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La Turquie ne va pas se séparer du gaz russe

La Turquie ne soutiendra pas le projet de l’UE de mettre fin aux importations de gaz russe. Ce qui menace les efforts de Bruxelles d’éliminer la dépendance restante du bloc à l’énergie russe.

Comme l’a rapporté Capital vendredi 8 août, la Turquie, à la frontière avec l’UE, a longtemps été un canal pour l’énergie russe à destination de l’Europe. Ce qui devrait maintenant changer, suite à une récente proposition de l’UE visant à éliminer toutes les importations de gaz naturel russe d’ici la fin de 2027.

En effet, Bruxelles souhaite imposer davantage d’exigences de surveillance afin de mieux suivre l’acheminement du gaz russe vers l’UE. Pour ce faire, l’UE aura probablement besoin d’informations provenant de pays de transit clés, comme la Turquie. Et Ankara n’est pas intéressée.

« L’UE peut décider ou non d’interdire totalement les importations de gaz russe. Mais la Turquie estime que des sanctions unilatérales risquent de perturber les économies et d’accroître les inquiétudes en matière de sécurité énergétique pour tous ». C’est ce qu’a déclaré le ministère turc des Affaires étrangères dans un communiqué. « La République de Turquie n’applique que les sanctions approuvées par le Conseil de sécurité des Nations unies », a-t-il précisé.

Cette réticence, avertissent les experts, pourrait ouvrir une brèche qui permettrait au gaz russe de continuer à affluer dans l’Union européenne sans être détecté bien après la date limite.

« La réticence de la Turquie à se conformer aux dispositions de surveillance de l’UE pourrait créer des défis pour la mise en œuvre efficace du règlement proposé. En particulier compte tenu du rôle croissant de la Turquie en tant que transit et plaque tournante potentielle pour le gaz russe ». Ainsi estime Ville Niinistö, député européen vert et ancien ministre finlandais de l’Environnement, qui dirige les travaux du Parlement européen sur le projet de loi.

Plus de trois ans après le début de la guerre en Ukraine, l’UE tente toujours de se sevrer complètement de l’énergie de Moscou et de couper une source de revenus essentielle pour le Kremlin.

Par ailleurs, l’UE a réussi à réduire ses importations de gaz d’environ deux tiers depuis 2022. Cependant, elle a continué à acheter des quantités importantes de GNL à Moscou, parallèlement à des approvisionnements limités par gazoduc.

En juin, Bruxelles a présenté une proposition de loi visant à lutter contre ces importations par une interdiction progressive et générale. Et ce, en commençant par les contrats à court terme cette année et en supprimant progressivement les accords à plus long terme en 2027.

Pour y parvenir, la Commission européenne, l’organe exécutif de l’UE, souhaite mieux contrôler les importations d’énergie en exigeant des entreprises important du gaz russe qu’elles fournissent « toutes les informations pertinentes » nécessaires à l’évaluation de l’origine du combustible, y compris les contrats d’approvisionnement. Les capitales et le Parlement européen négocient actuellement la législation.

En réalité, il est extrêmement difficile pour l’UE de retracer l’origine des flux. Car il n’existe aucun moyen d’en vérifier la provenance. En outre, les contrats d’approvisionnement sont confidentiels et le carburant passe souvent par de multiples intermédiaires avant d’atteindre sa destination.

De plus, les règles proposées n’imposeraient aucune obligation juridique à la Turquie, qui n’est pas membre de l’UE. Cependant, comme les contrats n’indiquent pas toujours clairement la provenance du combustible, les entreprises européennes pourraient devoir demander des informations complémentaires à leurs homologues turques si elles souhaitent continuer à importer du gaz.

En vertu de l’accord signé en 2023, la société énergétique bulgare Bulgargaz peut commander des cargaisons de gaz naturel liquéfié (GNL) dans les terminaux turcs. Lesquelles sont ensuite livrées à la société publique turque Botaş avant d’être renvoyées à Bulgargaz à la frontière de l’UE.

Le problème est que « nous ne savons pas si ce gaz livré à la Bulgarie est le même » que celui qui arrive aux terminaux turcs. Ce qui signifie que l’UE ne peut pas être sûre qu’il n’a pas été « mélangé » avec d’autres approvisionnements entre-temps. Et compte tenu du prix relativement réduit du gaz naturel de Moscou, il existe un « risque élevé » qu’une grande partie de ce gaz soit russe. De même qu’un risque similaire s’applique à l’interconnexion Kipi entre la Grèce et la Turquie.

A noter qu’en 2024 l’UE a importé 1,9 milliard de mètres cubes de gaz via les deux voies, selon les données de la plateforme ENTSO-G. Un chiffre qui pourrait atteindre 5,4 milliards de mètres cubes. Bien que ce chiffre soit dérisoire par rapport aux 150 milliards de mètres cubes que la Russie a exportés vers l’UE, il représente tout de même un cinquième des importations totales du bloc via les gazoducs en provenance de Moscou l’année dernière.

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Visa Schengen : Les Tunisiens sont-ils concernés par la nouvelle règle européenne ?

Alors que l’Union européenne a annoncé récemment un durcissement de l’application des règles liées à la demande de visa Schengen pour les ressortissants algériens, de nombreuses interrogations émergent en Tunisie. Les Tunisiens sont-ils eux aussi concernés par cette nouvelle mesure ?

Une communication officielle ciblée sur l’Algérie

Depuis l’annonce officielle de la Délégation de l’Union européenne en Algérie, le 4 août 2025, les voyageurs algériens sont soumis à une stricte application d’une règle déjà existante dans le Code Schengen : celle qui impose de déposer sa demande de visa auprès du consulat du pays constituant la destination principale du séjour en Europe. Un visa Schengen délivré par la France ou l’Italie ne peut plus être utilisé librement pour voyager majoritairement dans d’autres États membres.

Cette clarification vise à mettre fin à certaines pratiques, comme le choix d’un consulat plus rapide, même si le pays en question n’était pas la véritable destination. Les autorités européennes entendent ainsi renforcer le contrôle sur les itinéraires déclarés et améliorer la gestion des flux migratoires en provenance d’Algérie.

Désormais, les ressortissants algériens devront impérativement déposer leur demande de visa auprès du consulat du pays qui constitue leur destination principale en Europe, sous peine de refus ou d’annulation du visa à la frontière.

Cette règle n’est pas nouvelle en soi. Elle est prévue par le Code communautaire des visas Schengen. Toutefois, ce rappel officiel traduit une volonté politique claire : celle de renforcer l’application stricte de cette règle en Algérie, en réponse à une hausse significative des demandes et à certains détournements observés dans la pratique.

Qu’en est-il pour la Tunisie ?

Du côté de la Tunisie, aucun communiqué similaire n’a été publié à ce jour par la Délégation de l’UE ni par les consulats des pays membres (France, Italie, Espagne…). La règle de la “destination principale” est bien en vigueur, comme partout ailleurs dans les pays tiers, mais aucun renforcement spécifique ou contrôle intensifié n’a été annoncé officiellement pour les ressortissants tunisiens.

Les consulats européens en Tunisie (notamment ceux de la France, de l’Italie et de l’Espagne…, via leurs prestataires France-Visas, VFS Global et BLS International) continuent de mentionner cette exigence dans leurs procédures, sans en faire une priorité nouvelle ni la mettre en avant dans leur communication récente.

Ce contraste s’explique par plusieurs facteurs. L’Algérie fait partie des pays enregistrant le plus grand nombre de demandes de visa Schengen chaque année, ce qui engendre une pression accrue sur les services consulaires et des pratiques parfois non conformes (comme le dépôt de demandes dans des consulats jugés “plus souples” sans que cela corresponde à la destination réelle du séjour).

En Tunisie, le volume des demandes reste important, mais dans des proportions moins critiques. Par conséquent, aucune mesure particulière d’encadrement renforcé n’a été jugée nécessaire pour l’instant.

Ceci pour dire que si les Tunisiens ne sont pas directement concernés par la communication récente de l’UE en Algérie, ils doivent toutefois rester vigilants, car la règle de la destination principale s’applique à tous les demandeurs de visa Schengen, quelle que soit leur nationalité et ne pas la respecter peut entraîner le refus de visa, ou dans certains cas, des complications à l’entrée sur le territoire européen.

Donc, pas de panique pour les Tunisiens, mais un rappel utile à respecter les règles existantes pour éviter tout désagrément lors des prochains voyages vers l’espace Schengen.

Tourisme en Europe : l’Espagne, la France et l’Italie parmi les plus grands bénéficiaires en 2023

L’Union européenne a perçu 25,9% des recettes mondiales du tourisme international en 2023, selon des données publiées, lundi, par Eurostat, l’office statistique de l’UE.

Sur ces recettes, le tourisme intra-UE représente 15,2%, tandis que 10,7% provenaient des touristes hors Union européenne, précise l’organe européenne, qui a combiné les chiffres clés disponibles des 27 États membres et de sources internationales.

Par État membre, l’Espagne, la France, l’Italie, l’Allemagne, le Portugal, l’Autriche, la Grèce, les Pays-Bas, la Croatie et la Pologne se classent parmi les pays enregistrant au moins 1% des recettes mondiales du tourisme international.

D’après Eurostat, en 2023, 18 pays hors UE ont perçu au moins 1% des recettes mondiales du tourisme international. Les États-Unis ont enregistré une part de 12,3%, bien supérieure à celle des autres pays hors UE. Le Royaume-Uni occupait la deuxième place (4,8 %).

Le secteur européen du tourisme, composé des prestataires traditionnels de voyages et de services touristiques, englobe 2,3 millions d’entreprises, essentiellement des petites et moyennes entreprises (PME), et emploie quelque 12,3 millions de personnes, selon la Commission européenne.

Le tourisme, qui représente 10% du PIB de l’Union, est considéré comme un moteur économique ‘’essentiel’’, qui a une incidence significative sur la croissance, l’emploi et le développement social.

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Tunisie | Hausse des recettes touristiques de 8,2% au 20 juillet 2025

Le directeur général de l’Office national du tourisme (ONTT), Mehdi Haloui, a fait savoir qu’au 20 juillet 2025, la Tunisie avait accueilli 5 279 768 touristes, enregistrant une hausse de 19,8% par rapport à l’année 2024 et une augmentation de 16,2% par rapport à l’année de référence 2019.

Les nuitées ont également connu, à la même date, une progression de 7,1%, atteignant le chiffre de 12 362 062. Idem pour les revenus touristiques qui ont atteint 3 899,1 millions de dinars (MDT), soit une hausse de 8,2% par rapport à 2024, a-t-il ajouté, lors d’une conférence de presse tenue ce vendredi 1er août 2025.

Le taux d’occupation jusqu’au 20 juillet s’est établi à 35,3%, très faible certes, mais en hausse de 2,1% par rapport à 2024.

Le marché européen a connu une croissance de 10,7 %, avec 1 592 816 visiteurs en provenance des pays de l’Union européenne (UE).

Quant aux pays voisins, ils ont enregistré une hausse de 9,8%, avec 2 748 687 touristes, dont 1 246 000 Libyens et 1 459 000 Algériens.

Enfin, le nombre de Tunisiens résidant à l’étranger ayant visité la Tunisie a augmenté de 7,5 %, atteignant 805 361 visiteurs.

I. B.

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La Palestine, angle mort de la politique étrangère de l’Italie de Meloni

«L’initiative urgente à prendre est la reconnaissance nationale immédiate de l’État de Palestine» est l’intitulé de de l’appel lancé par 35 anciens ambassadeurs italiens dans une lettre ouverte adressée à la Première ministre Giorgia Meloni, publiée dimanche 27 juillet 2025. (Ph. Meloni n’est pas seulement insensible aux souffrances des Palestiniens – son fond raciste y est pour beaucoup -. Elle est aussi une pro-israélienne notoire).

Latif Belhedi

Les signataires, – dont Pasquale Ferrara, Pasquale Quito Terracciano, Ferdinando Nelli Feroci, Stefano Stefanini, Rocco Cangelosi et Vincenzo De Luca – demandent de «suspendre toute relation et coopération» avec Israël dans les secteurs militaire et de la défense; de «soutenir au sein de l’Union européenne (UE) toute initiative impliquant des sanctions individuelles» ; et de «se joindre au consensus européen» pour la suspension temporaire de l’accord Israël-UE.

«L’horreur perpétrée dans la bande de Gaza par Israël contre la grande majorité des civils sans défense» pousse les ambassadeurs à abandonner le langage prudent de la diplomatie, le langage secret réservé aux initiés. Et à prendre une initiative aussi inhabituelle que pertinente par son contenu et son timing.

L’ambiguïté n’est plus possible

Cette voix s’élève haut et fort dans le débat politique divisé depuis des jours – majorité d’un côté, aux côtés de la Première ministre Giorgia Meloni dont la position sur cette question est presque calquée sur celle du président américain Donald Trump, opposition de l’autre – sur la reconnaissance ou non, au moins, de l’État de Palestine.

L’appel compte d’ailleurs parmi ses signataires des personnalités qui ont occupé pendant des années des postes institutionnels de premier plan : au sein de l’UE, au Palazzo Chigi, présidence du Conseil des ministres, à l’Otan et au Quirinal, la présidence de la république, ainsi que, bien sûr, dans les plus hautes fonctions diplomatiques. «Il y a des moments dans l’histoire où l’ambiguïté ou le juste milieu ne sont plus possibles», avertissent-ils. Et d’ajouter : «Et ce moment est venu pour Gaza».

Les anciens ambassadeurs ont dénoncé «les violations flagrantes des droits de l’homme et de la dignité humaine» et «les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et le mépris constant du droit international et du droit humanitaire, dont le gouvernement israélien, comme tous les gouvernements, doit répondre.» Face à tout cela, «les déclarations, aussi nécessaires soient-elles, ne sont plus utiles», mais «des gestes politiques et diplomatiques concrets et efficaces».

Silence radio de Giorgia Meloni

Cet appel a été accueilli par un silence généralisé de la majorité, tandis que les partisans de Meloni ont souligné que la Première ministre avait «toujours» soutenu la solution «deux peuples, deux États», mais que reconnaître la Palestine aujourd’hui, comme elle l’a elle-même déclaré, ne constituerait pas une décision décisive. L’opposition, cependant, applaudit et retrouve une nouvelle énergie : «Nos diplomates sont un beau témoignage de dignité et de véritable patriotisme», déclare Giuseppe Conte, tandis que ses chefs de groupe aux commissions des affaires étrangères de la Chambre des députés et du Sénat, Francesco Silvestri et Bruno Marton, soulignent comment «ces ambassadeurs enseignent à Meloni ce que signifie représenter l’État avec honneur et dignité».

«Si Meloni ne nous écoute pas, qu’au moins il les écoute», a exhorté le secrétaire de +Europa, Riccardo Magi, soulignant que «reconnaître l’État de Palestine ne légitimerait pas le Hamas». Nicola Fratoianni, chef du parti Si, a qualifié cette décision de «leçon de dignité» pour le gouvernement, donnée par «une figure emblématique de notre histoire diplomatique».

Quand est-ce le bon moment ?

Lorsque le Premier ministre a déclaré que l’État palestinien n’était «pas le bon moment», il a répondu : «Quand est-ce le bon moment pour le reconnaître ? Quand il n’y aura plus de Palestiniens vivants ?» Ce sont des concepts qu’Elly Schlein elle-même met en avant depuis longtemps : «Il n’est pas trop tôt, comme le dit Meloni ; après cela, il sera trop tard, et il risque de ne plus rien rester à reconnaître.» De plus, le secrétaire du Parti démocrate estime que «cet acte constituerait une contribution concrète au processus de paix au Moyen-Orient». «Il y a des moments dans l’histoire où l’ambiguïté se mue en complicité. Et à Gaza, ce moment est arrivé», ajoute Angelo Bonelli, député AVS et co-porte-parole d’Europa Verde. Et si le gouvernement «continue de refuser de reconnaître l’État de Palestine», il fait «un choix de lâcheté politique et de subordination morale».

D’après Ansamed.

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Deux enfants morts et un disparu au large des côtes tunisiennes

«Deux enfants sont morts et une personne est portée disparue après le naufrage d’un navire marchand lundi lors d’une opération [de sauvetage de migrants illégaux] dans la zone SAR tunisienne», a déclaré Sea Watch, une organisation humanitaire ayant son siège à Berlin (Allemagne) et qui exerce une activité de recherche et de sauvetage de personnes en mer Méditerranée, au moyen de navires dont elle est propriétaire et exploitante.

«Nous avons vu le bateau en détresse avec 90 personnes à bord, en mer depuis trois jours. Nous avons appelé à l’aide. Frontex est arrivée six heures plus tard, a repéré le navire et est partie. Les autorités italiennes font tout leur possible pour les empêcher d’atteindre l’Italie. Il existe un risque que les garde-côtes libyens les emmènent en Libye. Notre navire, l’Aurora, aurait pu intervenir, mais il est bloqué par les autorités italiennes à Lampedusa pour des raisons infondées», rapporte l’ONG, dans un communiqué publié mardi rapporté par l’agence italienne Ansa.

L’UE laisse les gens se noyer à ses frontières

«Hier matin [lundi,Ndlr], les personnes étaient encore abandonnées à leur sort en mer. Les navires de sauvetage européens auraient pu les atteindre en environ trois heures, mais ils ont choisi de ne pas intervenir», a poursuivi Sea Watch. Et d’enchaîner : «Lorsque le navire marchand Port Fukuka, situé à proximité, a tenté de les secourir, il a chaviré. Toutes les personnes à bord sont tombées à la mer. Une fois secourus, deux enfants étaient morts et une personne était portée disparue. Aujourd’hui, les personnes sont toujours à bord du navire marchand. Le danger est imminent que les soi-disant garde-côtes libyens les kidnappent et les emmènent en Libye : vers la torture et la mort. C’est inacceptable. Notre navire de sauvetage rapide Aurora aurait pu intervenir pour secourir ces personnes. Il n’est qu’à quatre heures et demie de route, mais il est retenu par les autorités italiennes dans le port de Lampedusa pour des raisons infondées.»

Pour Sea Watch, «ce ‘‘spectacle’’ honteux n’est pas encore terminé, mais les autorités italiennes et européennes n’ont pas réagi. Ce système fait ce pour quoi il a été conçu : laisser des gens se noyer aux frontières de l’Europe. Silencieusement, systématiquement.»

I. B.

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L’Union européenne capitule face à Donald Trump

Donald Trump n’a jamais tenu en grande estime l’Union européenne (UE) et a toujours voulu prendre le dessus dans sa relation avec elle. L’accord acté entre les États-Unis et l’UE le week-end dernier en Écosse symbolise la capitulation des 27 face à l’Oncle Sam cependant les signes de faiblesse sont là depuis des mois. Certains États ont souhaité une attitude plus ferme et plus virile vis-à-vis de l’administration américaine mais d’autres qui privilégient la servilité à l’égard Washington ont poussé vers la capitulation. C’est plutôt la désunion européenne ! À chaque fois que les Européens avancent en rang dispersé, ils perdent la partie. 

Imed Bahri

Le Financial Times qui a consacré une enquête au sujet estime que l’UE a entamé son chemin vers la capitulation le 10 avril 2025 en réagissant mollement à la guerre commerciale «vicieuse» que lui a lancée par le président américain. 

Les droits de douane massifs imposés par Trump à la plupart des pays du monde au début du mois d’avril, à l’occasion de ce qu’il avait baptisé «Jour de la Liberté», ont semé la pagaille sur les marchés financiers et les investisseurs ont fui les actifs américains par crainte d’une récession. Face à l’intensification des ventes de ces actifs, Trump a fait marche arrière et, le 9 avril, a réduit les droits de douane à 10%, les qualifiant de mesure temporaire.

Cependant, Bruxelles a également reculé. Le 10 avril, elle a suspendu ses droits de douane de rétorsion et accepté l’offre américaine de négociations avec un droit de douane de 10% sur la plupart de ses échanges ainsi que des droits de douane plus élevés sur l’acier, l’aluminium et les véhicules alors considérés comme une menace.

Divergences entre les États membres

Plutôt que de se joindre au Canada et à la Chine pour prendre des mesures de rétorsion immédiates, l’UE, entravée par les divergences entre ses États membres, a choisi de rechercher un compromis dans l’espoir d’obtenir un meilleur accord.

En vertu de l’accord-cadre conclu dimanche par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et Trump au complexe de golf de Turnberry, l’UE a été contrainte d’accepter un tarif de base américain de 15% qui couvre principalement les voitures mais pas l’acier qui serait soumis à des quotas.

Toutefois, selon le journal britannique, le soulagement des décideurs politiques d’avoir évité une guerre commerciale transatlantique immédiate a été tempéré par quelques regrets. L’UE, premier bloc commercial mondial et prétendument une puissance économique majeure, aurait-elle pu obtenir de meilleures conditions si elle n’avait pas initialement modéré ses actions?

Le FT cite un diplomate: «C’est la brute de la cour d’école (Trump, Ndlr). Nous n’avons pas uni nos forces contre lui. Ceux qui ne coopèrent pas sont pendus seuls»

George Yerkelis, ancien fonctionnaire de la Commission ayant participé aux négociations du Brexit, a déclaré que la dernière menace de l’UE d’imposer des droits de douane en représailles sur 93 milliards d’euros (108,33 milliards de dollars) de marchandises américaines est arrivée trop tard.

Yerkelis, qui travaille aujourd’hui au Centre de politique européenne, a ajouté: «Avec le recul, l’UE aurait mieux fait de réagir avec force face aux États-Unis en avril, en ripostant aux hausses de droits de douane chinoises qui ont laissé les marchés et Trump sous le choc»

Selon le journal, Trump considère l’UE comme un parasite, se nourrissant du lucratif marché américain tout en bloquant le sien par des réglementations et des normes. Le président américain a déclaré que l’UE avait été «créée pour affaiblir les États-Unis» et était «plus grossière que la Chine».

Une réponse tardive et hésitante

La réponse de l’UE au retour au pouvoir de Trump en janvier a été hésitante, gaspillant des mois de planification par une équipe dédiée de hauts responsables du commerce, dirigée par Sabine Weyand, experte du Brexit, et Thomas Burt, conseiller commercial de von der Leyen.

Cette équipe a élaboré un plan en trois points.

Le premier : une offre visant à réduire le déficit commercial de près de 200 milliards d’euros (233 milliards de dollars) en achetant davantage de gaz naturel liquéfié, d’armes et de produits agricoles.

Le second: une offre de réductions tarifaires mutuelles sur les marchandises de chaque partie.

Le troisième: si les deux parties échouent, elles prépareront des mesures de rétorsion et compteront sur la réaction du marché à une éventuelle guerre commerciale ou à une hausse de l’inflation aux États-Unis pour forcer Trump à reculer.

Trump a agi plus vite que prévu et, en mars, il avait imposé des droits de douane de 25% sur l’acier, l’aluminium et les voitures.

Lors d’une réunion à Luxembourg ce mois-là, plusieurs ministres du Commerce étaient au bord de la guerre commerciale contre les États-Unis. L’Allemagne, la France et quelques autres pays ont poussé la Commission à la consultation sur l’utilisation du nouveau «bazooka commercial», un outil anti-coercition conçu après le premier mandat de Trump pour contrer l’utilisation de la politique commerciale pour faire pression sur les gouvernements sur d’autres sujets. Cet outil permettrait à Bruxelles d’exclure les entreprises américaines des appels d’offres publics, de supprimer les protections de propriété intellectuelle et de restreindre les importations et les exportations.

Des diplomates ont déclaré, avant le dernier accord, qu’il était difficile de savoir si une majorité des États membres accepterait la menace d’utiliser cet outil anti-coercition.

Sabine Weyand a appelé les ambassadeurs de l’UE, qui se réunissaient au moins une fois par semaine pour discuter de la question, à faire preuve de patience stratégique. 

Lorsque la Grande-Bretagne a conclu un accord commercial avec Washington en mai, acceptant le tarif douanier de base de 10% de Trump, ces pays ont encouragé les États membres de l’UE en quête de compromis, notamment l’Allemagne, à accepter une condition similaire.

Trump ne veut pas un accord gagnant-gagnant

Pendant des mois, la Première ministre italienne Giorgia Meloni et le chancelier allemand Friedrich Merz ont maintenu fermement l’offre initiale de l’UE d’éliminer tous les droits de douane industriels si les États-Unis faisaient de même, même si Washington a depuis longtemps exprimé clairement sa volonté de concessions unilatérales.

L’UE a envoyé son commissaire au commerce et à la sécurité économique, Maroš Šefkovich, à Washington à sept reprises pour proposer des pistes d’accord, souligner l’importance des relations transatlantiques et promouvoir le programme allemand d’indemnisation des accidents automobiles. Au total, Šefkovich a eu plus de 100 heures de discussions frustrantes avec ses homologues américains, selon le FT.

Trump a catégoriquement rejeté un accord réciproque permanent de 10% sur les droits de douane auquel sont parvenus plus tôt ce mois-ci les Européens et le représentant américain au Commerce Jamieson Greer ainsi que le secrétaire au Commerce Howard Lutnick et il a menacé au contraire de relever les droits de douane sur l’UE de 20% à 30% à compter d’août. Trump ne veut pas un accord gagnant-gagnant pour les deux parties mais seulement pour son pays. 

Pendant des mois de négociations, Sefcovic a exhorté les ministres européens à la prudence. Le ministre irlandais du Commerce, Simon Harris, a été un interlocuteur fréquent, souhaitant préserver les industries pharmaceutique et bovine de son pays d’une éventuelle contre-attaque américaine, sensibilisant le monde entier, et notamment les Américains, à cette préoccupation par de fréquentes publications sur les réseaux sociaux.

Les chefs d’entreprise ont vivement appelé à la retenue, préférant accepter des marges bénéficiaires réduites plutôt que de risquer des droits de douane punitifs qui auraient un impact négatif sur leurs ventes.

L’UE a réduit une deuxième série de droits de douane imposés en représailles aux États-Unis à 72 milliards d’euros (83,86 milliards de dollars) avant d’accepter finalement, le 24 juillet, de les utiliser en cas d’échec des négociations, portant le total à 93 milliards d’euros (108,33 milliards de dollars).

Des mois d’incertitude quant à l’orientation des négociations ont révélé des divisions au sein même de la Commission. Malgré les tentatives du gouvernement français de protéger les entreprises françaises contre les représailles, celui-ci a appelé à plusieurs reprises la Commission à une approche plus ferme face aux droits de douane imposés par Trump. Finalement, l’UE a capitulé et les États-Unis ont remporté la partie.

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Le partenariat Union européenne – Tunisie doit être réinitialisé

«Sans véritable changement stratégique, le partenariat [Union  européenne-Tunisie] s’effondrera de lui-même, par épuisement mutuel ou par inertie politique », prévient l’économiste tunisien Ferid Belhaj, qui occupait jusqu’à l’année dernière le poste de vice-président de la Banque mondiale (BM) pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.

Oussama Romdhani *

Alors que les diplomates européens à Tunis commémoraient le 30e anniversaire du traité de partenariat entre l’UE et la Tunisie, Ferid Belhaj abordait la question épineuse : «Pourquoi le partenariat Tunisie-Union européenne doit-il évoluer ?»

Sa réponse figure dans un document d’orientation récemment publié par le Centre de politique pour le Nouveau Sud, basé à Rabat.

Tout au long des 16 pages de ce document, il offre une perspective réfléchie et rafraîchissante, un hommage à la porte tournante qui permet à un homme du calibre et de l’expérience de Ferid Belhaj de présenter un point de vue honnête sur des questions complexes que les responsables ont tendance à obscurcir.

Belhaj indique clairement d’emblée que l’accord de partenariat UE-Tunisie ne nécessite pas de retouches technocratiques. Il nécessite plutôt une réinitialisation complète.

Trois décennies de relations asymétriques

L’accord signé par les deux parties en est venu à incarner l’opportunisme plutôt qu’une vision stratégique à long terme de «souverainetés imbriquées». Alors que la Tunisie se contente de compter sur l’UE pour répondre à ses besoins immédiats, «l’Europe cherche à externaliser ses vulnérabilités : maîtriser les flux migratoires, sécuriser son approvisionnement énergétique (notamment en gaz et en hydrogène vert) et stabiliser les zones de transit.»

Trente ans plus tard, la logique dominante est «transactionnelle et non convergente», explique Belhaj.

L’ancien vice-président de la BM estime qu’un changement d’approche tunisien est non seulement possible à ce stade, mais nécessaire. Cela n’impliquerait pas nécessairement une rupture avec l’UE, qui représente plus de 80 % des investissements étrangers en Tunisie. Il s’agirait plutôt de se débarrasser de «la dépendance intellectuelle, financière et politique qui a façonné trois décennies de relations asymétriques».

L’auteur soutient que la nation nord-africaine a des raisons d’être plus confiante dans sa position de négociation vis-à-vis de l’Europe, car elle peut compter sur sa situation géographique stratégique, carrefour entre l’Afrique, l’Europe et le flanc occidental du monde arabe, ainsi que sur son rôle régulateur dans la gestion des flux migratoires et son potentiel en tant que source d’énergie à long terme dont l’Europe a besoin.

L’économiste principal est suffisamment optimiste pour croire que l’UE pourrait envisager d’aligner son engagement envers la Tunisie sur les modèles qu’elle avait suivis dans les années 1980 avec des pays comme l’Espagne, le Portugal et la Grèce. Il note, par exemple, que l’Espagne a reçu jusqu’à 2,7 % de son PNB annuel en fonds structurels européens pour soutenir sa transition énergétique et industrielle après son adhésion à l’UE, contrairement à la Tunisie, qui a reçu en moyenne 0,3 % de son PNB en aide européenne au cours des 30 dernières années. De plus, le plus petit des pays du Maghreb (en termes de superficie) n’a jamais bénéficié d’orientation stratégique ni de coordination des politiques d’industrialisation de la part de l’Europe.

De l’euphorie à la déception mutuelle

Après les bouleversements du «Printemps arabe» de 2011, l’UE a pleinement adopté la transition du pays après l’ère Ben Ali comme modèle pour le reste de la région. Mais l’optimisme initial, proche de l’euphorie, a rapidement cédé la place à une déception mutuelle. L’UE a été généreuse dans son aide, mais pas au point de lancer un programme de type Plan Marshall qui aurait permis à la Tunisie de lier son destin, au moins économiquement, à celui de l’Europe. L’inaction des gouvernements tunisiens successifs en matière de réformes sociales et économiques a entraîné une stagnation de la croissance du pays.

Un axe majeur de la relation actuelle, comme l’illustre le protocole d’accord de 2023 entre les deux parties, est la migration. Belhaj n’hésite pas à aborder cette question «politiquement explosive» et à formuler des suggestions éclairées sur la manière de la gérer.

«Si l’Europe souhaite externaliser sa politique migratoire, la Tunisie devrait également externaliser ses exigences», affirme-t-il. Cela signifie que la Tunisie défend une «approche transactionnelle» qui exige un lien entre les filières migratoires légales et illégales, en sollicitant l’aide de l’UE pour l’installation des cadres tunisiens qualifiés en Europe, l’allocation de fonds de développement aux régions tunisiennes les plus touchées par les flux migratoires sortants et l’aide à la réintégration des migrants de retour, au lieu de chercher systématiquement à limiter le rôle de la Tunisie au contrôle de l’immigration clandestine offshore.

À cet égard, Belhaj voit une solution gagnant-gagnant entre la Tunisie et l’Union européenne.

D’un côté, une grande partie de la main-d’œuvre tunisienne, qualifiée et non qualifiée, considère l’émigration comme la solution ultime à leurs problèmes. Plus précisément, les professionnels tunisiens, dont des milliers d’ingénieurs et de médecins, quittent massivement le pays, attirés par des emplois mieux rémunérés et des perspectives de carrière plus attractives en Europe.

L’UE, quant à elle, peine à pourvoir de nombreux postes essentiels et à compenser son déclin démographique constant. Le taux de croissance démographique en Europe est passé de trois millions par an dans les années 1960 à 0,9 million entre 2005 et 2024.

L’Europe a pu ajouter 1,07 million d’habitants à sa population en 2024, seulement grâce à l’immigration de 2,3 millions de personnes en provenance de pays tiers.

L’Italie, doyenne des nations européennes, a annoncé son intention d’accorder environ 500 000 nouveaux visas de travail aux ressortissants de pays tiers entre 2026 et 2028.

Pour une forme productive de codéveloppement

Au-delà de l’instauration de conditions de concurrence équitables en matière de migration, Belhaj plaide pour une forme productive de codéveloppement et d’investissement qui inclurait une dynamique de transfert de technologie et de création d’emplois à valeur ajoutée, loin des limites évidentes du modèle éprouvé de délocalisation de main-d’œuvre bon marché.

L’ancien haut diplomate tunisien appelle à une nouvelle relation fondée sur la reconnaissance des intérêts de chaque partie et non sur la poursuite des notions sacrées de «convergence» et de réajustement «technocratique».

«Sans un véritable changement stratégique, le partenariat s’effondrera de lui-même, par épuisement mutuel ou par inertie politique», prévient-il.

Ce ne serait pas le type de résultat que les deux parties souhaitent, trente ans après la signature du premier accord de ce type entre l’UE et un pays du Maghreb.**

Traduit de l’anglais.

* Rédacteur en chef de Arab Weekly.

** Les intertitres sont de la rédaction.

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Ukraine l Zelensky promulgue une loi pour protéger les corrompus  

Des manifestations sans précédent ont eu lieu en Ukraine après l’adoption par le parlement d’une loi supprimant l’indépendance des instances anticorruption. Promulguée mardi 22 juillet 2025 par le président Volodymyr Zelensky, cette loi très critiquée à l’intérieur et à l’extérieur affaiblit l’autonomie des institutions anticorruption, provoquant indignation et inquiétude au sein même de l’Union européenne (UE), principal soutien du régime en place à Kiev.

Habib Glenza

En promulguant cette loi qui met fin à l’indépendance des agences anticorruption, le président Zelensky a suscité des protestations à l’intérieur et, à l’extérieur, une inquiétude parmi les alliés de Kiev. Plusieurs centaines de manifestants sont descendus dans les rues de la capitale ukrainienne, rapportent des reporters locaux, pour exprimer leur colère. «Le projet de loi a été adopté à la hâte», a critiqué l’un d’eux.

L’initiative a été qualifiée de «sérieux recul» par l’UE, qui s’est dite «profondément préoccupée». La commissaire chargée de l’élargissement de l’UE, Marta Kos, a déclaré que le respect de «l’État de droit reste au cœur des négociations d’adhésion» entre Kiev et Bruxelles. 

L’adoption de la loi par les députés ukrainiens, au lendemain de l’arrestation contestée d’un responsable travaillant dans l’une de ces structures, a suscité les critiques de militants et d’ONG en Ukraine qui s’inquiètent d’un recul démocratique dans le pays depuis le début du conflit russo-ukrainien en février 2022.

La corruption est un mal endémique en Ukraine, mais le pays a fait des progrès sur ce front en créant notamment, respectivement en 2014 et en 2015, une instance d’enquête, le Nabu, et un parquet, le Sap, spécialisé dans ces affaires de corruption.

Une loi sur mesure pour des «personnes intouchables»

Mardi, le Parlement a voté avec 263 voix pour, 13 contre et 13 abstentions, une loi ratifiée par le président Zelensky qui subordonne les activités de ces deux structures au procureur général, lui-même subordonné au président de la république, qui, on le sait, n’est pas lui-même au-dessus de tout soupçons. La nouvelle loi supprime donc de fait l’indépendance du Nabu et du Sap et met fin, en quelque sorte, à la lutte contre la corruption qui gangrène le pays depuis assez longtemps.

Le chef du Sap, Oleksandre Klymenko, a déclaré que le texte «détruit effectivement l’indépendance des institutions anti-corruption vis-à-vis de toute influence politique et pression sur nos enquêtes».

Selon le député Roman Lozinsky, ce texte accorde au procureur général le pouvoir de gérer le Sap, de donner des «instructions écrites obligatoires» au Nabu et d’avoir accès aux détails de n’importe quelle affaire et de les déléguer au procureur de son choix ou à d’autres agences.

Anastassia Radina, à la tête du Comité anticorruption du parlement, a dénoncé un texte qui «va à l’encontre de nos obligations dans le cadre du processus d’intégration à l’UE». Quelques heures avant le vote, un porte-parole de l’UE, Guillaume Mercier, avait souligné que le Nabu et le Sap étaient «essentielles au programme de réforme» que l’Ukraine s’est engagée à mener pour pouvoir adhérer à l’UE.

«L’infrastructure anticorruption fonctionnera. Simplement, sans l’influence russe», a écrit Zelensky sur Telegram dans la nuit de mardi à mercredi. «Il est important que le procureur général soit déterminé à assurer qu’en Ukraine, l’inévitabilité des peines soit véritablement assurée pour ceux qui vont à l’encontre de la loi», a-t-il ajouté.

Le directeur du Nabu, Semion Kryvonos, ne partage nullement c et avis. «Aujourd’hui, avec les votes de 263 députés, l’infrastructure anticorruption a été détruite», a-t-il regretté lors d’une conférence de presse, avertissant que la loi permettra l’existence de «personnes intouchables» en Ukraine.

Un pas vers un régime autoritaire

Depuis Kiev, après le vote, un diplomate européen, s’exprimant sous couvert de l’anonymat, a qualifié cette décision de «regrettable», tout en nuançant : «Est-ce un revers ? Oui. Est-ce un point de non-retour ? Non». Lundi, les services de sécurité ukrainiens (SBU) avaient annoncé l’arrestation d’un responsable du Nabu soupçonné d’espionnage au profit de Moscou, et ont perquisitionné les locaux de l’organisation, qui rejette ces accusations.

La branche ukrainienne de l’ONG anticorruption Transparency International a dénoncé cette arrestation, selon laquelle ces perquisitions sont illégales et «visent à obtenir de force des informations et à influencer les enquêtes menées sur de hauts responsables».

L’ONG a fait état dans un communiqué d’une «pression systématique» des autorités à l’encontre des structures anti-corruption en Ukraine. Avant le vote de mardi, les militants ukrainiens s’étaient déjà inquiétés des récentes poursuites judiciaires visant Vitaliï Chabounine, directeur d’une des principales ONG de lutte contre la corruption. Selon des médias ukrainiens, ces mesures interviennent alors que le Nabu et le Sap s’apprêtaient à inculper l’ex-ministre de l’Unité nationale Oleksii Tchernychov et alors que les deux instances enquêtaient sur l’ex-ministre de la Justice Olga Stefanishina.

«Aujourd’hui est un jour de honte pour le Parlement ukrainien. Les autorités ont introduit des amendements à la loi visant à détruire l’organe de lutte contre la corruption», a dénoncé sur Telegram le député indépendant Oleksii Gontcharenko, disant y voir un «pas vers un régime autoritaire». «Nous n’avons pas voté pour cette mascarade. J’ai honte et j’ai honte pour les gens dans cette salle», a abondé un autre député, Iaroslav Jelezniak du parti libéral Holos.

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Le divorce Nord-Sud | La fracture du siècle ?

Quelque chose d’essentiel est en train de se briser dans le silence des sommets internationaux. Ce n’est pas seulement une crise de confiance. C’est peut-être la fin d’un pacte, vieux de trois quarts de siècle, entre les deux mondes. Le Nord et le Sud. L’ordre et la marge. L’universel proclamé et l’univers ignoré.

Yahya Ould Amar *

Les pays du Nord, avec leurs sanctions, tarifs douaniers, taxes carbone et normes strictes, cherchent-ils à s’isoler du Sud global ? Cette dynamique, qui s’intensifie à l’approche de 2030 (objectifs de l’Accord de Paris), soulève des enjeux décisifs pour l’économie mondiale, le commerce et la coopération internationale.

La question est de savoir si un divorce est déjà en cours, entre ceux qui croient incarner les règles… et ceux qui en subissent les conséquences.

Quelles sont les motivations des pays du Nord, les conséquences pour le Sud global et quelles sont les pistes pour un avenir équilibré ?

Une mondialisation à sens unique

La mondialisation s’est bâtie sur une promesse : l’ouverture des marchés, le progrès partagé, le développement par la coopération. Cette promesse, renouvelée à Bandung en 1955 puis recyclée à chaque sommet du G7 ou de l’Onu, portait en elle un espoir : celui d’un monde qui, malgré les asymétries, finirait par se stabiliser dans la réciprocité.

Or, ce monde vacille. Les faits sont là : explosion des sanctions économiques unilatérales, extraterritorialité du droit américain, retrait des aides publiques au développement, fermeture implicite des marchés par le biais de normes environnementales, sociales, numériques.

À cela s’ajoute le retour d’un protectionnisme vert déguisé, où la taxe carbone devient barrière douanière, où la norme ESG (Environnemental Social et Gouvernance) devient instrument de tri géopolitique, où les chaînes de valeur sont reconfigurées non pour l’efficacité… mais pour la sécurité.

Les valeurs universelles à l’épreuve des conflits

Le Nord, longtemps chantre de l’universalisme moral, s’est lui-même piégé dans les contradictions de ses positions. En Ukraine, il invoque avec justesse le droit international, la souveraineté des États et la protection des civils. Mais ces principes deviennent soudain malléables, silencieux lorsqu’il s’agit de Gaza, du Yémen, de l’Iran, du Sahel ou d’autres théâtres oubliés. Le deux poids, deux mesures est devenu une constante : on arme certains au nom de la légitime défense, on condamne d’autres au nom de la paix. On célèbre la résistance ici, on la criminalise là. Cette dissonance creuse un fossé : celui d’un monde qui entend encore le discours du Nord, mais n’y croit plus. Car ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement la politique, c’est la crédibilité morale de tout un récit civilisationnel.

Démocratie : principe proclamé, réalité relativisée

Régulièrement érigée en condition de partenariat, la démocratie est, pour les pays du Nord, un idéal sacralisé… mais souvent relativisé lorsqu’elle entre en conflit avec les intérêts géostratégiques. Ainsi, l’Occident continue de s’allier, d’armer, de financer ou de protéger des régimes autoritaires dès lors qu’ils garantissent la stabilité, l’accès à des ressources ou la limitation de l’influence d’un rival. On tolère l’oppression au nom de la «stabilité régionale», on ferme les yeux sur la répression pour préserver un accord militaire ou énergétique.

Ce double discours ne fait que renforcer l’idée, dans les opinions du Sud, que la démocratie n’est pas une valeur universelle défendue par principe, mais un instrument de tri utilisé selon les convenances du moment. Un monde qui prêche la démocratie mais soutient l’autoritarisme mine, à terme, sa propre légitimité.

L’extrême droite au Nord : un miroir que le Sud observe

Pendant que le Nord exige du Sud qu’il réforme ses institutions et respecte les droits de l’homme et ses minorités, l’extrême droite progresse spectaculairement dans les urnes occidentales. En Europe comme en Amérique du Nord, les discours de repli, de xénophobie, d’ethno-nationalisme ou de rejet de l’immigration s’installent au cœur des démocraties libérales. Les partis prônant la fermeture des frontières, la préférence identitaire ou la rupture avec les engagements internationaux gouvernent déjà, ou s’en approchent dangereusement.

Ce glissement n’échappe pas aux peuples du Sud : comment prendre au sérieux les injonctions démocratiques venues de nations qui peinent à protéger elles-mêmes l’universalité des droits ? La montée des extrêmes n’est pas qu’un phénomène local : elle entame le socle commun des valeurs partagées, et nourrit l’idée que l’ordre libéral occidental n’est peut-être plus qu’un vernis fragile sur une réalité profondément fracturée.

Une muraille économique : sanctions, tarifs, taxe carbone et normes strictes

Les pays du Nord ont multiplié les outils économiques pour encadrer leurs relations avec le reste du monde. A titre d’exemple, depuis 2018, les sanctions économiques ont explosé, touchant des pays comme la Russie, la Chine, l’Iran… Mais pas Israël, accusé de génocide par la Cour pénale internationale (CPI).

Selon le Global Sanctions Database, plus de 12 000 sanctions étaient actives en 2024, un record historique, visant à limiter les échanges commerciaux avec des nations jugées en décalage avec les priorités stratégiques du Nord.

À cela s’ajoutent les tarifs douaniers, souvent utilisés comme vecteurs de supériorité. Par exemple ceux imposés en 2025 par l’Administration Trump. En 2023, l’Union européenne a imposé des droits de douane de 25 % sur certaines importations chinoises, notamment dans le secteur des véhicules électriques.

Ces mesures, combinées à des taxes environnementales comme la taxe carbone européenne (Carbon Border Adjustment Mechanism – CBAM ou Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières), qui entrera pleinement en vigueur au premier janvier 2026, visent à protéger les industries locales et à promouvoir des standards environnementaux élevés. Le CBAM taxera fortement les importations de produits à forte empreinte carbone notamment celles provenant du Sud global dans les secteurs de l’acier (Maghreb, Afrique australe, Inde), du ciment (Afrique de l’Ouest, Asie du Sud), de l’engrais (Afrique du Nord, Russie, Golfe), de l’aluminium (Guinée, Mozambique) et de l’électricité et hydrogène (Moyen-Orient, Afrique du Nord).

Mais ces politiques ne sont pas sans coût. Selon une étude de l’OCDE, le CBAM pourrait augmenter les coûts d’exportation pour les pays émergents de 1,5 à 2 % de leur PIB d’ici 2030, affectant particulièrement les économies dépendantes des matières premières. Les normes techniques et sanitaires, de plus en plus rigoureuses, compliquent également l’accès des produits du Sud aux marchés du Nord. Ainsi, les exportateurs agricoles doivent se conformer à des normes européennes sur les pesticides, souvent inaccessibles faute de moyens technologiques ou financiers.

La peur stratégique du Nord : perdre la maîtrise du récit

Le Nord se referme essentiellement par peur. Peur de la démographie du Sud, environ 2,5 milliards de jeunes de moins de 25 ans. Peur du poids croissant de l’Inde, de la Chine, du Brésil. Peur de l’effondrement de la hiérarchie construite depuis ces deux derniers siècles (révolution industrielle). Peur de perdre le contrôle de l’Onu et des différentes institutions internationales, conçues autrefois comme des instruments au service de la domination. Peur, enfin, que les valeurs qu’il dit incarner — droits de l’homme, démocratie, État de droit — soient utilisées contre lui, à l’aune de ses propres contradictions.

Cette peur engendre un réflexe défensif : remplacer l’universel par l’identitaire, l’interdépendance par la méfiance, et l’aide par le tri. On sélectionne les partenaires. On sanctionne les désobéissants. On normativise les flux commerciaux. Le Sud global n’est plus vu comme un acteur, mais comme un problème à gérer, une instabilité à contenir, une énergie à canaliser.

Une stratégie de repli ou une quête d’hégémonie ?

Pourquoi les pays du Nord adoptent-ils des mesures de repli ?

D’un côté, ces mesures reflètent une volonté de protéger leurs économies face à la montée en puissance du Sud global, notamment la Chine et l’Inde, qui représentent respectivement 18 % et 7 % du PIB mondial en 2024 (selon le FMI). Pour le Nord, l’ascension économique et politique du Sud – illustrée par la montée du PIB combiné des Brics (36 % du PIB mondial en 2024, contre 31 % pour le G7) – représente une menace existentielle à sa domination historique. Les industries du Nord, confrontées à une concurrence accrue, cherchent à préserver leurs parts de marché. Par exemple, l’industrie solaire européenne, qui ne représente plus que 3 % de la production mondiale face à la domination chinoise (80 %), bénéficie de subventions massives et de barrières douanières.

D’un autre côté, ces mesures traduisent une ambition stratégique plus large : imposer un modèle économique et environnemental global. En imposant des normes strictes, le Nord cherche à forcer le Sud à adopter ses standards, sous peine d’exclusion économique. Cette approche, bien que justifiée par des impératifs climatiques, crée un déséquilibre. Les pays du Sud, souvent en phase d’industrialisation, n’ont ni les ressources ni les infrastructures pour se conformer rapidement.

Enfin de telles mesures risqueraient d’asphyxier économiquement les pays du Sud en affaiblissant la compétitivité de leurs produits.

Un Sud plus lucide, mais pas moins coopératif

Le Sud, pourtant, ne réclame ni charité ni rupture. Il demande une parole respectée, une place équitable, une dignité retrouvée. Il ne rejette pas la mondialisation, mais souhaite en réécrire les termes. Il ne récuse pas les valeurs démocratiques, mais refuse qu’elles soient imposées à géométrie variable. Il ne cherche pas à humilier le Nord, mais à ne plus s’humilier lui-même en acceptant des partenariats fondés sur le soupçon.

De Johannesburg à Djakarta, de Brasilia à Tunis, un mot revient : co-souveraineté. Pas pour se replier. Mais pour bâtir des échanges qui ne soient plus des rapports de force. Le Sud veut une Onu réformée, un Bretton Woods repensé, plus représentatif qui tienne compte des réalités du XXIe siècle. Il veut que la coopération cesse d’être conditionnelle et devienne contractuelle. Que l’aide cesse d’être outil d’influence et redevienne levier de justice.

Le coût du divorce Nord-Sud

Le coût du divorce Nord-Sud ne se mesure pas seulement en milliards de dollars de commerce perdu. Il se chiffre aussi en instabilité géopolitique, en rancœurs durables et en opportunités gâchées pour l’ensemble de l’humanité. Un monde où le Sud se referme par défiance et le Nord par crainte est un monde qui se prive de la moitié de ses talents, de ses ressources, de son dynamisme démographique. Selon la Banque mondiale, plus de 60 % de la croissance mondiale d’ici 2050 viendra du Sud global. Rompre les ponts, c’est refuser d’investir dans cette croissance, de participer à son encadrement, d’en tirer les fruits. C’est aussi risquer l’émergence de systèmes concurrents de normes, de monnaies, de récits, qui tourneraient le dos à la coopération multilatérale. Ce coût stratégique serait bien plus élevé que tous les bénéfices supposés du repli.

Pour le Sud, le coût est tout aussi redoutable : exclusion des chaînes de valeur, renchérissement des exportations, désindustrialisation prématurée. L’Afrique pourrait perdre jusqu’à 16 milliards de dollars par an d’accès préférentiel aux marchés occidentaux si les barrières environnementales ne sont pas rééquilibrées. À cela s’ajoute une perte d’espoir. Car un monde où les règles du jeu sont écrites sans ceux qui les vivent est un monde où la radicalisation, l’exode des talents, ou les conflits trouvent un terreau fertile. L’illusion d’un découplage serein est donc une chimère. Le divorce Nord-Sud serait un appauvrissement mutuel, un gaspillage tragique d’intelligence collective, un échec de civilisation. À l’heure où les défis sont mondiaux, la séparation est non seulement coûteuse — elle est absurde.

Le divorce Nord-Sud aurait un coût géopolitique incalculable : celui de la paix mondiale. Car l’exclusion nourrit la frustration, et la frustration engendre l’instabilité. En marginalisant le Sud, le Nord affaiblit les équilibres déjà précaires d’un monde traversé par les tensions identitaires, les fractures économiques et les chocs climatiques. Sans perspective d’équité, des pans entiers de la jeunesse du Sud — plus de deux milliards et demi de jeunes de moins de 25 ans — risquent de sombrer dans les bras de l’extrémisme, de l’exode ou de l’hostilité stratégique. En s’éloignant des mécanismes de dialogue et d’intégration, le système international s’expose à une multiplication de foyers de conflit — ouverts, hybrides ou silencieux — des Balkans à la bande sahélienne, du Pacifique à la mer Rouge.

La paix, dans un monde interdépendant, n’est jamais durable si elle est asymétrique. Rompre avec le Sud, c’est miner les fondations de la sécurité collective. C’est transformer la carte du monde en un archipel de méfiances. Et c’est surtout hypothéquer l’avenir d’un ordre mondial coopératif, fondé sur la reconnaissance mutuelle plutôt que sur la confrontation permanente.

Des solutions pour un avenir commun

Le divorce n’est pas inéluctable. Mais la thérapie de couple devra être honnête. Le Nord doit comprendre que la reconnaissance de la pluralité n’est pas un renoncement. Qu’un monde multipolaire n’est pas un monde anarchique. Qu’ouvrir la gouvernance des institutions internationales, ce n’est pas s’effacer, mais s’assurer de durer.

Quant au Sud, il devra prouver qu’il ne remplace pas un paternalisme par une victimisation. Qu’il construise, propose, réforme. Qu’il est capable d’unir ses voix non pas contre l’Occident, mais pour un monde mieux équilibré. Il devra enfin convaincre que la coopération reste un choix stratégique, non un réflexe du passé.

L’urgence aujourd’hui est d’éviter une fracture systémique entre le Nord et le Sud. Pour cela, des mesures concrètes et équilibrées doivent être mises en œuvre afin de transformer la relation historique de dépendance en un partenariat de codéveloppement.

Première urgence : réduire les barrières non tarifaires qui étranglent les PME du Sud, en particulier dans les secteurs agricoles et manufacturiers. L’assouplissement ciblé des normes techniques, couplé à des dispositifs de certification financés par les pays du Nord, permettrait d’ouvrir l’accès aux marchés tout en élevant les standards locaux.

En parallèle, le développement des infrastructures vertes dans le Sud constitue un impératif à la fois climatique et économique. Mobiliser au moins 100 milliards de dollars par an — via des fonds multilatéraux pilotés par la Banque mondiale — permettrait d’accélérer la mise en œuvre de projets d’énergie renouvelable en Afrique, en Asie du Sud-Est et en Amérique latine. Ce rééquilibrage géo-énergétique renforcerait l’autonomie du Sud, créerait des millions d’emplois et réduirait significativement les émissions globales. Parallèlement, il conviendrait de réformer le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM) pour qu’il ne pénalise pas les économies vulnérables. L’introduction d’exemptions transitoires (2026–2030), accompagnées d’un appui technique à la transition bas-carbone, permettrait d’éviter que cet outil environnemental ne devienne un levier de désindustrialisation forcée.

En somme, repenser la coopération passe par la consolidation des marchés régionaux du Sud et la mise en place d’un dialogue multilatéral structurant. En soutenant des initiatives comme la Zlecaf ou l’Asean par des transferts technologiques, le Nord contribuerait à la résilience du commerce mondial tout en limitant les effets de dépendance asymétrique. Mais au-delà de l’économique, un dialogue politique permanent sous l’égide de l’Onu, intégrant gouvernance, fiscalité équitable, normes et transition écologique, est nécessaire pour rétablir la confiance. Dans un monde incertain, c’est par le dialogue, la justice économique et la codécision que l’on évitera la fragmentation, en construisant non un monde cloisonné, mais un avenir réellement commun.

Enfin, malgré les dissonances, les fractures et les ressentiments accumulés, l’Histoire n’est pas écrite au passé. Le divorce Nord-Sud, s’il menace, n’est pas une fatalité. Il est une alerte. Un moment charnière où les nations doivent choisir entre la crispation ou la co-construction, entre l’égoïsme stratégique et l’intelligence partagée. Ce qui se joue aujourd’hui dépasse les équilibres commerciaux ou les querelles normatives : il s’agit de redéfinir, ensemble, les fondations morales, politiques et économiques d’un monde habitable pour tous.

Car il n’y aura pas de prospérité durable dans un monde à deux vitesses. Pas de stabilité si l’on continue à nier l’égalité des dignités. Pas de transition écologique réussie si elle s’accompagne d’une exclusion systémique. L’humanité est face à un mur, mais elle en détient les briques. À condition de reconstruire non pas un nouveau rideau de fer, mais une architecture de confiance. De parler enfin d’égal à égal. D’échanger savoirs, capitaux, innovations et modèles, dans le respect des histoires, des cultures et des aspirations.

Le XXIe siècle peut encore être celui d’un sursaut collectif. Si le Nord accepte de ne plus imposer, et si le Sud choisit de ne plus subir. Si les deux s’engagent à bâtir un monde multipolaire non pas comme champ de rivalités, mais comme creuset de solidarités. C’est à cette condition que l’humanité pourra relever ses défis communs : climat, santé, paix, technologies. Et faire émerger non pas deux mondes qui s’ignorent, mais un destin partagé, fondé non sur la domination… mais sur la reconnaissance. L’avenir reste une promesse, à condition d’oser le rêver ensemble.

* Economiste, banquier et financier.

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Ukraine | Une agriculture ruinée, un pays bradé aux Occidentaux

L’économie de l’Ukraine est décimée, ses riches terres agricoles vendues aux multinationales occidentales et ses terres rares confiées aux bons soins de Donald Trump dans le cadre du remboursement de la dette d’une guerre qui n’est pas encore finie et qui aurait pu (et dû) être évitée. Un énorme gâchis dont les médias occidentaux ne parlent pas, ou peu.

Habib Glenza 

Le conflit entre Moscou et Kiev fait payer un lourd tribut à l’économie ukrainienne, notamment à l’agriculture, l’un des secteurs vitaux le plus important du pays. Avant l’invasion russe, en février 2022, l’agriculture représentait plus de 10 % du PIB de l’Ukraine et fournissait 17% de l’emploi national. Les terres agricoles situées le long de la ligne de front ont été soit abandonnées, soit utilisées pour construire des fortifications, tandis que la conscription a réduit le nombre de travailleurs disponibles pour les champs.

D’après la Banque mondiale, les pertes ukrainiennes de l’Ukraine sont de l’ordre de 100 milliards de dollars, y compris celles relatives aux infrastructures essentielles.

L’agriculture très sévèrement touchée

A noter que la Russie et l’Ukraine représentent à eux seuls 54 % des échanges mondiaux de blé, d’orge et d’avoine, ce qui affecte particulièrement les pays en développement qui dépendent de Moscou et de Kiev pour maintenir leur consommation locale. 

Cultures détruites, machines endommagées, bétail décimé… L’agriculture ukrainienne est très sévèrement touchée. Un rapport de la Banque mondiale et de l’Ecole d’économie de Kiev chiffre les dommages et les pertes à 80,1 milliards de dollars. Sans parler de la reconstruction du secteur sur le long terme.

Une large partie de ce montant –  69,8 milliards de dollars – est dû aux chutes de revenus causées par les pertes de production, à la baisse des prix des matières agricoles et à la hausse des coûts. Ces pertes ont doublé depuis l’évaluation précédente en 2023. Ajoutez à cela des dizaines de milliers d’hectares de cultures qui se situent désormais sur les territoires sous occupation russe. Sans compter les dommages causés aux cheptels qui provoquent déjà une baisse de la production de viande et de lait.       

Alors que la campagne céréalière se termine en Ukraine, le pays tente tant bien que mal de pallier les problèmes dont pâtit son secteur agricole. Or, la situation est de plus en plus préoccupante. Tout cela engendre des baisses de revenus pour les agriculteurs. C’est ce qui ressort du rapport conjoint publié au début de l’année 2025.                    

La facture s’alourdit encore avec les destructions au sol. Le coût des biens détruits est estimé à 10,3 milliards de dollars. La catégorie la plus importante est celle des machines agricoles. Tracteurs, moissonneuses-batteuses, semoirs détruits, endommagés ou volés. Tout comme les infrastructures de stockage de grains ou les équipements de fermes d’élevage ou de fermes laitières situées dans les zones bombardées qui ont subi le même sort. Les régions agricoles les plus touchées sont Zaporijia dans le sud-est, Kherson dans le sud ou encore Lougansk dans l’est du pays.

Il faut ajouter à cela les dégâts dans la pêche et l’aquaculture. Ici, la facture a triplé depuis l’an dernier à cause notamment de l’explosion du barrage de Kakhovka en juin 2023. La destruction de ce grand barrage construit sur le fleuve Dniepr a été un désastre écologique, selon un rapport de l’ONG ukrainienne Truth Hounds. L’immense réservoir d’eau vidé en quelques jours constituait une importante source d’approvisionnement en eau pour les industries et pour l’agriculture. En plus de la perte pour le secteur de la pêche, ce sont aussi les champs qui ont été privés d’irrigation.

Une dépendance de plus en plus grande de l’extérieur

Le tableau des pertes dans le seul secteur agricole est catastrophique et les besoins pour le reconstruire sont immenses. Selon la Banque mondiale et l’École d’économie de Kiev, 56,1 milliards de dollars seront nécessaires sur les dix prochaines années pour rebâtir l’agriculture ukrainienne. Ce montant comprend le remplacement des biens détruits et le soutien pour redresser la production sur le long terme.

L’acquisition de terres agricoles ukrainiennes par des investisseurs étrangers est un véritable problème, car l’Ukraine perd ainsi des ressources qui devraient profiter en premier lieu à sa propre population.

Face à la catastrophe imminente sur le front, l’Ukraine se trouve dans une situation sans issue, non seulement sur le plan militaire mais aussi économique. Le pays a perdu une partie considérable de sa puissance économique au cours des dernières années et dépend aujourd’hui presque exclusivement de l’aide financière de l’étranger.

Ce financement repose en grande partie sur des crédits du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque mondiale (BM) ainsi que sur les subventions des pays occidentaux, qui lient toutefois leurs fonds à certaines conditions et exercent ainsi une influence déterminante sur la politique ukrainienne. Parmi ces conditions figure notamment la vente de terres agricoles ukrainiennes à des investisseurs étrangers. Cela s’inscrit dans le cadre de la privatisation du secteur agricole ukrainien, accélérée par les dirigeants de Kiev depuis l’«Euromaïdan» * de 2014.

La vente de ces ressources étant auparavant interdite par la loi, l’Ukraine a mis en place en 2020 une réforme agraire très controversée, qui était d’ailleurs une condition préalable à l’augmentation des paiements de l’Occident. Cette réforme a levé le moratoire existant sur l’achat de terres et a ainsi légalisé la privatisation des terres agricoles pour les particuliers ukrainiens. Grâce à leurs liens avec les oligarques ukrainiens et d’autres représentants de l’élite locale, les investisseurs étrangers ont ainsi eu indirectement la possibilité d’acquérir d’immenses terres agricoles.

Fin 2023, la privatisation a été à nouveau libéralisée suite à une deuxième étape de la réforme agraire : depuis le 1er janvier 2024, les entreprises dont les propriétaires sont des citoyens ukrainiens peuvent également acheter des terres. En outre, le plafond d’acquisition de terres agricoles par personne ou entreprise a été relevé de 100 hectares à 10 000 hectares.

Le problème de l’accaparement des terres

Les critiques mettent toutefois en garde contre le fait que cette libéralisation du commerce des terres ne correspond en aucun cas aux intérêts de la population ukrainienne et que la situation se détériore ainsi considérablement dans l’ensemble du secteur agricole du pays. La principale raison invoquée est l’«accaparement des terres» – une appropriation illégale des terres agricoles par de grands capitaux internationaux, tels que des multinationales, des fonds d’investissement et d’autres structures financières étrangères (généralement occidentales). A cet égard, on constate une nette augmentation de l’accaparement des terres en Ukraine au cours des dernières années.

Selon le rapport de l’institut états-unien Oakland publié en 2023 et intitulé «Guerre et Vol : la prise de contrôle des terres agricoles de l’Ukraine», qui met notamment en lumière les intérêts financiers et autres forces motrices de la privatisation, les oligarques ukrainiens et les grandes entreprises internationales auraient déjà contrôlé à cette date plus de 9 millions d’hectares, soit plus de 28 % des terres agricoles ukrainiennes. Ce sont principalement les intérêts européens et nord-américains qui sont en jeu.

Le directeur politique de l’Oakland Institute et co-auteur du rapport, Frédéric Mousseau, résume ainsi l’évolution dramatique du secteur agricole ukrainien : «C’est une situation perdant-perdant pour les Ukrainiens. Alors qu’ils meurent pour défendre leur terre, les institutions financières soutiennent insidieusement la consolidation des terres agricoles par les oligarques et les intérêts financiers occidentaux. Alors que le pays est confronté aux horreurs de la guerre, le gouvernement et les institutions occidentales doivent écouter les revendications de la société civile ukrainienne, des universitaires et des agriculteurs, et suspendre la réforme agraire ainsi que la vente actuelle de terres agricoles». Car il s’agit, selon Mousseau, de créer un modèle agricole «qui ne soit plus dominé par l’oligarchie et la corruption», mais qui permette que «la terre et les ressources soient contrôlées par tous les Ukrainiens et leur profitent».

Un président marionnette qui brade son pays aux étrangers

D’autres critiques de ce «bradage» soulignent en outre que les agriculteurs individuels ainsi que les petites et moyennes entreprises agricoles d’Ukraine sont ruinés par la réforme agraire. Ces producteurs représentent jusqu’à 60 % des produits agricoles, alors que les grandes entreprises ne représentent qu’un quart de la production. Mais cela pourrait changer si les acteurs étrangers devaient prendre en charge encore plus de surfaces cultivables. Une telle évolution signifierait la fin des producteurs de taille moyenne, qui sont déjà confrontés depuis des années à des difficultés logistiques et à la faiblesse des prix des céréales, et qui enregistrent des pertes financières.

Volodymyr Zelenski, un président marionnette, a vendu son âme et bradé son pays aux Occidentaux. Un pays fantôme qui, au rythme où avance le processus de son démembrement, risque de disparaitre bientôt. C’est la faute à Poutine, dirait quelque analyste occidental, mais est-il le seul fautif ?

* Ou Eurorévolution, nom donné aux manifestations proeuropéennes en Ukraine, ayant débuté le 21 novembre 2013 à la suite de la décision du gouvernement ukrainien de l’époque ne pas signer l’accord d’association entre l’Ukraine et l’Union européenne au profit d’un accord avec la Russie.

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