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ECLAIRAGES – Un pas de plus vers la neutralité et ses implications pour la Tunisie

La Banque centrale européenne (BCE) s’apprête à franchir une nouvelle étape vers la normalisation de sa politique monétaire.

Après quatre baisses de taux directeurs depuis juin 2024, une nouvelle réduction de 25 points de base (pbs) est attendue lors de la réunion du 30 janvier. Ce mouvement, déjà largement anticipé par les marchés, vise à accompagner un retour progressif vers un taux « neutre » – un niveau estimé entre 1,75 % et 2,5 %, qui ne stimule ni ne freine l’économie.

Si cette trajectoire de la BCE s’inscrit dans un contexte européen marqué par des perspectives de croissance fragiles et une inflation en voie de stabilisation autour de 2 %, ses répercussions vont bien au-delà de la zone euro. Pour la Tunisie, dont l’économie est profondément interconnectée avec l’Europe à travers le commerce, les investissements et les flux financiers, ces ajustements monétaires pourraient engendrer des effets significatifs, tant en termes de financement extérieur que de dynamique inflationniste et de compétitivité des exportations.

 

Une politique monétaire européenne plus accommodante : quel impact pour la Tunisie ?

On peut identifier trois impacts principaux :

Premier impact, un effet mitigé sur les coûts de financement extérieur.

La baisse des taux directeurs de la BCE réduit le coût de l’argent en Europe, ce qui pourrait rendre le financement en euros légèrement plus accessible pour la Tunisie. Or, cette opportunité demeure relative, car la Tunisie fait face à des contraintes structurelles dont notamment,

  • Un endettement public élevé, dont une partie est libellée en devises étrangères, notamment en euros et
  • Une perception de risque accrue par les investisseurs internationaux, qui exige des primes de risque élevées.

En d’autres termes, même si les taux de la BCE reculent, la Tunisie ne pourra pleinement en bénéficier que si sa signature souveraine s’améliore et si elle parvient à stabiliser ses déséquilibres macroéconomiques.

Deuxième impact, un effet contrasté sur l’inflation importée

L’évolution de la politique monétaire européenne a également une incidence sur l’inflation en Tunisie, notamment à travers le canal des importations. Une BCE plus accommodante exerce généralement une pression baissière sur l’euro, ce qui pourrait, à court terme, modérer le renchérissement des importations tunisiennes libellées en euros (produits alimentaires, équipements industriels, médicaments, etc.).

Toutefois, la dynamique inflationniste reste aussi tributaire de facteurs locaux, notamment :

  • La dépréciation progressive du dinar tunisien face aux principales devises.
  • Les tensions sur les marchés de l’énergie et des matières premières.
  • La structure du marché tunisien, marquée par des phénomènes de spéculation et des distorsions dans les circuits de distribution.

Ainsi, si l’euro venait à se déprécier davantage, l’effet positif sur l’inflation importée en Tunisie pourrait être contrebalancé par ces facteurs internes, limitant l’impact global de la politique monétaire européenne sur les prix domestiques.

 

Troisième impact, un enjeu de compétitivité pour les exportations tunisiennes

L’assouplissement monétaire en zone euro a aussi des répercussions sur la compétitivité des exportations tunisiennes. Une baisse des taux de la BCE peut entraîner un euro plus faible, ce qui rend les exportations tunisiennes (textile, agroalimentaire, composants automobiles) plus compétitives en Europe.

Cependant, plusieurs défis restent à relever pour que cet avantage théorique se traduise en gains réels, dont notamment :

  • La compétitivité-prix ne suffit pas : la Tunisie doit aussi améliorer la qualité et la diversification de son offre exportatrice.
  • La conjoncture économique en Europe reste fragile, avec une croissance ralentie qui pourrait peser sur la demande adressée aux exportateurs tunisiens.

Par conséquent, si un euro plus faible peut offrir un certain soutien aux entreprises tunisiennes tournées vers l’export, une stratégie plus globale de montée en gamme et d’amélioration de la productivité est indispensable pour maximiser cet effet.

 

Quelle serait la posture pour la Banque centrale de Tunisie (BCT) ?

Face à ces ajustements en zone euro, la Banque centrale de Tunisie (BCT) doit naviguer dans un environnement complexe. Contrairement à la BCE, dont la priorité est la stabilité des prix autour de 2 %, la BCT fait face à des arbitrages plus délicats entre inflation, croissance et stabilité du dinar.

Trois axes de réflexion émergent :

  • Le premier, aligner sa politique monétaire avec les évolutions extérieures : une divergence trop marquée entre les taux directeurs de la BCE et ceux de la BCT pourrait accentuer les pressions sur le dinar et compliquer la gestion des flux de capitaux.
  • Le second, renforcer la coordination entre politique monétaire et politique budgétaire : alors que l’État tunisien cherche à réduire son déficit et à sécuriser des financements extérieurs, la BCT doit éviter une politique trop restrictive qui freinerait la croissance.
  • Le troisième, poursuivre les réformes structurelles pour restaurer la confiance : au-delà des ajustements monétaires, la Tunisie doit améliorer son climat d’investissement et sa gouvernance économique pour attirer davantage de capitaux et réduire sa vulnérabilité aux chocs externes.

En définitive, un contexte international à double tranchant se profile. Si la BCE poursuit son assouplissement monétaire, la Tunisie pourrait bénéficier d’un certain répit sur le plan du financement et de l’inflation importée, tout en renforçant la compétitivité de ses exportations. Cependant, ces effets restent conditionnés par des facteurs internes, dont essentiellement :

  • L’amélioration de la signature souveraine du pays.
  • Une gestion plus efficace du cadre macroéconomique et monétaire.
  • Une diversification et une montée en gamme de l’appareil exportateur.

Ainsi, plutôt que de compter uniquement sur l’impact indirect des décisions européennes, la Tunisie doit saisir cette fenêtre d’opportunité pour accélérer les réformes et renforcer sa résilience face aux turbulences économiques internationales.

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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