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Cynthia Gnassingbé-Essonam : « La ZLECAf, unique chance pour bâtir le marché africain du futur »

La quatrième édition de la Foire Intra-Africaine (IATF) illustre concrètement l’ambition de la ZLECAf de bâtir un marché unique continental. Cynthia Gnassingbé-Essonam, conseillère principale pour l’engagement du secteur privé auprès du secrétaire général de la Zone de Libre-échange Continentale Africaine (ZLECAf), souligne le rôle clé de la Tunisie, pionnière dans la ratification et la mise en œuvre de cet accord historique. Celui-ci ouvre de nouvelles opportunités pour les entreprises africaines, les jeunes entrepreneurs et les femmes, dans un contexte d’intégration accélérée et de transformation digitale. Interview : 

Quels axes stratégiques devraient être priorisés pour améliorer l’intégration économique africaine via ce forum ?

Cynthia Gnassingbé-Essonam : D’abord, la Foire Intra-Africaine, qui en est à sa quatrième édition, est le véritable marché de la ZLECAf. Pour nous, la foire permet concrètement de matérialiser la ZLECAf, car elle réunit plusieurs entreprises qui viennent nouer des relations commerciales et faire du réseautage. Cela offre aussi aux participants la possibilité de tester les produits. Car un problème fréquent est de savoir comment s’assurer que l’on a en face un opérateur économique digne de confiance.

Ainsi, l’organisation de ces foires intra-africaines facilite la rencontre directe entre ces opérateurs économiques, favorisant la conclusion de relations commerciales et, de fait, l’accroissement du commerce intra-africain, puisqu’elles permettent aux entreprises d’aller au-delà des frontières nationales. C’est le premier point. Nous devons renforcer ces espaces d’initiatives et nous assurer que l’environnement créé permette aux entreprises de participer, en particulier les jeunes et les femmes entrepreneurs, souvent limités par leurs moyens.

Un mécanisme complet doit être mis en place pour garantir que ces foires ne soient pas réservées uniquement aux grandes entreprises, mais qu’elles accueillent aussi les petites et moyennes entreprises, afin qu’elles puissent participer pleinement et bénéficier des avantages qu’elles offrent. Le second point concerne la zone de libre-échange continental elle-même, qui est aujourd’hui le principal programme d’intégration africaine.

C’est un projet emblématique de l’Union africaine. Bien qu’on en parle depuis longtemps, la mise en œuvre de la ZLECAf est désormais effective, ce qui revêt une importance d’autant plus grande que nous évoluons dans un contexte peu favorable aux pays africains, avec la fermeture des frontières et l’adoption de politiques protectionnistes.

Cependant, nous disposons d’un grand marché intérieur qu’il faut construire et développer : un marché de 1,4 milliard d’habitants, ce qui n’est pas rien. Il s’agit de pousser nos économies à se diversifier, de transformer les matières premières localement afin d’exporter des produits finis et intermédiaires sur le continent.

Comment la ZLECAf, en tant que cadre juridique déjà ratifié par 49 pays, peut-elle encourager les entreprises africaines à privilégier le marché continental, lever les barrières non tarifaires et renforcer le dialogue public-privé pour favoriser la compétitivité et l’exportation au sein de l’Afrique ?

La ZLECAf vise précisément cet objectif. Il est essentiel de continuer à sensibiliser les entreprises en leur indiquant qu’il n’est plus nécessaire de chercher à exporter hors du continent. Certes, nous faisons face à des défis logistiques, de transport et de connectivité, mais nous travaillons à leur résolution. Le secteur privé doit désormais voir le continent comme un marché prioritaire. Ensemble, nous devrons œuvrer pour lever les barrières, notamment les barrières non tarifaires que nous rencontrons au quotidien dans les activités de commerce et d’investissement.

Il est important de souligner que la ZLECAf dispose déjà de son cadre juridique, adopté et ratifié par 49 pays, ce qui est un progrès considérable.
Il s’agit désormais de mettre en place des mécanismes concrets, en collaboration avec le secteur privé, pour définir ce que nous faisons réellement afin de mettre en œuvre ce projet ou cet accord et qu’il profite véritablement au secteur privé, mais aussi aux femmes, jeunes entrepreneurs, innovateurs et start-ups.

Le deuxième point est donc de confirmer que la ZLECAf est une réalité, pas une utopie. Cela dit, il reste encore des efforts à fournir, notamment pour éliminer les barrières non tarifaires.

Le troisième point concerne le dialogue public-privé. Après tout, la ZLECAf commence aussi avec les États. Il faut continuer à sensibiliser et renforcer les capacités des acteurs étatiques afin qu’ils connaissent parfaitement les dispositions de l’accord et qu’ils créent un climat favorable à l’émergence des entreprises, pour qu’elles soient compétitives d’abord sur leur marché national, puis capables d’exporter vers d’autres pays.
Nous encourageons donc les entreprises à penser continent : lorsque vous créez une entreprise en Égypte, en Tunisie ou en Algérie, pensez immédiatement aux marchés ougandais, sud-africain, etc., car c’est ce que la ZLECAf offre aux opérateurs économiques.
L’industrialisation et le renforcement des capacités industrielles doivent évidemment accompagner cette dynamique, avec le développement de chaînes de valeur dans des secteurs prioritaires tels que l’agriculture, l’agrobusiness et la pharmacie. Par exemple, lors de mes visites en Algérie, j’ai constaté l’existence d’industries pharmaceutiques avec des coûts très compétitifs pour certains produits génériques. Je me demande pourquoi ce type de produit n’existe pas au Togo, par exemple. Même si ces produits étaient exportés vers cet État ou vers d’autres, leur coût resterait inférieur à ce que je paie actuellement. C’est également le cas en Tunisie pour les produits pharmaceutiques.

Qu’en est-il pour la Tunisie ?

La Tunisie offre effectivement un bon accès à ces produits. C’est aussi le cas pour le secteur automobile, où le continent accuse un retard important. Aujourd’hui, la production annuelle de véhicules en Afrique est d’environ un million, répartie principalement entre des pays comme le Maroc, l’Afrique du Sud, etc. Pour un continent de 1,4 milliard d’habitants, c’est très faible comparé à l’Inde, qui produit 5 millions d’unités avec une population équivalente. Il existe donc un déficit de 4 millions à combler. Mais ce n’est pas uniquement une question d’assemblage, puisque la fabrication des composants génère une création de valeur ajoutée importante et de nombreux emplois.

En ce qui concerne la transformation digitale, où en est-on réellement aujourd’hui ? Une plateforme a été évoquée précédemment. Quelles pistes peut-on envisager pour accélérer et dynamiser cette transformation numérique sur le continent ?

Dans l’accord de la ZLECAf, un protocole dédié au commerce numérique existe. Ce protocole harmonise les normes et standards pour le développement de l’économie digitale et des infrastructures associées. Il concerne également le transfert des données, ce qui justifie l’importance de créer un produit digital africain, capable de s’exporter à moindre coût, voire gratuitement.
Ce protocole aborde aussi les nouvelles technologies, leur développement, leur déploiement sur le continent, ainsi que la mise en place de systèmes interopérables pour faciliter les paiements transfrontaliers.

La transformation digitale est donc au cœur de la ZLECAf. Une mise en œuvre effective de ce protocole permettra d’investir davantage dans les infrastructures publiques, dans les FinTech connectées à ces infrastructures, notamment pour les paiements transfrontaliers. Le développement du e-commerce est une priorité à promouvoir, accompagné d’un effort soutenu de sensibilisation.
Il est intéressant de noter que trois pays sont considérés comme les leaders du protocole sur le commerce numérique : le Kenya, l’Afrique du Sud et le Nigeria. Ces pays, à travers leurs ministres du commerce et chefs d’État, travaillent à définir un plan d’action continental pour la mise en œuvre de ce protocole.

Un mot de la fin ?

Cette édition de la Foire Intra-Africaine est une réussite. Nous souhaitons vivement encourager les entreprises algériennes, tunisiennes, etc., à se déployer davantage. Il faut renforcer le transfert de technologies et la collaboration sud-sud.

Il est aussi indispensable d’utiliser pleinement la ZLECAf, en la considérant comme un outil opérationnel. N’hésitez pas à solliciter le secrétariat de la ZLECAf, appropriez-vous cet accord, car c’est la seule opportunité que nous avons aujourd’hui, en tant qu’Africains, pour nous développer et créer un marché unique africain. Si nous ratons cette opportunité, je ne sais pas ce que nos enfants et petits-enfants nous diront dans quelques années.
Il faut travailler, et c’est la responsabilité de tous : décideurs, chefs d’entreprise, étudiants, société civile, médias. Nous devons tous être aujourd’hui des ambassadeurs de la ZLECAf, car l’intégration africaine est véritablement la voie vers la prospérité de l’Afrique.

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