C’est quoi le racisme et comment le combattre ?
L’histoire est le grand témoin de l’ampleur des injustices et des crimes abjects que le racisme a causé et cause encore. Gengis Khan, le roi Léopold II de Belgique, Adolphe Hitler et Benyamin Netanyahu seront à jamais dans le panthéon, «le hall of Fame», des pires racistes génocidaires que l’humanité ait connues.
Med-Dahmani Fathallah *

Le racisme, voilà un fléau qui touche l’humanité depuis la nuit du temps et qui semble s’exacerber dans nos sociétés modernes. Même si ce fléau est régulièrement évoqué et dénoncé, on est en droit de se demander s’il est vraiment bien exploré et combattu.
C’est quoi le racisme? Quelle est l’origine du racisme ? Pourquoi on est raciste ou comment le devient-on? Pourquoi on peut adopter des attitudes racistes? Comment a évolué ce fléau? Et surtout, comment peut-on lutter efficacement contre le racisme? Ce sont autant de questions importantes auxquelles des réponses justes et claires doivent être apportées.
C’est quoi le racisme et quel est son origine ?
Le racisme émane de l’idée qu’en s’appuyant juste sur l’anthropologie physique, on aboutit à la théorie que l’espèce humaine comporte plusieurs races différentes. L’assignation raciale qui n’a vraiment aucun fondement rationnel repose sur la couleur de la peau des hommes comme unique critère de différentiation. Essayer de comprendre le bien-fondé et l’adoption très répandue de ce raisonnement aussi simplet que trivial relève presque de la poursuite de la quadrature du cercle.
Le problème c’est que ce raisonnement a abouti à une doctrine ou une idéologie délétère, le racialisme, qui prône l’existence de races «supérieures», tandis que d’autres seraient «inférieures». Ceci a amené des peuples se réclamant des races supérieures à vouloir en dominer d’autres.
Alors que les origines du racisme se perdent dans l’histoire, il reste néanmoins que les références historiques au racisme sont en majorité liées au début du commerce global des esclaves et de la traite transatlantique et à l’émergence de la théorie des races au XVIIIe siècle.
L’histoire est le grand témoin de l’ampleur des injustices et des crimes abjects que le racisme a causé et cause encore. Gengis Khan, le roi Léopold II de Belgique, Adolphe Hitler et Benyamin Netanyahu seront à jamais dans le panthéon, «le hall of Fame», des pires racistes génocidaires que l’humanité ait connue.
Selon la théorie des races, les organismes impliqués dans les droits de l’homme ont émis des définitions du racisme, dont celle-ci : «Toute distinction, discrimination, exclusion, restriction ou préférence, volontaire ou involontaire, provocation et incitation à la haine basée sur la couleur de la peau ou l’origine ethnique (la race) et faite dans l’intention d’empêcher quelqu’un de jouir de ses droits ou de les exercer».
Mais avec le temps la notion de race s’est affinée et l’idéologie raciste a évolué pour s’opposer à toutes les formes d’humanisme. La distinction, discrimination, exclusion, restriction ou préférence ont été étendues à des groupes au sein même d’une présumée race. Ces nouveaux groupes sont définis selon des critères comme la religion, la nationalité, l’origine ethnique, le sexe, l’âge, l’ascendance, le milieu socio-économique, les incapacités physiques ou mentales et l’orientation politique.
Ces critères sont évolutifs et il ne faut pas s’étonner que de nouveaux groupes de discrimination voient le jour selon l’évolution imprévisible des sociétés modernes.
Du racisme individuel au racisme d’Etat
L’évolution de cette idéologie a aussi dépassé le cadre du comportement individuel pour toucher les Etats. Ainsi des pays comme les Etats-Unis jusqu’au milieu du siècle dernier ou l’Afrique du Sud du temps de l’Apartheid, la Belgique et la France coloniale du XIXe et XXe siècle et l’actuel entité israélienne ont adopté la hiérarchisation des populations selon l’idée de race ou de groupes ethniques.
Pour assujettir les groupes raciaux considérés comme inferieurs et les priver des droits et des libertés fondamentales, ces pays ont établi des lois discriminatoires pour être en mesure de soumettre ces groupes à des mesures répressives hors du droit commun. Ces pays avaient été des Etats racistes, mais Israël l’a toujours été et le reste encore.
De nos jours beaucoup de pays, notamment européens, comme la France et l’Allemagne, ou encore les Etats-Unis, le Canada, l’Australie et l’Inde pratiquent le racisme d’Etat ou racisme institutionnel. Cette forme systémique de ségrégation raciste est généralement ancrée dans les pratiques policières qui ont généré le «délit de faciès». L’expression de ce racisme est aussi quasi quotidienne dans le milieu du travail et lors des événements sportifs particulièrement les matches de football.
La réfutation des théories racistes
Pour explorer et bien cerner les racines et les manifestations du racisme, on dispose de deux approches : scientifique et sociologique.
L’approche scientifique qui se base sur les sciences biologiques, essentiellement la génétique formelle et la génétique moléculaire, l’anatomie et la physiologie, a conduit à une réponse claire et définitive : il n’y a pas de races au sein de l’humanité. La notion de race est réfutée. Il n’existe qu’une seule espèce humaine Homo sapiens, la nôtre. La génétique est formelle, nous partageons tous les mêmes gènes. La science a aussi montré qu’il existe, chez les humains comme chez tous les organismes vivants, une diversité génétique qui est un discret polymorphisme moléculaire de l’ADN. Ces variations génétiques sont une règle fondamentale de la nature et un facteur d’enrichissement et d’adaptation au milieu environnant.
La science a montré par ailleurs qu’il existe des facteurs exogènes indépendants ou facteurs épigénétiques qui agissent sur le fonctionnement des gènes et peuvent affecter l’expression des gènes associés aux comportements.
A noter que tous les effets dus aux facteurs épigénétiques y compris ceux qui pourraient expliquer le comportement et les attitudes racistes sont réversibles.
L’approche sociologique permet d’explorer le racisme en tant que phénomène social complexe. Pour étudier les raisons qui font que l’homme peut adopter des attitudes racistes, cette approche examine plusieurs facteurs clés tels que la socialisation, les structures de pouvoir, les stéréotypes et les mécanismes de défense psychologique.
Les vecteurs de transmission des préjugés raciaux
La socialisation est l’un des principaux vecteurs du racisme. Dès leur plus jeune âge, les individus sont exposés à des normes, des valeurs et des croyances qui façonnent leur perception du monde. La famille, l’école, les médias et les groupes de pairs jouent un rôle crucial dans la transmission des préjugés raciaux.
Les enfants qui grandissent dans des environnements où les attitudes racistes sont des pratiques communes, sont plus susceptibles de reproduire ces comportements.
De plus, les messages ambigus ou négatifs véhiculés par les médias peuvent renforcer des perceptions erronées sur des groupes ethniques spécifiques. A ce niveau, l’approche sociologique et l’approche scientifique, en l’occurrence l’épigénétique, se rejoignent pour expliquer en partie les comportements racistes.
Par ailleurs, le racisme est souvent ancré dans les structures de pouvoir qui favorisent certains groupes au détriment d’autres. Ces structures alimentent souvent des sentiments de supériorité chez les groupes dominants. Dans ce contexte, le racisme devient un moyen de maintenir le statu quo et de justifier des privilèges. Les institutions, telles que la police, le système judiciaire et le marché du travail, peuvent également perpétuer des discriminations raciales, renforçant ainsi l’idée que certaines races sont inférieures ou moins dignes de respect.
Quant aux stéréotypes, ce sont des généralisations simplistes qui peuvent conduire à la déshumanisation des individus appartenant à un présumé groupe racial particulier. Lorsqu’une personne est perçue uniquement à travers le prisme de stéréotypes négatifs, cela peut justifier des comportements discriminatoires. Par exemple, des stéréotypes associés à la criminalité, aux carences intellectuelles ou à la paresse peuvent amener certaines personnes à voir les membres de certaines présumées races comme des menaces ou des parasites. Cette déshumanisation facilite l’acceptation de la discrimination et de la violence qui peut légitimer l’assassinat.
Sur le plan psychologique, le racisme peut également être compris comme un mécanisme de défense primaire. Face à l’incertitude, à la peur ou à l’angoisse, certains individus peuvent projeter leurs propres insécurités sur des groupes perçus comme «autres». En stigmatisant un groupe, ils renforcent leur propre identité et leur sentiment de supériorité. Ce besoin de se sentir supérieur peut être exacerbé par des crises économiques ou sociales, où les individus cherchent des boucs émissaires pour expliquer leurs difficultés.
Comment lutter contre le racisme ?
Pour lutter contre le racisme et l’injustice qui y est associée, il est essentiel d’agir sur au moins trois niveaux. Le premier est juridique. La solution consiste à se doter d’un arsenal juridique puissant qui comprend un ensemble de lois dissuasives pour quiconque commettrait un acte de discrimination, exclusion, restriction ou préférence, volontaire ou involontaire, provocation et incitation à la haine basée sur la race, la couleur de la peau ou l’origine ethnique, ou empêcherait quelqu’un de jouir de ses droits ou de les exercer.
L’arsenal juridique de lutte contre le racisme doit être accompagné d’une remise en question des structures de pouvoir qui doivent favoriser un tissu social harmonieux à travers la réduction des inégalités économiques, politiques et sociales sources de pouvoir et de velléités de dominance.
Le deuxième niveau de lutte contre le racisme est le système éducatif. Il faut veiller à prodiguer une éducation ou la déconstruction des stéréotypes soit un objectif majeur. Les programmes éducatifs doivent intégrer la socialisation positive et la valorisation de la diversité ainsi que l’enseignement aux enfants de la compassion, de l’équité et des droits de la personne.
Au troisième niveau de la lutte contre le racisme on trouve la société civile et les organismes non gouvernementaux qui doivent contribuer à la construction d’une société plus inclusive en favorisant la compréhension et l’empathie, en aidant à la dénonciation du sectarisme et des discours haineux, et en amplifiant la voix des opprimés. La société civile peut aussi jouer un rôle important pour guider la défense des personnes victimes de harcèlement.
Le racisme est donc un phénomène complexe qui touche toutes les sociétés et ne peut être réduit à des manifestations ou attitudes personnelles puisqu’il affecte des systèmes étatiques et impacte toutes ses composantes.
Si les sciences naturelles réfutent la théorie des races, il n’en demeure pas moins qu’elles supportent l’approche sociologique, qui nous apprend que le racisme est le produit de processus sociaux, culturels et historiques.
Il semblerait donc évident que la lutte contre le racisme passe des analyses historiques précises ainsi que des ajustements des processus sociaux et culturels pour renforcer les liens sociaux et prévenir les comportements et attitudes erratiques. La volonté politique doit s’exprimer pleinement pour qu’on puisse réussir ce travail colossal.
* Millenium 3 Advisory.
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