Intelligence artificielle: gagner le pari de l’inclusion financière
La Tunisie connait une forte utilisation des technologies de l’information, illustrée par un taux de possession de téléphones mobiles de 88% et un accès à Internet de 62% de la population, ce qui révèle un potentiel numérique important. Pourtant, il est encore sous-exploité par le système bancaire. Seulement 37% de la population tunisienne est bancarisée, un chiffre bien en deçà de la moyenne mondiale (76%), selon la Banque mondiale. L’accès au crédit demeure limité (10%) et lent, puisque le délai moyen pour recevoir une décision sur une demande de prêt est de 20,4 jours. L’épargne dans une institution formelle (y compris le réseau postal) reste modeste, soit 14% de la population.
Par ailleurs les paiements électroniques effectués représentent 24% des transactions, ce qui reflète une utilisation encore faible des services financiers numériques. Autant d’indicateurs qui révèlent les limites d’un système financier qui peine à s’adapter aux besoins réels et aux usages numériques d’une large part de la population. C’est précisément dans ce contexte que l’adoption de l’intelligence artificielle dans le secteur bancaire prend tout son sens.
En s’appuyant sur la connectivité croissante, l’IA pourrait soutenir le système bancaire dans l’élargissement de son réseau et permettre le développement de services financiers numériques dans des zones mal desservies. De plus, l’automatisation de l’étude des dossiers de crédit pourrait contribuer à raccourcir les délais de traitement des demandes.
L’intelligence artificielle pourrait jouer aussi un rôle déterminant dans l’accélération de l’adoption des paiements digitaux, en facilitant l’accès à des services tels que les transferts d’argent ou les comptes d’épargne numériques. Ces services peuvent être simplifiés et rendus plus accessibles, notamment pour la partie de la population encore largement exclue du système financier traditionnel. Enfin, l’absence d’interopérabilité entre le secteur bancaire et le réseau postal constitue un frein majeur à l’extension des paiements électroniques en Tunisie. Le recours à l’intelligence artificielle pourrait faciliter le traitement et l’analyse des données, ce qui permettrait de lever certains obstacles techniques et ainsi favoriser le développement des paiements électroniques.
En somme, ne pas saisir cette opportunité risquerait de creuser davantage les fractures financière et numérique dans un pays où la culture digitale semble être ancrée dans le quotidien des citoyens. L’adoption de l’IA apparaît ainsi comme une condition déterminante pour bâtir une finance plus inclusive.
Par Noura Harboub-Labidi
Cette analyse est disponible dans le mag de l’Economiste maghrébin n 920 du 21 mai au 4 juin 2025
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