La Tunisie a toujours su Ă©viter le jusquâau-boutisme des approches radicales fussent-elles fondĂ©es sur des arguments moraux. Aujourdâhui, face Ă ses nombreux dĂ©fis internes et externes, elle aurait tout intĂ©rĂȘt Ă maintenir sa position traditionnelle de neutralitĂ© et mĂȘme Ă nourrir une certaine ambiguĂŻtĂ© stratĂ©gique afin dâĂ©viter de se laisser entraĂźner dans des conflits dont elle se passerait bien.
Elyes Kasri *
En temps normal, la diplomatie est un mĂ©tier qui nĂ©cessite beaucoup de sang froid et de retenue dans lâanalyse, les dĂ©clarations et les actions car plus quâailleurs tout excĂšs tombe dans lâinsignifiance.
Dans un monde aussi volatile que ce XXIe siĂšcle, oĂč les Ă©quilibres gĂ©ostratĂ©giques planĂ©taires sont en pleine mutation vers des schĂ©mas incertains, lâobligation de retenue et de sĂ©rĂ©nitĂ© devient vitale car elle risque, en cas de mauvais calcul et de dĂ©rapage, de discrĂ©diter son auteur et de porter prĂ©judice aux intĂ©rĂȘts nationaux.
La Tunisie qui fait face Ă de nombreux dĂ©fis internes et externes aurait tout intĂ©rĂȘt Ă maintenir sa position traditionnelle de neutralitĂ© et mĂȘme nourrir une certaine ambiguĂŻtĂ© stratĂ©gique afin dâĂ©viter de se laisser entraĂźner dans des diffĂ©rends ou conflits qui ont diffĂ©rentes perceptions, logiques et espaces de soutien international.
Si lâapproche morale du conflit israĂ©lo-arabe peut avoir jusquâĂ une certaine limite une justification, les rĂ©sultats dĂ©sastreux du jusquâau-boutisme et les propos rĂ©cemment divulguĂ©s des leaders Ă©gyptien et libyen, Gamal Abdel Nasser et Mouammar Kadhafi, champions du prĂ©tendu nationalisme arabe, ont montrĂ© lâambivalence sinon lâhypocrisie de lâapproche radicale.
Quant Ă une quelconque prise de position au sujet de vieux contentieux entre des pays asiatiques notamment le Pakistan, lâInde ou la Chine, les dessous gĂ©opolitiques et les mouvements des plaques tectoniques gĂ©ostratĂ©giques dictent de ne rater aucune occasion de faire preuve de discrĂ©tion et mieux de se taire.
La situation dans laquelle se trouve la Tunisie lui donne le meilleur des alibis pour Ă©viter de sâincruster dans des conflits aux multiples facettes, historiques, gĂ©opolitiques, culturelles et confessionnelles. Si chaque histoire a plusieurs versions, les conflits internationaux, Ă lâexception peut ĂȘtre de la cause palestinienne qui permet quand mĂȘme Ă lâautoritĂ© palestinienne et dâimportants pays arabes une ambivalence indĂ©niable frĂŽlant lâambiguĂŻtĂ© morale, les autres conflits surtout dans la zone Asie-Pacifique, nouveau théùtre de confrontation globale, mĂ©ritent une approche empreinte de sĂ©rĂ©nitĂ© et de pondĂ©ration.
* Ancien ambassadeur.
Lâarticle Tunisie | Diplomatie, excĂšs et insignifiance est apparu en premier sur Kapitalis.