Reinaldo Bolívar : le Venezuela et la Tunisie, des siècles d’histoire commune
À l’occasion du 60ème anniversaire des relations diplomatiques entre la République Bolivarienne du Venezuela et la République tunisienne, célébré chaque 26 mars, leconomistemaghrebin.com a reçu l’article ci-dessous. Il met en lumière cet événement historique et « célèbre les liens d’amitié, de coopération et de solidarité qui unissent nos deux pays depuis six décennies ».
Les relations entre le Venezuela et la Tunisie ont une forte connexion historique. Tout d’abord, ce dernier pays est héritier de la culture berbère, qui s’est étendue à toute l’Afrique du Nord, à une partie du Sahel et à l’Atlantique, y compris les îles Canaries, d’où des milliers de familles mélangées avec les Berbères-Guanches ont émigré au Venezuela. C’est de ces familles que descend la lignée maternelle de Simón Bolívar.
La Tunisie fut la capitale de la puissante République de Carthage, qui, à son apogée, s’étendait de l’Égypte à la péninsule ibérique en passant par la Libye et l’Algérie. Elle fut le berceau du légendaire stratège militaire Hannibal Barca, général qui, pour contenir l’invasion romaine sur Carthage, réalisa l’exploit épique de traverser les Alpes avec 30 000 soldats africains et assiégea la péninsule italienne pendant quatorze ans (218-204 av. J.-C.). Cet exploit inspira Simón Bolívar en 1819 pour réaliser l’épopée du passage des Andes en Amérique du Sud, qui porta un coup décisif aux impérialistes espagnols dans la vice-royauté de Nouvelle-Grenade.
Après Hannibal Barca, la Tunisie et l’Afrique du Nord devinrent la route des Arabes-Maures vers la péninsule ibérique, où ils s’établirent pendant environ huit cents ans, laissant une empreinte culturelle indélébile qui se transmit aux pays d’Amérique, y compris le Venezuela. C’est à cette composition ethnique berbère, touareg, punique, arabe et maure que Simón Bolívar faisait référence dans le portrait qu’il dressa lors de son discours d’Angostura sur l’identité américaine et même sur l’Espagne elle-même.
Les relations bilatérales
Dans le domaine diplomatique, le premier précédent officiel des relations entre le Venezuela et la Tunisie fut la nomination, en 1888, d’un consul général vénézuélien dans la capitale tunisienne. Bien que sous occupation française, la Tunisie restait une nation luttant pour récupérer sa souveraineté et son autodétermination politique.
Lorsque la Tunisie obtint son indépendance en 1956, le Venezuela fut l’un des premiers pays d’Amérique à la reconnaître en raison de ces liens historiques. Pour renforcer cette position, en avril 1959, sous la présidence du fondateur de la République, Habib Bourguiba, les deux pays établirent des relations consulaires, avec l’ouverture par le Venezuela d’un consulat de première classe à Tunis.
Cet acte fut inédit dans les relations bilatérales. Dès 1958, le gouvernement tunisien avait proposé l’établissement de relations diplomatiques, mais le Venezuela était alors en pleine transition politique agitée.
Néanmoins, le début des relations consulaires entre le Venezuela et la Tunisie eut un impact retentissant sur les mouvements émancipateurs africains, qui se réunissaient fréquemment à Tunis sous la direction de Bourguiba et d’autres figures emblématiques du panafricanisme comme le Ghanéen Kwamé Nkrumah en 1960.
Le consulat vénézuélien maintint une activité remarquable de diffusion du pays de Bolívar en Tunisie et au Maghreb, jusqu’à ce que le 26 juin 1965 soit signé l’établissement des relations diplomatiques. Le Venezuela éleva alors son consulat au rang d’ambassade, qui servit également plusieurs pays d’Afrique du Nord-Ouest.
Dans les années 60 du XX siècle, l’amitié entre les deux pays se renforça, se manifestant par des visites officielles de haut niveau. Parmi les plus marquantes, celle de Habib Bourguiba, le fils, Secrétaire d’État aux Affaires étrangères, qui reçut l’Ordre du Libérateur. Une autre visite importante eut lieu en 1975, lorsque Habib Chatti, ministre tunisien des Affaires étrangères, fut reçu au Venezuela.
Fermeture et réouverture de l’ambassade vénézuélienne : les nouvelles relations
Le renversement du président Bourguiba a entraîné un ralentissement des activités diplomatiques entre les deux pays, au point qu’en 1991, le Venezuela a fermé son ambassade en Tunisie et lui a attribué un statut de concurrence, d’abord géré depuis l’Algérie, puis depuis la Libye.
En 2005, le président du Venezuela, Hugo Chávez, dans le cadre de « l’Agenda Afrique », a relancé les relations avec les peuples africains. C’est ainsi qu’en 2009, la Tunisie a participé avec une délégation dirigée par son ministre des Affaires étrangères au IIe Sommet Amérique du Sud – Afrique, qui s’est tenu à Margarita au Venezuela. Ce sommet reste l’événement multilatéral le plus important jamais organisé entre L’Amérique centrale et l’Afrique.
En 2012, après la triomphante révolution tunisienne, le président Chávez autorise la réouverture de l’ambassade vénézuélienne en terres carthaginoises. De son côté, la Tunisie, afin de faciliter les communications, a transféré la compétence pour le Venezuela de son ambassade à Washington à celle de Brasilia, en raison de la plus grande proximité géographique.
Dans cette nouvelle dynamique, le Venezuela a encouragé les échanges de haut niveau avec la Tunisie, en commençant par la visite officielle du vice-ministre des Affaires étrangères pour l’Afrique en 2013, Reinaldo Bolívar, qui a présidé la VIIe rencontre des ambassadeurs et chefs de mission du Venezuela en Afrique (dix-huit), réaffirmant ainsi l’amitié avec le pays d’Hannibal Barca.
Depuis lors, les négociations des instruments de complémentarité se sont accélérées, aboutissant à la signature de l’Accord général de coopération, duquel ont découlé ceux en matière électorale, de visa diplomatique et culturelle, qui se développent avec succès. Par ailleurs, dans le cadre du système des Nations Unies, les gouvernements des deux pays ont partagé leurs visions en défense des principes universels du droit international.
Dans le domaine de la solidarité entre les peuples, les échanges sont de plus en plus fréquents, que ce soit en présentiel ou virtuellement. Des délégations tunisiennes ont participé à des congrès, des élections, des événements culturels. Et, de même, les représentations vénézuéliennes se rendant en Tunisie sont de plus en plus nombreuses.
Le soutien commun que les peuples du Venezuela et de la Tunisie apportent à la nation palestinienne, ainsi que le respect de la souveraineté et de l’autodétermination des peuples, sont deux des éléments solides qui guident les relations diplomatiques entre ces deux nations glorieuses.
Cette amitié est en voie de se transformer en complémentarité dans divers domaines de coopération. Ainsi, les deux gouvernements, dirigés par Nicolás Maduro et Kaïs Saïed, plaident pour des échanges mutuels dans des secteurs d’importance majeure tels que le commerce, l’agriculture, l’éducation, le tourisme, les droits des femmes, entre autres.
Le Venezuela et la Tunisie sont deux peuples baignés d’histoire, unis par des liens communs qui les appellent à se retrouver, à se comprendre et à un va-et-vient porteur de bonnes nouvelles.
D’après communiqué
L’article Reinaldo Bolívar : le Venezuela et la Tunisie, des siècles d’histoire commune est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.