Par Ridha CHIBA – conseiller international en exportation
La situation du marché en Tunisie se caractérise par la hausse des prix, notamment les biens de consommation, les pénuries récurrentes et les actions fallacieuses et frauduleuses menées par les spéculateurs et les monopolisateurs. Ceci a véritablement impacté le niveau de vie des familles tunisiennes, augmenté davantage le profit de ces usurpateurs et mis ainsi les couches sociales moyennes et nécessiteuses dans l’embarras, voire en état d’affliction. Ces accapareurs se sont emparés de la quasi-totalité des axes de distribution et de vente au détriment de l’intérêt général du pays.
A cet effet, nous allons dans le cadre de cette contribution proposer des astuces plausibles pour mettre un terme définitif à ces manœuvres dolosives qui demeurent toujours et participer à l’instauration réelle d’une justice économique et sociale à laquelle aspirent toutes les classes sociales, notamment les plus démunies.
D’emblée, nous remarquons que le marché en Tunisie se distingue par l’augmentation des prix de façon déraisonnable et surtout le stockage illicite des produits touchant spécialement la nourriture des citoyens, tels que le café, le sucre, l’huile végétale et à un degré moindre le riz et le lait.
L’instabilité des prix persiste
Ajouter à cela les prix des services qui ne cessent de s’accroître d’une manière vertigineuse et sans aucun contrôle, surtout ceux touchant la santé, la scolarité, le divertissement… Ce genre d’augmentation est décidé, dans la plupart du temps, par les chambres syndicales et non arrêté par les autorités.
Tout cela a fait baisser considérablement le pouvoir d’achat du citoyen et l’a laissé constamment sous une pression pénible difficilement surmontable malgré l’augmentation des salaires ces derniers temps et l’effort déployé pour mettre un terme à ces anomalies.
Une question se pose ici : pourquoi ce fléau d’instabilité des prix des produits et des services serait aussi persistant ?
A vrai dire, nous constatons que les prix de vente et la distribution de plusieurs produits de base sont imposés aux consommateurs finaux, soit par la monopolisation ou le harcèlement publicitaire et la notoriété des entreprises qui imposent leurs conditions et accaparent la quasi-totalité du marché, soit par la spéculation, le marché parallèle, la dissimulation des biens, les lobbies dans plusieurs secteurs économiques stratégiques et vitaux, et surtout la très mauvaise organisation et l’absence de contrôle d’une manière continue des ventes en détail et en gros, et ce, malgré les efforts fournis.
A cet effet, il demeure impérieux que les autorités concernées doivent réaliser d’une manière efficiente les actions performantes conformément à une planification optimale, une organisation rationnelle, une direction fiable et un contrôle rigoureux au niveau de toutes les situations où l’omission et l’erreur ne peuvent aucunement être tolérées.
Flambée des prix, une responsabilité partagée
Assurément, nous affirmons que la responsabilité est partagée et incombe à quatre principaux intervenants, à savoir le producteur, le vendeur, l’acheteur et l’administration.
Pour le producteur, le coût de revient permet de déterminer le niveau minimal de fixation du prix de vente du produit ou de la prestation de services de sorte que l’entreprise puisse rentrer dans ses frais. A cela, il faut déterminer la marge bénéficiaire qui dégage les bénéfices de la vente des produits ou des services.
Pour qu’une entreprise augmente sa rentabilité sans nuire aux consommateurs, plusieurs solutions sont possibles. D’abord, les prix de vente peuvent être augmentés sans trop s’éloigner du prix de marché. Ainsi, les producteurs doivent toujours chercher des partenaires moins chers pour offrir à leurs clients des prix en conséquence.
En plus, les industriels doivent instaurer un plan de charge adéquat et suivre un processus de fabrication optimal conformément aux normes pour éviter les répercussions de la non-qualité sur les prix de revient et les augmentations sans aucun mobile valable des augmentations au niveau des prix des composantes des produits, des fonctions machines, de la main-œuvre et de la marge bénéficiaire.
A cet effet, nous lançons un appel pressant aux autorités régionales et nationales à contrôler les entreprises, notamment industrielles et de distribution afin de vérifier la conformité des prix de revient et la marge bénéficiaire appliquée conformément aux normes de référence.
De même, les producteurs ne doivent pas accaparer, à eux seuls, les différentes marges bénéficiaires, à savoir leur marge, celles des grossistes et des détaillants, créant ainsi une monopolisation à travers leurs succursales de vente en imposant les produits et les prix à leur guise provoquant ainsi des queues de personnes devant leurs boutiques dont la plupart des gens sont âgés et qui vaquent à leurs besoins quotidiens
Quant aux acheteurs, ces derniers doivent absolument boycotter les prix les plus chers et les produits étrangers qui nuisent aux produits similaires tunisiens. Ils doivent, par ailleurs, s’adresser systématiquement aux structures en charge des droits de consommateurs et tous les groupes similaires dans toutes les régions du pays et encourager les mouvements visant à organiser l’information et la défense des consommateurs face aux entreprises de production et de distribution afin de trouver des solutions pour leurs litiges éventuels et surtout pour les stimuler au renforcement des campagnes visant à boycotter les produits dont la cherté est anormale.
De même, il est important que le Tunisien apprenne à boycotter certains produits, rationaliser sa consommation et acquérir, indubitablement, une nouvelle culture de consommation. Le distributeur, de son côté, doit absolument lier ses états de stocks réels avec le ministère du Commerce à travers ses directions régionales dans chaque gouvernorat et disposer d’un état dans lequel figurent tous ses clients grossistes ainsi que les quantités vendues à chacun d’eux et la liste de leurs détaillants et les stocks qui leur ont été acheminés. Ils doivent aussi assurer un contrôle spartiate au niveau des factures, des bons de réception, des distributions effectives et leurs confrontations à ce qui doit être assuré.
Contrôle des produits alimentaires subventionnés
En fait, au moment où l’Etat tend actuellement à libérer progressivement les prix des produits de base, nous constatons que tous les produits subventionnés sont accaparés par les spéculateurs qui les acheminent, à leur guise, pour d’autres utilisateurs avec des prix exorbitants et des conditions déraisonnables. Ceci, outre les étrangers qui visitent la Tunisie et qui en profitent.
Les actions à entreprendre pour contrecarrer cette situation doivent être beaucoup plus sérieuses et appuyées d’un pouvoir dissuasif. Les autorités doivent vérifier les marges bénéficiaires des intermédiaires et leur conformité avec les lois en vigueur, encourager davantage la vente du producteur au consommateur durant toute l’année et dans toutes les régions du pays, lutter contre les augmentations des prix pour mettre un terme à cette mascarade des corrupteurs, des spéculateurs, des imposteurs et des malfaiteurs.
Quant aux prix non homologués, en principe, c’est l’Etat qui doit assurer les importations des produits stratégiques et ne pas les confier aux privés.
Tous les états de stock des produits stratégiques doivent être liés avec le ministère du Commerce par les réseaux informatiques et, ainsi, contrôler les prix de revient gonflés et les marges bénéficiaires exagérées à partir de la comptabilité analytique de chaque entreprise.
Les autorités peuvent ainsi décortiquer les produits en sous-produits en déterminant les coûts d’achat des diverses composantes : à savoir la matière première, la main-d’œuvre, le fonctionnement machine, le temps alloué, les taux de rebuts permis… et vérifier exactement le taux de marge appliqué pour chaque composante ainsi que la marge sur le prix de revient de chaque produit destiné à la vente.
L’Etat doit, d’un autre côté, lutter consciencieusement contre l’économie informelle, le dumping, le lobbying, les monopoles et les groupes de pression. Il doit absolument être intransigeant et dissuasif vis-à-vis des ventes conditionnées, à la concurrence illicite et à la prolifération de la corruption.
En conclusion, nous suggérons que l’Etat réalise plus de contrôle sur les prix et les spéculateurs, davantage d’investissements avec des capitaux nationaux, la réallocation de toutes les administrations pour améliorer la rentabilité et l’efficience requises, la création de nouvelles entreprises industrielles et commerciales pour l’accroissement davantage de richesse et la multiplication des postes d’emploi.
Ceci ne peut que stimuler l’amélioration infime de la balance commerciale, le taux d’évolution économique, diminuer le taux de chômage, de l’inflation, booster certains agrégats économiques, principalement le PIB, et enfin instaurer une culture de travail dans un cadre légal assurant les intérêts de tous les intervenants économiques et sociaux et garantissant une vie stable qui va de pair avec les aspirations de tous les Tunisiens.
L’article Tribune – Commerce et circuits de distribution : Mettre fin à la flambée des prix et à la spéculation est apparu en premier sur La Presse de Tunisie.