique, à la recherche de laboratoires de fentanyl, opérations que M. Ratcliffe a ensuite étendues.

Actions secrètes de la CIA en Amérique latine

L’autorisation d’opérations secrètes de Trump pourrait paraître comme une évolution naturelle de ces efforts antidrogue mais l’histoire des actions secrètes de la CIA en Amérique latine et dans les Caraïbes est, pour le moins, mitigée.

En 1954, l’agence a orchestré un coup d’État qui a renversé le président Jacobo Árbenz du Guatemala, inaugurant des décennies d’instabilité. L’invasion de Cuba par la Baie des Cochons, soutenue par la CIA, en 1961, s’est soldée par un désastre et l’agence a tenté à plusieurs reprises d’assassiner Fidel Castro. La même année, la CIA a fourni des armes aux dissidents qui ont assassiné Rafael Leónidas Trujillo Molina, le dirigeant autoritaire de la République dominicaine.

L’agence a également été impliquée dans le coup d’État de 1964 au Brésil, la mort de Che Guevara et d’autres machinations en Bolivie, le coup d’État de 1973 au Chili et la lutte des Contras contre le gouvernement sandiniste de gauche du Nicaragua dans les années 1980.

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Pollution industrielle à Gabès | Des manifestants poursuivis en justice   

Depuis le 14 octobre 2025, 89 personnes ayant participé aux mouvements de protestation contre la pollution industrielle à Gabès ont été déférés devant le ministère public, dont 20 mineurs, a indiqué le président de la section de Gabès de l’Ordre des avocats de Gabès Mounir Adouni.

Dans une déclaration à l’agence de presse officielle Tap, dans la soirée du dimanche 19 octobre, Me Adouni a ajouté qu’un autre groupe de prévenus arrêtés et maintenus en garde à vue vont être déférés ce lundi 20 octobre devant le ministère public auprès du tribunal de première instance de Gabès.

Quinze des 89 prévenus ont comparu devant la chambre correctionnelle pour «participation à un rassemblement ayant perturbé l’ordre public». Des mandats de dépôt ont été émis contre 5 d’entre eux alors que 5 autres sont en attente de comparution devant le juge d’instruction et 3 devant le Pôle judiciaire antiterroriste

Malgré les promesses des autorités d’apporter des solutions urgentes au problème de la pollution industrielle qui nuit à la santé des habitants de Gabès, et notamment des riverains des unités du Groupe chimique tunisien (souffrant de problèmes respiratoires, de cancers et autres atteintes), le mouvement de protestation pacifique encadré par la société civile locale ne faiblit pas. Et pour cause, la confiance a été perdue entre les habitants de Gabès, longtemps trompés et bercés de fausses promesses, et les autorités publiques, qui ne semblent pas prêtes à fermer les unités industrielles incriminées comme le demandent les protestataires depuis 2016, dates des premières actions publiques contre la pollution industrielle dans la région.

I. B.

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‘‘Ses Yeux’’, un classique du roman iranien enfin traduit en français

Publié en 1952, ‘‘Ses Yeux’’ de Bozorg Alavi est un jalon majeur de la littérature moderne iranienne. Pourtant, ce roman emblématique n’avait jamais été traduit en français jusqu’à aujourd’hui. Grâce à la traduction de Hoda Vakili, le public francophone découvre enfin une œuvre qui mêle intimité et politique avec une justesse rare.

Djamal Guettala

À travers le prisme de l’amour, de la mémoire et de la résistance culturelle, Alavi peint dans ce roman une époque tourmentée de l’histoire iranienne. Figure essentielle du courant réaliste iranien, il a su capter avec une lucidité exceptionnelle les fractures sociales et politiques de son temps. ‘‘Ses Yeux’’ s’inscrit dans cette démarche, mais se distingue en plaçant une femme au centre du récit. Dans une société où son regard était souvent ignoré, ce choix confère au roman une modernité et une humanité singulières.

L’amour, la mémoire et la résistance

L’intrigue suit Maḳân, peintre engagé et intellectuel critique du régime autoritaire de Reza Shah. Exilé pour ses convictions, il incarne la figure de l’artiste pris entre création et survie. Mais le fil narratif principal se concentre sur Fereshteh, la femme qui a aimé Maḳân en secret. À travers ses souvenirs, ses désirs et ses blessures, elle offre une vision intime d’un Iran en mutation, déchiré entre tradition et modernité, oppression et soif de liberté.

La voix de Fereshteh donne au roman toute sa profondeur. Elle raconte un amour impossible, mais aussi la répression qui étouffe la parole et la pensée. Chaque silence imposé devient témoignage de la peur et de la résilience. Chaque souvenir, un pont entre la douleur personnelle et la mémoire collective. Chez Alavi, l’intime devient politique, et la passion amoureuse se transforme en acte de résistance.

Le roman séduit aussi par sa langue. Fluide, sensible, picturale, elle traduit la double nature d’Alavi, écrivain et peintre. Les rues d’Ispahan et de Téhéran, les intérieurs feutrés, les ateliers, les visages et les gestes sont décrits avec la précision d’un pinceau. L’art y apparaît comme un refuge et un moyen de résistance face à la répression politique.

Dans ‘‘Ses Yeux’’, l’histoire individuelle rejoint celle d’un peuple. Fereshteh devient la métaphore de la condition des femmes et des intellectuels iraniens sous Reza Shah. Ce tissage entre intime et collectif donne au roman une force universelle, où la beauté du sentiment côtoie la douleur de l’exil intérieur.

Hoda Vakili, la passeuse entre deux mondes

Derrière cette traduction se tient Hoda Vakili, née à Ispahan en 1981. Son enfance marquée par la guerre l’a menée très tôt vers la lecture et l’imaginaire. Les classiques français — Hugo, Zola, Balzac, Camus, Sartre — ont façonné sa sensibilité. Après des études en peinture et une expérience dans la rédaction artistique, elle s’est tournée vers la traduction, convaincue que la littérature peut abolir les frontières.

Pour elle, traduire ‘‘Ses Yeux’’ n’a pas été un simple exercice linguistique : c’était rendre l’âme d’un peuple, transmettre ses émotions et ses nuances. Grâce à sa double culture et à son regard d’artiste, Vakili a su préserver la dimension picturale du roman tout en restituant sa tension politique et émotionnelle.

La traduction a exigé deux années de travail acharné. Entre fidélité au texte et fluidité du français, chaque phrase a demandé un soin particulier. Le projet a failli s’interrompre à plusieurs reprises, faute de moyens. Mais Hoda Vakili a trouvé un éditeur à Vancouver, Kidsocado, qui a cru en l’importance de cette œuvre et a permis sa publication.

Grâce à cette édition canadienne, le lecteur francophone peut désormais pénétrer l’atmosphère, les émotions et les tensions de l’Iran des années 1930-1940. ‘‘Ses Yeux’’ est aujourd’hui édité chez Kidsocado (Canada) et disponible sur les plateformes Amazon et Fnac, ouvrant ainsi la voie à une nouvelle reconnaissance internationale de Bozorg Alavi.

Une œuvre à portée universelle

Lire ‘‘Ses Yeux’’, c’est entrer dans un monde où l’amour, la mémoire et la résistance sont indissociables. C’est découvrir comment un regard — celui d’une femme — peut révéler tout un pan de l’histoire d’un pays. Fereshteh n’est pas seulement une amante blessée : elle est le miroir d’une société en quête de justice et de reconnaissance.

Aujourd’hui, grâce à la traduction de Hoda Vakili, Ses Yeux rejoint les grands classiques mondiaux. Ce roman rappelle que la littérature, au-delà des frontières, demeure un espace de dialogue et d’émotion. Entre art et politique, douleur et beauté, il offre une vision rare de l’Iran et une invitation à réfléchir à la puissance de la mémoire.

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Santé | Une Tunisienne sur cinq souffre d’ostéoporose

En Tunisie, une femme sur cinq souffre d’ostéoporose, une maladie silencieuse qui fragilise les os, a indiqué Dr Héla Sahli, la cheffe du service rhumatologie et d’orthopédie de l’hôpital universitaire La Rabta, à Tunis.

Dr Sahli a fait cette annonce lors d’une journée de sensibilisation consacrée au dépistage de l’ostéoporose chez les femmes âgées de 60 ans et plus, organisée samedi 18 octobre 2025, en marge de la Journée mondiale de l’ostéoporose, célébrée chaque année le 20 octobre, ajoutant que cette pathologie est assez répandue en Tunisie, touchant davantage les femmes que les hommes et qu’elle ne présente aucun symptôme apparent.

De nombreuses personnes découvrent leur maladie seulement après une fracture, souvent provoquée par une simple torsion qui, chez un individu en bonne santé, ne causerait aucune complication, a-t-elle expliqué. Et de recommander d’effectuer régulièrement un examen de densitométrie osseuse, accompagné d’analyses de laboratoire, notamment chez les personnes âgées de 60 ans et plus ou celles à risque accru. Un dépistage précoce permet, en effet, de mieux prendre en charge la maladie et d’entamer un traitement adapté.

Selon Dr Sahli, les femmes ménopausées sont particulièrement exposées à l’ostéoporose, tout comme les personnes atteintes de maladies neurologiques, articulaires ou intestinales, ou encore celles sous traitement prolongé à base de corticoïdes.

La praticienne a mis en garde contre la négligence du dépistage précoce, rappelant que l’ostéoporose peut provoquer des fractures graves, notamment au niveau du bassin.

Selon des études internationales, 25% des femmes âgées ayant subi une fracture du bassin liée à l’ostéoporose décèdent dans les six mois suivant l’accident, en raison des complications liées à l’alitement prolongé.

Dr Sahli a, également, souligné l’importance d’adopter une hygiène de vie favorable à la santé osseuse, en privilégiant une alimentation riche en calcium et en vitamine D, éventuellement complétée par des suppléments nutritionnels, ainsi qu’en pratiquant une activité physique régulière, à raison d’au moins 150 minutes par semaine.

Elle a enfin insisté sur la bonne observance du traitement médical, précisant qu’une prise incorrecte ou irrégulière des médicaments peut réduire leur efficacité et entraîner des complications graves.

Lors de la journée organisée à La Rabta, les patients présents ont pu bénéficier gratuitement de tests de densité osseuse, d’un accompagnement médical personnalisé et de séances d’information sur les moyens de préserver la santé des os.

D’après Tap.  

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Pollution industrielle à Gabès | Les Chinois appelés à la rescousse

La confiance des autorités tunisiennes dans les capacités de la Chine à trouver des solutions à certains de leurs problèmes est assez remarquable. Ainsi, donc, à chaque fois qu’un projet coince ou piétine, elles appellent les Chinois à la rescousse en espérant qu’ils trouveront la solution et qu’ils allieront la méthode adéquate à la rapidité d’exécution.

Après le projet de restauration (ou de reconstruction) du stade d’El-Menzah, d’ailleurs toujours en chantier, et celui de la Cité médicale des Aghlabides à Kairouan, pas encore sortie des cartons, que l’on a confiés aux Chinois, voilà que le projet de réhabilitation des unités de production du Groupe chimique tunisien (GCT) à Gabès leur est, lui aussi, confié, à la demande du président de la république Kaïs Saïed. Enfin, pas encore, mais le ministre de l’Équipement et de l’Habitat, Slah Zouari, en a touché un mot à l’ambassadeur chinois à Tunis, Wan Li, lors de leur rencontre samedi 18 octobre 2025, à Tunis.

Pays industriel par excellence, considérée comme l’usine du monde, la Chine doit sans doute avoir une certaine expérience dans le domaine de la lutte contre la pollution industrielle. Expérience qu’elle pourrait mettre à profit pour mettre fin aux émissions de gaz et de liquides toxiques par les unités du GCT à Gabès dont se plaignent les riverains depuis au moins deux décennies.

Ces émissions, rappelons-le, causent de graves problèmes de santé aux habitants de Gabès (détresse respiratoire, tumeurs cancéreuses…). D’ailleurs, ces derniers protestent quotidiennement, depuis le 27 septembre, pour exiger le démantèlement de l’usine d’engrais chimiques du GCT.

Le ministère de l’Equipement n’a pas donné plus de précisions dans le communiqué qu’il a publié hier à ce sujet, mais on peut considérer qu’il s’agit d’un premier contact et que des experts chinois pourraient être dépêchés rapidement au chevet du GCT, car la crise environnementale à Gabès est critique et des solutions doivent lui être apportées en urgence.

Il restera, bien sûr, à espérer que le coût de l’opération de rénovation des équipements de l’usine et de réhabilitation de son environnement sera à la portée des finances publiques tunisiennes, lesquelles, on le sait, n’offrent pas une grande marge de manœuvre.

Latif Belhedi

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Nabeul | Le Festival de la Harissa célèbre l’art culinaire tunisien

La 11e édition du Festival de la Harissa, sauce piquante traditionnelle à base de piments rouges, d’ail et d’huile d’olive, inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco depuis 2022, se tient du 17 au 19 octobre 2025 à Nabeul.

Organisé par l’Association pour la sauvegarde de la ville de Nabeul, avec le soutien du projet Pampat de l’UE, d’Unico Tunisie et de l’ambassade de Suisse à Tunis, cet événement célèbre ce condiment emblématique de la presqu’île du Cap Bon et vise à promouvoir le patrimoine culinaire tunisien autour de la harissa, en mettant l’accent sur les méthodes de préparation traditionnelles.

Le programme, comprenant des expositions- ventes, des démonstrations culinaires, des conférences, des ateliers, des spectacles divers et des concours destinés aux meilleurs chefs et producteurs locaux, propose également des créations inspirées du piment, ingrédient clé de la harissa, par des artisans céramistes de Nabeul, lauréats du concours Artiterroir, mettant en lumière les liens entre l’artisanat local et l’identité culinaire de la région.

Cet événement s’inscrit dans la stratégie nationale de promotion des produits du terroir menée par le ministère de l’Agriculture, en collaboration avec l’Agence de promotion des investissements agricoles (Apia). Il se veut ainsi une vitrine vivante du savoir-faire artisanal de la Tunisie et une célébration culturelle et gastronomique de l’un des symboles les plus forts de son identité culinaire.

L. B.

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Bâtir la cité intérieure | Pour un urbanisme du lien social

Il devient urgent de réinterroger les choix urbanistiques de la Tunisie pour qu’ils reflètent une vision humaine de la ville — non pas une juxtaposition d’appartements, mais une communauté vivante. Car l’architecture peut fabriquer du lien social, comme elle peut aussi le détruire. (Ph. Médina de Tunis : créer du lien social).

Zouhaïr Ben Amor *

Nos villes sont les miroirs silencieux de nos âmes collectives. Elles révèlent notre rapport à l’autre, au temps, à la nature. Ce que nous appelons «urbanisme» n’est pas qu’un exercice d’ingénierie : c’est une mise en forme de notre société, une écriture invisible qui traduit nos valeurs.

La Tunisie, comme beaucoup de nations en mutation rapide, a vu son paysage urbain se transformer en quelques décennies : des médinas humaines et poreuses, nous sommes passés à des banlieues standardisées, où l’anonymat est devenu la règle. Derrière les murs des immeubles collectifs, chacun vit replié sur soi, tandis que les rues, autrefois lieux de sociabilité, se réduisent à de simples couloirs de transit.

Pourtant, l’habitat peut être un ferment de fraternité. La disposition des maisons, la présence d’une cour, d’un banc ou d’un arbre peut inviter à la rencontre. Mal pensée, l’architecture isole ; bien pensée, elle relie. Il devient donc urgent de réinterroger nos choix urbanistiques pour qu’ils reflètent une vision humaine de la ville — non pas une juxtaposition d’appartements, mais une communauté vivante.

L’urbanisme : science de l’espace, science du vivre ensemble

L’urbanisme ne se limite pas à dessiner des rues et des bâtiments. Il organise la cohabitation des individus et modèle leurs comportements. Henri Lefebvre, dans ‘‘Le Droit à la ville’’ (1968), insistait sur le fait que l’espace urbain n’est jamais neutre : il est le produit d’un rapport social. L’urbaniste ne trace pas seulement des plans, il définit les conditions de la vie collective.

Jane Jacobs, dans ‘‘The Death and Life of Great American Cities’’ (1961), a montré que la vitalité d’un quartier dépend de la présence d’espaces mixtes et d’activités diverses. Les rues animées, disait-elle, sont les plus sûres parce qu’elles sont «surveillées» naturellement par les habitants : «Eyes on the street». À l’inverse, les grands ensembles isolés, fruits d’une vision technocratique de la ville, ont engendré la désocialisation.

Le Corbusier, dans ‘‘La Charte d’Athènes’’ (1943), rêvait de villes fonctionnelles et géométriques, séparant rigoureusement les zones d’habitation, de travail et de loisirs. Ce modèle, séduisant sur le papier, a souvent produit dans la réalité des espaces sans âme.

Les théoriciens contemporains comme Françoise Choay (‘‘L’Urbanisme, utopies et réalités’’, 1965) ou Richard Sennett (‘‘Building and Dwelling: Ethics for the City’’, 2018) rappellent que l’urbanisme doit redevenir une éthique du vivre-ensemble. La ville est d’abord un organisme social, et son architecture doit refléter cette vocation.

La Tunisie urbaine : du village au bloc de béton

Jusqu’aux années 1960, les villes tunisiennes étaient des mosaïques humaines. Les médinas, avec leurs ruelles étroites, favorisaient la rencontre et la solidarité. Les maisons s’ouvraient sur des patios intérieurs, véritables cœurs battants où s’exprimait l’équilibre entre intimité et convivialité.

Mais la modernisation postindépendance a bouleversé cet équilibre. Sous l’effet de la croissance démographique et des politiques de logement de masse, on a vu surgir des cités entières à la périphérie des grandes villes : blocs d’immeubles identiques, sans âme, ni verdure, ni cœur communautaire. Ce fut la victoire du modèle «fonctionnel» sur l’humain.

Ces «cités sociales» étaient pensées pour loger, non pour relier. L’urbaniste tunisien Ali Ben Salem notait déjà dans les années 1980 que «la cité devient un refuge sans horizon, où l’habitant perd jusqu’à la mémoire du voisinage». Les équipements collectifs promis ne voient souvent pas le jour ; les espaces publics se dégradent ; les habitants vivent dans un anonymat que rien ne vient compenser.

Et pourtant, dans les villages tunisiens — Testour, Mahdia ou Houmt Souk — la convivialité demeure une seconde nature. Les gens s’y saluent, s’assoient sur le pas de la porte, partagent un café. La structure même du bâti, à échelle humaine, rend cette interaction possible. Elle enseigne une vérité simple : l’architecture peut fabriquer du lien social, mais elle peut aussi le détruire.

Quand l’architecture façonne la psychologie sociale

L’espace habité agit sur la psychologie de l’individu. Les chercheurs en psychologie environnementale, comme David Canter ou Roger Barker, ont démontré que la configuration spatiale influence la manière dont les gens se comportent, communiquent et perçoivent autrui.

Un espace lumineux et végétalisé incite à la détente ; une rue ombragée encourage la promenade ; un hall froid et vide provoque la fuite. L’absence de lieux de transition entre le public et le privé — cour, jardin, perron — engendre des existences confinées.

Les anciens habitats tunisiens avaient compris cette nécessité. Le patio, la terrasse, le banc à l’entrée de la maison jouaient le rôle d’espaces médiateurs. Ils permettaient de voir sans être vu, d’échanger sans être exposé. En supprimant ces zones intermédiaires, l’architecture moderne a créé des «non-lieux», pour reprendre le terme de Marc Augé (‘‘Non-Lieux, introduction à une anthropologie de la surmodernité’’, 1992).

Ces espaces neutres — parkings, ascenseurs, halls impersonnels — ne favorisent ni la rencontre ni l’attachement. Or, la qualité d’une société se mesure aussi à sa capacité à offrir des lieux de gratuité : des endroits où l’on n’achète rien, où l’on se croise simplement, où la parole circule.

La psychologie collective tunisienne souffre aujourd’hui d’une architecture qui segmente. Nos villes produisent plus d’isolement que de voisinage. Le «vivre ensemble» ne se décrète pas : il se construit, pierre après pierre, autour d’espaces qui encouragent la rencontre.

Construire autrement : vers un urbanisme relationnel

Face à la crise du lien social urbain, de nombreuses villes à travers le monde ont entrepris de repenser la manière de bâtir. On parle désormais d’urbanisme relationnel, où la priorité n’est plus la densité mais la qualité de la relation humaine.

À Medellín (Colombie), les autorités ont transformé les quartiers pauvres en y implantant bibliothèques publiques, jardins suspendus, écoles d’art et téléphériques reliant les collines au centre. Le sociologue Javier Echeverri parle de «reconstruction du tissu moral par la beauté». La criminalité a baissé, la fierté citoyenne a renaît.

À Copenhague, la conception urbaine repose sur la «ville des piétons». Selon l’architecte Jan Gehl (‘‘Cities for People’’, 2010), marcher, s’asseoir, observer, sont des actes fondateurs de la démocratie urbaine. Plus une ville encourage ces gestes simples, plus elle est humaine.

À Barcelone, le modèle des superilles (superblocs) a redonné aux habitants la maîtrise de leurs rues. La circulation automobile y est restreinte, les places publiques redeviennent des espaces de jeux et de dialogue.

Ces exemples montrent que la réussite d’une politique urbaine ne se mesure pas seulement au nombre de logements construits, mais à la qualité du lien social qu’elle engendre. Une cité vivante est un organisme où la mixité sociale, la verdure, la beauté et la convivialité se conjuguent.

Repenser les constructions sociales en Tunisie

La Tunisie connaît aujourd’hui une relance des programmes de logements sociaux. Mais trop souvent, ils reproduisent les erreurs du passé : uniformité, isolement, absence d’espaces partagés. Or, le logement n’est pas une fin en soi : c’est un cadre de vie qui influence l’éducation, la sécurité et même la démocratie locale.

Chaque projet devrait commencer par une étude sociologique :

– Qui va y habiter ?

– Quels liens sociaux existent déjà ?

– Quels usages culturels faut-il préserver ?

    Un urbanisme socialement intelligent doit intégrer plusieurs éléments essentiels :

    – des espaces communs ouverts et végétalisés;

    – des commerces de proximité et des services intégrés;

    – des écoles, ateliers, cafés culturels et bibliothèques au cœur du quartier ;

    – des formes architecturales diversifiées, favorisant la mixité générationnelle et sociale ;

    – et surtout, la participation des habitants à la conception du projet.

    Les architectes tunisiens, nombreux et talentueux, devraient être associés à cette refondation. Des initiatives locales émergent déjà : à Sousse, le projet «Darna» tente d’introduire des cours collectives ; à Tunis, certains collectifs d’architectes proposent des «micro-espaces partagés» dans les zones densifiées. Ces tentatives montrent la voie : la cité doit redevenir un lieu de citoyenneté.

    Le philosophe Paul Ricoeur rappelait dans ‘‘L’idéologie et l’utopie’’ (1986) que l’espace bâti «donne forme à nos relations sociales». En ce sens, l’État tunisien, les municipalités et les promoteurs portent une responsabilité morale : construire, c’est aussi éduquer.

    Les nouvelles constructions sociales ne doivent pas être de simples logements de secours, mais des écoles de coexistence. En y intégrant des jardins communautaires, des ateliers pour enfants, des espaces de rencontre, on y sème la graine de la citoyenneté.

    Bâtir la cité intérieure

    Une société se lit dans ses murs. Une ville qui enferme ses habitants produit des citoyens méfiants ; une ville ouverte, verte et équilibrée engendre la confiance.

    La Tunisie a un héritage architectural exceptionnel : nos médinas, nos villages, nos patios témoignent d’un art du lieu où beauté et mesure cohabitaient. Nous n’avons pas besoin de revenir au passé, mais d’en extraire la leçon : l’harmonie entre l’individuel et le collectif.

    Bâtir des maisons, ce n’est pas seulement couler du béton, c’est façonner des comportements. Si nos murs sont trop hauts, nous perdrons la voix de nos voisins. Si nos places sont trop grandes et vides, nous perdrons la chaleur des rencontres.

    Il faut redonner à l’urbanisme sa dimension éthique. Comme l’écrivait Richard Sennett, «habiter, c’est apprendre à composer avec les autres dans la proximité» (‘‘The Conscience of the Eye’’, 1990).

    La Tunisie du futur ne se jugera pas seulement à ses lois ou à ses technologies, mais à la qualité de ses quartiers. Une cité où l’on se salue, où l’on s’assoit sous un arbre, où les enfants jouent ensemble, sera toujours plus forte qu’une cité où l’on se barricade.

    Construire pour vivre ensemble, c’est bâtir la cité intérieure — celle où l’humain précède le béton, où chaque maison devient un signe d’ouverture. Si nos urbanistes savent entendre cette leçon, alors nos villes redeviendront des espaces de paix et d’hospitalité.

    Références bibliographiques :

    Lefebvre, Henri. Le Droit à la ville. Paris : Anthropos, 1968.

    Jacobs, Jane. The Death and Life of Great American Cities. New York : Random House, 1961.

    Le Corbusier. La Charte d’Athènes. Paris : Minuit, 1943.

    Choay, Françoise. L’Urbanisme, utopies et réalités. Paris : Seuil, 1965.

    Sennett, Richard. Building and Dwelling: Ethics for the City. New Haven : Yale University Press, 2018.

    Augé, Marc. Non-Lieux : introduction à une anthropologie de la surmodernité. Paris : Seuil, 1992.

    Gehl, Jan. Cities for People. Washington : Island Press, 2010.

    Ricoeur, Paul. L’idéologie et l’utopie. Paris : Seuil, 1986.

    Echeverri, Javier. Urbanismo social en Medellín. Bogotá : Universidad Nacional de Colombia, 2015.

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    Tech, or et «légitimité» des Etats | Le triangle du XXIᵉ siècle

    Jamais les marchés n’auront autant incarné nos contradictions. Alors que les actions des géants de l’intelligence artificielle (IA) s’envolent —Nvidia +1531 %, Palantir +2265 % en trois ans —, l’or atteint simultanément des sommets historiques à 4 250 dollars l’once, une envolée de +157 % sur la même période. La planète financière célèbre le triomphe de la raison artificielle tout en se ruant vers le refuge le plus archaïque qui soit, comme si l’avenir prometteur des transformations de l’IA et la fin du monde cotaient désormais sur le même marché. Deux actifs censés s’exclure montent ensemble : le risque et la peur, la promesse du futur et la couverture contre la fin. Les investisseurs n’ont plus une foi unique, ils en ont deux, contradictoires mais simultanées. Ils croient à la toute-puissance du code informatique et à la fragilité de la civilisation. Ils misent sur l’IA pour reconstruire la croissance, et sur l’or pour survivre à l’échec de cette promesse.

    Yahya Ould Amar *

    Ce qui se joue ici dépasse les courbes : c’est le récit même du capitalisme contemporain qui vacille. Là où autrefois le progrès et la stabilité marchaient main dans la main, ils avancent désormais dos à dos.

    Les investisseurs des pays développés s’abandonnent à une nouvelle mystique, celle de l’IA. Ils croient que les machines sauveront la croissance, que les algorithmes répareront ce que les gouvernements ont détruit, et que les data remplaceront la diplomatie. Le progrès technique devient la dernière idéologie universelle, une théologie du calcul où le code se substitue à la loi, et la prédiction à la politique. Les ingénieurs remplacent les hommes d’État comme gardiens du destin collectif. Les citoyens doutent des institutions, mais croient aux mises à jour logicielles. Les investisseurs ne font plus confiance aux devises, mais aux start-ups. Le capitalisme ne cherche plus à produire, il cherche à croire.

    Pour la première fois depuis la machine à vapeur, le capitalisme s’imagine infini. L’IA promet d’abolir la rareté, la fatigue, l’erreur — jusqu’à la mort du doute. Les bénéfices futurs sont actualisés à l’infini, comme si la technologie annulait le temps. Les marchés, eux, se sont faits métaphysiques, s’ils pensent que l’IA peut tout prédire, alors plus rien ne peut surprendre — et donc tout vaut plus, les entreprises technologiques n’ont plus de prix.

    Derrière cet enthousiasme algorithmique se cache cependant un autre récit, celui du désespoir d’un monde qui ne croit plus en ses dirigeants. La tech est devenue le dernier substitut à la confiance politique.

    Détresse du Sud : des États fantomatiques

    Pendant que les investisseurs du Nord se laissent envoûter par les promesses de l’IA, les peuples du Sud, eux, fuient des États devenus fantomatiques, incapables de s’imposer comme entités tangibles : infrastructures en déliquescence, institutions minées par la suspicion, populations délaissées se repliant sur des réseaux informels ou choisissant l’exode.

    À quoi bon un drapeau flottant au vent avec une monnaie nationale, si les territoires qu’il surplombe ne recèlent que du néant ?

    Lorsque la protection, l’équité et l’espérance se réfugient dans des enclaves communautaires, des factions armées ou des migrations forcées, l’État se mue en abstraction bureaucratique – tolérée par les puissances étrangères, mais reléguée à l’insignifiance par ceux qu’elle devrait élever.

    Aujourd’hui, la planète des investisseurs s’enflamme pour les promesses de l’IA, tandis que des centaines de millions de personnes dans le Sud Global cherchent encore un abri, une justice, une école ou un dispensaire pour se soigner. L’Occident parie sur la machine; le Sud réclame encore la légitimité de ses Etats. L’un veut abolir les contraintes de la réalité, l’autre cherche simplement à en retrouver une.

    Ce contraste n’est pas seulement économique, il est existentiel. Le Nord rêve d’un monde dématérialisé; le Sud réclame encore de la matière — des routes, de la nourriture, de l’eau, de la dignité. Les uns déploient des réseaux neuronaux ; les autres cherchent des réseaux électriques. Le fossé n’est plus entre riches et pauvres, mais entre ceux qui croient encore à la promesse d’un futur, et ceux qui peinent à tenir le présent.

    L’or : la revanche du réel

    Pendant que les entreprises de la tech fabriquent des promesses, la planète redécouvre la plus vieille valeur refuge : l’or.

    Le métal ne produit rien, n’innove pas, ne distribue aucun dividende ni intérêt — et pourtant il redevient la seule vérité quand tout vacille. Chaque lingot acheté est un aveu de doute, un bulletin de défiance silencieux. La Chine, la Russie, l’Inde, la Turquie ou le Brésil en remplissent leurs coffres, c’est la dédollarisation par la gravité.

    L’or est la monnaie des nations méfiantes, des économies blessées, des peuples trahis. Dans les villages du Sahel ou les ruelles du Venezuela, il circule comme une contre-monnaie de la confiance. Quand la parole de l’État ne vaut plus rien, le métal pèse ce que la légitimité ne vaut plus.

    Ainsi, la ruée vers l’or et la foi dans la tech ne s’opposent pas, elles se complètent. Elles disent la même chose que le monde a perdu confiance. Le Nord se protège de la faillite du système; le Sud, de la faillite de l’État. Les uns achètent des puces ; les autres, de la poussière d’or. Mais tous achètent la même chose : une assurance contre la fin.

    Faillites jumelles des monnaies et des États

    Ce que les marchés vivent sur les écrans, les peuples du Sud le vivent dans la chair. La perte de confiance monétaire et la perte de légitimité politique ne sont que les deux faces d’un même effondrement économique, politique et moral. Là où les investisseurs n’ont plus foi en la valeur de leurs monnaies, les citoyens n’ont plus foi en la parole de leurs gouvernants. Le capital symbolique – celui de la confiance – s’est évaporé.

    Le résultat est identique : la fuite. Fuite vers les cryptos ou vers les exils. Fuite des capitaux au Nord, des cerveaux au Sud. Les deux mondes fuient la même chose, la promesse trahie d’un ordre stable. Il n’y a plus d’hommes ou femmes d’Etat, il n’y a dans plusieurs pays que des gestionnaires du déclin ou des comptables du chaos.

    Dans les marchés comme dans les institutions, la crédibilité s’est dissoute. Et dans cette érosion, l’humanité redécouvre son vide : sans foi, il n’y a ni monnaie, ni État, ni avenir.
    La légitimité : la vraie valeur refuge.

    La seule ressource durable du XXIe siècle, ce n’est ni le pétrole, ni le lithium, ni les data, c’est la légitimité. C’est elle qui convertit le pouvoir en autorité, la richesse en prospérité, la loi en justice. Sans elle, les États se désagrègent en zones grises, et les marchés se perdent dans les bulles.

    Dans le Sud global, la légitimité devient la frontière entre l’effondrement et la renaissance. L’Indonésie ou Singapour l’ont compris, la confiance se gagne par la performance, l’inclusion et la justice. Un État est légitime, non pas parce qu’il est reconnu internationalement, mais parce qu’il répond aux besoins de ses citoyens. Un peuple ne croit pas à un drapeau, mais à une promesse tenue.

    Demain, la technologie construira des outils, mais seule la confiance construira des nations. L’IA pourra anticiper des famines, prévenir des crises, détecter la corruption, mais encore faut-il que les gouvernants veuillent s’en servir pour le bien commun. La technologie sans légitimité des Etats n’est qu’un pouvoir sans boussole.

    Le Sud, laboratoire de la refondation mondiale

    C’est au cœur de l’instabilité que naissent les grandes renaissances. Et si la fracture du Sud global, loin d’être une fatalité, devenait l’opportunité fondatrice du XXIᵉ siècle ?Berceau des défis majeurs de notre temps — climatiques, démographiques, technologiques, le Sud n’est pas condamné à subir le désordre du monde, il peut en devenir l’architecte du renouveau.

    Déjà, des expériences émergent : plateformes citoyennes pour suivre la gestion des budgets publics, IA prédictives pour anticiper les famines ou les sécheresses. Autant d’initiatives qui prouvent qu’une autre modernité est possible, enracinée dans la réalité du terrain.

    Le Sud peut ainsi transformer la technologie en instrument de légitimité, et non en bulle spéculative. Car l’innovation, lorsqu’elle sert la justice, la transparence et la dignité, devient le ciment d’un nouvel ordre mondial, un ordre fondé sur la confiance, non sur la domination.

    Le monde de demain ne se divisera plus entre riches et pauvres, mais entre sociétés crédibles et sociétés désavouées, entre celles qui inspirent confiance et celles qui la perdent. Et sur ce terrain décisif, le Sud détient un avantage, celui d’avoir connu la fragilité, et d’avoir appris à rebâtir. Le Sud pourrait réconcilier progrès et légitimité, technologie et humanité.

    Enfin, le XXIᵉ siècle s’ouvre sur une équation inédite : la technologie promet l’infini, l’or rappelle la peur, et la légitimité des Etats devient la condition de survie. Entre la foi dans les machines et la fuite vers les refuges anciens, l’humanité cherche un cap — un sens, une boussole, un horizon commun.

    Or, cette boussole ne se trouve ni dans les algorithmes ni dans les lingots d’Or, mais dans la confiance retrouvée entre les peuples et leurs États. C’est elle, et elle seule, qui transformera la puissance en civilisation, la richesse en avenir, le progrès en justice.

    * Economiste, banquier et financier.

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    Bizerte | Concert enchanteur de Mehrez Sadkaoui

    La Maison de la culture Cheikh Driss à Bizerte a vibré, samedi 18 octobre 2025, au rythme des sonorités orientales et des mouwachahat, lors d’un concert exceptionnel animé par le chanteur Mehrez Sadkaoui et sa troupe Layali El-Ons, organisé par le Commissariat régional à la culture dans le cadre de la Semaine de la Musique.  

    Composée de neuf musiciens talentueux, la troupe a présenté un florilège de chansons traditionnelles et classiques du patrimoine musical arabe. Des pièces raffinées, mêlant les émotions profondes des mouwachahat à l’élégance intemporelle de la musique orientale, ont été interprétées avec virtuosité, transportant le public dans un voyage musical aussi raffiné qu’émouvant.

    L’assistance, composée principalement de mélomanes férus de musique orientale, a rapidement trouvé une belle harmonie avec le chanteur. L’interaction entre Mehrez Sadkaoui et le public a atteint des sommets d’intensité : les spectateurs ont chanté à l’unisson, battu des mains et partagé des moments de complicité et de nostalgie à travers des mélodies bien connues. L’énergie collective a transformé la salle en un espace vibrant de passion et d’authenticité.

    Mais au-delà de l’accueil chaleureux du public — conquis par l’interprétation sensible et la présence scénique de l’artiste —, c’est un avis de connaisseur qui a attiré notre attention. Cheikh Driss Jaziri, figure éminente de la «soulamia» (chant des confréries soufies) et «monched» (chanteur liturgique) respecté, a glissé à notre oreille une remarque pleine de justesse : «Mehrez Sadkaoui possède une très belle voix, une oreille musicale fine, et maîtrise parfaitement les fondamentaux du chant. Il est temps pour lui de franchir une nouvelle étape : celle de chanter ses propres chansons.»

    Talent et charisme

    Une appréciation qui en dit long, surtout venant d’un homme reconnu pour sa rigueur musicale et son exigence artistique. Cette suggestion sonne presque comme une invitation à l’artiste de s’affirmer davantage en tant que créateur, et non seulement en tant qu’interprète.

    Mehrez Sadkaoui semble aujourd’hui à un tournant de son parcours artistique. Fort de la reconnaissance du public et du respect des professionnels, il ne manque ni de talent ni de charisme pour s’imposer avec un répertoire original. L’avenir nous dira si cette voix, déjà bien connue pour sa justesse et sa chaleur, osera bientôt porter ses propres mots et mélodies.

    Ce gala restera sans doute gravé dans les mémoires des mélomanes présents, tant pour la qualité artistique de la prestation que pour l’atmosphère chaleureuse et festive qui a régné tout au long de la soirée. Un véritable hommage à la richesse de notre patrimoine musical.

    Lotfi Sahli

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