Les températures sont en hausse remarquable, ce mercredi 20 août 2025, en Tunisie. Les maximales sont comprises entre 32 et 36 degrés au Cap Bon, entre 37 et 43 dans le reste des régions, atteignant les 45 à Kairouan et dans l’extrême sud-ouest avec coups locaux de sirocco.
C’est ce que fait savoir l’Institut national de la météorologie (INM) dans un bulletin, ajoutant que le vent soufflera de secteur sud, relativement fort près des côtes, faible à modéré ailleurs puis se renforçant relativement sur les hauteurs avec une vitesse dépassant temporairement 60 Km/h sous forme de rafales.
Au 18 août 2025, les réserves en devises de la Tunisie se sont élevées à 24,231 milliards de dinars, couvrant ainsi l’équivalent de 105 jours d’importations.
Cette amélioration s’explique principalement par la hausse des transferts des Tunisiens résidant à l’étranger, qui ont atteint 4,6 milliards de dinars, au premier semestre, en progression de 8,2% sur un an, ainsi que par la croissance des recettes du tourisme, évaluées à 3,899 milliards de dinars au 20 juillet, soit +10,5% en dollars et +9,3% en euros.
La diminution des importations de produits de base a, également, contribué à cette performance.
Les achats d’huiles végétales ont chuté de 30% à 349,4 millions de dinars, ceux de sucre de 36, à 175,3 millions, tandis que les importations de céréales ont reculé de 20,5%, générant une économie globale de 407 millions de dinars.
Le parquet près le tribunal de première instance de Tunis 2 a émis, mardi 19 mai 2025, un mandat de dépôt à l’encontre d’un jeune homme accusé d’avoir brisé la vitre d’un bus appartenant à la Société de Transport de Tunis (Transtu) dans la région de Sidi Hassine Sijoumi, à l’ouest de Tunis. Il a été déféré, en état de détention, devant le tribunal correctionnel pour répondre aux accusations de dégradation de biens d’autrui.
La semaine dernière, la société Transtu avait annoncé qu’un jeune homme avait volontairement jeté des pierres sur l’un de ses bus juste après en être descendu, provoquant la brisure de la vitre latérale du véhicule. Elle avait précisé avoir entamé les démarches judiciaires à l’encontre de l’auteur des faits.
Les actes de vandalisme ciblant des véhicules de transport (bus, trains…) sont fréquents dans certains quartiers populaires de la capitale et sont souvent le fait d’enfants et d’adolescents désœuvrés. En sévissant, les autorités espèrent mettre fin à ce fléau par la dissuasion.
Les ressources énergétiques primaires de la Tunisie ont atteint 1,8 million de tonnes équivalent pétrole (Mtep) à la fin du mois de juin 2025, soit une baisse de 8% par rapport au niveau enregistré à la même période en 2024, selon les données de l’Observatoire national de l’énergie et des mines.
Cette baisse est principalement imputable au recul de la production nationale de pétrole brut et de gaz naturel. Ces deux hydrocarbures continuent de dominer le mix énergétique, constituant ensemble 70% de l’ensemble des ressources primaires. En revanche, la contribution de l’électricité d’origine renouvelable, incluant la production de la Steg, du privé et l’autoproduction, demeure marginale avec une part qui ne dépasse pas les 3%, alors que l’Etat table sur un taux de 30% à l’horizon 2030, un objectif très difficile à atteindre au vu de la situation actuelle.
Contrairement à l’offre, la demande en énergie primaire a, elle, augmenté de 6% sur la même période. La consommation de gaz naturel a connu une forte progression de 10%, tandis que celle des produits pétroliers a enregistré une légère hausse de 1%.
La part des produits pétroliers est passée de 51% en juin 2024 à 49% un an plus tard, alors que celle du gaz naturel est montée de 48% à 50%.
Ce déséquilibre croissant entre une offre en baisse et une demande en hausse a creusé le déficit du bilan énergétique primaire. Celui-ci s’est établi à 2,8 Mtep à fin juin 2025, affichant une aggravation de 17% sur un an. Conséquence directe, le taux d’indépendance énergétique, qui mesure le ratio des ressources nationales par rapport à la consommation, a chuté à 38% contre 44% un an auparavant. Sans la prise en compte de la redevance gazière, ce taux serait même tombé à seulement 29%, contre 33% en 2024.
Le déficit de la balance commerciale énergétique de la Tunisie a diminué de 7 % à fin juin 2025 par rapport à l’année précédente, atteignant 5,188 milliards de dinars contre 5,577 milliards de dinars en juin 2024, indique le rapport sur la conjoncture énergétique pour juin 2025, publié par l’Observatoire national de l’énergie et des mines.
Le taux de couverture des importations par les exportations n’a pas dépassé 18 % au cours du premier semestre de l’année.
Les exportations énergétiques ont enregistré, à fin juin 2025, une baisse de valeur de 38 %, tandis que les importations ont reculé de 15 % par rapport à fin juin 2024.
La valeur des ressources énergétiques importées jusqu’à fin juin 2025 s’élève à près de 6,3 milliards de dinars, alors que les exportations de produits énergétiques ont atteint environ 1,1 milliard de dinars, ce qui a conduit à l’enregistrement de ce déficit.
La production d’électricité en Tunisie a atteint environ 9 061 GWh à fin juin 2025, en hausse de 3 % sur un an par rapport à fin juin 2024. Les importations directes d’électricité depuis l’Algérie ont couvert près de 10 % des besoins nationaux, indique le rapport sur la conjoncture énergétique pour juin 2025, publié par l’Observatoire national de l’énergie et des mines.
Selon le même rapport, la production destinée à la consommation locale est restée quasiment stable sur la période.
Le parc de production électrique s’est appuyé quasi exclusivement sur le gaz naturel, qui a représenté environ 94 % de la production. La Société tunisienne de l’électricité et du gaz (Steg) a généré 8 567 GWh, tandis que les producteurs privés d’énergie solaire ont contribué pour 29 GWh.
Les producteurs autonomes d’énergie solaire ont, de leur côté, fourni environ 341 GWh, enregistrant une croissance de 32 %.
En revanche, les achats directs d’électricité en provenance d’Algérie ont reculé de 19 %, selon les données de l’Observatoire.
La production tunisienne de pétrole brut s’est située à 629 kt à fin juin 2025 enregistrant ainsi une baisse de 9% par rapport à fin juin 2024, indique le rapport sur la conjoncture énergétique pour juin 2025, publié par l’Observatoire national de l’énergie et des mines.(Ph. Champ pétrolier Nawara).
Cette baisse a touché la plupart des champs : Nawara (-54%), Ashtart (-19%), El Hajeb/Guebiba (-19%), Barka (-79), Gherib (-21%), Halk el Menzel (-13%), Sidi Marzoug (-4%), Hasdrubal (-9%) et Adam (-7).
D’autres champs ont enregistré, par contre, une amélioration de production : Ezzaouia (+83%), Gremda/El Ain (+179%), D.S.T (+69%), M.L.D (+12%) et Bir Ben Tartar (+17%).
La moyenne journalière de la production de pétrole est passée de 29 600 barils/j à fin juin 2024 à 27 000 barils/j à fin juin 2025.
Les résultats du programme de surveillance «Adoptez une plage» du WWF Afrique du Nord pour la saison 2023-2024 sont inquiétants, a révélé l’Ong, dont le rapport, fruit d’une initiative impliquant des centaines de bénévoles, met en évidence une situation environnementale critique. Une plus grande sensibilisation environnementale est nécessaire.
Les données collectées sur le terrain, basées sur un protocole scientifique rigoureux, montrent des chiffres alarmants : plus de 30 000 fragments de plastique, 23 000 bouchons de bouteilles et 17 000 pailles ont été retrouvés sur les plages tunisiennes surveillées, ainsi que 12 000 morceaux de polystyrène et, bien qu’ils ne soient pas en plastique, 78 000 mégots de cigarettes.
Selon le WWF, un changement des habitudes individuelles est urgent.
Les zones les plus touchées sont la plage de Kheireddine, avec une concentration de 3 766 objets/déchets aux 100 mètres, et la plage de Mahdia, où 1 775 objets ont été trouvés aux 100 mètres.
Ces statistiques, écrit le WWF, «soulignent l’urgence de changer nos comportements et de promouvoir la sensibilisation et la protection de l’environnement ».
Le programme de surveillance a utilisé un protocole bien établi, en collaboration avec l’Institut national des sciences et technologies marines et l’initiative «Adoptez une plage» du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), démontrant ainsi l’importance de l’éducation et de la surveillance continue pour lutter contre le problème des déchets plastiques et non plastiques en mer et sur les plages.
La fête de l’Assomption de Marie ou le cortège de la Madone de Trapani a été de nouveau été célébrée cette année, dans le quartier de la Petite Sicile, où a longtemps vécu une communauté venue de la célèbre île Italienne, à la Goulette, ville portuaire et balnéaire au nord de Tunis.
Lorsque la statue de la Madone de Trapani a été amenée le 15 août à la tombée de la nuit sur la place devant l’église dédiée aux saints Augustin et Fidèle, des centaines de fidèles et de badauds l’ont accueillie par des applaudissements et des youyous. Pour la seconde année consécutive, de nombreux chrétiens issus de la communauté africaine subsaharienne ont accompagné le cortège.
Cette tradition a été observée en Tunisie au cours de la première moitié du 20e siècle. Elle a été abandonnée à partir du début des années 1960 avant de reprendre en 2017. Elle a toujours été un modèle de communion et de proximité entre les différentes communautés ethniques et religieuses : musulmans, juifs et chrétiens, Tunisiens, Italiens, Français et Maltais cohabitent depuis longtemps dans cette ville côtière.
La messe, célébrée par l’archevêque de Tunis, Mgr Nicolas Lhernould, précédée d’une récitation collective du chapelet l’après-midi, avait pour thème principal une prière pour la paix dans le monde.
Au-delà de son aspect religieux, la fête de l’Assomption de La Goulette préserve des coutumes traditionnelles qui reflètent l’identité et la mémoire locales. Les chroniques évoquent la forte participation des habitants du quartier, l’utilisation de chants accompagnant la sortie de la statue, et le fort caractère populaire interreligieux de l’événement.
Ce sont les Italiens, et notamment les Siciliens, qui ont introduit et diffusé le culte de la Vierge de Trapani et la messe de l’Assomption en Tunisie, qui comprenait également, jusqu’en 1962, une procession de la Vierge de Trapani jusqu’à la mer, annonçant pour les vacanciers la fin de la saison de la baignade. Elle est restée un événement essentiel pour la petite mais dynamique communauté chrétienne de Tunis, où il n’est pas rare de croiser musulmans et juifs.
Rappelant le lien encore fort entre l’Italie et la Tunisie, dans cette bande de terre où cohabitaient autrefois pêcheurs tunisiens et siciliens, une immense fresque murale dédiée à l’actrice Claudia Cardinale, qui a passé son enfance à La Goulette, est accrochée sur la façade d’un immeuble de la place.
Créée en 1946 à l’époque coloniale, l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) s’est construite pour optimiser la rémunération des travailleurs, mais aussi pour saboter les entreprises coloniales, afin de chasser les colons. Les ancrages idéologiques de cette approche bicéphale n’ont pas totalement disparu aujourd’hui, 70 ans après l’indépendance.
Moktar Lamari *
Aujourd’hui encore, l’UGTT s’emploie à optimiser les salaires, de façon indifférente à l’état de l’économie, insouciante de la compétitivité des entreprises, et rétive qu’elle est aux impératifs de la productivité du travail.
Son (in)action a fait reculer le sens du travail, a détérioré le capital social et a renforcé les systèmes rentiers. Il faut comprendre le fonctionnement du «business model» de l’UGTT pour mesurer ses réels impacts sur le marché du travail en Tunisie. C’est ce qu’on propose ici, chiffres à l’appui.
Vampiriser les extrants, saccager les intrants
Quelques mois avant son décès cette année, l’économiste Houssine Dimassi a qualifié l’UGTT de vestige anarcho-féodal. Et il n’a pas tort lui qui connaît très bien le fonctionnement de l’UGTT pour avoir longtemps été l’un de ses conseillers économiques. Ce n’est pas rien, il faut en parler franchement, les yeux dans les yeux, et sans détours.
Le modèle d’affaire de l’UGTT est devenu avec le temps contreproductif, anachronique voire suicidaire pour l’économie tunisienne. Ce modèle n’arrivant plus à se ressourcer et à se moderniser pour suivre les évolutions et les changements dans la société et l’économie tunisienne.
Aujourd’hui, les tensions sont à leur summum, la veille d’un coup de force de l’UGTT, pour une marche de protestation, le 21 août, et probablement une grève générale.
Pour schématiser et simplifier nos propos aux lecteurs, on peut dire que les processus de production (dans les entreprises publiques ou privées, dans le gouvernement ou dans les organisations à but non lucratif) fonctionnent en deux volets : celui des intrants (travail, capital, technologie, organisation) et celui des extrants (production, rentabilité, productivité, compétitivité). Le processus productif consiste à transformer les intrants en extrants, dans un contexte sociopolitique et technologique donné.
Les revendications syndicales de l’UGTT ont toujours ciblé et parfois aveuglément les augmentations de salaires des travailleurs, canalisant ses revendications sur les extrants des processus productifs, empêchant parfois les entreprises d’investir ou d’innover.
Rien n’est fait par contre par l’UGTT pour renforcer les entreprises et les intrants de la machine productive d’une économie et d’un tissu d’entreprises principalement tuniso-tunisiens. Les investisseurs étrangers restent prudents face au caractère anarchiste et aléatoire de la gouvernance de cette centrale syndicale.
Ce modèle d’affaires est désuet et ne fonctionne plus dans les pays et sociétés modernes d’aujourd’hui. Ce modèle pénalise l’économie, puisqu’il vampirise les extrants et sabote les intrants de l’économie dans son ensemble. Il détruit ainsi le capital social, affaiblit la compétitivité des entreprises et sabote les infrastructures physiques et humaines.
Les problèmes du recul de la productivité et de la dévalorisation du sens du travail sont au cœur de la faillite de ce modèle de fonctionnement, devenu ipso facto improductif et très dommageable à l’économie et à la croissance en Tunisie.
Depuis Ahmed Ben Salah, les différentes élites, équipes et directions à la tête de l’UGTT ont fermé les yeux sur la déperdition du sens du travail ainsi que sur le recul de la productivité du travail (et multifactorielle), de manière générale.
L’UGTT a tort de penser que la productivité ne relève pas de ses responsabilités globales, elle qui a fait des droits des travailleurs son fonds de commerce. Elle, qui est omniprésente dans la sphère politique, nationale et internationale. Devenant un méga-syndicat, presque un parti politique.
L’UGTT ne s’est pas intéressée non plus au potentiel productif de la population en âge actif (15-65 ans). Elle a occulté les aspirations et la vie misérable des centaines de milliers de jeunes en chômage, des femmes malmenées, abusées dans les champs agricoles de tous les territoires du pays. L’UGTT jette le bébé avec l’eau du bain, prétextant que cela ne relève pas de son mandat, ni de sa responsabilité sociétale.
Les chiffres sont têtus et la responsabilité de l’UGTT est irréfutable.
1- Dit simplement, pour les 3,7 millions d’actifs occupés dans l’ensemble des secteurs formels, les gains de productivité ont été proche de zéro durant les dernières années. La productivité du capital mis à leur disposition a aussi enregistré un léger recul durant la 2015-2024.
2- Selon plusieurs études, le Tunisien moyen occupé et rémunéré travaille en moyenne pas plus 5 heures par jour, au lieu de 7 à 8 heures. Un tiers de temps payé n’est pas travaillé, sérieusement du moins. Dans de nombreuses organisations gouvernementales, cette durée effectivement travaillée ne dépasse pas deux heures par jour.
3- La durée effective du travail ne dépasse pas une la moyenne annuelle de 1 350 heures payées. En France et en moyenne annuelle, les travailleurs font 1 680 heures pour les salariés à temps complet (données 2019), au Canada, 1890 heures par an (2022). La moyenne européenne est à 1846 heures, soit 40% de plus que la moyenne annuelle en Tunisie.
4- Un taux d’emploi insuffisant, puisque la proportion de personnes demandant un emploi parmi celles en âge de travailler (15-64 ans) est de 43% seulement. Le taux d’emploi mesure la capacité d’une économie à utiliser de manière efficace son capital humain. Ce taux est pratiquement la moitié de ce qui est observé dans les pays occidentaux. Dans les pays européens ce taux oscille entre 62 à 80%. Pour l’ensemble de l’Union européenne (UE), la moyenne est de 70%. Les Pays-Bas sont à 81%, le Japon à 79%, l’Allemagne à 77% de même que le Danemark et la Suède, le Royaume-Uni et le Canada à 75%, les Etats-Unis à 71%.
5- Trois femmes sur quatre en âge actif sont sans emploi. Deux millions de femmes sont sur le carreau, dépendantes de leur conjoint et enfants pour vivre décemment. Elles se font exploiter, maltraiter… L’UGTT ne fait rien, et laisse faire, ses dirigeants ne se prononcent pas sur le sujet. Ils ferment les yeux et occultent l’enjeu, et aucun écrit ne permet de saisir les positions syndicales au sujet du travail des femmes et des enfants.
6- L’UGTT ne se préoccupe pas non plus des travailleurs du secteur informel, qui sont pourtant très nombreux, opérant dans des activités pénibles, mal payées, sans cotisation sociale, sans couverture médicale en cas d’accident ou imprévu.
On sait que l’organisation syndicale est fortement discréditée par la corruption qui la gangrène à feu doux. On sait aussi que plusieurs de ses dirigeants croient encore à la lutte des classes, voire à l’anarchie créative. Mais, ce qu’on ne sait pas c’est que les élites syndicales des quarante dernières années ont été prévenues de l’impasse et de l’essoufflement du modèle en vigueur.
Pour l’histoire, et je sors de ma réserve pour révéler ici qu’un rapport à ce sujet a été soumis à la haute direction de l’UGTT en novembre 1990.
J’ai été associé, à tire de jeune professeur d’économie à l’université de Sousse, à une réflexion évaluative des impacts économiques de l’action de l’UGTT. Sous la direction du professeur à l’Enit, Mohamed Tahar Chebbi (décédé en juillet 2025), coordonnateur du Bureau d’études de l’UGTT, un groupe de travail restreint a été créé, constitué des professeurs Houssine Dimassi (décédé), Raouf Ridane (décédé), Abdjellil Bedoui, Chedly Ayari (décédé), Abdelfatah Ghorbel, Jameledine Ziadi… avec des invités occasionnels, tous des économistes. Une jeune journaliste du journal Echaab assistait aussi aux travaux et faisait la synthèse des contributions.
Nous avons travaillé pour plus de six mois, en se réunissant pendant un séjour bloqué de 2 jours par mois, dans un hôtel de Hammamet. Nous avons proposé, dans notre rapport écrit, un ajustement structurel des approches syndicales de l’UGTT. Cet ajustement se basait sur l’extension des mandats de l’UGTT à la valorisation du sens du travail, de l’extension de la durée du travail, de l’importance de la formation professionnelle, du renforcement de la productivité et de la compétitivité des entreprises publiques et privées.
Ce rapport, produit il y a 35 ans, a documenté les défis, et illustré avec des statistiques les dangers d’une action syndicale qui dénigre la valeur du travail, qui sacrifie la productivité et qui prône une rémunération paramétrique, mur-à-mur, sans indemnisation fondée sur la performance et le rendement. Ce rapport en papier a été tabletté, et probablement oublié avec le temps.
Nous avons démontré dans ce rapport que les augmentations salariales, si elles ne sont pas accompagnées par des gains de productivité finissent par devenir un fardeau destructeur pour des dizaines de milliers d’entreprises (surtout des PME) et des centaines de milliers d’emplois avec.
Peine perdue, rien de ce qui a été proposé n’a eu une suite, l’institution est restée prisonnière de son radicalisme d’antan et s’enfonçait de plus en plus dans le déni de la valeur du travail et de la productivité.
L’UGTT a préféré continuer dans son action dévastatrice sur les intrants des processus productifs (sabotage, blocage, démolition, casse, etc.) élargissant les ambitions de ses dirigeants privilégiés, pour progressivement étendre ses pouvoirs et l’implication dans les domaines politiques et partisans, tant avec Ben Ali qu’avec ses successeurs à l’ère post-2011.
Elle a pris du poids et accentué son pouvoir, de par son statut de monopole et omniprésent dans les régions, tous les secteurs et de mèche avec divers lobbyistes et groupes de pressions (médias notamment).
Un déni qui favorise l’optimisation des hausses salariales et donc de la ponction sur les extrants, négligeant les intrants et leur importance dans la création de la richesse collective incontournable pour le progrès et la prospérité du pays.
Faire le lien entre rémunération et productivité du travail
D’importants secteurs économiques ont ainsi été saccagés. Il suffit de voir le sens du travail dans les sociétés publiques, dont le transport. Les 600 000 ha de terres domaniales ont été mis en friche par ce syndicalisme anarchiste, féodal entre autres. L’UGTT refuse de faire un lien entre rémunération et productivité du travail.
Le plus gros dégât de l’action syndicale de l’UGTT a trait à la dégradation du capital social et du sens du travail de manière générale en Tunisie.
L’UGTT a besoin d’une révolution interne, elle a besoin d’une prise de conscience et d’un encadrement éthique anti-corruption, assortis d’un engagement pour la réhabilitation du sens du travail et de la productivité. C’est incontournable.
Avec plus de croissance, et de richesses créées, les salaires, le pouvoir d’achat des citoyens et l’accès à l’emploi ne peuvent que suivre, et évoluer vers la hausse, pas vers la baisse comme on le constate aujourd’hui.
La question qui se pose est la suivante : une telle révolution interne peut-elle être initiée de façon endogène et démocratique au sein de l’organisation, ou au contraire de façon exogène et top down. L’avenir nous le dira.
La Tunisie traverse une crise silencieuse où la désespérance des élites et l’incivilité quotidienne des citoyens se combinent pour façonner une culture de la laideur. Les architectes, intellectuels et autres acteurs culturels ont un rôle décisif pour transformer ce désordre latent en projet collectif. Ignorer cette dynamique, c’est laisser la société se réinventer par défaut, dans le désordre et la gabegie.(Ph. Cité Ennasr, à Tunis : Quand chacun fait comme il veut, c’est la société tout entière qui apprend à tolérer l’inacceptable.)
Ilyes Bellagha *
Nous ne savons plus où nous allons, mais nous continuons à marcher comme si tout était normal.
La bourgeoisie tunisienne, traditionnellement formée et privilégiée, exprime un désarroi profond. Architectes, cadres et intellectuels continuent de se projeter dans les cercles de pouvoir sans mettre à jour leurs méthodes, leurs pratiques ou leur rapport au travail. Le prestige académique et les titres ne suffisent plus.
Le travail devient précaire, mal reconnu, et souvent déconnecté des réalités sociales. Pendant ce temps, la population, elle-même en quête de repères, ne trouve ni sens ni reconnaissance dans ces élites déphasées.
Incivilité et normalisation des comportements
Quand chacun fait comme il veut, c’est la société tout entière qui apprend à tolérer l’inacceptable.
L’incivilité quotidienne n’est pas un simple problème moral : elle est le symptôme d’une société qui expérimente de nouvelles normes dans l’ombre des institutions défaillantes. Frustration, absence de projet collectif et détachement des élites transforment le quotidien en laboratoire social.
Ce qui était autrefois marginal devient progressivement toléré, visible, et, à terme, normalisé. La Tunisie ne subit plus seulement une politique défaillante : elle fabrique sa propre inculture par défaut, dans laquelle comportements et pratiques s’imposent plus vite que la loi.
L’architecte comme révélateur et acteur
Ce que je fais à une maison, je le fais à un corps. Ce que je fais à la société, je le fais à son avenir, dirait l’architecte qui, en tant qu’acteur culturel, occupe une place cruciale. Une formation élitiste et théorique ne suffit plus à légitimer un travail souvent précaire et mal valorisé. Ceux qui se limitent à la posture du prestige risquent d’alimenter le désordre latent.
À l’inverse, ceux qui réinventent leur rôle, adaptent leurs savoir-faire aux réalités locales et ouvrent le dialogue avec la population peuvent devenir des leviers de renaissance culturelle et civique. L’architecte peut alors transformer l’incivilité et la frustration en création et en projet collectif.
Vers un projet collectif
Ignorer cette dynamique, c’est laisser la société se réinventer par défaut. Et si rien n’est fait, la frustration, l’incivilité et la désespérance peuvent devenir la norme.
Le véritable défi pour les élites et pour l’architecte est de transformer cette énergie négative en un projet collectif tangible et intelligible. Avant que la culture émergente par défaut ne s’impose, il est urgent de reconstruire des repères communs et de réinventer le rôle de chacun dans la société tunisienne.
* Ancien président de l’Ordre des Architectes de Tunisie.
Tout le monde sait que le Mossad a infiltré jusqu’à la moelle la République islamique d’Iran cependant, et même si c’est à un degré moindre, les Iraniens ont intensifié leurs efforts pour faire la même chose en Israël. Des agents iraniens ont incité des Israéliens à commettre des actes de sabotage voire à fomenter des assassinats. Ces affaires ont soulevé des questions sur la cupidité, la crédulité et la loyauté au sein de la société israélienne. (Ph. Deux Israéliens, Vladislav Victorson et Anya Bernstein, accusés d’espionnage au profit de l’Iran, lors d’une audience à Tel-Aviv le mois dernier).
Imed Bahri
Le New York Times a publié une enquête d’Isabel Kershner consacrée à l’espionnage iranien en Israël affirmant que l’Iran a recruté des dizaines d’Israéliens comme espions.
Le journal américain précise que tout a commencé l’été dernier par un message sur la plateforme Telegram proposant de l’argent facile. Vladislav Viktorson, 31 ans, habitant une banlieue est de Tel Aviv, est tombé dans le piège. Selon des documents judiciaires israéliens, les premières missions qui lui ont été assignées consistaient à taguer des slogans antigouvernementaux dans son quartier dont un comparant le Premier ministre Benjamin Netanyahu à Hitler.
Les documents révèlent que Viktorson et sa compagne Anya Bernstein également accusée d’avoir mené ces missions, ont rapidement gagné 600 dollars.
Israéliens recrutés en ligne pour travailler pour l’Iran
Selon les enquêtes menées par la police et le service de sécurité intérieure le Shin Bet, l’auteur de la mission était un agent iranien.
Viktorson et Bernstein, arrêtés en octobre 2024, faisaient partie d’un groupe d’Israéliens recrutés en ligne pour travailler pour l’Iran.
Ces exigences ont ensuite évolué vers le sabotage de boîtiers électriques à l’acide sulfurique, l’incendie de voitures, l’utilisation de laque et de feux d’artifice pour fabriquer une bombe, et enfin, le complot visant à assassiner un professeur israélien pour 100 000 dollars.
Victorson et Bernstein sont tous deux jugés pour contacts avec un agent étranger, sabotage et, dans le cas de Victorson, complot en vue de commettre un meurtre.
L’initiative iranienne ajoute une nouvelle dimension à la guerre de l’ombre qui oppose Israël et l’Iran depuis des décennies. Israël cherche à freiner les ambitions nucléaires de Téhéran, tandis que l’Iran soutient des forces mandatées à la frontière israélienne.
Les efforts de recrutement iraniens restent modestes comparés à l’infiltration significative des cercles internes iraniens par les services de renseignement israéliens, comme en témoignent les frappes aériennes visant des sites nucléaires et de sécurité iraniens, de hauts responsables militaires et des scientifiques nucléaires en juin dernier. Les experts en sécurité affirment que l’Iran tente également de pénétrer les cercles internes d’Israël.
Recrutement de faible envergure d’Israéliens ordinaires
Cependant, des responsables et des experts israéliens affirment que le recrutement de faible envergure d’Israéliens ordinaires, qui s’est intensifié depuis le 7 octobre 2023, constitue une tentative iranienne d’inciter au conflit interne et de saper la société israélienne.
En construisant un vaste réseau, les agents iraniens espèrent trouver un petit nombre de personnes prêtes à tuer, à un moment où la réaction au recrutement soulève des questions sur la loyauté au sein de la société israélienne.
Les responsables iraniens n’ont pas répondu aux demandes de commentaires du NYT, tandis que certains responsables à Téhéran ont récemment accusé Israël d’être derrière une série d’incendies et d’explosions mystérieux survenus récemment en Iran.
Au cours de l’année écoulée, le gouvernement israélien affirme que le Shin Bet et la police ont découvert plus de 25 cas de recrutement rémunéré en ligne et déjoué des dizaines d’autres, détectés précocement. «Les Iraniens investissent des sommes et des ressources considérables dans une vaste campagne de recrutement d’Israéliens en ligne pour mener à bien des missions», a déclaré le Shin Bet dans un communiqué. Une campagne de sensibilisation lancée par le gouvernement israélien via des spots radio et les réseaux sociaux avertit que l’argent facile peut entraîner des années de prison.
Shalom Ben Hanan, ancien responsable du contre-espionnage au Shin Bet, a déclaré que les exigences croissantes envers Victorson sont des tactiques d’espionnage typiques. Ces tactiques commencent par de petites sommes d’argent pour de petites tâches, mais plus les tentations de l’argent et du risque augmentent, plus la tentation et l’auto-illusion augmentent, a ajouté Ben Hanan. Les personnes recrutées pour ce type de travail disent souvent: «Je l’ai fait, ce n’était pas si grave, je n’ai tué personne», ce qui les pousse à prendre ce risque potentiel.
Les responsables israéliens affirment que plus de 40 Israéliens ont été arrêtés au cours de l’année écoulée et ont été inculpés d’espionnage pour le compte de l’Iran ou devraient l’être, certains d’entre eux accusés de collaboration avec un ennemi en temps de guerre.
Introduit clandestinement en Iran à l’arrière d’un camion
L’un d’eux, Moti Maman, un homme d’affaires riche mais sans succès d’une soixantaine d’années, a été reconnu coupable et arrêté en septembre 2024. Il a été condamné à dix ans de prison en avril après avoir été introduit clandestinement en Iran à deux reprises à l’arrière d’un camion et avoir discuté de l’assassinat d’un homme politique israélien avec des agents des services de renseignement iraniens.
Les suspects représentent un échantillon représentatif de la société israélienne : juifs religieux et laïcs, migrants, citoyens arabes, un Israélien d’origine iranienne, un soldat et un habitant d’une colonie juive de Cisjordanie. Le plus âgé parmi eux est Moti Maman, le plus jeune a 13 ans.
Un examen de plus d’une douzaine d’actes d’accusation a révélé que les sommes d’argent perçues par les espions présumés, payées en cryptomonnaies, ne dépassaient généralement pas quelques milliers de dollars. La plupart des suspects ont été arrêtés quelques semaines après leur premier contact avec les intermédiaires.
Selon les actes d’accusation, les tâches des espions consistaient notamment à allumer des incendies et à trouver de l’argent, des armes ou des explosifs enterrés puis à les transporter vers divers lieux. Les cibles ont également été invitées à acheter des téléphones portables, des appareils photo et d’autres équipements ainsi qu’à télécharger un logiciel de cryptage pour sécuriser leurs communications. L’un des accusés, un migrant azerbaïdjanais vivant dans le sud d’Israël, aurait été invité à documenter son itinéraire à travers des sites militaires sensibles et à louer un appartement avec vue sur le port de Haïfa. Les actes d’accusation précisent que deux autres personnes ont été invitées à installer des caméras près du domicile du ministre israélien de la Défense mais ont renoncé à leur demande lorsqu’elles ont repéré une voiture de patrouille.
Deux jeunes hommes sont accusés d’avoir planifié un voyage en Iran pour s’entraîner à un assassinat en Israël.
Le week-end dernier, dans une petite salle d’audience de Tel-Aviv, Victorson et Bernstein étaient assis derrière une vitre, vêtus d’uniformes de prison marron, séparés par des gardes, tandis qu’un enquêteur de police, l’un des dizaines de témoins à charge dans cette affaire, témoignait. L’acte d’accusation précise que les deux hommes ont effectué des missions «en sachant que l’agent agissait pour le compte d’un État hostile ou d’une organisation terroriste» et qu’ils étaient conscients que leurs actions pouvaient porter atteinte à la sécurité nationale.
Pour la défense de son client, l’avocat Yigal Dotan, qui représente Victorson, a déclaré n’avoir connaissance d’aucun élément prouvant que la personne qui a appelé son client était originaire d’Iran ou d’un autre État hostile. Dans cette affaire, comme dans d’autres, l’Iran, l’espionnage ou le transfert d’informations à un ennemi ne sont pas explicitement mentionnés dans l’acte d’accusation, et les informations du Shin Bet sont classifiées. Dotan a déclaré que le Shin Bet avait interrogé Victorson sans lui permettre au préalable de contacter un avocat puis qu’il avait été interrogé par la police. Ces interrogatoires n’avaient été ni filmés ni documentés, ce qui rendait sa défense difficile.
«C’est une jeune fille malheureuse qui a été influencée»
L’enquêteur de police qui a comparu devant le tribunal n’a pas nié les allégations. Il a toutefois insisté sur le fait que l’agent recruté était iranien et ce, sur la base d’éléments reçus du Shin Bet. L’agence a affirmé que ses interrogatoires étaient menés conformément au protocole et sous contrôle judiciaire.
L’avocat de Bernstein, Yaroslav Matz, a déclaré qu’elle pensait travailler pour des activistes impliqués dans les guerres politiques et culturelles israéliennes. Elle a rencontré Victorson à l’âge de 17 ans. Matz a ajouté: «C’est une jeune fille malheureuse qui a été influencée par Victorson».
Selon l’acte d’accusation, Victorson a refusé plusieurs missions, notamment le sabotage de boîtiers électriques, par crainte d’être exposé à l’acide sulfurique. Le parquet a déclaré qu’il avait été envoyé filmer des manifestants antigouvernementaux à Tel-Aviv mais qu’un poste de contrôle de police l’en avait empêché. Il a tenté de tromper son recruteur en lui envoyant des photos trouvées en ligne. Selon l’acte d’accusation, Bernstein aurait encouragé Victorson à incendier des voitures. Matz a nié toute implication dans le complot visant à assassiner le professeur. Le recruteur a déclaré à Victorson que ce dernier l’avait trahi et qu’il ne travaillait pas pour le gouvernement, selon l’acte d’accusation.
Le recruteur a proposé de rembourser les dettes de Victorson s’il commettait l’assassinat du professeur, ou d’une autre cible, pour au moins 40 000 dollars. Il a promis de rencontrer le couple en Russie et de les emmener dans un pays tiers. Dans la nuit du 22 septembre, Victorson a annoncé à son recruteur qu’il pouvait acheter un fusil de précision pour 21000 dollars. Le recruteur a répondu qu’il le rappellerait dans deux jours. Victorson et Bernstein ont été arrêtés quelques heures après le contact avec le recruteur.
Le journaliste et dessinateur maltais-américain Joe Sacco vient de remporter l’Eisner Award 2025 dans la catégorie Best Single Issue/One-Shot pour son œuvre ‘‘The War on Gaza’’. La cérémonie s’est tenue lors de la San Diego Comic-Con, l’un des rendez-vous les plus prestigieux du monde de la bande dessinée.
Depuis ‘‘Palestine’’ jusqu’à ‘‘Footnotes in Gaza’’, Sacco s’est imposé comme un pionnier du journalisme en bande dessinée. Avec rigueur et puissance graphique, il raconte les conflits et donne voix aux populations oubliées, mêlant enquête journalistique et narration visuelle percutante.
Dans ‘‘The War on Gaza’’, il explore les conséquences de la guerre à Gaza avec sensibilité et précision. Publié par Fantagraphics Books et traduit en plusieurs langues, l’ouvrage confirme son rôle de passeur de mémoires, transformant l’horreur des conflits en récit visuel accessible et marquant.
Cette distinction illustre l’influence durable de Joe Sacco, dont les œuvres continuent de sensibiliser le public international aux injustices et aux réalités des conflits contemporains.
Etant donné les difficultés qu’ils ont à accéder aux prêts bancaires, notamment aux prêts à la consommation, un plus grand nombre de Tunisiens recourent désormais aux établissements de la microfinance, dont l’activité connaît un regain de dynamisme depuis quelque temps.
Les indicateurs et les données disponibles confirment que le secteur de la microfinance en Tunisie a considérablement progressé. Preuve en est que plus de 804 000 Tunisiens ont obtenu un prêt auprès de ces institutions.
Au cours des trois premiers mois de l’année, celles-ci ont accordé 113 583 prêts. Le recours à ce type de financement est devenu un mécanisme compensatoire pour accéder au crédit, ce qui a permis aux institutions de microfinance du pays de se positionner plus largement dans le paysage financier national.
L’analyste financier Bassam Ennaifer a déclaré à l’agence Tap que, compte tenu de la baisse notable des prêts bancaires non professionnels en Tunisie, «il convient de prêter attention à la demande croissante de microfinance, qui finance désormais une part importante des Tunisiens».
Au cours du premier trimestre 2025, l’encours des prêts de la microfinance a augmenté de 33,7 millions de dinars (MDT), a-t-il précisé, soulignant qu’une partie de la baisse des prêts bancaires a été absorbée par le secteur de la microfinance, malgré des taux d’intérêt élevés. L’obtention de ces prêts est plus facile et s’effectue sans les complications administratives du financement bancaire.
L’analyste a révélé que plus de 804 800 Tunisiens ont obtenu des prêts auprès des institutions de microfinance, pour un portefeuille total de prêts du secteur évalué à 2 596 MDT. Il a souligné que le montant des prêts accordés par les institutions de microfinance au cours du premier trimestre de cette année a atteint 564,9 MDT, contre 511,7 MDT au premier trimestre 2024.
Cela reflète la demande croissante de financement des Tunisiens, les banques étant réticentes à accorder des prêts, notamment des prêts à la consommation, a-t-il souligné.
Le montant moyen des prêts obtenus auprès des institutions de microfinance a atteint 4 974 dinars à fin mars 2025, contre 4 646 dinars à la même période de l’année précédente, ce qui, selon lui, témoigne des besoins financiers croissants des Tunisiens.
Ennaifer a indiqué qu’environ 13,3 % des personnes ayant obtenu un prêt au cours du 1er trimestre 2025 ont bénéficié d’un microfinancement pour la première fois, ce qui témoigne de l’importance du recours des Tunisiens aux institutions de microfinance.
La croissance de la consommation en Tunisie est principalement tirée par les institutions de microfinance plutôt que par les banques.
«La situation en Libye n’est pas une question internationale, mais purement interne, et que la solution ne peut être qu’inter-libyenne, sans aucune ingérence extérieure», a souligné Kaïs Saïed, réaffirmant la ferme position de principe de la Tunisie en faveur du libre choix du peuple libyen.
«Le peuple libyen est souverain et seul capable d’élaborer les solutions qu’il juge appropriées; il ne manque ni de compétence ni de volonté» a encore souligné Saïed, lors de son entretien, lundi 17 août 2025, avec Mohammed el-Menfi, président du Conseil présidentiel libyen, en visite de travail en Tunisie.
Les deux parties ont souligné la profondeur des relations historiques entre les peuples tunisien et libyen, ainsi que leur engagement commun à les renforcer et à les développer davantage dans tous les domaines, dans l’intérêt des deux nations et pour consolider la sécurité, le développement et la stabilité. Ils ont également souligné la nécessité d’agir rapidement pour surmonter toutes les difficultés et répondre aux aspirations de leurs peuples à une coopération et intégration accrues.
Selon un communiqué de la Présidence, le Président Kaïs Saïed a affirmé l’interdépendance des intérêts des deux peuples, soulignant que la sécurité et la stabilité de la Tunisie sont indissociables de celles de la Libye, et vice-versa. Il a souligné que les défis communs doivent être relevés ensemble, car la sécurité nationale des deux pays est une.
La réunion a également abordé la situation en Palestine occupée et le génocide en cours perpétré par les forces d’occupation sionistes.
Outre les dizaines de milliers de martyrs et de blessés, ces forces détruisent délibérément tous les moyens de subsistance, notamment en affamant la population et en la privant de nourriture, d’eau et de médicaments. Le peuple palestinien meurt de faim sous les yeux du monde entier.
Le chef de l’État a réitéré la position inébranlable de la Tunisie en faveur du droit du peuple palestinien à établir un État indépendant et pleinement souverain sur l’ensemble du territoire palestinien, avec Al-Qods pour capitale, soulignant que ce droit est inaliénable et ne s’éteindra pas avec le temps. Le peuple palestinien, par sa résistance héroïque, déjouera toute tentative visant à briser sa volonté ou à imposer des plans de déplacement.
Le Président de la République a ajouté que la légitimité internationale s’érode de jour en jour et sera remplacée par une nouvelle légitimité humanitaire, à mesure que les peuples du monde entier se soulèveront contre les crimes de l’entité sioniste occupante.
Les Accords d’Oslo ont été vendus par la communauté internationale et surtout les pays occidentaux, qui ne sont autres que les parrains d’Israël, comme la panacée pour régler le conflit israélo-palestinien et comme l’avènement de la paix, de la prospérité et la coexistence harmonieuse. Quand on voit le résultat catastrophique 32 ans plus tard, on constate que ces Accords étaient en réalité une escroquerie qui a conduit à l’asservissement du peuple palestinien et à son écrasement par le colonialisme criminel israélien.
Imed Bahri
Le génocide actuel à Gaza mais aussi les deux décennies de souffrance qui l’ont précédé dans le territoire palestinien le prouvent comme l’explique une analyse du quotidien londonien arabophone Al-Quds al-Arabi.
Depuis la signature des accords d’Oslo en 1993, les bases d’une politique de famine à Gaza ont été posées, avant qu’elle ne devienne un plan concret en 2007, lorsqu’Israël a fixé l’apport calorique minimal nécessaire pour subvenir aux besoins de la population de la bande de Gaza. Cette violence à long terme a atteint aujourd’hui son paroxysme meurtrier.
En 2012, l’organisation israélienne de défense des droits humains Gisha a obtenu une décision de justice obligeant le gouvernement israélien à publier des documents confirmant qu’il avait calculé les besoins caloriques de la population de Gaza dans le but de créer une crise alimentaire sans famine.
Maintenir Gaza au bord de l’effondrement
En 2021, soit deux ans avant la guerre génocidaire israélienne, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a constaté qu’environ 90% des enfants d’âge préscolaire de Gaza recevaient moins de 75% de leurs besoins alimentaires quotidiens.
Malgré l’accord de 2005 entre Israël et l’Autorité palestinienne visant à garantir la circulation des biens et des personnes entre Gaza et la Cisjordanie, cet accord est devenu un outil de renforcement des restrictions. Avant 2006, 400 camions entraient quotidiennement dans la bande de Gaza mais Israël a réduit ce nombre à 107. En 2007, seuls 67 camions étaient autorisés à y entrer quotidiennement.
Face à la pénurie de vivres, les Palestiniens ont dû creuser des tunnels pour faire passer clandestinement de la nourriture et des produits de première nécessité. Un câble diplomatique américain, fuité et publié par The Guardian, a révélé que les responsables israéliens affirmaient que leur objectif était de «maintenir l’économie de Gaza au bord de l’effondrement».
Les accords d’Oslo, qui semblait accorder l’autonomie aux Palestiniens, ont en réalité consolidé leur subordination forcée. Israël a conservé le contrôle total des frontières, de la sécurité et de la circulation des personnes et des biens, tandis que l’Autorité palestinienne s’est vu confier des fonctions limitées comme la santé et l’éducation. Comme l’a décrit le regretté universitaire américano-palestinien Edward Saïd, Oslo était «un instrument de capitulation palestinienne – un Versailles palestinien», l’écrivaine Salima Gul l’a récemment rappelé dans un article publié dans plusieurs médias progressistes américains.
Aujourd’hui, la famine a atteint un point que la manipulation des récits médiatiques ne peut plus occulter. Des images provenant de Gaza, comme celle de l’enfant Mohammed Zakaria affamé, ont choqué même certains médias occidentaux qui reproduisent depuis longtemps le récit israélien.
Cependant, les corrections ultérieures apportées à la couverture médiatique –sous la pression des groupes pro-israéliens– ont tenté de minimiser l’impact de ces images en remettant en question leur contexte.
Dans leurs analyses juridiques, des experts tels que Tom Dannenbaum et Alex de Waal affirment que la «famine due au siège» n’est pas seulement une violation humanitaire mais un crime de guerre de «torture communautaire» car elle compromet la capacité des populations à vivre ensemble et détruit les liens communautaires. De Waal souligne que le blocus de Gaza –le plus long de l’histoire moderne– pourrait être levé du jour au lendemain si Israël le décidait, démontrant ainsi qu’il s’agit d’une décision politique non inéluctable.
Retard de croissance et malnutrition chronique
Des études indiquent que les effets de la famine s’étendent sur plusieurs générations, même au niveau génétique, comme ce fut le cas lors du siège de Hama en 1982. À Gaza, où le blocus est en vigueur depuis près de deux décennies, les taux de retard de croissance et de malnutrition chronique ont atteint des niveaux alarmants depuis le début des années 2000.
La famine à Gaza n’est pas une politique aléatoire, c’est un outil pour punir et asservir une société entière, conformément à la logique de la «mort sociale» qui vise à démanteler le tissu humain et à transformer les gens en individus noyés dans le besoin, incapables d’espoir ou d’action.
De récents sondages israéliens ont montré que 79% des Juifs israéliens n’étaient pas perturbés par les informations faisant état de famine à Gaza, tandis que des foules se rassemblaient pour assister aux bombardements depuis les collines voisines, une scène qui témoigne de la brutalité des lieux et de la festivité de la violence.
L’écrivaine Salima Gul estime que ce qui se passe aujourd’hui à Gaza constitue la «version finale» des accords d’Oslo et que l’illusion d’une solution à deux États s’est évanouie avec la mort d’Oslo. Elle affirme que mettre fin au génocide et à la famine exige une décision américaine décisive mais Washington n’agira pas car cette politique sert sa position impérialiste tandis que les positions arabes et islamiques demeurent impuissantes ou complices.
Selon Gul, le message que la punition de Gaza envoie au monde est le suivant : Si vous luttez pour la liberté, vous serez affamés et anéantis, et personne ne viendra à votre secours mais malgré cela, certains Palestiniens persistent à résister et à survivre car les cris des affamés ne leur laissent pas d’autre choix.
Les agressions contre les jeunes médecins sont en passe de devenir quotidiennes dans nos hôpitaux. Ces scènes, qui se répètent, ne représentent pas des cas isolés, elles constituent désormais un fléau social, qui doit nous interpeller, d’autant que ce sont souvent les jeunes médecins résidents qui en font les frais. De quoi les dégoûter de leur métier et de leur pays, et les inciter à émigrer.(Ph. Alors que nos médecins partent à l’étranger, allons-nous bientôt recourir à des médecins étrangers dans nos hôpitaux publics?)
Raouf Chatty *
Samedi dernier, un jeune médecin résident en orthopédie et traumatologie a été violemment agressé ** dans un hôpital public à Sfax dans le cadre de son travail par un patient exigeant d’être soigné en priorité.
Ce grave forfait doit être condamné sans réserve. J’exprime mon entière solidarité avec la victime et avec les médecins et autres personnels de la santé dans nos hôpitaux publics dans des conditions souvent difficiles. J’appelle aussi les autorités publiques compétentes à se pencher sérieusement sur la situation des médecins dans les hôpitaux publics. Car il y a feu en la demeure et elles doivent prendre les devants et sévir contre les auteurs d’actes d’agression et de vandalisme.
Les agressions contre les jeunes médecins sont en passe de devenir quotidiennes dans nos hôpitaux. Il y a quelques semaines, un groupe d’individus déchainé avait attaqué un hôpital public à Kairouan, fracassant tout sur leur passage, terrorisant patients et personnels et occasionnant des pertes en matériel médical, évaluées à des centaines de milliers de dinars. Ces scènes, qui se répètent de manière régulière, ne représentent pas des cas isolés, elles constituent désormais un fléau social, qui doit nous interpeller.
Ce sont souvent les jeunes médecins résidents qui font les frais de ces agressions, alors qu’ils n’ont aucune responsabilité dans les conditions qui ont rendu ces agressions possibles. Ils en sont très affectés sur le plan psychique. Certains en viennent même à honnir le jour ils ont opté pour des études en médecine et consenti un investissement lourd en travail, efforts et en sacrifices.
Le médecin victime de l’agression à Sfax.
Des conditions extrêmement difficiles
Ces médecins exercent leur profession dans des conditions extrêmement difficiles, voire très dures. Les hôpitaux manquent cruellement de ressources humaines, de moyens techniques et d’équipements médicaux. Ces quinze dernières années, la situation a beaucoup empiré dans les hôpitaux publics, suite à la démission des autorités administratives et à la montée des syndicats qui imposent désormais leur loi.
En effet, de nouvelles pratiques ont vu le jour dans les hôpitaux. L’autorité des médecins chefs de services s’est effritée. Le personnel paramédical fort de son nombre et de son ancienneté a occupé le terrain et fait désormais la loi dans les hôpitaux. Ils sont devenus quasiment intouchables. Cette situation a généré beaucoup d’abus et de dépassements. Aussi ne se passe-t-il pas une semaine sans que l’on entende parler des brimades et des misères que ces jeunes médecins subissent dans le cadre de leur travail. Maillon faible de la chaîne, ils sont entre le marteau et l’enclume, pris en tenailles entre l’autorité du chef de service dont ils dépendent pour la validation de leur cursus de stage et celle, non moins réelle, des agents paramédicaux qui font la pluie et le beau temps. Ces derniers travaillent à leur guise et sont souvent réticents à satisfaire les demandes des jeunes médecins qu’ils sont censés servir.
Beaucoup de ces jeunes médecins souffrent de ce calvaire durant la période de résidanat qui, pour certaines spécialités médicales et chirurgicales, dure entre quatre et cinq ans répartis en dix semestres dans les hôpitaux de la République. Exploités et baladés, la suite de leur carrière dépend du bon vouloir de leur patron, voire parfois de l’humeur générale régnant dans l’établissement où ils opèrent.
Beaucoup de jeunes médecins se plaignent du manque d’encadrement dans certains services. D’autres ont peur de voir leur patron refuser de valider leur stage de formation, ce qui revient à les priver de candidature à l’examen national de spécialité en médecine. L’Organisation tunisienne des jeunes médecins (OTJM) a d’ailleurs souvent soulevé ces problèmes.
De quoi vous dégoûter de la médecine
Les jeunes médecins parlent aussi souvent du stress qu’ils endurent dans les hôpitaux publics et qui n’est pas contrebalancé par un salaire décent, de bonnes conditions de travail ou un statut social, et ce au terme d’un cursus médical de onze ans, six ans d’études de médecine souvent très pénibles après un baccalauréat scientifique mention très bien et cinq ans de résidanat dans les hôpitaux dans des conditions pitoyables.
Dans ces conditions, il ne faut pas faire la politique de l’autruche et jouer aux vierges effarouchées, en voyant ces jeunes médecins faire leurs valises et quitter le pays à la recherche de meilleures perspectives de carrière à l’étranger. Pour beaucoup d’entre eux, il s’agit souvent d’un aller sans retour. Ce qui constitue une perte pour eux, pour leurs parents et pour leur pays, qui a beaucoup investi dans leur formation.
L’honnêteté exige de compatir avec ces jeunes médecins ainsi contraints à l’exil, de se pencher sur leur situation et de remédier aux problèmes auxquels ils sont confrontés dans l’exercice de leur métier, au risque de voir bientôt les bacheliers brillants se détourner des études de médecine et laisser cette filière dévalorisée aux médiocres. Ce qui ne manquera pas de rejaillir négativement sur l’image de notre médecine et de nos médecins qui, jusqu’ici, sont généralement appréciés dans les pays étrangers où la plupart réussissent très bien.
* Ancien ambassadeur.
** Cela s’est passé à l’hôpital universitaire Habib Bourguiba à Sfax: un patient blessé à la main a agressé un médecin résident en lui assénant un coup sur la tête, lui faisant perdre conscience. Le jeune praticien a dû passer une nuit à l’hôpital, alors que l‘agresseura été laissé en liberté par la police, au prétexte qu’il était blessé lui-même.
Projeté depuis le 23 juillet 2025 au cinéma Variété à Marseille, ‘‘Frantz Fanon’’ d’Abdenour Zahzah retrace une étape décisive de la vie du psychiatre martiniquais, encore méconnu à l’époque, mais déjà en rébellion intérieure contre le système colonial. J’ai assisté à la séance du 16 août à 22h00, et malgré sa durée relativement courte (une heure et demie), le film impressionne par sa densité et sa profondeur.
Djamal Guettala
Ce psychiatre noir né en Martinique en 1925, en somme un Français pas comme les autres, s’est allié à la cause algérienne, jusqu’à en devenir un des leaders. Choisi par les militants de l’indépendance pour devenir leur représentant à l’étranger, il meurt portant la nationalité tunisienne en décembre 1961. Ce qui pourrait ressembler à un conte, tellement la situation semble aujourd’hui étrange, s’est déroulé en partie à Tunis, où il a vécu et travaillé entre 1957 et 1961.
L’ouverture du film est un choc. Une femme — incarnée par Houria Behloul — est assise sur des escaliers, face à une porte condamnée. La lumière crue, presque irréelle, découpe son corps immobile. Soudain, elle se lève, hurle, frappe la porte avec une rage désespérée, avant d’être maîtrisée par deux infirmiers et entraînée vers une séance d’électrochocs. Ce plan inaugural condense l’aliénation vécue par les patients, la brutalité des pratiques psychiatriques de l’époque, mais aussi la condition coloniale elle-même : une population enfermée, réprimée, frappant à une porte que l’Histoire maintient close. Dans ce rôle, Houria Behloul ne joue pas : elle habite la patiente. Son cri devient celui d’une foule silencieuse, celui de toutes les vies niées qui réclament justice.
La brutalité des pratiques psychiatriques
Le choix du noir et blanc n’est pas anodin. Il inscrit le récit dans une esthétique sobre et élégante, évoque les années 1950 et confère au film une gravité documentaire. Les contrastes de lumière et d’ombre soulignent la tension dramatique et traduisent le combat intérieur de Fanon, partagé entre son rôle de médecin et son refus d’un système injuste.
À son arrivée à l’hôpital de Blida-Joinville, Fanon (interprété avec intensité par Alexandre Desane) découvre une institution traversée par les fractures coloniales : un pavillon pour les Français, un autre pour les «musulmans». Cette ségrégation, glaçante dans un lieu censé être dédié au soin, reflète la hiérarchie coloniale dans toute sa brutalité. Le chef du pavillon musulman, campé par Omar Boulakirba, incarne cette tension entre obéissance institutionnelle et malaise moral. Lors d’une réunion marquante, un responsable lance aux médecins : «Qui sait, peut-être qu’un jour cet hôpital portera le nom de l’un d’entre vous.» Une phrase qui résonne aujourd’hui avec le CHU Frantz-Fanon de Blida.
Le film met en lumière l’innovation majeure de Fanon : la psychothérapie institutionnelle. Contrairement aux pratiques centrées sur le patient isolé, cette approche explore la dynamique du groupe, les relations entre soignants et soignés, et le rôle de l’institution elle-même dans la guérison. En réorganisant les espaces, en encourageant la participation active des patients, en faisant des tensions internes des données cliniques, Fanon invente une psychiatrie profondément humaine. Dans le contexte colonial, ce geste prend une dimension politique : montrer que ségrégation et oppression sont sources de pathologies.
La psychothérapie comme dynamique du groupe
Abdenour Zahzah s’appuie sur les notes cliniques de Fanon et les témoignages de ses collègues pour tisser une fiction documentée. La sobriété des dialogues, la justesse des scènes, la concision des archives visent l’essentiel : la réflexion de Fanon sur la déshumanisation coloniale, qu’il résumait ainsi : «L’Arabe […] vit dans un état de dépersonnalisation absolue. Le statut de l’Algérie ? Une déshumanisation systématisée.»
Certes, on peut regretter que le film hésite parfois entre documentaire et fiction, et que certaines archives auraient mérité un développement plus ample. Une durée plus longue — trois heures par exemple — aurait permis d’élargir encore la fresque. Mais ce parti pris de concision a un mérite : il maintient le spectateur au plus près de l’expérience humaine de Fanon et de ses patients, sans dispersion.
Frantz Fanon est un film exigeant et immersif : huis clos, interprétations puissantes, tension constante. Il n’offre ni facilité ni complaisance, mais une plongée rare dans l’histoire psychiatrique et coloniale, un portrait intime et politique d’un homme en devenir, dont la lucidité et les choix ont façonné une pensée révolutionnaire toujours actuelle.
Et si une image devait rester, ce serait celle d’Houria Behloul, frappant de toutes ses forces une porte fermée. Parce qu’elle condense à elle seule le cinéma de Zahzah et l’esprit de Fanon : un cri qui traverse le temps, un cri qui refuse d’être enfermé, un cri qui exige d’ouvrir les portes.
L’auteur de ce texte se présente comme «payeur de taxe insatisfait» et ce sont des millions de Tunisiennes et de Tunisiens dans son cas, contribuables honnêtes, qui se plaignent de la médiocrité des services publics, s’ils existent, et de la gabegie générale régnant dans le pays du fait d’une administration souvent aux abonnés absents.(Ph. Les agents de la municipalité de Carthage sont occupés à libérer la Palestine. Ils n’ont pas le temps pour s’occuper du ramassage des ordures et autres corvées).
Abdelwaheb Jebri *
Pendant 23 ans, j’ai payé mes taxes municipales avec rigueur et loyauté, convaincu que c’était là le fondement du contrat social : je contribue, la commune me sert. Mais aujourd’hui, je ne peux que constater l’échec total de ce pacte. Carthage, ma ville, est devenue le symbole d’une administration absente, d’une gestion défaillante, et d’un mépris institutionnalisé envers ses citoyens.
Tout a commencé par une demande simple : obtenir un numéro pour ma maison. Une formalité, pensais-je. Ce fut en réalité le début d’un parcours kafkaïen. Des semaines de démarches, des portes closes, des rendez-vous fantômes, des responsables invisibles. Chaque interaction avec la municipalité est une épreuve, chaque silence un affront.
Une cacophonie numérique
Excédés par cette inertie, les citoyens ont fini par attribuer eux-mêmes des numéros à leurs maisons, de façon arbitraire, sans ordre ni logique, dans le seul but d’avoir une adresse postale permettant aux facteurs de livrer leur courrier. Le résultat est aussi absurde que révélateur : dans une même rue, on trouve des maisons portant des numéros à deux chiffres précédant des numéros à un chiffre, ou l’inverse. Une cacophonie numérique qui illustre le désengagement total de l’administration et le bricolage citoyen devenu nécessité.
Ma maison, pourtant bien réelle et solidement bâtie, semble souffrir d’un mal étrange : l’invisibilité municipale. Elle donne fièrement sur deux rues — l’Avenue Hedi Chaker, grande et fréquentée, et la rue Hassen ibn Noômen, paisiblement aménagée depuis 2002 — mais elle n’a pas de numéro. Et pourtant, malgré cette double exposition, elle reste officiellement introuvable. Ni numéro à l’avant, ni numéro à l’arrière. Rien. Un exploit bureaucratique qui défie les lois de la géolocalisation. Comme si elle avait été construite dans une dimension parallèle où l’administration n’a pas encore posé le pied.
Devant cette énigme bureaucratique, j’ai dû me résoudre à une solution aussi inventive qu’improbable : emprunter l’adresse de ma belle-famille pour recevoir mon courrier. Oui, ma maison est là, mais elle vit sous l’identité d’une autre. Une sorte de témoin protégé du système postal. On pourrait presque croire que c’est une stratégie de discrétion, sauf que même les facteurs hésitent entre rire et pleurer.
C’est une situation qui ferait un excellent sketch, si elle ne révélait pas si crûment le naufrage du service public. Car dans un État censé servir ses citoyens, devoir faire appel à sa belle-famille pour exister sur une enveloppe, c’est tout sauf banal.
Et pendant que je me bats pour un droit élémentaire, la ville se délite. Les ordures s’amoncellent, les sacs éventrés jonchent les trottoirs. Le soir, l’obscurité règne : les réverbères sont morts, et l’insécurité s’installe. Carthage n’est plus qu’une ombre d’elle-même, abandonnée par ceux qui devraient la servir.
A quoi bon payer des taxes ?
Alors je pose la question : à quoi bon payer des taxes quand les services sont inexistants ? Pourquoi continuer à financer une institution qui nous ignore, qui nous méprise, qui nous abandonne ?
Ma décision est claire : je suspends le paiement de mes taxes municipales. Ce n’est ni un caprice, ni une provocation. C’est un acte de résistance. Un signal d’alarme. Car la patience des citoyens a des limites, et la loyauté ne peut être unilatérale.
Je m’adresse aujourd’hui à vous, Monsieur le Président : Carthage mérite mieux. Elle mérite une administration digne, des services fonctionnels, une écoute réelle. Il est temps de secouer cette inertie, de réveiller les consciences, de remettre le citoyen au cœur de l’action publique.
Le contrat social doit être rétabli. Et cela commence par le respect