Augmentation des honoraires des médecins en Tunisie : un mal nécessaire ?
Le Dr Hatem El Ghazel, embryologiste tunisien et directeur du laboratoire de génétique à l’hôpital militaire de Riyad, est revenu, dans une note publiée sur sa page officielle Facebook, sur la récente polémique concernant l’augmentation des honoraires des médecins en Tunisie, entrée en vigueur le 1er janvier 2025.
« Sans exagération, l’augmentation des honoraires est la suivante : en médecine générale, les honoraires étaient compris entre 35 et 45 dinars et sont désormais situés entre 40 et 55 dinars. En médecine spécialisée, les honoraires variaient entre 50 et 70 dinars et se situent désormais entre 55 et 80 dinars… Cette révision représente donc une augmentation de 5 à 10 dinars », a-t-il indiqué.
Il a ajouté que les médecins sont tenus de respecter ces nouveaux tarifs, même s’ils expriment des réserves. Le Dr El Ghazel a observé, à travers les commentaires de nombreux collègues, un manque d’enthousiasme pour cette augmentation. Cependant, ils seront contraints de l’appliquer.
Pour quelles raisons ?
Dans ce même cadre, le Dr El Ghazel a identifié plusieurs facteurs justifiant cette révision des tarifs. Il a tout d’abord cité le taux d’inflation dépassant 7 %, qui rend nécessaire une révision des tarifs pour compenser la hausse des coûts des biens, des loyers et des services.
« Il est évident que le taux d’inflation, qui dépasse 7 % en Tunisie, rend inévitables les hausses dans tous les secteurs, y compris les biens, les loyers et les services… Étant donné que les médecins sont également concernés par cette situation, il est normal que leurs honoraires, qui n’ont pas évolué depuis deux ans, soient ajustés en conséquence », a-t-il expliqué.
Ensuite, il a affirmé que l’impôt sur le revenu a été relevé, passant de 35 % à 40 % pour la tranche applicable aux médecins, ce qui implique que l’augmentation des honoraires servira principalement à compenser cette hausse fiscale conséquente. « En effet, aujourd’hui, 47 % du prix de la consultation est directement prélevé par l’État, sans compter les 7 % de TVA », a-t-il précisé.
« Finalement, et non moins important, il est indispensable de retenir les médecins tunisiens en garantissant un revenu minimum, afin de freiner l’exode massif que nous observons actuellement », a-t-il encore affirmé.
Des réserves…
D’un autre côté, le Dr El Ghazel a exprimé des réserves concernant cette augmentation. Il a estimé que la décision a été prise trop rapidement, sans tenir compte des circonstances économiques et sociales actuelles. De plus, l’augmentation des tarifs ne profitera pas à de nombreux médecins qui ne reçoivent que cinq ou six patients par jour.
« Cette décision a été prise de manière précipitée et n’a pas suffisamment pris en compte la situation économique et sociale difficile que traverse le pays actuellement, notamment l’absence d’augmentation salariale, ce qui aurait dû appeler à davantage de prudence avant de la mettre en œuvre. Par ailleurs, et c’est là le point le plus important, l’augmentation des honoraires ne bénéficiera pas à un grand nombre de médecins, particulièrement ceux qui ne reçoivent pas plus de cinq ou six patients par jour dans leurs cabinets », a-t-il expliqué.
Face à cette situation, il a plaidé pour une réforme structurelle permettant aux médecins de consulter un plus grand nombre de patients et offrant aux citoyens des services médicaux appropriés dans le secteur privé, sans frais supplémentaires.
« Je fais particulièrement référence à la médecine générale et à la médecine familiale, qui peuvent résoudre 80 % des problèmes de santé de la population… Cette réforme nécessite une nouvelle législation favorisant une coopération totale entre les secteurs public et privé, ce qui allégerait la charge des établissements publics et permettrait aux jeunes médecins de travailler dans leur pays sans être contraints à l’émigration », a-t-il encore souligné.
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