Ces Tunisiens qui soutiennent le Hezbollah libanais
Une manifestation s’est tenue dans la soirée du vendredi 8 août 2025, devant l’ambassade du Liban à Tunis pour protester contre la décision des autorités libanaises de désarmer le Hezbollah, dénonçant ce qu’ils appellent «un agenda colonial et sioniste». La manifestation fait suite aussi à la publication de récents rapports documentant les crimes de guerre israéliens contre les civils et les infrastructures au Sud-Liban.
Latif Belhedi
Les manifestants ont dénoncé les efforts croissants de Beyrouth pour démanteler les capacités militaires du Hezbollah, estimant que ces efforts s’inscrivent dans une campagne plus large visant à affaiblir les «mouvements de résistance» à Israël dans la région.
La manifestation a été organisée par la Coordination pour l’action commune pour la Palestine, une coalition de plus en plus influente et active dans le soutien à la cause palestinienne.
Et qui déjà organisé des sit-in et des manifestations de plusieurs jours devant les ambassades américaine et égyptienne, accusant les gouvernements des deux pays de complicité dans la guerre israélienne contre Gaza.
Dans un communiqué publié le 6 août, la Coalition a rejeté ce qu’elle a qualifié de «tentatives persistantes» du gouvernement libanais de désarmer le Hezbollah, groupe de résistance chiite soutenu par l’Iran, affirmant que ces efforts servent des «programmes coloniaux et sionistes» visant à mettre fin à toute résistance dans la région au projet expansionniste d’Israël au Moyen-Orient.
Cette manifestation intervient dans un contexte de tensions croissantes le long de la frontière sud du Liban et fait suite à la proposition de désarmement la plus détaillée jamais présentée par Washington.
Un plan américain pour le désarmement du Hezbollah
Selon Reuters, les États-Unis ont présenté au Liban un plan visant à éliminer progressivement la présence armée du Hezbollah d’ici la fin de l’année, en échange de l’arrêt des opérations militaires israéliennes dans le pays et du retrait des forces israéliennes de cinq positions au sud du Liban. Ce plan, soumis par Tom Barrack, envoyé du président Donald Trump dans la région, est actuellement examiné à Beyrouth. Lors d’une réunion du cabinet jeudi dernier, le gouvernement libanais a approuvé les objectifs généraux du plan, qui comprennent le contrôle de toutes les armes par l’État, le déploiement de forces libanaises dans les zones frontalières clés et l’ouverture de pourparlers indirects avec Israël pour résoudre la question des prisonniers et finaliser les frontières du Liban avec Israël et la Syrie. «Nous n’avons pas examiné les détails ni les composantes de la proposition américaine. Nos discussions et notre décision se sont limitées à ses objectifs», a déclaré le ministre libanais de l’Information, Paul Morcos, à l’issue de la réunion. Des ministres affiliés au Hezbollah et à son allié politique chiite, Amal, auraient quitté la réunion en signe de protestation.
Le Hezbollah a été fondé en réponse à l’invasion du Liban par Israël en 1982, puis à son occupation. Soutenu par l’Iran, il est devenu une puissante guérilla qui a mené la campagne pour mettre fin à l’occupation israélienne au Sud-Liban en 2000.
La guerre de 2006 contre Israël, qui s’est terminée sans que ce dernier n’atteigne ses objectifs militaires, a accru la popularité du groupe dans le monde arabe et musulman. De Tunis à Alep, des images du chef du Hezbollah chiite de l’époque, Hassan Nasrallah, ornaient les cafés et même les foyers sunnites du Maghreb, où beaucoup le voyaient comme un symbole de la résistance anticoloniale.
Cependant, la décision du Hezbollah, dans les années 2010, de déployer des combattants pour soutenir l’ancien dictateur syrien Bachar Assad pendant le soulèvement qui a dégénéré en guerre civile a gravement terni sa réputation.
Les images choquantes des atrocités commises par les forces d’Assad et leurs alliés ont laissé de nombreux habitants de la région désillusionnés par un groupe autrefois considéré comme l’avant-garde de la libération. Pour ses détracteurs, le Hezbollah n’était plus qu’un instrument de la politique étrangère de Téhéran.
Pourtant, avec le déclenchement de la guerre de Gaza en 2023 et la décision du Hezbollah de rejoindre ce qu’il a appelé un «front de solidarité» avec le Hamas tout en défendant la frontière sud du Liban contre d’éventuelles incursions israéliennes, le groupe a commencé à regagner une partie de son prestige perdu, les drapeaux jaunes du Hezbollah réapparaissant lors des manifestations à Sanaa, Rabat, Tunis et Nouakchott.
«La Palestine est notre boussole»
«Nous soutenons la résistance et son droit de porter les armes contre l’occupant. Vous nous trouverez toujours aux côtés des canons des fusils pointés sur les sionistes ; c’est notre place et notre voie», a déclaré Jawaher Chenna, membre de la Coordination d’action commune pour la Palestine, défendant la position du groupe. D’autres militants de la Coalition et des Tunisiens qui ont promis de se joindre à la manifestation ont critiqué le gouvernement libanais pour sa tentative d’apaisement envers Washington au détriment de sa propre sécurité et de celle de la cause palestinienne. «La Palestine est notre boussole. Nous soutenons quiconque tire sur les sionistes», ont commenté de nombreux manifestants sur les réseaux sociaux.
La manifestation à Tunis a fait également suite à la publication récente de rapports d’organisations internationales documentant les crimes de guerre israéliens contre les civils et les infrastructures au Sud-Liban. «De nombreux villages frontaliers du sud du Liban ont été rasés, et là où des écoles étaient restées debout, plusieurs ont été vandalisées et au moins deux ont été saccagées par les forces israéliennes», a déclaré Ramzi Kaiss, chercheur sur le Liban à Human Rights Watch (HRW). «En pillant des écoles, les forces israéliennes ont commis des crimes de guerre apparents et mis en péril l’éducation des élèves libanais», a ajouté HRW.
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