C’est une première européenne. Et son nom indique ses ambitions: Jupiter, comme la planète considérée – au stade des connaissances actuelles – la plus grande.
Ainsi, installé à Jülich, ville située à l’ouest de Cologne, le supercalculateur Jupiter marque une avancée stratégique majeure pour l’Union européenne dans le domaine du calcul intensif et de l’intelligence artificielle, rapportent les médias européens.
Avec une capacité de calcul dépassant le quintillion d’opérations par seconde — soit un milliard de milliards —, il s’agit du premier ordinateur exascale du Vieux Continent et du quatrième dans le monde, rejoignant un club très restreint dominé jusqu’ici par les États-Unis.
Occupant près de 3 600 mètres carrés, soit la moitié d’un terrain de football, la machine embarque quelque 24 000 puces Nvidia, élément central dans l’architecture des systèmes d’IA modernes.
Développé par le groupe français Atos, pour un budget d’environ 500 millions d’euros cofinancé par l’Allemagne et l’Union européenne, Jupiter est présenté comme l’ordinateur le plus puissant jamais conçu sur le sol européen.
« C’est aujourd’hui ce qui se fait de plus puissant au monde en matière de calcul intensif », affirme Emmanuel Le Roux, responsable de l’activité Advanced Computing chez Atos, cité par l’AFP.
Une avancée stratégique pour l’IA européenne
Au-delà de sa puissance brute, Jupiter répond à un enjeu stratégique de souveraineté technologique pour les Européens. Selon Thomas Lippert, directeur du centre de recherche de Jülich, la machine représente un bond technologique majeur, vingt fois plus puissant que tout autre système installé en Allemagne.
En effet, longtemps en retrait face aux géants américain et chinois dans le domaine de l’IA, on aura compris, l’Europe compte désormais sur Jupiter pour combler une partie de son retard dans l’entraînement des modèles d’intelligence artificielle. En 2024, selon un rapport de l’université de Stanford, les institutions américaines ont produit 40 modèles d’IA « notables », contre 15 pour la Chine et seulement 3 pour l’Europe.
« La performance d’un modèle d’IA dépend directement de la puissance de calcul », explique Jose Maria Cela, chercheur au Supercomputing Center de Barcelone. « Jupiter est un outil décisif pour que l’Europe puisse enfin former ses propres modèles de grande envergure, comme les LLM – pour large language models – utilisés dans ChatGPT ou Gemini ».
Toutefois, cette percée reste partiellement dépendante de la technologie américaine, en ce sens que la majorité des puces intégrées dans Jupiter proviennent du fabricant Nvidia, soulignant la fragilité de la chaîne technologique européenne dans un contexte de tensions transatlantiques croissantes.
Un outil pour la science, la santé et le climat
Qu’à cela ne tienne, les applications de Jupiter dépassent largement le seul champ de l’intelligence artificielle. Grâce à ses capacités exceptionnelles, le supercalculateur pourra aussi simuler des prévisions climatiques de long terme, jusqu’à 30 à 100 ans, selon certains modèles, permettant d’anticiper plus précisément les événements extrêmes comme les canicules ou les inondations.
Dans le secteur de la transition énergétique, il contribuera à optimiser la conception des éoliennes en simulant les flux d’air, et dans le domaine de la santé, il pourrait offrir des modélisations plus réalistes du cerveau humain, ouvrant la voie à des avancées dans la recherche contre des maladies neurodégénératives telles qu’Alzheimer.
In fine, Jupiter incarne donc une double ambition : répondre aux défis scientifiques et industriels de demain, tout en affirmant la place de l’Europe dans une compétition mondiale où la maîtrise de la puissance de calcul devient un enjeu de souveraineté.
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