Lâauteur de cet article, un Ă©conomiste universitaire ayant enseignĂ© diffĂ©rentes disciplines de lâĂ©conomie pendant vingt ans et lâayant pratiquĂ© en tant que consultant international pendant vingt autres annĂ©es, se livre Ă un exercice inĂ©dit : associer Ă chacun des prĂ©sidents qui ont gouvernĂ© la Tunisie depuis son indĂ©pendance, le nom dâun grand Ă©conomiste dont lui ou son gouvernement ont appliquĂ© les idĂ©es souvent sans le savoir. Il propose Ă la fin de son analyse au prĂ©sident Kais SaĂŻed une Ă©cole de pensĂ©e Ă©conomique et les axes dâun modĂšle de dĂ©veloppement qui tiennent compte de sa vision politique et de ses valeurs et lui permettront de transformer ses rĂȘves pour la Tunisie en rĂ©alitĂ©. Un article trĂšs pĂ©dagogique et didactique Ă lire et Ă faire lire aux plus hauts responsables du pays.
Dr. Sadok Zerelli
Il est un fait connu de tout le monde quâil est plus facile de critiquer que de proposer et plus facile de dĂ©truire que de construire.
Conscient de cela, jâai toujours fais personnellement des efforts dans tous les articles que jâai publiĂ©s dans Kapitalis depuis quatre ou cinq ans (une bonne trentaine) de ne pas tomber dans ce travers et de proposer toujours une voie de sortie ou une solution, que je pense est la plus adaptĂ©e aux problĂ©matiques Ă©conomiques que jâanalyse dans ces articles, quâil sâagisse de la politique monĂ©taire suivie par la BCT, ou de la dĂ©cision de Kais SaĂŻed de rompre les relations avec le FMI, ou mĂȘme de cette derniĂšre loi catastrophique sur les chĂšques qui sâavĂšre non pas avant-gardiste en engendrant un moindre usage des billets de banques dans lâĂ©conomie, comme le proclamaient haut et fort sur tous les mĂ©dias ses auteurs et dĂ©fenseurs, mais bien arriĂšre-gardiste qui sâest traduite, au contraire, par lâaccroissement des paiements en espĂšces dont le montant a explosĂ© depuis la promulgation de cette loi, comme malheureusement je lâavais prĂ©dit dans quatre ou cinq articles que jâavais consacrĂ©s Ă ce sujet (Notamment le dernier en date ââSix questions aux auteurs de la nouvelle loi sur les chĂšquesââ).
Il est une rĂ©alitĂ© aussi relevĂ©e par lâopinion publique, tous les responsables politiques et tous les observateurs Ă©conomiques, quâalors que les plus grands dĂ©fis qui se posent pour la Tunisie depuis quelques annĂ©es dĂ©jĂ sont dâordre Ă©conomique, la dĂ©mission des Ă©conomistes de ce pays devant leurs responsabilitĂ©s est flagrante et leur silence est assourdissant.
En effet, Ă part moi-mĂȘme et quelques autres Ă©conomistes qui se comptent sur les doigts dâune seule main, dont le Professeur Hachemi Alaya, lâun des meilleurs Ă©conomistes que ce pays a enfantĂ©s et lâun des rares qui mĂ©ritent de porter le titre de «Professeur des UniversitĂ©s» en sciences Ă©conomiques, contrairement Ă plus de deux mille autres (dont je nâai pas lâhonneur de faire partie), dont on nâentend ni ne lit jamais les analyses, Ă part quatre ou cinq bien introduits dans les cercles mĂ©diatiques et qui sont dâailleurs toujours les mĂȘmes Ă occuper le devant de la scĂšne audiovisuelle et dont la superficialitĂ© et la banalitĂ© des analyses font Ă mon avis honte Ă la profession.
Un modÚle développement pour quelle Tunisie ?
Jâai tenu Ă prĂ©ciser dans le titre de cet article que mon objectif final Ă travers cet essai est de proposer un modĂšle de dĂ©veloppement pour la Tunisie de 2025 gouvernĂ©e par Kais SaĂŻed, qui nâest pas celle de 1956-1987 gouvernĂ©e par Bourguiba, ni celle de 1987-2010 gouvernĂ©e par Ben Ali, ni celle de 2011-2019 gouvernĂ©e par le tandem Ghannouchi/CaĂŻd Essebsi, suite Ă leur fameuse rencontre Ă Paris et leur entente pour se partager le pouvoir, lâun au Palais du Bardo et lâautre au Palais de Carthage.
En effet, il est clair que tant sur le plan du contexte politique international, que dĂ©mographique et sociologique propres Ă la Tunisie ainsi que politique, il y a eu de grands changements dâune pĂ©riode Ă lâautre, dont on doit compter si on veut ĂȘtre rĂ©aliste et appliquer avec rigueur la maxime de lâhomme le plus riche du monde et le gĂ©nie du temps modernes, Elon Musk, Ă savoir : un problĂšme bien posĂ© est un problĂšme Ă moitiĂ© rĂ©solu.
Ainsi, sur le plan du contexte international et si je mâen tiens Ă comparer les deux pĂ©riodes les plus extrĂȘmes dans le temps, celle de Bourguiba et celle de Kais SaĂŻed, il est Ă©vident quâil y a une grande diffĂ©rence entre le contexte de la guerre froide et de la vive compĂ©tition entre les blocs Est et Ouest des annĂ©es 1960/1970 et celle de la guerre dâUkraine avec domination des Etats-Unis comme seule superpuissance mondiale quâon vit actuellement. MĂȘme la personnalitĂ© et le charisme des principaux dirigeants du monde ne sont plus les mĂȘmes : on ne peut pas comparer un Donald Trump Ă un John Kennedy ou un Emanuel Macron Ă un Charles De GaulleâŠ
Sur le plan dĂ©mographique et sociologique, on ne peut pas comparer la Tunisie de Bourguiba avec des familles souvent nombreuses et une mĂšre souvent au foyer qui sâoccupent bien de ses enfants Ă la Tunisie Kais SaĂŻed avec des familles de deux ou trois enfants, des mĂšres qui travaillent et des enfants souvent livrĂ©s Ă eux-mĂȘmes. Les jeunes ne sont plus les mĂȘmes et nâont plus les mĂȘmes valeurs et visions de la vie : entre jouer Ă la toupie ou aux billes et lire Taha Hussein, comme ma gĂ©nĂ©ration le faisait du temps de Bourguiba, et lire Harry Potter et naviguer sur Tik-Tok ou Facebook comme le font les enfants dâaujourdâhui, il y de sacrĂ©es diffĂ©rences qui impactent la personnalitĂ© et les comportements des jeunes et donc des futurs consommateurs et producteurs quâils seront.
Sur le plan du rĂ©gime politique aussi, et sans trop mâavancer sur ce terrain minĂ© et courir le risque de dĂ©tourner lâobjet de cet article qui est dâordre Ă©conomique et non politique, je dirais que le type de rĂ©gime prĂ©sidentiel, la rĂ©partition des pouvoirs au sein dâun mĂȘme type, et les dispositions des constitutions de 1958, 2014 et 2021 sont forts diffĂ©rentes, ce qui doit ĂȘtre pris en compte dans le choix du modĂšle de dĂ©veloppement Ă©conomique Ă proposer Ă Kais SaĂŻed, car le lien entre lâĂ©conomique et le politique nâest plus Ă dĂ©montrer.
Les sciences Ă©conomiques, au pluriel
Ce nâest pas un hasard quâon ne parle pas de la science Ă©conomique au singulier mais des sciences Ă©conomiques au pluriel, parce quâil existe effectivement plusieurs Ă©coles de pensĂ©e qui prĂ©sentent chacune une vision diffĂ©rente du type de sociĂ©tĂ© visĂ©, des objectifs Ă atteindre en matiĂšre de rĂ©partition de la richesse nationale entre plusieurs classes de la sociĂ©tĂ© et des politiques Ă©conomiques les plus efficaces pour y arriver.
Lâ objet de cet article, qui se veut pĂ©dagogique et didactique, est justement de prĂ©senter et dâexpliquer dans le langage le plus simple accessible au grand public, les principales Ă©coles de pensĂ©es Ă©conomiques, dâidentifier laquelle se trouve Ă la base des diffĂ©rentes politiques Ă©conomiques menĂ©es en Tunisie depuis son indĂ©pendance et de «marier» chacun des PrĂ©sidents qui ont gouvernĂ© notre pays au grand Ă©conomiste, considĂ©rĂ© comme le chef de file de lâĂ©cole de pensĂ©e, dont ce PrĂ©sident ou son gouvernement a Ă©pousĂ© les idĂ©es et les a appliquĂ©es consciemment ou pas. Lâobjectif final est dâidentifier pour le PrĂ©sident SaĂŻed, quâon peut considĂ©rer comme encore «cĂ©libataire» dans le sens oĂč il est manifestement encore Ă la recherche de lâĂ©cole de pensĂ©e Ă©conomique avec laquelle il pourrait «se fiancer» et qui lui permettrait de rĂ©aliser le modĂšle de sociĂ©tĂ© dont il rĂȘve pour la Tunisie de lâaprĂšs le 25 juillet 2021.
Le couple Bourguiba/Keynes
John Maynard Keynes (1883-1946) est un Ă©conomiste anglais qui a probablement le plus marquĂ© lâhistoire de la pensĂ©e Ă©conomique, plus mĂȘme que le fondateur de lâĂ©conomie en tant que discipline, Adam Smith (1723-1790), qui a Ă©tĂ© anoblit par la reine dâAngleterre pour ses travaux de recherche synthĂ©tisĂ©s dans son fameux livre qui sâenseigne encore dans toutes les facultĂ©s de sciences Ă©conomiques dans le monde (ââLa ThĂ©orie gĂ©nĂ©rale de lâemploi, de lâintĂ©rĂȘt et de la monnaieââ,1936). Dans ce livre, il remet en question les idĂ©es classiques et nĂ©oclassiques en vigueur Ă son Ă©poque, selon lesquelles lâĂ©conomie sâautorĂ©gule et le marchĂ© assure naturellement et Ă long terme le plein emploi. Keynes montre dans cet ouvrage que lâĂ©conomie peut rester bloquĂ©e Ă court terme en situation de sous-emploi (chĂŽmage et rĂ©cession persistants) et que lâintervention de lâĂtat est nĂ©cessaire pour relancer lâactivitĂ© Ă©conomique. Un de ses arguments est sous la forme dâune boutade restĂ©e cĂ©lĂšbre qui a consistĂ© Ă dire que, mĂȘme si les classiques et nĂ©oclassiques avaient raison de considĂ©rer que le libre fonctionnement du marchĂ© permet dâatteindre Ă long terme le plein emploi, «à long terme on est tous morts», et personne ne sera encore lĂ pour le vĂ©rifier !
La pensée keynésienne repose sur quatre idées fondamentales trÚs novatrices à cette époque qui était dominée par la pensée néoclassique :
- la demande globale (consommation publique et privée + investissement + exportation) est le moteur de la croissance économique;
- une politique budgĂ©taire expansionniste, qui consiste Ă augmenter les dĂ©penses publiques mĂȘme en recourant sâil le faut Ă un budget volontairement dĂ©ficitaire, permet de relancer la croissance et rĂ©sorber le chĂŽmage;
- il faut baisser les impĂŽts directs et indirects pour stimuler la consommation et lâinvestissement, donc la croissance Ă©conomique;
- il faut appliquer une politique monĂ©taire accommodante basĂ©e sur la rĂ©duction du taux directeur de la banque centrale et de faibles taux dâintĂ©rĂȘt bancaire pour inciter les entreprises et les mĂ©nages Ă emprunter et Ă investir.
La pensĂ©e keynĂ©sienne a Ă©tĂ© appliquĂ©e avec succĂšs par tous les pays occidentaux Ă la sortie de la deuxiĂšme guerre mondiale (notamment par le âNew Dealâ du PrĂ©sident Roosevelt aux Etats-Unis), et a gĂ©nĂ©rĂ© ce quâon appelle encore aujourdâhui avec nostalgie «les trente glorieuses» en rĂ©fĂ©rence aux trente annĂ©es durant lesquelles les principaux pays occidentaux ont connu une forte croissance Ă©conomique sans chĂŽmage et une nette Ă©lĂ©vation des niveaux de vie (1950-1980).
Bourguiba, un grand visionnaire comme lâĂ©tait Keynes, a su Ă©pouser les idĂ©es de ce dernier et a lancĂ© dĂšs le dĂ©but de lâindĂ©pendance un vaste programme dâemploi massif de dizaines de milliers de chĂŽmeurs sur des chantiers quâil savait pratiquement improductifs mais qui permettaient de leur distribuer des salaires pour augmenter leur consommation et donc la demande globale.
Dans le domaine de lâinvestissement, autre composante de la demande finale, sa politique Ă©conomique dâinspiration keynĂ©sienne sâest traduite par la crĂ©ation de grands pĂŽles de dĂ©veloppent rĂ©gionaux (raffinerie Ă Bizerte, usine de cellulose Ă Kasserine, de sucre Ă BĂ©ja, chimique Ă GabĂšs, El-Fouledh Ă Menzel Bourguiba, etc.), souvent financĂ©s par le recours Ă lâendettement extĂ©rieur, et une politique monĂ©taire accommandante de la part de la BCT qui se traduisait par de faibles taux dâintĂ©rĂȘt, comme le prĂ©conisait Keynes.
Soixante ans aprĂšs, on peut dire avec le recul que le couple Bourguiba/Keynes a plutĂŽt bien rĂ©ussi Ă relever les dĂ©fis qui se posaient Ă lâĂ©poque et que leurs progĂ©nitures, en lâoccurrence toute ma gĂ©nĂ©ration, en ont largement profitĂ© sous forme dâenseignement gratuit, de bourses dâĂ©tudes, de soins mĂ©dicaux gratuits, etc.
Le couple Nouira/ Marshall
AprĂšs lâĂ©chec cuisant en 1969 de la politique collectiviste des coopĂ©ratives agricoles prĂŽnĂ©e par Ahmed Ben Salah, Bourguiba en vĂ©ritable «animal» politique quâil Ă©tait, a effectuĂ© un virage de 180° et a confiĂ© les rĂȘnes de la politique Ă©conomique Ă Hedi Nouira, Gouverneur de la Banque Centrale, qui ne cachait pas ses idĂ©es libĂ©rales. Celles-ci sont basĂ©es sur les enseignements de lâĂ©cole nĂ©oclassique, menĂ©e par Alfred Marshall (1842-1924) qui, par son ouvrage ââPrinciples of Economicsââ (1890), a jouĂ© un rĂŽle central dans la formalisation de cette Ă©cole de pensĂ©e, notamment en dĂ©veloppant les concepts dâĂ©lasticitĂ©et de coĂ»t marginal et en structurant lâĂ©conomie comme une discipline mathĂ©matisĂ©e et analytique.
LâidĂ©e Ă la base de cette thĂ©orie est que les marchĂ©s sont efficaces et que lâoffre et la demande dĂ©terminent naturellement le niveau des prix et le volume de la production. Son hypothĂšse de base est quâil existe un «Homo Ćconomicus», un ĂȘtre imaginaire parfaitement rationnel et bien informĂ©, qui cherche toujours Ă maximiser sa fonction dâutilitĂ© tandis que les entreprises cherchent toujours Ă maximiser leurs bĂ©nĂ©fices.
Contrairement Ă lâĂ©cole keynĂ©sienne, lâĂ©cole nĂ©oclassique prĂ©conise que lâEtat ne doit pas intervenir dans la vie Ă©conomique dâun pays et quâil doit juste assumer ses fonctions rĂ©galiennes de puissance publique (justice, police, diplomatie, armĂ©e, etc.).
Un des enseignements de cette thĂ©orie est que tous les facteurs de production (travail et capital) doivent ĂȘtre rĂ©munĂ©rĂ©s selon leur productivitĂ© marginale (supplĂ©ment de production) en particulier les travailleurs, justifiant ainsi lâinĂ©galitĂ© des salaires entre les cadres et les ouvriers et la distribution inĂ©gale du revenu national entre les travailleurs et les capitalistes et entre les classes sociales.
Avec lâĂ©lection de Margaret Thatcher au Royaume-Uni et de Ronald Reagan aux Ătats-Unis au dĂ©but des annĂ©es 1980, deux dirigeants mondiaux conservateurs, cette Ă©cole de pensĂ©e nĂ©oclassique, qui date du XIXe et du dĂ©but du XXe siĂšcle, est redevenue Ă la mode.
Ce sont les idĂ©es de cette Ă©cole de pensĂ©e, quâon appelle aussi lâĂ©cole marginaliste, qui ont inspirĂ© Hedi Nouira pour promulguer la fameuse loi de 1972 qui ouvre largement les portes de la Tunisie aux investissements directs Ă©trangers (IDE), en tablant sur les bas salaires des ouvriers qui doivent ĂȘtre payĂ©s, conformĂ©ment Ă la thĂ©orie nĂ©oclassique, selon leur productivitĂ© marginale qui est faible en raison de leurs faibles qualifications.
Le couple Ben Ali / Lucas
LâĂ©conomiste American Robert Lucas (1937-2023) a expliquĂ© dans son cĂ©lĂšbre livre ââLes anticipations rationnellesââ (1970), que les individus anticipent les dĂ©cisions Ă©conomiques du gouvernement, ce qui rend inefficaces les politiques de relance keynĂ©siennes.
LâidĂ©ologie nĂ©olibĂ©rale, dont il est considĂ©rĂ© comme le chef de file, est une idĂ©ologie Ă la fois politique et Ă©conomique, qui applique certaines idĂ©es nĂ©o-classiques mais va plus loin en prĂŽnant des rĂ©formes structurelles pour libĂ©raliser lâĂ©conomie, supprimer les rĂ©gulations qui entravent le marchĂ©, rĂ©duire les barriĂšres douaniĂšres pour ouvrir davantage lâĂ©conomie au marchĂ© international, privatiser les entreprises publiques etc.
Cette idĂ©ologie, qui est Ă lâorigine de lâapparition dans les annĂ©es 1990 du phĂ©nomĂšne de la mondialisation, se retrouve encore aujourdâhui dans le type de rĂ©formes structurelles que le FMI et la Banque Mondiale exigent des pays qui leur demandent des prĂȘts, comme conditions prĂ©alables pour leur en accorder (câest ce qui a justifiĂ© la derniĂšre dĂ©cision de Kais SaĂŻed de rompre les relations avec le FMI).
CâĂ©tait le cas pour Plan dâAjustement Structurel (PAS), appliquĂ© par la Tunisie dans les annĂ©es 1990 qui avait pour but de stabiliser lâĂ©conomie et de rĂ©former les finances publiques aprĂšs la crise Ă©conomique et la forte dette accumulĂ©e durant les annĂ©es 1980.
Les objectifs et mesures du PAS Ă©taient :
- stabilisation macroĂ©conomique : rĂ©duction des dĂ©ficits budgĂ©taires et maĂźtrise de lâinflation;
- libĂ©ralisation de lâĂ©conomie : suppression de certaines subventions, privatisations, ouverture aux investissements Ă©trangers;
- rĂ©duction du rĂŽle de lâĂtat : privatisation dâentreprises publiques et baisse des dĂ©penses publiques;
- réforme monétaire et fiscale : dévaluation du dinar, encouragement des exportations et modernisation du systÚme fiscal;
- déréglementation du marché du travail : réforme des codes du travail pour favoriser la flexibilité.
Force est de reconnaitre quâavec le PAS, le couple Ben Ali/Lucas a obtenu un succĂšs relatif dans le sens oĂč :
â une certaine stabilisation macroĂ©conomique a Ă©tĂ© obtenue (rĂ©duction de lâinflation et des dĂ©ficits budgĂ©taires);
â la Tunisie a connu une croissance Ă©conomique soutenue dans les annĂ©es 1990 Ă 2010 grĂące Ă lâinvestissement aussi bien public que privĂ©, lâindustrialisation et au dĂ©veloppement des exportations;
â le pays est devenu plus attractif pour les investissements Ă©trangers.
Mais comme dans tout couple, le bonheur apparent cache quelque fois de profondes fissures qui finissent avec les années par apparaitre :
â la dĂ©valuation du dinar a entraĂźnĂ© une perte du pouvoir dâachat pour la population;
â les privatisations ont profitĂ© Ă une minoritĂ© liĂ©e au pouvoir, favorisant la corruption;
â la rĂ©duction des dĂ©penses publiques a affectĂ© lâĂ©ducation, la santĂ© et les services sociaux;
â le chĂŽmage est restĂ© Ă©levĂ©, notamment chez les jeunes et les diplĂŽmĂ©s;
â lâaugmentation des inĂ©galitĂ©s sociales et rĂ©gionales a nourri un mĂ©contentement qui a culminĂ© avec la RĂ©volution de 2011.
En conclusion, je dirais que le couple Ben Ali/Lucas a rĂ©ussi Ă obtenir une bonne stabilisation macroĂ©conomique, mais a creusĂ© davantage les inĂ©galitĂ©s sociales et rĂ©gionales et a ainsi semĂ© les graines de la rĂ©volte de 2011, dont les rĂ©percussions bouleversent encore aujourdâhui la vie Ă©conomique et politique du pays
Le couple Ghannouchi/Friedman
Il sâagit de la pĂ©riode entre 2011 et jusquâĂ la premiĂšre Ă©lection de Kais SaĂŻed comme PrĂ©sident en 2019, durant laquelle on peut considĂ©rer pour ne pas tomber dans un dĂ©bat de politique politicienne, que Rached Ghannouchi a effectivement gouvernĂ© le pays, soit seul Ă travers les gouvernements dirigĂ©s par ses disciples Hamadi Jebali et Ali Larayedh soit conjointement avec BĂ©ji Caid Essabsi au Palais de Carthage et lui-mĂȘme au perchoir de lâARP.
Les gouvernements qui se sont succĂ©dĂ© durant cette pĂ©riode ont tous appliquĂ©, probablement sans mĂȘme le savoir, une politique Ă©conomique monĂ©tariste, surtout aprĂšs la promulgation de la loi de 2016 qui a accordĂ© Ă la BCT lâindĂ©pendance de dĂ©cision.
Cette Ă©cole de pensĂ©e, dont le chef de fille est Milton Friedman (1912-2006), cherche Ă dĂ©terminer comment la monnaie influence lâĂ©conomie et comment les politiques strictement monĂ©taires peuvent ĂȘtre utilisĂ©es pour relancer la croissance, rĂ©sorber le chĂŽmage et stabiliser lâĂ©conomie.
Elle repose sur la fameuse Ă©quation quantitative de la monnaie, connue sous le nom de «Equation de Cambridge» (que jâavais exposĂ©e et expliquĂ©e dans plusieurs de mes articles trĂšs critiques Ă lâĂ©gard de la politique monĂ©taire suivie par la BCT, notamment le dernier ââPlaidoyer en faveur de lâamendement de la loi de la BCTââ), qui affirme quâune augmentation de la masse monĂ©taire entraĂźne mĂ©caniquement une hausse proportionnelle des prix si la vitesse de circulation et la production restent constantes Ă court terme. Elle attribut la premiĂšre responsabilitĂ© pour lutter contre lâinflation aux banques centrales qui disposent de trois instruments pour le faire :
â les taux directeurs qui, Ă travers le taux du marchĂ© monĂ©taire (TMM) influencent le coĂ»t du crĂ©dit;
â les opĂ©rations dâ«open market» qui se traduisent par lâachat/vente dâobligations et autres actifs financiers pour rĂ©guler le volume de monnaie en circulation;
â le contrĂŽle des rĂ©serves obligatoires des banques commerciales qui dĂ©terminent leur capacitĂ© Ă accorder des crĂ©dits Ă leurs clients et Ă crĂ©er ainsi de la monnaie scripturale et gonfler la masse monĂ©taire en circulation.
Il faut dire que les enseignements de cette thĂ©orie ont Ă©tĂ© appliquĂ©s souvent avec succĂšs dans les pays dĂ©veloppĂ©s pour maĂźtriser lâinflation Ă travers la manipulation du taux directeurs fixĂ©s par les banques centrales (BCE, FEDâŠ).
Par exemple, câest grĂące Ă une telle politique monĂ©taire que des pays comme la France ou les Etats-Unis, qui ont connu des taux dâinflation Ă deux chiffres (supĂ©rieurs Ă 10%) juste aprĂšs le dĂ©clenchement de la guerre en Ukraine et la flambĂ©e des cours du pĂ©trole et des matiĂšres premiĂšres qui sâen est suivie, ont rĂ©ussi Ă les ramener pratiquement Ă 2% aujourdâhui en moins de deux ans.
Mais, en Tunisie, la mĂȘme politique monĂ©taire du taux directeur appliquĂ©e depuis que la BCT est devenue indĂ©pendante en 2016 sâest avĂ©rĂ©e un Ă©chec cuisant, puisque lâinflation a atteint Ă un moment donnĂ© 11,3% et quâelle reste encore Ă©levĂ©e jusquâĂ aujourdâhui (6,7%). La raison est que les deux conditions de base que Friedman lui-mĂȘme a bien indiquĂ©es pour le succĂšs dâune politique du taux directeur pour la maĂźtrise de lâinflation, Ă savoir une vitesse de circulation de la monnaie stable Ă court terme et lâexistence dâun bon mĂ©canisme de transmission entre lâĂ©conomie rĂ©elle et lâĂ©conomie monĂ©taire, sont loin dâĂȘtre remplies en Tunisie en raison de lâimportance du secteur informel (qui reprĂ©sente jusquâĂ 54% du PIB, selon certains experts) et de la faible inclusion financiĂšre (seuls 35% des mĂ©nages disposent dâun compte courant bancaire ou postal).
Jâai personnellement publiĂ© depuis trois ou quatre ans une bonne dizaine dâarticles Ă ce sujet, expliquant de long et en large les causes structurelles de cet Ă©chec, formule mathĂ©matique de lâĂ©quation quantitative Ă lâappui et citant mĂȘme Friedman⊠mais cela nâa pas empĂȘchĂ© lâex-gouverneur de la BCT dâaugmenter Ă huit reprises successives le taux directeur jusquâĂ atteindre 8% et le nouveau gouverneur (qui nâest mĂȘme spĂ©cialiste en Ă©conomie monĂ©taire mais en Ă©conomie de lâĂ©nergie) de le garder Ă ce niveau jusquâĂ aujourdâhui, asphyxiant ainsi les mĂ©nages, les entreprises et prenant en otage les investissements et la croissance Ă©conomique, sans rĂ©ussir pour autant Ă maĂźtriser lâinflation.
Quant Ă lâexcuse derriĂšre laquelle lâex comme le nouveau gouverneur ont lâhabitude de se cacher pour Ă©chapper Ă leur responsabilitĂ©, Ă savoir que câest le conseil dâadministration de la BCT qui dĂ©cide en la matiĂšre, elle est Ă rejeter dâun revers de la main, parce les membres de ce conseil sont des directeurs gĂ©nĂ©raux dans diffĂ©rents dĂ©partements ministĂ©riels (agriculture, commerce, industrie, transport, etc.) qui, mĂȘme sâils sont compĂ©tents dans leur domaine, nâont aucune formation Ă©conomique pour savoir quelle est la politique monĂ©taire la plus adaptĂ©e aux spĂ©cificitĂ©s de lâĂ©conomie tunisienne et Ă quelles conditions lâĂ©quation quantitative de la monnaie de Friedman, dont ils nâont probablement jamais entendu parler, pourrait sâappliquer avec succĂšs. Quant aux trois Ă©conomistes universitaires quâil revient au gouverneur de nommer dans son conseil dâadministration, ils le sont souvent sur la base dâaffinitĂ© sinon dâamitiĂ© personnelles, compte tenu des Ă©normes jetons de prĂ©sence quâils touchent Ă ce titre.
Pourtant, il existe une autre politique monĂ©taire beaucoup plus efficace et facile Ă mettre en Ćuvre pour lutter contre lâinflation, que tous les Ă©conomistes disciples de Friedman mentionnent et que jâai rappelĂ©e dans tous mes articles, celle des rĂ©serves obligatoires (voir plus haut). En effet, il suffit dâaugmenter de quelques points le taux de rĂ©serves obligatoires que les banques commerciales sont tenues de dĂ©tenir pour rĂ©duire drastiquement et mĂ©caniquement leur capacitĂ© Ă crĂ©er de la monnaie scripturale (on dĂ©montre mathĂ©matiquement que le processus de crĂ©ation monnaie scripturale par les banques commerciales est une suite algĂ©brique qui converge vers lâinverse du taux de rĂ©serves obligatoires).
Il ne fait pas de doute pour moi que si jâhabitais le Palais de Carthage, je convoquerais, dĂšs demain, le Gouverneur de la BCT et lui ferais signer dans mon bureau mĂȘme deux circulaires Ă adresser aux banques commerciales de trois mots chacune : lâune stipule que le taux directeur est de la BCT est diminuĂ© de 8% Ă 4% (câest son niveau dans des pays Ă Ă©conomie similaire Ă la nĂŽtre, tels que le Maroc ou la Jordanie) et lâautre stipulant que le taux de rĂ©serves obligatoires est augmentĂ© de 4%. Si la consommation des mĂ©nages, les investissements des entreprises et la croissance Ă©conomique ne reprendront pas en moins de trois mois sans produire pour autant plus dâinflation, alors je ne suis pas un Ă©conomiste mais un charlatan!
Il reste une question que tous les lecteurs et lectrices se posent certainement et Ă laquelle je me dois de leur apporter une rĂ©ponse mĂȘme subjective : pourquoi les responsables de la BCT sâentĂȘtent-ils Ă appliquer une politique du taux directeur pour essayer de maĂźtriser lâinflation plutĂŽt quâune politique du taux de rĂ©serves obligatoires quâils doivent certainement connaĂźtre (câest du niveau dâun maĂźtrisard en sciences Ă©conomiques)?
La seule rĂ©ponse que je trouve est que la premiĂšre permet aux banques dâaccroĂźtre considĂ©rablement leurs bĂ©nĂ©fices puisque le taux de rĂ©munĂ©ration des bons du TrĂ©sor que lâEtat est obligĂ© dâĂ©mettre pour financer son dĂ©ficit budgĂ©taire (selon un article pernicieux de la loi de 2016) sont indexĂ©s au taux directeur de la BCT, alors que la seconde rĂ©duit considĂ©rablement leur capacitĂ© Ă accorder des crĂ©dits, leurs chiffres dâaffaires et donc leurs bĂ©nĂ©fices. De lĂ Ă dĂ©duire que la BCT est au service du lobby bancaire, je laisse Ă chacun(e) la libertĂ© de franchir ou non ce pas.
Toujours est-il quâavec lâĂ©chec pour la maitrise de lâinflation, un taux de chĂŽmage dĂ©passant 16% de la population active et mĂȘme 40% parmi les diplĂŽmĂ©s de lâenseignement supĂ©rieur et un taux officiel de croissance Ă©conomique nĂ©gatif de -1,8% en moyenne par an durant la pĂ©riode 2012 et 2021, on ne peut pas dire que le couple Ghannouchi/Friedman a laissĂ© de bons souvenirs aux Tunisiens !
Les possibles «fiançailles» de Kais Saïed avec Arthur Pigou
On peut considĂ©rer notre PrĂ©sident qui, dâaprĂšs ses discours, sait quel type de sociĂ©tĂ© il veut construire pour la Tunisie et quelles valeurs il veut dĂ©fendre, comme un «cĂ©libataire» qui nâa pas encore «trouvĂ© chaussure Ă son pied», dans le sens oĂč il est encore Ă la recherche de lâĂ©cole de pensĂ©e Ă©conomique et du modĂšle de dĂ©veloppement qui lui permettront de rĂ©aliser la Tunisie dont il rĂȘve.
Compte tenu des idĂ©es quâil dĂ©veloppe dans ses discours que je ne rate jamais, je lui propose de «se fiancer, en vue dâun futur mariage si entente mutuelle», comme il est dâusage de le dire dans ces circonstances, avec la thĂ©orie Ă©conomique du bien-ĂȘtre (Welfare Theory) qui a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©e par plusieurs Ă©conomistes dont le chef de file est Arthur Pigou (1877-1959) dans son cĂ©lĂšbre ouvrage ââThe Economics of Welfareââ (1920).
Pigou a dĂ©veloppĂ© lâidĂ©e que lâĂtat peut amĂ©liorer le bien-ĂȘtre Ă©conomique en corrigeant les dĂ©faillances du marchĂ© et a introduit ce que les Ă©conomistes appellent les «taxes pigouviennes» pour rĂ©duire les effets nĂ©gatifs des externalitĂ©s (exemple : taxe carbone pour lutter contre la pollution, taxe sur le capital oisif que jâavais proposĂ©e dans mon dernier article ââLe prĂ©sident SaĂŻed a-t-il raison de rompre les relations avec le FMIââ).
Lâobjectif recherchĂ© par cette Ă©cole de pensĂ©e est la rĂ©alisation de lâoptimum de Pareto, qui dĂ©signe une situation dâallocation des ressources matĂ©rielles et humaines disponibles optimale dans le sens oĂč aucune amĂ©lioration du bien-ĂȘtre dâun individu ne peut se faire sans dĂ©tĂ©riorer celui dâun autre.
En pratique, il sâagit de maximiser une fonction dâutilitĂ© collective que Paul Samuelson (1915-2009) appelle «fonction de bien-ĂȘtre social», qui permet dâagrĂ©ger les prĂ©fĂ©rences individuelles pour Ă©valuer le bien-ĂȘtre collectif, et que Kenneth Arrow (1921-2017) a dĂ©montrĂ© par son «thĂ©orĂšme dâimpossibilité» quâelle ne peut pas ĂȘtre construite par simple agrĂ©gation des utilitĂ©s individuelles. Par exemple, si chaque individu dĂ©cide pour maximiser son utilitĂ© individuelle de se rendre dans sa voiture Ă son travail, il en rĂ©sultera un tel embouteillage sur les routes que personne nâarrivera Ă temps Ă son bureau.
Il se trouve que je suis moi-mĂȘme «marié» Ă cette Ă©cole de pensĂ©e depuis que jâavais soutenu en 1979 Ă la Sorbonne une thĂšse Doctorat dâEtat portant sur ââLâinvestissement en infrastructures des transports selon la thĂ©orie dâallocation optimale des ressourcesââ, devant un jury prĂ©sidĂ© par Maurice Allais qui a reçu en 1988 le prix Nobel dâĂ©conomie pour ses recherches dans ce domaine. Jâen applique les enseignements depuis plus de 30 ans pour lâĂ©valuation de la rentabilitĂ© Ă©conomique dâun grand nombre de programmes projets dâinfrastructures rĂ©alisĂ©s en Tunisie et dans une trentaine de pays africains pour le compte des bailleurs de fonds multinationaux tels que la BAD, la BEI, la Banque Mondiale, etc.
Sans trop entrer dans des dĂ©tails techniques et thĂ©oriques, je dirais Ă lâintention de notre PrĂ©sident que la thĂ©orie du bien-ĂȘtre cherche un Ă©quilibre entre lâobjectif dâefficacitĂ© et de croissance Ă©conomique et celui dâune plus grande justice sociale, une prĂ©occupation majeure quâon retrouve dans tous ses discours. Elle est utilisĂ©e pour justifier et analyser les interventions Ă©conomiques de lâĂtat, notamment :
â les politiques de redistribution (impĂŽts progressifs, allocations sociales) pour corriger les inĂ©galitĂ©s;
â les politiques de rĂ©gulation pour corriger les dĂ©faillances de marchĂ© (monopoles, externalitĂ©s nĂ©gatives comme la pollution);
â la justification des investissements publics dans lâĂ©ducation, la santĂ© et les infrastructures de transport, qui augmentent le bien-ĂȘtre global.
Quel ModÚle de développement économique pour la Tunisie de Kais Saïed
La Tunisie a adoptĂ© plusieurs modĂšles de dĂ©veloppement Ă©conomique au fil des dĂ©cennies, mais aucun nâa rĂ©ellement permis dâatteindre un Ă©quilibre durable entre croissance, inclusion sociale et stabilitĂ© financiĂšre. Aujourdâhui, la question du modĂšle de dĂ©veloppement est au cĆur des dĂ©bats, car le pays peine Ă sortir de la crise Ă©conomique persistante.
En se basant sur les enseignements de la thĂ©orie du bien-ĂȘtre comme cadre thĂ©orique, et face aux dĂ©fis actuels (croissance faible, dette Ă©levĂ©e, chĂŽmage, inflation, corruptionâŠ), les axes du modĂšle de dĂ©veloppement que je propose Ă notre PrĂ©sident sont :
- un modĂšle basĂ© sur lâĂ©conomie de la connaissance et lâinnovation : la Tunisie possĂšde une jeunesse instruite et un fort potentiel en matiĂšre de numĂ©rique. Miser sur lâĂ©conomie du savoir (technologies, intelligence artificielle, industrie 4.0, biotechnologiesâŠ) permettrait dâattirer des investissements et de crĂ©er des emplois qualifiĂ©s;
- une transformation vers une Ă©conomie productive et diversifiĂ©e : la Tunisie doit rĂ©duire sa dĂ©pendance aux services et au tourisme en dĂ©veloppant des industries Ă plus forte valeur ajoutĂ©e, comme lâaĂ©ronautique, les Ă©nergies renouvelables et lâagro-industrie. Cela implique des rĂ©formes pour amĂ©liorer lâenvironnement des affaires et soutenir les entreprises locales;
- un modĂšle axĂ© sur le dĂ©veloppement durable : avec la crise climatique et la raretĂ© des ressources naturelles, une transition vers une Ă©conomie verte est nĂ©cessaire. Lâinvestissement dans les Ă©nergies renouvelables, lâagriculture biologique et lâĂ©conomie circulaire pourrait permettre Ă la Tunisie de se positionner comme un leader rĂ©gional en matiĂšre de dĂ©veloppement durable.
- Une Ă©conomie plus inclusive et Ă©quilibrĂ©e : la croissance ne peut ĂȘtre durable que si elle bĂ©nĂ©ficie Ă toutes les rĂ©gions du pays. Un dĂ©veloppement rĂ©gional Ă©quilibrĂ©, avec une meilleure rĂ©partition des infrastructures et des opportunitĂ©s Ă©conomiques, est crucial pour rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales et territoriales.
Ce modĂšle nĂ©cessitera des rĂ©formes profondes pour amĂ©liorer la gouvernance, renforcer lâĂ©ducation, moderniser lâadministration et attirer les investissements. Sans ces transformations, la Tunisie risque de rester dans un cercle vicieux de crises Ă©conomiques et sociales, avec le risque de dĂ©faut de paiement et le Club de Paris Ă lâhorizon
Post Scriptum 1 : Je doute fort quâun tel article acadĂ©mique et didactique soit lu par notre PrĂ©sident, qui paraĂźt-il, prĂ©fĂšre la lecture des poĂšmes de Bayram Ettounsi⊠que ce genre dâarticles Ă©conomiques rĂ©barbatifs. Cependant, sâil mâaurait permis dâenrichir la culture Ă©conomique du public et partager avec lui un tant soit peu mes connaissances acquises au prix dâune vie dâĂ©tudes universitaires et de pratique de lâĂ©conomie un peu partout dans le monde, je ne regretterais pas de lâavoir rĂ©digĂ©.
Post Scriptum 2 : Le seul bĂ©nĂ©fice que je peux espĂ©rer retirer de la rĂ©daction de ce genre dâarticle que je fais gratuitement et qui me demande beaucoup dâefforts, est quelques visiteurs de plus de mon blog «PoĂšmes de la vie», pour y lire mes poĂšmes sur ce que les poĂštes grecs appellent la «finitude» et que jâappelle «lâinsignifiance des ĂȘtres et des choses». Ils y trouveront un dernier poĂšme que jâai appelĂ© «Donne-moi la main pour traverser ensemble» (il ne sâagit pas de traverser la MĂ©diterranĂ©e sur un bateau de fortune pour immigrer clandestinement⊠!).
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