L’interminable feuilleton de l’éternelle recherche d’un accord entre le ministère de l’équipement et les populations concernées, sur le tracé définitif de l’autoroute devant relier la ville de Bousalem (nord ouest du pays) à la frontière algérienne ne semble pas prendre fin, Et pour cause.
Après une dizaine d’années de discussions entre les deux parties en vue d’un accord, une information publiée, ces derniers jours, par une tierce partie, en l’occurrence, la Commission d’enquête et de réconciliation du gouvernorat de Jendouba, vient de remettre les compteurs à zéro.
Dans le détail, le président de cette Commission Mohamed Hedi Moknin, a annoncé le lancement de la publication de l’intention d’expropriation de terrains situés dans les délégations de Bou Salem et Balta Bou Aouane, en vue de la réalisation de la première tranche du projet de l’autoroute Bou Salem – frontière algérienne, s’étendant du point kilométrique zéro au point kilométrique 15.
« Un projet stratégique ne peut rester otage d’interminables négociations. »
L’information, objet d’un communiqué affiché au siège du gouvernorat de Jendouba, invite toute personne s’estimant propriétaire légitime à consulter la liste détaillée des parcelles concernées ainsi que le plan y afférent.
Le dépôt des contestations doivent se faire, dans un délai de 60 jours, à compter du début de la publication de l’intention d’expropriation (le 29 janvier en cours) et jusqu’au 29 mars 2025.
Comprendre : les négociations sont pratiquement au degré zéro et sont loin d’avancer entre les deux parties.
Les négociations s’éternisent
Cette information est surprenante lorsqu’on sait que, depuis 2016, au temps de Mohamed Salah Arfaoui ministre de l’équipement, l’étude de faisabilité technico économique du projet était fin prête. Ses résultats, particulièrement, en ce qui concerne l’itinéraire et le tracé de l’autoroute, ont été affichés pour avis, suggestions et réclamations à l’intention des communautés des zones que l’autoroute devrait traverser. Pour mémoire, ces résultats ont été placardés au chef-lieu du gouvernorat de Jendouba, dans les bureaux des structures régionales de l’équipement, des municipalités, zones et délégations concernées (Bousalem, Bulla Régia, Fernana, Ain Elbaya …).
A signaler qu’à cette époque, le tracé retenu dans l’étude du bureau d’étude STUDI n’a pas été du goût d’une soixantaine d’agriculteurs et de particuliers de la zone Balta-Bouaouane (proximité de Bousalem).
Dans une pétition, ils ont considéré que le nouveau tracé (tracé nord) porte préjudice à leurs intérêts : arrachage d’oliveraies, démolition d’habitations, condamnation de centaines d’hectares de terres fertiles irriguées… Ils déplorent particulièrement, leur non consultation par les ministères de l’agriculture et de l’équipement et réclament le retour au «tracé sud» qui serait moins long (économie de 8 kms) et partant moins coûteux pour le contribuable.
« L’autoroute Bou Salem – Algérie est bloquée, mais le temps, lui, file à toute vitesse. »
Depuis, de multiples réunions de conciliation visant à rapprocher les points de vue et à trouver une solution ont été tenues mais sans résultats notoire.
Il faut reconnaître que l’instabilité politique qu’a connue le pays durant cette période (depuis 2016) n’a pas beaucoup aidé à la résolution de cette problématique. Pis avec un coût de 2500 MDT il était difficile de lui trouver facilement un financement.
Pourtant à un certain moment, on avait cru que le problème était sur la voie d’être résolue lorsqu’en 2020, dans une déclaration faite à l’Agence TAP, le 22 janvier 2020, Haykel Ghazouani, ingénieur à la direction générale des ponts et chaussées, avait annoncé –bien annoncé- “que le coup d’envoi du défrichement de terrain relatif au projet de l’autoroute Bou Salem-Frontière algérienne a été donné ».
« 10 ans de discussions, 80 kilomètres à construire… et un chantier toujours à l’arrêt. »
Avec le recul, cette déclaration était simplement fausse. C’était du bluff. Elle était destinée à calmer les esprits au plan régional.
Cela pour dire que par-delà ces éclairages sur l’évolution de ce mégaprojet, beaucoup de zones d’ombre restent à éclaircir par le ministère de l’équipement et de l’habitat.
Morale de l’histoire, le projet est retourné au point zéro.
Le projet a pourtant une dimension stratégique
Pourtant, ce tronçon, long de 80 kilomètres, a une dimension hautement stratégique. Il devrait être en principe prioritaire. Il est, le dernier lot de la partie que la Tunisie s’est engagée à réaliser dans le cadre de l’autoroute trans-maghrébine qui devrait traverser, dans le futur, la Mauritanie, le Maroc, l’Algérie, la Tunisie et la Libye. Ce projet de plus de 3500 kms. La trans-maghrébine est retenue comme un «des 30 plus grands projets d’infrastructure dans le monde ».
Abou SARRA
EN BREF
Autoroute Bou Salem – Frontière algérienne : un projet toujours bloqué
- Un projet stratégique à l’arrêt : Dernier tronçon tunisien de l’autoroute trans-maghrébine (80 km), attendu depuis plus de 10 ans.
- Blocage majeur : Contestations foncières et expropriations remettent tout en question.
- Procédure relancée : La Commission d’enquête de Jendouba a publié l’intention d’expropriation (29 janvier 2025). Contestations ouvertes jusqu’au 29 mars 2025.
- Enjeu financier : Coût estimé à 2500 MDT, financement encore incertain.
- Question en suspens : Quand ce projet verra-t-il enfin le jour ?
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