L’après-Alaska : Trump a-t-il la force et le courage d’aller jusqu’au bout ?
Le surprenant sommet de l’Alaska a donc eu lieu et Trump n’a pas eu droit à la moindre concession de la part de son invité qui a pourtant bénéficié d’un accueil des plus chaleureux. Le mainstream media de part et d’autre de l’Atlantique a descendu en flammes le président américain non seulement pour n’avoir rien obtenu de Poutine, mais aussi pour avoir décidé tout seul du sommet et tenu à l’écart Zelensky, « le principal intéressé », et les alliés européens.
En dehors du mainstream media, plusieurs commentateurs américains, à l’instar des professeurs Jeffrey Sacks, John Mearcheimer, Michael Wolff, du colonel à la retraite Douglas Mc Gregor, du juge Andrew Napolitano et bien d’autres, ont donné raison à Poutine d’avoir refusé la demande occidentale de cessez-le-feu. Car, soutiennent-ils, « le conflit russo-ukrainien ne sera pas résolu par un cessez-le-feu de quelques semaines, mais en se penchant sur les causes réelles du conflit ».
Ces causes réelles, il faut bien le rappeler, ont été accumulées sur une durée de 30 ans par les présidents américains successifs qui ont contribué, chacun à sa manière, à instiller leur dose de venin dans la relation entre la Russie, d’une part, et les États-Unis et leurs alliés européens, d’autre part, jusqu’à la rendre explosive.
C’est Bill Clinton qui entama la course au désastre en 1994, en ouvrant les portes de l’Otan à la République tchèque, la Hongrie et la Pologne, en dépit de l’engagement pris trois ans plus tôt par Bush père et son secrétaire d’État James Baker que « l’Otan n’avancera pas d’un iota en direction de l’Est ». Et quand des journalistes ont rappelé cet engagement à Bill Clinton, il a eu cette réponse indigne d’un président d’une grande puissance : « Les États-Unis tiennent leurs engagements, à moins qu’ils changent d’avis et ne veulent plus les tenir ».
La course au désastre a continué avec George W. Bush qui, non seulement a accueilli plus d’anciens membres du Pacte de Varsovie à l’Otan, mais au sommet de Budapest de cette organisation, il a eu l’infernale idée d’inviter l’Ukraine et la Géorgie à se préparer à adhérer à l’Otan, ignorant la sévère mise en garde de Poutine, présent à ce sommet.
Barack Obama a accéléré radicalement la course au désastre en donnant son feu vert en février 2014 à la CIA de renverser le gouvernement légitime du président Ianoukovitch qui œuvrait pour le développement de l’Ukraine sur la base de la neutralité et des bonnes relations à la fois avec l’Occident et avec la Russie. En réaction, la Russie a repris la Crimée que la Grande Catherine a achetée en offrant un bon prix aux Turcs ottomans, mais que Khrouchtchev a offerte à la République soviétique d’Ukraine en 1954, à l’occasion… du 200e anniversaire de l’intégration de cette dernière à la Russie.
De 2014 à 2022, les gouvernements de Porochenko et de son successeur Zelensky ont mené une véritable guerre contre les populations russophones du Donbass, en lâchant contre elles les milices bandéristes nazies, dont l’idole Stépan Bandera fut l’auxiliaire ukrainien de Hitler pendant l’attaque de l’armée nazie contre l’Union soviétique en 1942…
De janvier 2021 (arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche) à février 2022 (déclenchement de la guerre), le Kremlin a tout fait pour obtenir l’accord de Biden sur un arrangement sécuritaire en Europe qui prendrait en considération les soucis sécuritaires de la Russie et qui fermerait la porte de l’Otan à l’Ukraine. Mépris total des demandes de la Russie avec cette réponse répétée ad nauseum par Biden et ses collaborateurs : « Ce n’est pas à la Russie de décider qui sera ou non membre de l’Otan ».
Sans parler bien sûr des accords de Minsk 1 et 2 utilisés, selon François Hollande et Angela Merkel, « pour détourner l’attention de la Russie et armer l’Ukraine pour la préparer à la guerre »…
Sans parler aussi de l’accord d’Istanbul de mars 2022 entre Russes et Ukrainiens qui aurait pu mettre fin au conflit trois semaines après son déclenchement, n’eût été l’interférence de Joe Biden et de Boris Johnson qui ont forcé Zelensky à ignorer l’accord et à poursuivre la guerre.
Et malgré tout cela, jusqu’à ce jour, hommes politiques et médias de part et d’autre de l’Atlantique continuent de parler de « guerre non provoquée menée par le dictateur Poutine contre la démocratie ukrainienne ».
C’est en ayant en tête toutes ces données que les commentateurs indépendants aux États-Unis et en Europe, par objectivité et honnêteté, donnent raison à Poutine de refuser le cessez-le-feu et d’insister sur sa condition principale : traiter les causes réelles du conflit.
Maintenant, comme on dit, les carottes sont cuites. L’Ukraine et ses alliés ont perdu la guerre. L’insistance des élites occidentales au pouvoir sur l’obtention d’un cessez-le-feu n’est rien d’autre qu’une tentative désespérée de cacher une défaite gravement embarrassante pour elles vis-à-vis de leurs populations. Celles-ci ne manqueront pas de leur demander des comptes sur les centaines de milliards d’euros du contribuable européen qui ont été détournés pour financer la guerre au lieu de négocier des arrangements sécuritaires avec la Russie.
Le déni de la défaite ne peut pas durer indéfiniment. Des voix commencent à se faire entendre dans le mainstream media occidental pour dire que rien ne va plus. L’une de ces voix est celle du quotidien londonien The Daily Telegraph qui a écrit dans son édition du 14 août : « L’Ukraine a perdu. Il n’y a plus d’espoir. Il est temps de mettre de côté les indignations passionnées et les vœux pieux et faire face à ce qui sera inscrit dans l’histoire comme le plus grand échec de la politique étrangère occidentale du XXIème siècle. L’Ukraine a perdu la guerre contre la Russie ».
Trump ne peut ignorer cela. Mais a-t-il la force et le courage d’agir en conséquence face à des néoconservateurs fanatiques, un complexe militaro-industriel vorace et des élites gouvernantes européennes terrorisées à l’idée de devoir rendre des comptes à leurs populations ?
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