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29e édition des Prix Littéraires Comar d’Or : Récompenser l’art de raconter

Retour sur les détails de la soirée qui a rassemblé auteurs, éditeurs, journalistes et amoureux des livres et qui confirme encore une fois son rôle de tremplin pour les talents littéraires d’aujourd’hui et de demain.

La Presse —La très attendue cérémonie de remise des prix littéraires Comar d’or s’est tenue samedi le 17 mai au Théâtre municipal de Tunis. Ce rendez-vous annuel incontournable célèbre la créativité et soutient la vie littéraire par la récompense des meilleurs romans tunisiens parus entre le 1er avril de l’année dernière et le 31 mars de l’année en cours. Entre discours, suspense, émotions et révélations, retour sur les détails de la soirée qui a rassemblé auteurs, éditeurs, journalistes et amoureux des livres et qui confirme encore une fois son rôle de tremplin pour les talents littéraires d’aujourd’hui et de demain.

«La culture est une nécessité, pas un luxe»

Sous le patronage du ministère des Affaires culturelles, la cérémonie a été animée par Hamza Balloumi. Avant que les romans ne soient à l’honneur, la musique a occupé la scène. Une prestation de Rana Zarrouk a lancé la soirée avec élégance et énergie en reprenant un medley de grands classiques de la chanson orientale.

Dans son mot d’ouverture, M. Slaheddine Ladjimi, président du Conseil d’administration de Comar Assurances,a rappelé que, depuis 1997, 787 romans en langue arabe ont été en lice avec 89 prix décernés. Pour les romans en français,  91 prix ont été attribués aux lauréats parmi les 392 participants. Il est également revenu sur le nombre et la qualité des œuvres retenues dans la course aux prix cette année. Cette cérémonie aspire, selon lui, à mettre la culture au centre du débat culturel face aux réseaux sociaux et aux contenus éphémères. Il a également tenu à remercier les éditeurs «dénicheurs de talents» sans lesquels des œuvres de qualité seraient encore «dans les tiroirs». M. Lotfi Ben Haj Kacem, président du Comité d’organisation des prix littéraires Comar, a évoqué des éléments importants dont l’intérêt persistant des Tunisiens pour la littérature francophone ainsi que l’âge des participants qui sont de générations différentes. Il a promis une cérémonie grandiose l’année prochaine pour l’édition qui marquera le 30e anniversaire des Prix Comar. «La culture est une nécessité, pas un luxe», lança-t-il à la fin de son discours. 

Le palmarès dévoilé 

Grâce au travail des jurys composés de spécialistes du domaine, universitaires et écrivains, la liste courte de cette édition 2025 comprend 21 romans en français et 55 romans en arabe. Les membres du jury pour les romans en langue arabe sont Mme Naziha Khlifi, Mme Saadia Ben Salem, M. Ahmed Gasmi et M. Hafedh Mahfoudh.

Quant aux romans en langue française, le jury a été présidé par M. Ridha Kefi avec comme membres M. Mokhtar Sahnoun, Mme Azza Filali, Mme Amina Chenik et M. Mhamed Hramel.

La liste de tous les lauréats du Comar d’or 2025 couvrant six catégories est répartie comme suit : le Comar d’or en langue arabe a été décerné à «Li man tajamaou wardaka ye Makram» (Pour qui ramasses-tu tes roses, Makram ?) de Chafik Tarqui, paru chez Mayara Editions. Le jury a tenu à mentionner que le roman endosse l’image de «L’Homme à l’ère de la misère, l’échec et les déceptions dans sa quête de soi. Un texte qui réunit différents genres artistiques et nous parle de la réalité culturelle actuelle avec ses douleurs et ses rêves».

Le Comar d’or en langue française revient au roman «Écris, tu seras aimé des dieux» de Mahdi Hizaoui, paru aux éditions Arabesques. Le jury a indiqué que «Le narrateur, alter ego de l’auteur, traîne un regard désabusé sur les êtres, les phénomènes et les choses. Sa vision du monde, aux accents philosophiques et aux tons ternes, donne lieu à une réflexion d’ordre existentiel et ontologique, tout à la fois sévère, insolite et drôle».

Le Prix spécial du jury (français) a été attribué au roman «Le vert et le bleu» de Abdellatif Mrabet paru chez Contraste Editions, qui, selon le jury, «Ce roman, structuré selon la technique de la mise en abyme, met en scène un militant écologiste qui rentre au pays pour réaliser son projet et son rêve : entretenir avec passion la terre de ses parents située au cœur de l’oasis maritime de Gabès, pour la sauvegarde de laquelle il se dévoue corps et âme».

Le Prix Découverte (français) est venu récompenser «Écoute-moi ma fille» de Houda Mejdoub, édité chez Arabesques que le jury a salué pour «les récits entrecroisés de plusieurs personnages appartenant à trois générations. L’auteure analyse les relations complexes au sein de la famille, où les malentendus, les secrets et les non-dits n’interdisent pas l’amour qui triomphe».

Le Prix spécial du jury (arabe) pour «Ashab Al Hodhod» (Les compagnons de la huppe) de Sofienen Rejab, Meskliani Editions.

Le jury a salué l’auteur pour son roman cohérent dans sa structure, harmonieux dans sa thématique, fondé sur l’originalité et la diversité des événements, en plus de la capacité du romancier à fusionner des univers multiples, notamment à travers sa manière d’exploiter l’héritage soufi.

Quant au prix découverte (arabe)  «Nafidha ala al chams» (Une fenêtre sur le soleil) de Balkis Khalifa, Mayara Editions, a attiré l’attention du jury par sa structure harmonieuse dans la diversité de ses événements. L’auteure y a rassemblé des questions politiques et sociales… Peut-être cherche-t-elle à remodeler la réalité».

Les récompenses sont dotées de 10.000DT pour chacun des lauréats du Comar d’or et du Prix spécial du Jury  dans les deux langues. La somme de 2.500DT est décernée à chacun des gagnants du Prix Découverte, pour les romans où les jurys décèlent de réelles promesses. 

Entre discours des lauréats et applaudissements, la cérémonie célèbre, au-delà d’une remise de prix, ce que la littérature a de plus précieux : sa capacité à toucher, à faire réfléchir, à relier les êtres.

Pour clore la soirée, un interlude musical a été proposé aux invités. Mohamed Ben Salah est venu prolonger l’élan d’émotion de cette soirée littéraire en interprétant des chansons orientales, notamment des tubes de Melhem Baraket. C’est Olfa Ben Romdhane qui a conclu la cérémonie en grâce avec un medley de chansons tunisiennes, salué par le public.

Rendez-vous l’année prochaine pour une 30e édition riche en découvertes !

Chafik Tarqui, lauréat du COMAR d’OR en langue arabe à La Presse : « Il faut de tout pour écrire un texte »

Le grand prix Comar d’OR a été décerné cette année au roman « Pour qui ramasses-tu tes fleurs, Makrem ?» Li man Tajmaou Wouroudaka ye Makrem?) de Chafik Tarqui. À la croisée des styles, son écriture trace un chemin unique qui allie poésie et expérience romanesque. Nous lui avons posé quelques questions en fin de la cérémonie.  

La Presse — Est-ce que c’est la première fois que vous recevez un prix littéraire ?

C’est déjà trois romans à mon compte. Le premier, « Lavazza », a déjà reçu un prix à Dubai en 2015. J’ai aussi un deuxième roman «Barbara» et des recueils de poésie. En fait, j’ai entamé un parcours de poète avant de me convertir à l’écriture romanesque.  Je suis heureux de cette récompense pour sa valeur symbolique. C’est un prix prestigieux qui a son poids en Tunisie vu l’ancienneté de son instauration et la qualité des œuvres révélées chaque année. La cérémonie contribue à médiatiser des titres de livres et des noms d’auteurs dont on se souvient pour longtemps. J’estime que toutes les œuvres qui ont été retenues pour la sélection finale sont gagnantes en quelque sorte. Je tiens à remercier les assurances Comar pour la perpétuité de cette tradition ainsi que les jurys qui ont cru en nous. Je crois en un avenir radieux de la scène littéraire tunisienne avec tous ces talents d’auteurs dévoilés. 

Quel est le thème de votre roman primé aujourd’hui?

C’est une histoire qui tire sa profondeur de sa simplicité apparente. Un poète tunisien tout à fait méconnu tombe de son vélo alors qu’il avait un bouquet de fleurs en main. En se penchant pour ramasser les fleurs, en dépit de la blessure endurée par la chute, une réflexion se déclenche. Le narrateur part de cet événement anodin pour déployer le passé du protagoniste, sa vie sentimentale, sa vision de son existence, avec toutes les contradictions humaines… La fin est ouverte.

Le jury a souligné l’originalité de votre style d’écriture. Pouvez-vous nous en donner plus de détails ?

Je déploie mon expérience dans l’écriture poétique ainsi que mes connaissances de chercheur en poésie arabe dans la conception de mes romans. Je suis titulaire d’un doctorat en littérature arabe portant sur Mahmoud Derouiche.  Ce livre allie donc mes influences diverses. J’ai fait le choix de mêler les genres littéraires, donnant naissance à une œuvre hybride et originale. En croisant les codes de la poésie, du théâtre, du cinéma et d’un univers artistique riche d’une manière générale, je retiens ce qu’il y a de beau dans chaque genre. Ce que j’essaie de prouver, c’est qu’il n’y a pas de véritables frontières entre les registres littéraires. Il faut de tout pour écrire un texte.

Projet Elyssa : Des avancées concrètes

Sur 116 candidatures, cinq projets sont retenus pour les musiques et huit pour les arts visuels. Nous avons profité de cet évènement pour échanger avec les artistes et découvrir leurs démarches.

La Presse — Au mois d’octobre 2024, l’Institut français de Tunisie a annoncé le lancement d’un fonds d’aide pour la création et le soutien des artistes, baptisé « Elyssa ». Le principe est de lancer des appels à candidature  afin de sélectionner, accompagner et mentorer les créations de qualité des artistes tunisiens émergents et confirmés.

Une rencontre a eu lieu le 9 mai, à mi-parcours, réunissant lauréats, partenaires, coachs formateurs et journalistes, afin de faire une mise au point des étapes franchies jusqu’à présent. Nous sommes partis à la rencontre des lauréats et de l’équipe qui chapeaute ce projet.

Un projet qui vise le marché international

M. Fabrice Rousseau, directeur de l’IFT, a rappelé dans son mot de bienvenue que « Elyssa »  est un fonds d’aide à la création qui aspire à dynamiser la scène culturelle tunisienne et aider les artistes à être plus visibles sur le marché international. Deux catégories sont au centre de l’intérêt : les musiques et les arts visuels.

Le volet logistique a été assuré avec le soutien actif de partenaires de terrain tunisiens. Fany Roland  attachée culturelle de l’IFT, a souligné dans son intervention que les artistes sélectionnés par des comités d’experts bénéficient actuellement d’un accompagnement personnalisé avec des séances de coaching et une résidence artistique de création. Le programme inclut également la mise en réseau et la diffusion des œuvres abouties à travers des concerts et des expositions. Saima Samoud, cheffe de projet, a annoncé la liste finale des lauréats. Sur 116 candidatures, cinq projets sont retenus pour les musiques et huit pour les arts visuels. Nous avons profité de cet évènement pour échanger avec les artistes et découvrir leurs démarches.

« Hor el Ensen-Walk free » de Broua

Broua est un ensemble musical réunissant des artistes venus de Tunisie, de France et des Pays-Bas. Leur musique propose une fusion originale entre les sonorités traditionnelles tunisiennes et des genres, tels que le jazz, le blues et la musique latine.Le projet est porté par Wissem Zaidi, musicien, auteur et compositeur tunisien.

À travers ses morceaux, Broua aborde des thématiques profondes, telles que l’identité, la nostalgie et la quête de soi, invitant le public à un voyage empreint de récits personnels et de métissages culturels. « La collaboration au projet Elyssa nous a offert le premier fonds qui nous ouvrira de nouveaux horizons. La résidence live à Hammamet sera une occasion pour nous réunir et travailler davantage sur le projet. Ce qu’il y a de plus intéressant, c’est surtout la possibilité d’une tournée en Europe», nous a confié Wissem Zaidi. « Nous sommes en train de travailler sur un album qui verra le jour en septembre prochain. Deux titres sont déjà dans les bacs».

« Dendri fel Midane » par le groupe Dendri-Stambeli Movement

Dirigé par Mohamed Khachnaoui, ce groupe aspire à dépoussiérer le stambeli, rituel musical et thérapeutique ancien, et le remettre au goût du jour avec une vision artistique moderne qui lui apporte un vent de fraîcheur. Enseignant universitaire à l’Ismt, Mohamed Khachnaoui a démarré ses recherches depuis 2008 dans le cadre de son parcours académique.

« Ce projet est l’aboutissement de mon engagement avec des musiciens curieux qui partagent avec moi cette passion », nous explique-t-il. «  C’est une musique riche artistiquement et esthétiquement. Nous travaillons à la réinventer, la rejouer avec des instruments modernes : basse électrique, guitare électrique… ». 

L’aventure dans le design vestimentaire de Wadi Mhiri

En artiste pluridisciplinaire, Wadi Mhiri a commencé depuis 2004 par pratiquer la photographie, puis la céramique, la vidéo et l’installation…  Styliste de formation, depuis 2004, il collectionne photos, vidéos, céramique, installations.. « Ce projet sur lequel je réfléchis sérieusement depuis 4 ans est une rétrospective, un hommage à ma famille qui est dans le monde du textile et de l’habillement. Je suis moi-même styliste de formation», nous a-t-il indiqué. 

Le projet de design écologique de Mohamed Ali Ouertani

Architecte de formation, Mohamed Ali Ouertani est aussi designer de céramique. Il a son propre atelier et sa propre marque. Sa collaboration avec Elyssa allie à la fois l’architecture et le design. « C’est un système de ventilation naturel qui va être installé dans les bâtiments existants avec une approche écologique. Je suis en train de développer le prototype par les recherches et les tests en vue de le commercialiser en Tunisie et à l’étranger », explique l’auteur du projet.

Le management artistique par Mohamed Ben Saïd

 Le manager d’Acacia Production a tenu à souligner l’importance de l’accompagnement des  artistes pour mener à bon port les projets sur lesquels ils travaillent actuellement. « Le profil de manager musical existe en Tunisie. C’est l’industrie proprement dite qui fait défaut. Le plus difficile pour un artiste émergent, c’est de décrocher des opportunités pour se produire dans de grands évènements culturels.

Nous avons des centaines de festivals en Tunisie, mais  ce sont les mêmes noms qui s’en emparent. Les jeunes artistes ont peu de chance de se faire programmer, à part quelques exceptions qui ont eu un succès commercial fulgurant. Nous avons de jeunes talents et de la bonne musique dans tous les coins de la Tunisie. Il faut les encourager à la création, valoriser leurs œuvres et surtout les encadrer pour qu’ils puissent construire leur avenir autour de leur musique. »

Mohamed Ben Saïd travaille principalement sur ce volet.  Ramener des coachs tunisiens et étrangers, des programmateurs de festivals, des experts en droits d’auteur. Ils apprennent aux artistes et aux managers artistiques les bases du métier : l’organisation d’un concert, la signature des contrats, le volet fiscal. 

Notons que les résidences artistiques dans le cadre du projet Elyssa sont actuellement en cours. Un concert est prévu au mois de juin, à l’occasion de la fête de la musique, avec les lauréats à l’affiche. Des expositions auront lieu bientôt  pour les arts visuels.

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