Doctrine économique Trump : la Tunisie pourra-t-elle éviter le choc des titans du commerce mondial ?
Alors que le monde entre dans une nouvelle phase de turbulences économiques et géopolitiques, la Tunisie, bien que modeste dans le concert des nations, se retrouve en première ligne face aux effets du “Printemps Américain” – une guerre commerciale lancée par Donald Trump qui, depuis son investiture a mis le monde en haleine soufflant le chaud et le froid.
Qu’en est-il de la Tunisie dans un contexte mondial où c’est la boussole Trump qui décide des orientations et de la vitesse des vents économiques ? La Tunisie où nombre de décideurs dans l’exécutif et même des législateurs pensent pouvoir gommer le tout et établir un nouvel ordre économique populiste à souhait criant à tout va les slogans d’une justice sociale sans en avoir les moyens et encore moins les stratégies ?
Une fois de plus l’ARP, nous a donné toute la mesure de sa méconnaissance -pour ne pas dire ignorance- des risques encourus par l’économie nationale rejetant le projet d’un prêt de 80 millions d’euros pour soutenir les PME qui suffoquent sous prétexte que le gouvernement doit assumer ses responsabilités !
Un prêt dont le taux d’intérêt est de 3,1% par an avec 5 années de grâce et un remboursement qui s’étale sur 20 ans. Nous sommes loin des prêts accordés par l’Afreximbank remboursables sur 5 ans avec des garanties et des taux d’intérêts encore plus élevés que les fonds dont bénéficient l’État tunisien.
Encore heureux que le ridicule ne tue pas !
Pendant ce temps, l’Egypte affermit ses relations avec la France profitant de la générosité de l’État français qui projette d’y construire 100 établissements scolaires francophones, d’y édifier un hôpital pour le traitement du cancer avec des technologies françaises, un partenariat approfondi dans l’IA et la sécurité cybernétique et plus que tout l’élévation des investissement français sur place de 4 milliards d’euros à 7 milliards d’Euros !!!
Mais la Tunisie, elle, a les moyen de compter sur ses propres ressources ! Ressources ???
Nous n’arrivons pas à identifier lesquels car il faut reconnaître que le pays est en perte de vitesse s’agissant d’une ressource vitale : la matière grise ! Il faut dire qu’il y en a qui s’accommodent plus de la bêtise que de la compétence et l’intelligence !
Et pendant que Trump mène sa guerre contre la Chine, des économies comme la Tunisie, fortement liées aux marchés européens et mondiaux risquent de devenir des dommages collatéraux en l’absence de ripostes économiques intelligentes et réfléchies adossées sur une vision du monde beaucoup plus large que celle de nombre d’abrutis couvrant les vastes espaces des réseaux sociaux et certains médias du désert de leur ignorance.
Pour Trump, explique le financier Arbi Bouhali l’objectif est clair : construire un nouveau système économique mondial, basé sur la domination du dollar et réduire la dépendance commerciale des États-Unis vis-à-vis d’économies fortes telle celle de la Chine.
Il cherche à imposer un « Nouveau Bretton Woods », réorganisant les règles du commerce mondial tout en maintenant le dollar comme monnaie de réserve et le pétrodollar comme pivot. Dans cette guerre commerciale, pourrait être le perdant estime M. Benbouhali faisant écho aux affirmations de plusieurs économistes de renom, comme Joseph Stiglitz, Jeffrey Sachs, et Paul Krugman, qui soulignent que les réels perdants de cette guerre sont les consommateurs américains, déjà affectés par une stagflation persistante depuis deux ans.
Le piège pourrait aussi se refermer sur la Tunisie !
Le piège pourrait aussi se refermer sur des pays éloignés géographiquement des États-Unis, comme la Tunisie. L’un des principaux défis réside dans la baisse des exportations vers l’Europe, qui représente le principal marché pour les produits tunisiens.
En raison des tarifs douaniers de Trump, la demande européenne va se contracter, ce qui affectera directement les recettes des exportations tunisiennes. De plus, les transferts d’argent des expatriés tunisiens en Europe risquent de chuter en raison de la suppression d’emplois dans les pays européens, déjà durement touchés par les conséquences économiques de la guerre commerciale. La situation pourrait se détériorer davantage avec les risques géopolitiques provenant des tensions croissantes avec la Chine, la Turquie, et l’Algérie.
Alors que ces pays, et particulièrement la Chine, ont déjà engagé une guerre monétaire contre les États-Unis, leur capacité à vendre des produits moins chers sur le marché mondial pourrait aggraver le déficit commercial de la Tunisie.
De plus, le marché tunisien pourrait se retrouver inondé de produits chinois et turcs à bas prix, ce qui nuira à la compétitivité de la production locale. Un autre facteur qui pourrait peser lourdement sur l’économie tunisienne est la situation en Libye, un marché clé pour les exportations tunisiennes.
La dévaluation du dinar libyen de 13,3 % par rapport au dollar américain aura des effets immédiats, réduisant les dépenses libyennes en produits tunisiens et impactant négativement le tourisme tunisien estime Arbi Benbouhali qui interpelle le président Kaïs Saïed pour le sauvetage de l’économie tunisienne.
Comment ?
Plusieurs mesures d’urgence semblent indispensables, estime-t-il. D’abord, la chute des prix du pétrole, qui a actuellement atteint 60 dollars le baril alors que le budget tunisien avait prévu 74 dollars, représente une occasion à saisir. Cette différence pourrait être utilisée pour accorder des réductions fiscales et stimuler la demande intérieure.
Dans le même temps, Saïed pourrait solliciter une aide européenne, à l’instar de ce qu’a obtenu la Turquie en matière de soutien à la gestion des flux migratoires. Demander une révision des conditions de financement du FMI est aussi valable. La Tunisie, qui a une note de crédit supérieure à celle de l’Argentine (CCC), pourrait plaider pour une aide financière plus avantageuse, notamment à un taux d’intérêt inférieur à celui proposé par des institutions comme l’Afreximbank. Cela permettrait d’obtenir des ressources financières pour soutenir les investissements et éviter la crise de liquidité.
Les réformes internes cruciales et nécessaires !
Des réformes internes s’avèrent cruciales pour rétablir la stabilité économique à long terme. L’un des leviers les plus importants serait une amnistie fiscale touchant surtout l’économie informelle et permettant de régulariser l’argent liquide détenu par les citoyens.
“Cela pourrait générer plusieurs milliards de dinars et renforcer le système bancaire tunisien, vital pour la relance économique. Par ailleurs, la Banque centrale de Tunisie (BCT) pourrait jouer un rôle central en émettant des obligations islamiques (Sukuks) pour stimuler les réserves en devises. Ces fonds pourraient être utilisés pour investir dans des entreprises publiques et soutenir l’économie tunisienne dans des secteurs stratégiques comme l’agriculture. Cette stratégie permettrait de diminuer la dépendance de la Tunisie aux importations alimentaires et de renforcer son indépendance économique”.
La Tunisie est aujourd’hui confrontée à nombre de défis mais elle dispose aussi de leviers économiques et politiques importants pour se défendre face à ce contexte international incertain. En prenant des mesures audacieuses et ciblées et en évitant des orientations socioéconomiques populistes et exagérément courtermistes, elle pourrait non seulement surmonter la crise mais aussi se positionner comme un acteur majeur de la Méditerranée, capable de résister à la tempête mondiale et d’en sortir renforcée.
Face au tsunami Trump, la Tunisie dispose-t-elle d’une clé ouvrant la porte des solutions pour naviguer dans ce chaos planétaire et sécuriser l’avenir économique du pays ?
Amel Belhadj Ali
L’article Doctrine économique Trump : la Tunisie pourra-t-elle éviter le choc des titans du commerce mondial ? est apparu en premier sur WMC.