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Vient de paraître : « Potières de Sejnane sans tour ni four »


Reconnue internationalement comme un patrimoine culturel immatériel ayant une valeur universelle, depuis son inscription en 2018, sur la liste du patrimoine humain de l’Unesco, la poterie modelée de Sejnane, une des plus vielles activités artisanales de la planète, vient d’être gratifiée d’un très bel ouvrage illustré de photos intitulé « Potières de Sejnane, sans tour ni four».

Publié par les Editions du Patrimoine Maghreb Méditerranée (EPMM/Alif) en  partenariat avec l’Agence de Mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle (AMVPPC) , cet ouvrage est un hymne aux potières de Sejnane qui ont persévéré, de génération en génération, pour préserver cette poterie artisanale amazigh (berbère) qui remonte à plus de 30 000 ans d’histoire.

Concocté avec beaucoup de professionnalisme par Viaviane Bettaieb pour la rédaction et Mohamed Salah Bettaieb pour la photo, l’ouvrage est une invitation à découvrir toutes les facettes historique, sociale, économique, faunistique et artistique de ce savoir faire artisanal qui remonte à l’âge de bronze.

“La poterie de Sejnane : un art millénaire, un savoir-faire unique, un héritage précieux, un cri du cœur.”

 

Il décrit avec minutie le processus de confection des objets-articles de poterie de Sejnane dont les motifs symétriques et convergents, souvent figuratifs, tracés en rouge et en noir. Elle est façonnée à la main, exclusivement par des potières, sans utiliser ni four, ni tour, puis sont cuites sur un feu composé de branches et bouses de vaches. L’utilisation de ces poteries artisanales est majoritairement destinée à des usages domestiques : la conservation et la cuisson des aliments.

Les potières ne jurent que par leurs mains

Poterie SejnaneCet ouvrage qui raconte « une histoire où un passé lointain devient présent et avenir » est réparti en cinq parties.

Dans la première partie, « un pays, des femmes potières », l’ouvrage revient sur le contexte historique et géographique dans lequel ont évolué les générations de potières de Sejnane. L’accent est mis sur l’amélioration au fil des années de la visibilité de cet art artisanal.

Dans la deuxième partie, « Sans argile et la main des femmes rien ne sera »,  l’ouvrage s’attarde sur la disponibilité dans la zone de Sejnane d’un terroir généreux en argile, relève la passion des potières de Sejnane pour la maitrise sans cesse renouvelée de leur métier et décrit avec une précision inouïe les différentes étapes par lesquelles passe la confection de cette poterie : collecte de l’argile auprès des oueds, sa préparation avant son utilisation, la confection des articles, leur cuisson et leur décoration, le tout sans tour ni four.

Les potières de Sejnane : des femmes de courage, des artistes de talent, des gardiennes de la tradition, des oubliées de l’économie.

 

La troisième partie, « De la poésie gestuelle dans l’atelier de Sabiha » est un superbe  portrait d’une potière au travail, Sabiha. L’ouvrage peint à grands traits le merveilleux usage dont cette artisane souriante fait de ses mains pour façonner avec passion les articles de poterie, particulièrement, l’article fétiche de la poterie de Sejnane « laaroussa » (la jeune mariée ou la poupée).

Pour l’auteure de l’ouvrage le spectacle est « un moment de grande émotion, de poésie, des moments de fascination, un moment de sérénité ».

Dimension artistique de la poterie de Sejnane

La quatrième partie, « Artisanes ou artistes ? Les potières franchissent la frontière », jette la lumière sur la dimension artistique de la poterie de Sejnane.

Ce volet artistique est perceptible à travers la créativité que favorise « l’indépendance dont jouissent les potières lors de la décoration et dans la création de nouvelles formes ».

Elle est également perceptible, selon l’auteure de l’ouvrage, à travers « l’attrait des collectionneurs pour l’acquisition d’un objet qui les a émus et avec lequel ils développeront une étroite relation »

« La potière dessine à l’œil, sans règle ni compas. De sa dextérité, de son expérience, de son intelligence triste des couleurs et des mots, naissent des œuvres », lit-on dans l’ouvrage.

Il est temps de reconnaître la valeur du travail des potières de Sejnane, de protéger leur savoir-faire, de soutenir leur art, de leur offrir un avenir digne.

 

La 5ème partie « pour que demeure la beauté du geste » a le mérite d’attitrer l’attention sur l’iniquité commerciale dont sont victimes les 600 potières de Sejnane.

Car, en dépit de la forte visibilité que leur a conférée l’inscription de la poterie modelée de Sejnane sur la liste du patrimoine humain de l’Unesco, en dépit de l’assistance que leur apportent des ong et en dépit la multiplication des invitations pour participer à des expositions mondiales, les potières de Sejnane sont toujours pauvres.

Le métier de potière n’enrichit pas

A ce propos on relève ce passage merveilleux dans l’ouvrage : « En Tunisie, sur le bord de la route, les potières, souvent habillées d’une malya colorée et coiffée d’un foulard fleuri, vendent la plupart du temps à des prix dérisoires. Elles restent confrontée à des acheteurs inconscients ignorant la valeur travail de l’objet (pénibilité, savoir faire, expression artistique) ».

Poussées à produire plus pour alimenter des ventes de misère, la qualité des poteries et de leur décor risque d’en pâtir. Il y a aussi le risque que la jeune génération tourne le dos à ce métier si peu rémunérateur. Pourtant les potières ont de l’or dans leurs mains. La poterie de Sejnane est un récit vivant de traditions et d’innovations. « Dans les mains des potières, les histoires des ancêtres prennent forme, leurs voix résonnent dans l’argile inspirant les générations à venir », note l’auteure.

Des photos qui donnent à voir

Pour y remédier l’Etat est appelé à intervenir et à protéger les droits des potières au titre de la propriété intellectuelle.  Et pour ne rien oublier, au rayon des photos, le talentueux photographe Mohamed Salah Bettaieb a été tout simplement au top de son art.

La photo de la jeune fille souriante qui vend des objets de poterie au bord de la route est tout simplement mythique. Son sourire est désarmant.

Il y a aussi les deux photos de la doyenne des portières Ommi jomâa, star de Sejnane. La première photo a été prise en 1974 tandis que la seconde en 2024. Au regard de l’évolution du look de la potière, ces deux photos donnent à voir comme on dit. Elles illustrent de manière éloquente que le métier de potière est peu rentable et peu rémunérateur. Il n’enrichit pas les potières qui l’exercent.

Abou SARRA

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