Yury Revich, 33 ans, est un virtuose du violon issu d’une famille de musiciens classiques depuis quatre générations du côté paternel. Né en Russie dans un milieu intellectuel, il commence le violon à 5 ans et participe très tôt à des concours et festivals, dont celui de Colmar à 10 ans, qui lui fait découvrir la France. Formé dans les meilleures écoles d’Italie et d’Autriche, il s’installe à l’aube de l’âge adulte à Vienne, obtient la nationalité autrichienne et se produit dans de prestigieuses salles de concert. À seulement 18 ans, il joue au Carnegie Hall de Manhattan. Il se produira pour la première fois en Tunisie, le 16 août 2025, à l’amphithéâtre d’El Jem pour la clôture du festival, une manière élégante de conclure cet événement.
Nous l’avons rencontré entre deux répétitions, le 14 août à 14h, à la Cité de la Culture de Tunis. Cette interview a pu se faire grâce à la présence d’Ursula Vavrik, conseillère artistique de Yury Revich. Il convient également de rappeler l’importance de la participation autrichienne à ce festival de musique symphonique d’El Jem, organisé à l’occasion du tricentenaire des relations diplomatiques entre la Tunisie et l’Autriche.
Quelle est l’importance pour vous de jouer dans un lieu historique comme l’amphithéâtre romain d’El Jem, classé au patrimoine mondial de l’Unesco ?
L’amphithéâtre d’El Jem, classé au patrimoine mondial de l’Unesco, réunit deux formes d’art intemporelles : la musique et l’architecture, toutes deux parties intégrantes de l’Histoire de l’art. Non seulement cela permet de préserver la musique, mais aussi l’architecture, et ce moment est magnifique et inspirant à vivre et à jouer ici.
Comment avez-vous préparé le concert avec l’Orchestre symphonique tunisien pour la clôture du festival ?
Nous sommes actuellement en pleins préparatifs. C’est un grand plaisir de travailler avec des musiciens locaux, mais aussi avec certains musiciens autrichiens. Les musiciens s’entendent très bien, il y a une belle énergie, et nous parlons ensemble le langage universel de la musique. C’est aussi une grande joie de travailler avec les musiciens locaux de Tunis, très réceptifs, enthousiastes, amicaux, très talentueux, et c’est un beau moment de préparation ensemble.
Pouvez-vous partager avec nous ce que représente aujourd’hui la musique classique pour vous, et son rôle dans le monde contemporain ?
La musique classique occidentale, ainsi que la musique classique arabe, indienne, chinoise, etc., la musique classique de différentes régions doivent être préservées et protégées, et c’est ce que nous faisons ici. Comme je l’ai dit, la musique est un langage universel, un langage de paix, qui réunit les cultures, les peuples de différentes origines, religions, et la musique classique, peu importe d’où elle vient, est un formidable vecteur de rapprochement.
En tant que violoniste virtuose, comment transmettez-vous vos émotions et votre passion à un public aussi diversifié, comme lors du festival en général ?
Je pense, comme je l’ai mentionné, que la musique est un point de connexion. La neuroscience a prouvé que la musique peut réellement émouvoir, rendre les gens meilleurs, les connecter, créer la paix. Moi-même, je m’exprime non seulement à travers le violon, mais aussi en tant que compositeur, en créant ma propre musique. Cette année, je présente notamment une pièce originale intitulée Awakening, inspirée par la nature, et la jouer en plein air est une source d’inspiration supplémentaire. Créer mes propres œuvres est très important, mais lorsque j’interprète des œuvres d’autres compositeurs, je suis traducteur, interprète de leur musique pour le public. Lorsque je joue ma propre musique, je m’exprime avec mon propre langage auprès du public.
Quelle est la place de l’innovation dans votre interprétation musicale, spécialement lors d’un concert où vous mêlez virtuosité classique et modernité ?
Je pense que ce n’est pas à moi de juger de mes compétences en innovation. Mais je travaille beaucoup avec la musique moderne, en tant que compositeur, avec la musique électronique, la musique populaire, et je suis curieux de différents styles, dont la musique tunisienne. Pour moi, l’innovation, c’est respecter la tradition, puis bâtir sur elle de nouvelles choses, de nouvelles connexions, de nouvelles musiques.
Un conseil pour les musiciens tunisiens ?
Le conseil que je donnerais à tous les musiciens est de garder l’esprit ouvert, d’écouter beaucoup de musique, de découvrir différents styles : arabe, indien, chinois, russe, occidental, latino, etc. Tout cela peut nous inspirer, et plus on découvre de musiques, plus on peut créer du neuf et du beau. Un autre conseil : promouvoir la musique auprès de ceux qui la connaissent peu, car notre mission est de l’apporter à tous, la musique peut vraiment nous unir.
Avez-vous déjà écouté de la musique arabe, tunisienne ?
Bien sûr. En Europe, par exemple, nous avons des populations très mélangées, avec des personnes originaires de nombreux horizons. Cela nous permet d’écouter et de découvrir de grandes musiques du monde entier, que ce soit à Vienne, à Paris ou à Londres, grâce à la radio ou ailleurs. C’est formidable.
Quelle est votre devise dans la vie ?
Je ne sais pas, simplement ne jamais abandonner.
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