Le président de la République, Kaïs Saïed, a affirmé jeudi, lors de sa présidence du Conseil des ministres, que l’application de la loi ne saurait être entravée, insistant sur le fait que “nul n’est au-dessus de la reddition de comptes”. Il s’est exprimé dans un discours ferme sur le fonctionnement de l’administration tunisienne et la situation de plusieurs services publics qu’il juge en décalage avec les orientations définies par l’État.
Responsabilités entravées et sabotage délibéré
Le chef de l’État a dénoncé le comportement de certains responsables qui, au lieu d’assumer leurs fonctions, bloquent volontairement l’avancement de projets publics. “Le but est clair : attiser la colère sociale par tous les moyens”, a-t-il affirmé, tout en précisant que plusieurs responsables publics n’ont pas rempli leurs obligations et n’ont, de ce fait, plus leur place dans l’appareil d’État.
Il a fustigé la nécessité de devoir intervenir personnellement dans des affaires qui devraient être gérées à l’échelle locale, citant notamment des irrégularités dans la gestion de l’eau potable dans le gouvernorat du Kef, où des factures falsifiées ont été émises, ainsi que des coupures d’eau et d’électricité jugées “injustifiées” dans plusieurs régions à la veille de l’Aïd al-Adha.
Sur un autre plan, le président a appelé à une refonte complète du modèle de gestion des services publics essentiels, tels que la santé, les transports ou encore le marché de gros. “La révolution législative doit être suivie d’une révolution administrative et culturelle”, a-t-il déclaré, évoquant la construction d’un État social fondé sur la justice économique, la transparence et la fin de la marginalisation.
“Il n’y a pas de liberté de circulation sans transport accessible, ni de droit à l’éducation sans moyens adéquats dans toutes les régions”, a-t-il souligné, appelant à la concrétisation des droits garantis par la Constitution – politiques, civils, économiques et sociaux – afin d’assurer à tous les citoyens une vie digne et un emploi.
Lutte contre la corruption et la captation des ressources
Le chef de l’État a en outre lancé une mise en garde à ceux qu’il accuse de se tourner vers l’étranger, se montrant critiques envers certains acteurs politiques et médiatiques qu’il qualifie de “traîtres et agents à la solde de puissances étrangères”. “La Tunisie est un État souverain. Sa souveraineté appartient au peuple, et n’est pas à vendre”, a-t-il martelé.
Il a également réitéré que la souveraineté de la Tunisie à l’international n’est pas un sujet de négociation, et que les relations avec les autres pays doivent se faire sur un pied d’égalité, dans le respect de la volonté populaire.
Kaïs Saïed a aussi dénoncé l’influence persistante de lobbies et de clans économiques ayant, selon lui, accaparé la richesse nationale. Il a rappelé que la majorité des services publics ont été bradés, contribuant à l’extension de la pauvreté et de la corruption. “Les richesses du peuple tunisien doivent lui revenir, et nous ne les céderons pas”, a-t-il déclaré.
Concernant les fonds détournés à l’étranger, il a critiqué les obstacles judiciaires invoqués par certains pays pour empêcher leur restitution, affirmant que seuls de “maigres montants” ont été récupérés, à l’instar de plusieurs pays africains.
Une volonté d’aller jusqu’au bout
“Nous n’accepterons rien d’autre que la victoire et le rétablissement complet de l’État”, a insisté le président, évoquant la récente interdiction de la sous-traitance dans les secteurs public et privé comme mesure forte contre l’exploitation des travailleurs. Il a également appelé à une évaluation rigoureuse de nombreuses structures publiques qui, selon lui, gaspillent l’argent du contribuable sans produire de résultats tangibles.
“Tous les Tunisiens sont égaux. Il n’y a pas de traitement préférentiel entre les régions. Et toute personne fautive devra rendre des comptes, quelle que soit sa fonction”, a-t-il ajouté.
Finalement et non moins important, le président a dénoncé les discours alarmistes et les campagnes de désinformation visant à affaiblir les institutions. Il a affirmé que la Tunisie dispose des ressources nécessaires pour surmonter ses difficultés, à condition de faire preuve de détermination. Il a conclu en assurant que les “résidus du passé” encore présents dans l’administration seront écartés et traduits en justice.
Il est à noter que le Conseil des ministres a par ailleurs examiné plusieurs projets de lois et décrets d’application, et discuté de l’état général des services publics.
La Presse