KOTOUF-Festival : Djerba devient le carrefour des littératures méridionales
La première édition du KOTOUF-Festival des Littératures du Sud se déroulera les 17 et 18 octobre à Djerba, marquant un événement culturel majeur dédié à la mise en valeur des richesses littéraires et intellectuelles du Sud. Initié par une équipe principalement féminine, ce festival a pour ambition de décentraliser la culture et d’offrir une plateforme aux créateurs et penseurs souvent marginalisés des régions méridionales.
Fatma Dellagi-Bouvet de la Maisonneuve, membre du comité de direction du festival, écrivaine, membre du Parlement des écrivains francophones et psychiatre tunisienne exerçant à Paris, a accordé un entretien à L’Économiste Maghrébin pour expliquer la philosophie de cet événement. Elle souligne l’importance de rompre avec la surreprésentation des références culturelles occidentales. « Nous avons trop souvent négligé les richesses du Sud. Djerba, avec son histoire millénaire et son rôle de carrefour culturel, est l’endroit idéal pour accueillir cette diversité », affirme-t-elle. À noter que l’événement se tiendra en partenariat avec l’Association d’Animation Culturelle de Djerba et sous l’égide de Destination Djerba.
Ce festival se présente comme une réponse à l’invisibilisation des productions intellectuelles et littéraires du Sud, tout en s’inscrivant dans une dynamique de tourisme culturel. « Les habitants de Djerba aspirent à dépasser l’image réductrice de l’île comme simple destination touristique balnéaire. Ce festival démontre que Djerba peut aussi briller par son patrimoine immatériel et sa vitalité intellectuelle », explique-t-elle. Elle évoque d’ailleurs des surprises liées à des éléments culturels djerbiens récemment inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO, qui seront mis en lumière lors de l’événement.
Un programme riche et varié
Le festival proposera une série d’activités destinées à un public large et diversifié. Des tables rondes réuniront des auteurs tunisiens de renom, tels qu’Emna Belhadj Yahia, Faouzia Zouari, Mohamed Mahjoub, Nadia Khiari, Lotfi Chebbi, Hafidha Karabiben, Fethi Ben Maamar, Hassanine Ben Amou, ainsi que des écrivains internationaux comme Tanella Boni (Côte d’Ivoire), James Noël (Haïti) et Lise Gauvin (Canada). Ces rencontres seront l’occasion d’échanges approfondis sur les spécificités et les enjeux des littératures du Sud.
Des séances de lecture musicale et des performances théâtrales viendront animer les deux jours de festivités, offrant une approche immersive de la littérature. Le festival mettra en avant la recherche et l’innovation culturelle à travers des stands présentant les travaux universitaires les plus récents. Une collaboration étroite a été établie avec les universités de Gabès, Médenine, Gafsa, Carthage et Tunis, permettant une participation active des étudiants et de leurs enseignants.
Au programme également : des ateliers créatifs (bande dessinée, écriture, traduction) ouverts à tous les passionnés. Point d’orgue de cette édition : l’UNESCO s’associe au festival en y intégrant la Semaine mondiale du roman, apportant une dimension internationale à l’événement.
Une exposition photographique de Pierre Gassin sur le thème de la berbérité sera également proposée, accompagnée d’un concours destiné aux jeunes talents locaux. Cette initiative vise à encourager la participation active de la jeunesse et à renforcer le lien entre patrimoine et création contemporaine.
Une approche transgénérationnelle et inclusive
Le festival se distingue par sa volonté d’associer toutes les générations. Des élèves des écoles locales seront invités à illustrer par des dessins les textes lus lors des séances, tandis que les étudiants universitaires présenteront leurs projets littéraires et de recherche. « Nous voulons que ce festival soit une fête de la littérature accessible à tous, des plus jeunes aux plus âgés, et qu’il reflète la diversité de notre société », précise Fatma Bouvet de la Maisonneuve.
L’un des principes fondateurs du festival est le respect d’une stricte parité, tant en termes de genre que d’origine géographique. Parmi les invités figurent des auteurs comme l’Algérien Walid Hajar Rachedi, le Malgache Jean-Luc Raharimanana et la Mauricienne Ananda Devi. « La présence de ces grands noms de la littérature internationale est une reconnaissance de la vitalité culturelle de la Tunisie et du Sud en général », se réjouit l’organisatrice.
Soutenu par des sponsors locaux et une banque partenaire, le KOTOUF-Festival aspire à s’inscrire dans la durée, à l’image de grands événements littéraires internationaux comme le festival Étonnants Voyageurs de Saint-Malo. « Notre objectif est de faire de Djerba, chaque mois d’octobre, une capitale culturelle où la littérature investit l’espace public, des cafés aux maisons particulières », conclut-elle . Elle appelle à un « rêve collectif intelligent et festif », mêlant créativité, échanges et convivialité.
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