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Tunisie : une croissance modeste sur fond de fragilités persistantes

« Les estimations issues des comptes nationaux trimestriels montrent que le Produit Intérieur Brut (PIB) en volume, corrigé des variations saisonnières, a enregistré une croissance au taux de 1,6 % sur un an au cours du premier trimestre de l’année 2025. En glissement trimestriel, c’est-à-dire par rapport au quatrième trimestre de l’année 2024, le PIB en volume aura diminué de 0,2 % », lit-on dans le communiqué de l’INS.

Une croissance en demi-teinte

Ce 1,6 % de croissance semble être une performance en apparence positive, mais elle s’inscrit dans un contexte économique instable et soulève plusieurs interrogations sur la santé réelle de l’économie et sur les marges budgétaires dont dispose l’État. Cette croissance relative est principalement attribuable à une saison agricole exceptionnelle (+7 %) et reste, comme le souligne l’économiste Hachemi Alaya, artificielle, alimentée par des facteurs ponctuels (pluviométrie abondante, ajustements statistiques), plutôt que par une dynamique économique durable.

“Cette croissance relative est principalement attribuable à une saison agricole exceptionnelle et reste artificielle, alimentée par des facteurs ponctuels.” (Hachemi Alaya, économiste)

 

Cela doit inciter à une lecture prudente : les comparaisons doivent être faites entre trimestres équivalents, et non entre des périodes disjointes, afin d’éviter des analyses biaisées d’un contexte économique assez délicat. Ce taux reste en deçà des niveaux nécessaires pour impulser une relance solide, notamment dans les secteurs productifs et de services, qui font toujours face à des défis structurels.

Une boursière dynamique en trompe-l’œil

Dans le même temps, la Bourse de Tunis affiche des performances très positives. Cela s’explique en partie par le fait que les professions libérales — médecins, avocats, experts-comptables, architectes — doivent déposer leurs déclarations fiscales le 25 mai. Pour réduire le taux d’imposition, ils souscrivent aux CEA (Comptes Épargne Actions), qui sont des acquisitions sur la Bourse.

Parallèlement, les principaux indicateurs boursiers des grandes entreprises, hors banques, ne sont pas reluisants. Les chiffres d’affaires d’entreprises industrielles et commerciales comme Les Ciments de Bizerte, la Société du bois ou encore la SFBT ont baissé par rapport au premier trimestre 2024. Le fait que la Bourse de Tunis affiche une croissance qui ne reflète pas une prospérité économique réelle prouve, encore une fois, que les transactions qui y sont effectuées sont déconnectées de la réalité du marché.

“Grâce à la baisse des cours mondiaux, la Tunisie pourrait engranger entre 2,2 et 2,5 milliards de dinars de ressources supplémentaires.”

 

La performance boursière contraste fortement avec la baisse de la consommation intérieure, notamment sur des produits comme le vin ou le gaz de consommation domestique, révélant une réaction du pouvoir d’achat, en particulier au sein de la classe moyenne.

Des opportunités budgétaires encore inexplorées

Grâce à la baisse des cours mondiaux du pétrole, du gaz et des céréales, sans oublier la baisse du dollar par rapport aux principales devises, sous l’effet de la politique de Trump, la Tunisie pourrait engranger entre 2,2 et 2,5 milliards de dinars — voire 3 milliards — de ressources supplémentaires non prévues dans la loi de finances initiale si les cours des hydrocarbures et des céréales continuent à baisser ou se maintiennent à leur niveau actuel. Le budget 2024 avait été calculé sur la base d’un baril à 77,4 dollars, alors que le prix moyen actuel oscille autour de 64 à 66 dollars.

Ces économies pourraient représenter une véritable bouffée d’oxygène pour l’État. Il est envisageable de les réallouer selon des priorités nationales claires :

  • 1 milliard de dinars pour le transport public ;
  • 1 milliard pour l’éducation ;
  • 1 milliard pour la santé ;

Mais encore faut-il avoir un plan précis, aligné avec les besoins réels du pays.

Un manque de vision

Sans un environnement d’affaires stable, sans la confiance des investisseurs, et dans un climat social anxiogène, toutes les ressources du monde risquent de rester inefficaces. Tant que les entreprises peinent à investir, que les citoyens sont inquiets pour leur avenir, et que l’administration n’a pas de vision structurée, le pays ne pourra pas transformer ces opportunités ponctuelles en une dynamique durable.

“Les PME tunisiennes sont aujourd’hui parmi les plus fragiles. Nombre d’entre elles sont au bord de la faillite. Il est donc urgent de mettre en place un plan de sauvetage.”

 

Le défi des PME : urgence nationale

Les PME tunisiennes sont aujourd’hui parmi les plus fragiles. Nombre d’entre elles sont au bord de la faillite. Il est donc urgent de mettre en place un plan de sauvetage, combiné à des incitations claires à l’investissement national. Ce tissu économique, s’il est soutenu et modernisé, pourrait à lui seul créer des milliers d’emplois et relancer la machine économique.

Entre contrastes et carrefours économiques

La Tunisie se trouve aujourd’hui à un carrefour économique décisif. D’un côté, des signaux positifs : opportunités budgétaires liées à la conjoncture mondiale, résilience de certains secteurs. De l’autre, des réalités préoccupantes : baisse de la consommation, tensions sociales, absence de stratégie claire et climat des affaires dégradé.

Transformer ces paradoxes en levier de transformation passe par une gouvernance lucide, des choix politiques courageux et une mobilisation urgente autour du sauvetage des entreprises et de la relance de l’investissement local.

Amel Belhadj Ali

EN BREF

  • Le PIB tunisien affiche une croissance annuelle de 1,6% au premier trimestre 2025, principalement due à une excellente saison agricole.
  • Cependant, le PIB a diminué de 0,2% en glissement trimestriel, signalant une fragilité économique sous-jacente.
  • La bourse de Tunis connaît une dynamique positive, mais déconnectée de la réalité des entreprises (baisse du chiffre d’affaires pour plusieurs grands groupes).
  • La baisse des prix mondiaux offre une opportunité budgétaire significative (2,2 à 2,5 milliards de dinars).
  • Un plan de sauvetage urgent pour les PME et une vision stratégique claire sont essentiels pour une relance économique durable.

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