Lese-Ansicht

Es gibt neue verfügbare Artikel. Klicken Sie, um die Seite zu aktualisieren.

Ce que le corps guérit, Big Pharma ne veut pas l’entendre

Régénérer. Un mot simple. Presque biologique. Mais dans le monde du pouvoir médical, c’est un blasphème. Régénérer, c’est dire : le corps peut se réparer. C’est contester le monopole de la molécule. C’est refuser l’abonnement à vie à une industrie de la chronicité. Et cela, ils (les boss de la Big Pharma) ne le supportent pas.

Dr Hichem Ben Azouz *

Récemment en Chine, une femme diabétique a reçu une greffe de cellules souches dérivées de son propre tissu adipeux. En 75 jours, elle n’avait plus besoin d’insuline. Trois ans plus tard, elle allait toujours bien. Pas de brevet. Pas de laboratoire américain. Pas de financement Gilead ou Roche. Un protocole local, une innovation contextuelle, une médecine du vivant. Et immédiatement : silence. Pas d’éditoriaux enthousiastes dans The Lancet. Pas de subventions internationales pour explorer. Pas d’ONG se ruant pour implémenter. Seulement un malaise. Parce que cette expérience ne rentre pas dans leur logique.

Attaque contre le cœur du système

L’Afrique devrait être en première ligne de ces alternatives. Nous avons les malades. Nous avons les terrains. Nous avons les raisons d’en finir avec la dépendance. Et pourtant, nous sommes absents. Ou plutôt : rendus absents. Parce que soutenir la régénération, c’est attaquer le cœur du système : leur modèle de soin, basé sur la répétition; leur modèle économique, basé sur la consommation; leur modèle politique, basé sur le contrôle.

Régénérer, c’est leur dire «Nous n’avons plus besoin de vous.» Mais ils veulent tuer cet avenir. Ils vont l’étouffer sous des procédures. Ils vont l’enterrer sous des «protocoles non validés». Ils vont le ridiculiser comme «science marginale». Et nous, dans nos ministères, nos commissions éthiques, nos comités de pilotage, allons les aider. Nous allons refuser. Nous allons bloquer. Nous allons exiger des preuves… jusqu’à ce que l’innovation meure.

Retour au corps qui sait

Mais ce que nous oublions, c’est que le corps se souvient. Il se souvient de la plante. Il se souvient du toucher. Il se souvient de la voix, du souffle, du rituel, du lien.

La médecine que nous avons laissé mourir était une médecine de la mémoire. Et ce que propose la régénération, c’est cela : un retour au corps qui sait; un saut vers un soin qui libère; un refus d’être éternellement malade pour enrichir les mêmes.

Il ne s’agit pas ici de naïveté. Il s’agit de souveraineté. De la possibilité d’une médecine qui ne nous soumet plus. De la possibilité d’un soin qui ne prolonge pas la domination. De la possibilité d’un avenir non capturé par la peur du marché.

Ils ne veulent pas que nous guérissions. À nous de vouloir plus : reconquérir la santé, un dernier mot avant la rupture.

Nous avons parcouru le labyrinthe de l’aide qui étouffe, des ONG qui s’imposent, de Big Pharma qui exploite, des dirigeants qui profitent, des médecins qui se taisent… Mais il faut maintenant regarder devant.

Un acte de reconquête

Cet article n’est pas un testament de colère. C’est un acte de reconquête. La santé ne peut plus être un marché. La médecine ne peut plus être un outil de soumission. Le soin ne peut plus être distribué selon les intérêts des puissants.

Il est temps de reprendre ce qui nous appartient. Pas dans l’abstraction d’un idéal. Mais dans la matérialité d’un choix politique, quotidien, ancré.

A nous de reprendre la formation, la recherche, le récit, les pratiques, les programmes, les nôtres.

Nous avons besoin d’écoles de santé souveraines. Qui forment des soignants critiques, enracinés, créatifs. Nous avons besoin de recherche libre. Pas financée par ceux qui veulent des réponses convenues. Nous avons besoin de récits puissants. Pour dire les humiliations, les résistances, les alternatives. Nous avons besoin de pratiques nouvelles. Qui n’imitent pas les modèles d’ailleurs, mais qui écoutent ici.

Cela demandera du courage. Il faudra affronter les bailleurs, refuser les protocoles, inventer sans validation, parier sur le local, résister à l’appel de la carrière docile. Il n’y a pas d’autre voie. Ce chapitre est une passerelle entre la dénonciation et la création, entre la colère et la refondation, entre le constat et l’action. Le soin peut redevenir un acte de liberté, à condition d’oser sortir du système, penser autrement et désobéir.

Ce que je ne veux plus cautionner

Cet article a voulu allumer le feu; il t’appartient désormais d’y souffler. Je n’écris pas ces mots pour gagner des alliés. Je les écris parce que je n’en peux plus de me taire. Je suis médecin, africain, et je connais les couloirs glacés des hôpitaux publics, les réunions pleines de PowerPoint, les missions financées, les rapports de 80 pages, les objectifs à 95-95-95 du VIH, les acronymes qui masquent les corps. Je connais aussi la fatigue du terrain et la honte du compromis. Et je ne veux plus cautionner, valider des programmes dont je sais qu’ils ne servent pas ceux qu’ils prétendent sauver.

Je ne veux plus distribuer des médicaments quand je sais qu’une alternative existe ailleurs, mais qu’elle dérange trop pour être introduite. Je ne veux plus signer des documents qui félicitent, qui maquillent, qui transforment des désastres en succès administratifs. Je ne veux plus saluer des ONG qui vivent du malheur qu’elles dénoncent, faire semblant que la santé est neutre, être le relais d’un empire, pas même en blouse blanche. Je veux une médecine debout, qui guérit, qui écoute, qui refuse, qui ose dire non aux bailleurs, qui libère, et pas qui domestique.

Je n’ai pas écrit cet article contre mes collègues. Je l’ai écrit avec eux. Pour ceux qui se taisent, qui n’en peuvent plus, qui veulent autre chose. Je l’ai écrit pour les malades qui n’ont plus de mots, pour mon fils, pour les élèves, pour les générations à venir. Je l’ai écrit pour que le soin redevienne un lieu de vérité.

Ce que je ne veux plus cautionner, je l’écris. Et ce que j’écris, je m’engage à le vivre. Il est temps de sortir de la servitude médicale, d’ouvrir les portes, de soigner autrement.

* Médecin, chercheur et écrivain à Johannesburg, Afrique du Sud.

L’article Ce que le corps guérit, Big Pharma ne veut pas l’entendre est apparu en premier sur Kapitalis.

❌