Au commencement une vidĂ©o diffusĂ©e sur les rĂ©seaux sociaux. On y voit deux lycĂ©ens prendre un vilain plaisir Ă dĂ©molir, avec une violence inouĂŻe, le mobilier dâune salle de classe. Le spectacle est consternant et affligeant. Il suscite, Ă premiĂšre vue, indignation, abattement et dĂ©sarroi. Et pour cause.
Un symptĂŽme dâun systĂšme Ă©ducatif Ă bout de souffle
Loin dâĂȘtre un comportement isolĂ© ou encore un simple fait divers, la scĂšne est, le moins quâon puisse dire, rĂ©voltante. Câest un marqueur fort de lâĂ©chec cuisant de notre systĂšme Ă©ducatif. Ce dernier a failli Ă sa mission basique, celle dâinculquer aux jeunes gĂ©nĂ©rations le respect du bien public et le rĂŽle majeur que ce bien public joue dans la formation de leur citoyennetĂ©.
LâincomprĂ©hension face Ă de tels agissements
Pour revenir Ă cet acte de vandalisme gratuit, la question est de savoir comment en sommes-nous arrivĂ©s lĂ ? Nous savons certes quâau regard du bas niveau scolaire de nos enfants, ce systĂšme Ă©tait loin dâĂȘtre parfait, mais sâattendre Ă un tel comportement destructeur de collĂ©giens est trop choquant.
On se demande surtout comment ces deux « sauvageons » sont parvenus Ă passer le cycle dâenseignement de base (9 ans) et accĂ©der au secondaire sans apprendre des Ă©lĂ©ments basiques comme leur propre intĂ©rĂȘt.
Lâenseignement public, une opportunitĂ© nĂ©gligĂ©e
Est-il besoin de rappeler que lâenseignement public est gratuit, quâil coĂ»te trĂšs cher au contribuable et quâil prĂ©sente, par lâeffet de lâascenseur social et en dĂ©pit de ses contreperformances, une prĂ©cieuse opportunitĂ© pour permettre aux jeunes apprenants de devenir meilleurs dans lâavenir.
Des réactions partagées sur les réseaux
Concernant les rĂ©actions Ă cette vidĂ©o, elles sont divergentes. Pour certains â et ils sont, hĂ©las, nombreux â il sâagit de sĂ©vir. Les deux Ă©lĂšves quâon peut reconnaĂźtre facilement dans la vidĂ©o doivent ĂȘtre exclus de tous les Ă©tablissements scolaires du pays. Pis, leurs parents doivent mettre la main Ă la poche et rembourser les dĂ©gĂąts.
La voie de la sanction nâest pas la solution
Pour dâautres, apparemment plus sages et plus avertis, ce vandalisme est le symptĂŽme dâun mal plus profond : celui du dĂ©sarroi dâune jeunesse qui nâa pas de rĂ©fĂ©rences ni morales ni civiques.
Plus grave encore, ils pensent que si ces adolescents sont violents et destructeurs, câest tout simplement parce quâon nâa jamais pris le temps pĂ©dagogique nĂ©cessaire â ni au niveau de la famille, ni au niveau de lâĂ©cole â pour les Ă©couter, pour les comprendre et pour leur apprendre, en mĂȘme temps, les comportements civiques et responsables souhaitĂ©s.
Ce que nous enseignent les expériences étrangÚres
Les pays occidentaux, qui ont été confrontés à des actes de vandalisme similaires, ont beaucoup réfléchi sur les causes et facteurs qui peuvent expliquer pourquoi un adolescent ou une adolescente adopte des comportements violents.
Leurs sociologues ont identifiĂ© plusieurs mobiles. Au nombre de ceux-ci figurent : une faible capacitĂ© dâempathie, une faible estime de soi, une faible intelligence Ă©motionnelle, un sentiment dâinsĂ©curitĂ©, stress, angoisse ou diffĂ©rentes difficultĂ©s dans la vie personnelle, scolaire, sociale ou amoureuse. Pour ces sociologues, « il nâest pas rare que les comportements de violence soient un moyen pour lâadolescent ou lâadolescente dâexprimer une difficultĂ© ou un besoin sous-jacent ».
Pour une approche dâĂ©coute et dâaccompagnement
Morale de lâhistoire, la panacĂ©e idĂ©ale serait non pas de punir les sauvageons prĂ©citĂ©s mais de les Ă©couter et de les accompagner, et de crĂ©er dans les Ă©tablissements scolaires des cellules dâĂ©coute. Car, notent-ils, leur violence ne serait quâun cri de dĂ©tresse, voire un appel Ă lâaide.
Une réforme éducative à construire autrement
La Tunisie, qui sâapprĂȘte Ă entreprendre une grande rĂ©forme de son systĂšme Ă©ducatif, a tout intĂ©rĂȘt Ă sâinspirer dâexpertises rĂ©ussies en la matiĂšre, sâagissant notamment des expertises des pays nordiques. La prochaine visite en Tunisie du PrĂ©sident finlandais serait une opportunitĂ© pour Ă©tablir un premier partenariat avec ces pays.
Abou SARRA
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