Michael Burry accuse la tech de gonfler ses profits
Michael Burry, l’investisseur devenu célèbre pour avoir anticipé la crise des subprimes – et immortalisé dans The Big Short – revient à la charge. Cette fois, sa cible est la Silicon Valley. Et vous verrez que, à travers ces quelques lignes, cette dénonciation n’est pas si désintéressée que cela.
Michael Burry, gestionnaire du fonds Scion Asset Management, révèle que les géants de la tech gonflent artificiellement leurs profits grâce à des astuces comptables liées à l’intelligence artificielle. C’est ce que rapporte le site spécialisé TradingSat.
Dans un message publié sur X (ex-Twitter), il affirme que Microsoft, Meta, Amazon, Alphabet et Oracle ont étendu la durée de vie comptable de leurs équipements technologiques – serveurs, processeurs, GPU – de trois à cinq, voire six ans. En allongeant cette période d’amortissement, ces groupes réduisent leurs charges de dépréciation et affichent ainsi des bénéfices supérieurs à la réalité, ajoute la même source.
M. Burry évalue cette sous-évaluation à 176 milliards de dollars entre 2026 et 2028. Ce qui aurait pour effet d’augmenter artificiellement les résultats de 20 à 27 % pour certaines entreprises, rien que cela. Il dénonce une “fraude comptable moderne” et promet de dévoiler davantage d’éléments d’ici la fin novembre.
Mais cette dénonciation est-elle si désintéressée ?
Si l’on en croit TradingSat, derrière cette croisade comptable se cacherait un pari financier pour Michael Burry. En effet, les documents transmis à la SEC, le régulateur boursier américain, montreraient qu’il a acquis des options de vente (“puts”) sur des actions Palantir et Nvidia. Autrement dit, il parie sur une baisse du secteur technologique. De quoi nourrir donc les soupçons : plus la confiance du marché s’érode, plus son pari devient lucratif. Une stratégie qui rappelle celle des “vendeurs à découvert”, qui publient des rapports alarmistes sur les sociétés qu’ils misent à la baisse, explique le média.
Cependant, il s’agit d’un débat technique aux multiples lectures, explique-t-on. En effet, sur le fond, l’accusation de M. Burry repose sur un fait réel : les grands groupes ont effectivement allongé la durée d’amortissement de leurs infrastructures. Mais plusieurs raisons peuvent justifier cette évolution.
Le ralentissement de la loi de Moore* rend les puces moins rapidement obsolètes. Certaines, comme les GPU Nvidia A100 lancés en 2020, restent encore massivement utilisées. Alphabet a même confirmé que certaines de ses puces âgées de sept ou huit ans demeuraient encore opérationnelles.
Dans ce contexte, prolonger la durée de vie comptable de ces équipements peut paraître cohérent. Amazon a d’ailleurs fait le chemin inverse cette année, en réduisant certaines durées d’amortissement après avoir constaté une accélération des cycles d’innovation dans l’IA.
Wall Street pas affectée par cette prédiction “négative“
Pour l’heure, la sortie de Michael Burry n’a pas ébranlé les marchés. Les investisseurs se focalisent davantage sur la croissance, les marges opérationnelles et la génération de cash que sur ces ajustements comptables, indique StradingSat. “Ces durées d’amortissement ne sont pas choquantes. Les géants de la tech financent leurs investissements sur fonds propres, pas par la dette”, souligne Vincent Juvyns, stratégiste chez ING.
Charles Monot, président de Monocle AM, abonde dans le même sens : “Amazon avait déjà modifié la dépréciation de ses serveurs AWS, et cela n’avait pas affecté sa valorisation. Les marchés regardent la dynamique de croissance, pas les détails de la comptabilité”.
Alors, prédiction scientifique ou prédiction intéressée?
L’avenir nous le dira.
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* La loi de Moore est l’observation formulée par Gordon Moore (cofondateur d’Intel) en 1965, selon laquelle le nombre de transistors sur une puce électronique double environ tous les 18 à 24 mois. Ce qui entraîne une augmentation exponentielle de la puissance de calcul. Cette loi a historiquement fait progresser la technologie informatique de manière significative, rendant les appareils plus rapides, plus efficaces et plus abordables avec le temps.
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