Que s’est-il passé au juste pour que l’idylle de courte durée entre Donald Trump et Elon Musk se transforme en une haine aussi implacable? Retour sur une rupture inévitable mais lourde de conséquences.
L’on s’attendait à ce que la lune de miel entre le dirigeant le plus puissant de la planète et l’homme le plus riche du monde soit de courte durée. Mais personne ne s’attendait à ce que le télescopage public entre ces deux têtes brûlées soit aussi brutal, spectaculaire et lourd de conséquences.
Dernier coup en dessous de la ceinture porté par Donald Trump au patron de Tesla? Le président américain accuse son ancien allié et mécène de profiter des subventions fédérales et de vivre ainsi au crochet du contribuable américain. « Sans subvention, Elon aurait probablement dû fermer boutique et retourner chez lui en Afrique du Sud », a-t-il écrit mardi 1er juillet en lettres capitales sur son réseau Truth Social ; dénonçant à l’occasion « un système de gaspillage massif » incarné par Tesla et SpaceX.
Licencié comme un majordome
Mais que s’est-il passé pour que le 47ème président des Etats-Unis brandisse la menace d’expulser Elon Musk et de lui retirer même la nationalité américaine, lui qui l’avait soutenu durant sa campagne, y compris en finançant à hauteur de 250 millions de dollars ses ambitions électorales?
Après un passage jugé en demi-teinte au sein du gouvernement, où placé à la tête Doge (Department of Government Efficiency), Musk affichait l’ambition de réaliser 2 000 milliards d’économie. Une utopie, puisque fin janvier, il abaissait déjà l’objectif à 1 000 milliards. Finalement son passage s’est soldé par seulement 175 millions de dollars d’économies. Fin mai, il aurait démissionné ou été limogé sans ménagement par le locataire de la Maison Blanche.
Revanche
Furieux et blessé dans son amour propre, Musk s’attaqua avec virulence à la réforme budgétaire intitulée pompeusement le « grand et beau projet de loi ». A savoir un projet de loi budgétaire massif, promu par Trump, qui prévoit d’augmenter de façon inédite le plafond de la dette fédérale de 5 000 milliards de dollars. Un texte que Musk qualifier même de « complètement insensé et destructeur » et de « gaspillage éhonté ».
Le magnat conservateur de la tech avait finalement rétropédalé le 11 juin, regrettant « être allé trop loin ». Mais son opposition à la « grande et belle loi » a repris le dessus lundi 30 juin, lorsqu’il a publié une série de tweets sur X pour étriller le projet. « Il est évident, vu les dépenses ahurissantes du texte – qui augmente de manière record le plafond de la dette de 5 000 milliards DE DOLLARS –, que nous vivons dans un pays au parti unique : le parti des cochons qui se goinfrent », a déploré le milliardaire de la tech.
Donald Trump riposta en menaçant de rompre les contrats fédéraux accordés à Tesla et SpaceX. Les conséquences ne se sont pas fait attendre : en effet, la proposition du projet de loi budgétaire supprime les aides aux véhicules électriques. Un coup dur pour Tesla, bénéficiaire historique de 38 milliards de dollars d’aides, dont 595 millions sur les seuls quatre premiers mois de 2025.
Pis. Tesla a vu sa capitalisation boursière fondre de 150 milliards de dollars le 5 juin, un record de baisse en une journée pour le constructeur automobile. Mardi 1er juillet, le titre reculait encore de 5 % à la clôture.
Et ce n’est pas fini. Puisque la Maison Blanche envisage de remettre en cause certains contrats fédéraux, notamment ceux de SpaceX, qui pèsent plus de 22 milliards de dollars.
Musk contre-attaque sur le terrain politique. Il a évoqué lundi la possibilité de créer un nouveau parti qui serait « exactement au milieu entre les démocrates et les républicains ».
« Si cette loi folle est adoptée, le parti de l’Amérique sera créé dès le lendemain », a-t-il prévenu dans un autre message, le décrivant comme un « parti trans-partisan démocrate-républicain pour que le peuple ait réellement une VOIX ». Une menace à laquelle s’ajoute celle de financer la campagne des primaires des républicaines de candidats opposés aux élus qui auraient voté la loi budgétaire. « Ils perdront leur primaire l’année prochaine », a écrit Elon Musk.
Plus grave. Musk porta un coup mortel à son ancien ami en insinuant qu’il figurait dans les dossiers liés à Jeffrey Epstein, l’homme d’affaires accusé d’exploitation sexuelle de mineurs qui s’est donné la mort en prison. La ligne jaune a été allégrement franchie et la rupture entre les deux hommes est totale, irrévocable et définitive.
Rivalité politique
Au final, que dire de cette rupture fracassante entre ces deux milliardaires qui continuent de s’étriper publiquement par mails interposés et déclarations intempestives?
Au-delà du choc frontal entre la personnalité imprévisible d’un président détenant entre ses mains tous les leviers du pouvoir, ne tolérant aucune concurrence, aucune contestation et celle d’un génie de la tech, tout aussi fantasque, tout aussi puissant, immensément riche et qui se comporte de surcroit comme un président bis, la coexistence est impossible entre un président populiste qui réclame un État fort, de préférence à son service, et un entrepreneur qui prône l’émergence d’un Etat réduit à sa plus simple expression et ramené à l’essentiel le plus basique. Surtout au service des intérêts privés.
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