« Le Cheval et la Nuit » clôture le festival de ASBU: Un tableau vivant de l’âme arabe
Dans un monde morcelé, « Le cheval et la nuit » tente de rassembler. Karim Thlibi orchestre un récit en musique et en images, convoquant deux symboles universels de la culture arabe pour parler à l’âme : la liberté du cheval, le mystère de la nuit. Un voyage sensoriel d’une rare intensité que l’artiste orchestre tel un hymne visuel et musical.
En clôture de la 25e édition du Festival arabe de la radio et de la télévision, l’Opéra de la Cité de la Culture accueillera une création inédite : «Le cheval et la nuit», une immersion onirique signée Karim Thlibi. Bien au‑delà d’un simple concert, cette œuvre hybridaire tisse un pont entre mémoire collective et imaginaires contemporains, convoquant deux symboles puissants de la culture arabe : le cheval, emblème de majesté et de liberté, et la nuit, voile propice à l’introspection et à la rêverie.
L’ossature du spectacle repose sur 21 pièces, mêlant compositions originales et réinterprétations de chants classiques. Chaque séquence est pensée comme une scène visuelle et sonore : musiques, chants, lumières et projections dialoguent pour créer une écriture scénique évocatrice, où le temps suspend son cours.
Sept voix arabes, autant d’itinérances et d’univers poétiques, incarnent ce récit collectif.

Le Marocain Radouane El Asmar navigue entre mélancolie traditionnelle et modernité urbaine. La Mauritanienne Mouna Dendeni exhale la douceur saharienne du chant Hassani. Le Saoudien Abdelmajid Ibrahim, à l’âme voyageuse, insuffle la chaleureuse influence des terres du Golfe, d’Egypte et du Maghreb. Christia Kassab, du Liban, mêle raffinement classique et langue familière. Souha Al‑Masri, du Yémen, prête à la création une profondeur mélodique ancrée dans son patrimoine. Ahmed Rebai, jeune chantre tunisien, incarne l’avenir du chant classique avec grâce et rigueur. Enfin, Baha Eddine Ben Fadhel, compositeur et orchestrateur tunisien, structure l’ensemble d’une architecture musicale solide et inventive.
Tous évoluent sous la baguette de Rassem Dammak, dont la direction fera vibrer la diversité des timbres arabes. L’orchestre devient un espace de dialogue entre les uns et les autres, un lieu où se mêlent les héritages vocaux et instrumentaux.
Ce spectacle-anthologie ne suit pas un récit conventionnel mais propose un parcours intérieur, une construction symbolique nourrie d’éclats de mémoire, de fulgurances musicales et de silences habités.
À une époque où la fragmentation culturelle gagne du terrain, «Le cheval et la nuit» apparaît comme une réponse sensible et incarnée, un appel à l’union par l’émotion et la beauté.
L’œuvre transpose dans le présent un vieux vers d’Al-Mutanabbi : «Le cheval, la nuit et le désert me connaissent». Mais ici, il ne s’agit pas seulement de se souvenir : il s’agit de recréer, de redonner vie à une appartenance vivante et plurielle, dans un geste artistique lumineux et fraternel.