Génocides et tragique ironie de l’histoire
En 2002, en pleine seconde intifada, le Premier ministre israélien d’alors, Ariel Sharon, avait engagé son armée dans une opération destructrice du camp de Jénine, bastion du combat contre l’occupation israélienne. Les tanks qui étaient à l’œuvre dans les rues étroites du camp, détruisaient tout sur leur passage. En quelques jours, les 21 000 habitants se sont trouvés dans la même situation que leurs parents dans la guerre de 1948 : dans la rue, ne sachant ni que faire ni où aller.
Le camp fut reconstruit avec l’aide financière des Emirats arabes unis. Détail tragique : les ingénieurs qui planifiaient la reconstruction du camp avaient élargi les rues du camp non pas pour le confort des Palestiniens, mais de manière à permettre aux chars israéliens de passer sans tout détruire sur leur passage. Car, il était clair pour tous qu’Israël ne laissera pas le camp de Jénine tranquille et reviendra à la charge un jour ou l’autre.
Et de fait, 23 ans plus tard, et parallèlement à la guerre génocidaire contre les Gazaouis, l’armée israélienne s’attaqua de nouveau au camp de Jénine avec l’intention de le transformer en un tas de ruines. Si pendant plus d’un an et sept mois et jusqu’à ce jour Israël se déchaine impunément contre Gaza, qu’est-ce qui l’empêcherait de faire de même à Jénine?
Cette fois, Netanyahu est allé beaucoup plus loin que Sharon : il a tout détruit et les Palestiniens ne peuvent même pas s’approcher des ruines de leurs maisons, l’armée israélienne tirant sur tout ce qui bouge. Selon Gideon Levy, journaliste au quotidien Haaretz : « Le camp est mort et ses habitants en ont été bannis à jamais. L’armée a annoncé qu’elle n’autoriserait pas la reconstruction des maisons et des routes. »
S’étant assuré du soutien aveugle de la puissance américaine et de l’indifférence du reste du monde, Israël s’est engagé dans la destruction méthodique de Gaza et Jénine. Et ce n’est guère un hasard : l’une et l’autre étant les deux bastions de la lutte palestinienne contre l’occupation.
Tous les habitants de Gaza et de Jénine sont des réfugiés et des enfants de réfugiés qu’Israël avait expulsés de leurs terres en 1948. Les plus vieux ont vécu, enfants, le calvaire de l’expulsion. Ils ont vécu, adultes, les différentes guerres destructrices menées par Israël depuis 1967, et vivent aujourd’hui l’horrible cauchemar du génocide perpétré à Gaza et Jénine.
En d’autres termes, à partir du 14 mai 1948, date de sa création, Israël a fait vivre aux Palestiniens le calvaire des expulsions, des occupations et des guerres. Et depuis le 8 octobre 2023, cet Etat-paria leur fait vivre le cauchemar du génocide.
A en juger par ce qui se passe à Gaza et Jénine, il est clair que la classe dirigeante et la hiérarchie militaire israéliennes ont opté pour la solution finale de la question palestinienne à laquelle elles sont déterminées à mettre fin par le massacre ou l’expulsion hors des frontières de la Palestine historique.
Ironie tragique de l’histoire : la décision de « la solution finale » de la question palestinienne a été prise par les descendants des survivants de « la solution finale » de la question juive par l’Allemagne nazie et ses différents alliés dans le continent européen entre 1933 et 1945…
L’humanité était alors assez naïve pour croire qu’après la folie meurtrière et destructrice qui se déchaina dans le monde entre 1939 et 1945, elle sera protégée par les leçons tirées de l’histoire, les institutions établies et les règles de droit édictées.
En fait, au vu de ce qui se passe depuis 1991, date de l’effondrement de l’Union soviétique, et depuis le déchainement américain aux quatre coins du monde et le débridement israélien dans les quatre coins du Moyen-Orient, nous ne pouvons qu’être convaincus que ce qui protège l’humanité, ce ne sont ni les institutions ni les règles du droit international, mais l’équilibre des forces dans le monde.
Un équilibre que Moscou et Pékin s’efforcent d’établir et que Washington et ses supplétifs en Europe et ailleurs s’acharnent à entraver. La paix dans le monde et l’arrêt des carnages et des génocides dépendent de l’issue de ce bras de fer planétaire.
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