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Impôt sur la fortune : La Tunisie à l’épreuve du réalisme économique, entre résilience et refondation

Longtemps perçue comme prisonnière de ses déséquilibres structurels, la Tunisie aborde désormais une phase où la résilience devient plus qu’un mot d’ordre : une stratégie nationale. Entre les contraintes budgétaires, les mutations globales et les dynamiques internes, le pays tente de conjuguer stabilité, réformes et inclusion.

Malgré une conjoncture internationale tendue— inflation importée, tensions géopolitiques, reconfiguration des chaînes d’approvisionnement- la Tunisie a su préserver une relative stabilité macroéconomique.

 

Les transferts des Tunisiens résidents à l’étranger (TRE), la reprise du tourisme et une diversification industrielle progressive ont permis d’amortir le choc des crises successives. Cette capacité d’adaptation illustre une économie moins vulnérable qu’elle ne l’a été au cours de la dernière décennie.

 

Mais derrière cette résilience se cachent des fragilités profondes. La croissance demeure insuffisante pour absorber le chômage structurel. Et la dette publique, bien que maîtrisée à court terme, pèse sur la marge de manœuvre budgétaire. Le redressement du modèle tunisien appelle donc une relecture de ses fondements économiques.

Des penseurs pour éclairer la refondation

Ainsi, plusieurs économistes offrent des pistes inspirantes pour cette reconfiguration.

Robert Boyer, chef de file de l’école de la régulation, rappelle que chaque économie doit construire sa propre cohérence institutionnelle. La Tunisie ne peut importer de modèle clé en main. Elle doit donc articuler ses politiques autour de ses structures productives et de ses compromis sociaux.

 

Joseph Stiglitz, prix Nobel d’Economie, insiste quant à lui sur la nécessité d’un État stratège, capable de corriger les défaillances du marché et de stimuler une croissance équitable. Dans un pays où les disparités régionales et sociales persistent, cette vision trouve un écho particulier.

 

Amartya Sen, enfin, place la liberté économique et sociale au cœur du développement. Pour lui, la richesse d’une nation ne réside pas seulement dans son PIB; mais aussi dans la capacité de ses citoyens à agir, produire et innover. La Tunisie, riche de son capital humain, pourrait ainsi transformer ses politiques sociales en leviers de croissance inclusive.

Le tournant de la politique économique

La période actuelle offre une occasion rare : celle de repenser la fonction économique de l’État. Ni un retrait dogmatique, ni un interventionnisme archaïque; mais plutôt une présence stratégique dans les secteurs structurants comme l’énergie, le transport, le numérique et la sécurité alimentaire.

 

Le rôle du secteur privé doit également être redéfini, non pas comme simple acteur d’opportunités; mais comme moteur de création de valeur nationale et d’emplois durables.

 

Dans cette optique, la régulation et la transparence deviennent essentielles. Les réformes fiscales et financières ne doivent pas se limiter à combler un déficit, mais viser la restauration de la confiance entre l’État, les entreprises et les citoyens.

Vers un modèle tunisien du développement

Plus qu’une réforme technique, c’est un changement de paradigme qui s’impose. Le modèle tunisien doit articuler efficacité économique et justice sociale, modernisation industrielle et cohésion territoriale.
L’enjeu est d’inventer une trajectoire propre, fondée sur la connaissance, l’innovation et la valorisation du capital humain; plutôt que sur la seule compression de la dépense publique.

 

Dans un monde fracturé, où les dépendances se reconfigurent et où la souveraineté économique redevient un enjeu stratégique, la Tunisie a tout à gagner à transformer ses contraintes en leviers. La résilience, pour être durable, doit devenir refondation.

 

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Pour en savoir plus, voir in L’ECONOMISTEMAGREBIN-MAGAZINE numéro 933, à paraitre le 03 décembre 2025, ma contribution augmentée : « Impôt sur la fortune – entre justice sociale et efficacité économique – Un débat qui dépasse les chiffres ».

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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ECLAIRAGE – Tunisie 2025 : entre redressement fragile et défis structurels

La Tunisie s’impose comme un exemple complexe de résilience dans un contexte mondial incertain. En dépit des turbulences géopolitiques et économiques qui secouent la planète, l’économie tunisienne semble s’en sortir, avec des signes de redressement. Toutefois, cette reprise reste teintée d’ambiguïtés : l’équilibre entre progrès et vulnérabilités reste précaire, et le pays doit encore faire face à des défis structurels de taille pour pérenniser son développement.

Les prémices d’une reprise tangible

Le tableau économique de la Tunisie pour 2025 présente plusieurs signaux encourageants. Le produit intérieur brut (PIB) affiche une croissance de 3,2 % au deuxième trimestre, un chiffre qui contraste avec les 1,4 % de l’année précédente.

Derrière cette performance se cachent des moteurs divers : la relance de l’agriculture, l’essor du tourisme, la reprise des industries manufacturières, et l’essor des services.

La baisse de l’inflation, passée de 6,7 % en septembre 2024 à 4,9 % en octobre 2025, est un autre indicateur rassurant. Cela témoigne d’une gestion efficace des tensions inflationnistes, fruit de la politique monétaire mise en place par la Banque centrale. Celle-ci a également allégé le coût du crédit en révisant son taux directeur à 7,5 %, une mesure qui soutient l’investissement.

Les indicateurs sont également positifs du côté des finances extérieures. Les transferts des Tunisiens de l’étranger et les recettes touristiques en hausse viennent renforcer les réserves de change, qui atteignent désormais 107 jours d’importation. Cette reprise reste cependant fragile, et les observateurs restent prudents : si les progrès sont réels, ils ne sont pas suffisants pour effacer toutes les incertitudes.

Une résilience mise à l’épreuve

Cette reprise, bien que notable, ne masque pas les fractures profondes de l’économie tunisienne. L’un des principaux défis réside dans la question du chômage. À 15,3 %, ce taux reste structurellement élevé et traduit un marché du travail déconnecté des dynamiques économiques positives. Pour résoudre cette problématique, il faudrait une croissance supérieure à 4,5 % par an, un objectif difficile à atteindre dans le contexte actuel.

La résilience tunisienne, qui se traduit par des exportations dynamiques, un afflux d’investissements directs étrangers (IDE) et une relance du tourisme, semble cependant concentrée sur le littoral. L’intérieur du pays, notamment les régions rurales et montagneuses, peinent à bénéficier de cette croissance. Ce clivage géographique des effets de la reprise soulève une question fondamentale : la croissance actuelle est-elle véritablement inclusive ?

Un autre point de friction réside dans la stagnation de la productivité. Le pays souffre d’un appareil administratif lourdaud et de procédures complexes qui découragent les investisseurs.

Abdallah Dardari, directeur régional du PNUD pour les pays arabes, plaide pour un choc de modernisation. Cela inclurait une simplification des démarches administratives, la digitalisation des services, le développement des compétences et, surtout, une intégration renforcée des nouvelles technologies. Ces réformes structurelles sont jugées essentielles pour libérer le potentiel productif de l’économie tunisienne.

L’émergence d’une économie verte : un espoir durable ?

Parallèlement à cette reprise conjoncturelle, un autre aspect devient de plus en plus central dans les discussions économiques : la transition vers une économie verte.

Dans un monde de plus en plus tourné vers les défis climatiques, la Tunisie pourrait trouver un levier stratégique en exploitant ses ressources naturelles pour se tourner vers des solutions énergétiques durables.

Le pays dispose en effet d’atouts considérables, notamment dans les énergies renouvelables, l’hydrogène vert, le biogaz et la valorisation des déchets.

Cependant, pour que cette transition devienne une réalité, il faudra plus qu’une prise de conscience écologique : elle nécessite un cadre institutionnel solide et des investissements massifs.

C’est là que la question de la gouvernance se pose à nouveau. L’absence de politiques claires et cohérentes pourrait limiter la portée de ces initiatives.

Le poids des écarts internationaux : un défi à surmonter

Si les indicateurs internes montrent des signes positifs, la place de la Tunisie sur la scène internationale reste préoccupante.

Dans l’indice mondial de risque et de résilience des investissements, la Tunisie se classe à une modeste 166ᵉ place, loin derrière des modèles comme Singapour ou les pays nordiques. Avec un score de risque élevé et une résilience jugée faible, la Tunisie demeure perçue comme vulnérable face aux chocs externes.

Ce classement révèle une double réalité : si les fondamentaux économiques sont en amélioration, la gouvernance, l’innovation et la productivité doivent encore être renforcées pour que la Tunisie puisse rejoindre les rangs des économies réellement résilientes. Il ne s’agit pas uniquement de résister aux crises, mais de se transformer pour en tirer parti.

Vers une résilience active : un modèle à repenser

Aujourd’hui, la résilience tunisienne ne se mesure plus à sa simple capacité de survie, mais à sa capacité à se réinventer. Dans un monde où la compétitivité est synonyme d’agilité et d’innovation, le pays doit amorcer une transition vers un modèle de croissance plus dynamique et durable.

Il est temps pour la Tunisie de passer d’une résilience défensive à une résilience proactive. Cela nécessite une refonte de son modèle productif, un investissement massif dans l’innovation, et un soutien sans faille à l’économie verte. La Tunisie a prouvé qu’elle savait tenir debout. Le défi consiste désormais à lui donner la capacité de courir.

C’est un chemin semé d’embûches, mais aussi riche de potentiels. La question qui se pose désormais n’est pas tant de savoir si la Tunisie pourra se redresser; mais comment elle saura transformer sa résilience fragile en une dynamique véritablement créatrice de valeur et d’opportunités durables.

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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Revue économique et financière hebdo au 07 novembre 2025 – La stabilité avant la tempête ?

Dans un environnement mondial toujours incertain, la Tunisie semble marquer une pause. Les indicateurs monétaires et financiers publiés au 7 novembre 2025 traduisent une stabilité apparente, soutenue par la détente des prix mondiaux et une accalmie monétaire interne. Mais derrière cette respiration, se dessine une fragilité persistante qui limite la portée de la reprise.

 

International : un monde en équilibre instable

À l’international, les marchés financiers évoluent dans une atmosphère d’attente. Aux États-Unis, la Réserve fédérale a suspendu ses hausses de taux, encouragée par une désinflation visible mais prudente. Les rendements obligataires à dix ans sont repassés sous 4,4 %, signalant une détente des anticipations d’inflation.

En Europe, la BCE reste sur la même ligne, confrontée à une croissance quasi nulle et à un ralentissement marqué de la consommation.

Sur le front géopolitique, les tensions persistantes au Moyen-Orient entretiennent la volatilité. Le baril de Brent oscille autour de 82 dollars, tiré par les restrictions de production de l’OPEP+ mais tempéré par une demande chinoise encore hésitante.

À Pékin, la relance budgétaire et immobilière peine à restaurer la confiance des ménages.

Résultat : un environnement international plus calme sur les prix des matières premières, mais où la croissance reste fragile — un contexte plutôt favorable aux pays importateurs comme la Tunisie.

Tunisie : une conjoncture tunisienne en respiration

Les données monétaires et financières de la Banque centrale de Tunisie, au  07 novembre 2025* confirment un certain répit. Le solde du compte courant du Trésor remonte à 749,8 millions de dinars, en hausse par rapport à la veille mais toujours inférieur à 2024. Côté bancaire, la liquidité s’améliore : le solde du compte courant des banques s’établit à 372,6 millions de dinars, soit une progression de 86 % sur un an.

La BCT maintient son taux directeur à 7,5 %, après une baisse de 50 points de base depuis 2024, dans une logique de soutien mesuré à l’activité. Le taux du marché monétaire reste stable à 7,49 %, tandis que le volume global du refinancement recule légèrement à 11,6 milliards de dinars. Ces niveaux traduisent un équilibre relatif, malgré une demande de liquidités toujours élevée.

Les avoirs en devises atteignent 24,7 milliards de dinars, équivalents à 107 jours d’importation, soutenus par deux piliers essentiels : les recettes touristiques cumulées, en hausse (sur un an) de 7,8 % sur un an, et les transferts des Tunisiens à l’étranger, en progression de 7,4 %. Ces flux extérieurs assurent une bouffée d’oxygène à la balance des paiements et contribuent à la stabilité du dinar, qui reste légèrement plus ferme face à l’euro mais plus faible face au dollar.

Une dette intérieure sous contrôle apparent

La gestion de la dette publique montre une recomposition intéressante. L’encours des Bons du Trésor à court terme chute à 3 milliards de dinars, contre plus de 9 milliards un an plus tôt, tandis que les Bons du Trésor assimilables à moyen et long terme grimpent à 28,7 milliards. L’État semble vouloir étaler ses échéances, réduisant le risque immédiat de refinancement.

Mais cette stratégie a un coût : les taux des BTA dépassent encore 8 %, maintenant une charge d’intérêt élevée pour le budget. Sur le marché boursier, la tendance reste neutre : la Tunisie financière attend la loi de finances 2026 pour calibrer ses anticipations. Les valeurs bancaires et d’assurance dominent les échanges, profitant d’un climat monétaire plus stable et d’un regain de confiance prudent.

Des équilibres fragiles à consolider

À court terme, la Tunisie bénéficie d’une phase de stabilité bienvenue. L’inflation ralentit, les réserves en devises se maintiennent, et la détente du taux directeur allège légèrement la contrainte sur le crédit. Cette respiration monétaire soutient la confiance, sans toutefois créer un élan de croissance.

À moyen terme, le pays devra concilier cette stabilité avec les exigences de la consolidation budgétaire. Les marges de manœuvre sont limitées : la masse salariale publique reste élevée, les besoins de financement du Trésor récurrents, et la croissance encore trop faible pour inverser la tendance.

La clé réside désormais dans la coordination entre politique monétaire et politique budgétaire. Une meilleure allocation des dépenses publiques, un soutien ciblé à l’investissement productif et une réforme fiscale équitable pourraient offrir à la Tunisie un levier durable pour transformer cette stabilité fragile en relance maîtrisée.

 

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Références :

(1) Sources principales consultées pour le contexte international : World Bank MENAAP (07 nov. 2025), données prix Brent / marché pétrolier (07 nov. 2025), minutes Fed / prises de position récentes, analyses Reuters sur la réaction des marchés aux tensions régionales. (Banque Mondiale)

(2) (*) https://www.bct.gov.tn/bct/siteprod/indicateurs.jsp

(**) https://www.ins.tn/

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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Dinar tunisien : la faiblesse d’une monnaie qui peine à retrouver sa force

La force d’une monnaie ne se décrète pas. Elle se gagne, lentement, au rythme de la solidité économique qu’elle incarne. En Tunisie, le dinar reflète aujourd’hui les déséquilibres d’une économie sous tension. Malgré une inflation en repli et les efforts de stabilisation monétaire, il reste structurellement affaibli. Sa valeur sur les marchés, son pouvoir d’achat interne et la confiance qu’il inspire racontent, ensemble, une histoire de fragilité durable.

 Depuis une quinzaine d’années, le dinar tunisien s’est continuellement déprécié face aux grandes devises internationales. En 2010, un euro s’échangeait contre environ 1,9 dinar. En 2025, il faut près de 3,4 dinars pour un euro et plus de 3 dinars pour un dollar. Cette chute n’est pas anodine : elle traduit une perte de valeur nominale qui se répercute sur le coût des importations, sur les prix intérieurs et, in fine, sur le pouvoir d’achat des ménages.

Cette dépréciation prolongée est la conséquence directe d’un déséquilibre entre l’offre et la demande de devises. La Tunisie importe beaucoup plus qu’elle n’exporte. Ses recettes touristiques et les transferts des Tunisiens résidents à l’étranger, bien qu’importants, ne suffisent plus à combler le déficit courant. Dans un climat d’incertitude économique et politique, les investissements étrangers se font rares, ce qui accentue la pression sur le marché des changes. Le dinar, affaibli par cette rareté de devises, glisse lentement, sans choc spectaculaire mais avec une constance inquiétante.

 

La Tunisie importe beaucoup plus qu’elle n’exporte. Ses recettes touristiques et les transferts des Tunisiens résidents à l’étranger, bien qu’importants, ne suffisent plus à combler le déficit courant. Dans un climat d’incertitude économique et politique, les investissements étrangers se font rares, ce qui accentue la pression sur le marché des changes.

 

Un pouvoir d’achat réel érodé

La faiblesse du dinar ne se limite pas à son taux de change : elle s’exprime dans la vie quotidienne des Tunisiens, à travers la perte de pouvoir d’achat. En octobre 2025, l’inflation a atteint 4,9%. Ce taux, bien qu’en baisse par rapport aux années précédentes, reste supérieur à celui des partenaires commerciaux de la Tunisie, notamment la zone euro où l’inflation avoisine 2,5%. Cette différence signifie que les prix augmentent plus vite en Tunisie qu’à l’étranger, ce qui réduit la valeur réelle du dinar.

Même si la monnaie semble se stabiliser sur le plan nominal, son pouvoir d’achat continue de s’effriter. Un même montant en dinars permet d’acheter moins de biens qu’auparavant, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Les ménages en font l’expérience au quotidien, lorsque le prix des produits importés — carburants, blé, médicaments ou équipements — s’élève mécaniquement au rythme de la dépréciation.

Une fragilité d’origine structurelle

Le problème du dinar n’est pas conjoncturel, il est structurel. Il réside dans les fondations mêmes de l’économie tunisienne, marquée par une productivité insuffisante, une dépendance chronique aux importations et des déficits jumeaux — budgétaire et courant — qui grèvent la stabilité monétaire.

L’État dépense plus qu’il ne perçoit, tandis que le pays continue d’importer davantage qu’il n’exporte. Cette double contrainte alimente une demande permanente de devises étrangères. À cela s’ajoute un endettement extérieur élevé, qui accroît la pression sur les réserves de change. La Banque centrale de Tunisie, malgré ses efforts pour préserver la stabilité des prix, évolue dans un contexte budgétaire et politique difficile qui limite la crédibilité de son action.

 

L’État dépense plus qu’il ne perçoit, tandis que le pays continue d’importer davantage qu’il n’exporte. Cette double contrainte alimente une demande permanente de devises étrangères. À cela s’ajoute un endettement extérieur élevé, qui accroît la pression sur les réserves de change.

 

Ces déséquilibres nourrissent un cercle vicieux : la dépréciation du dinar renchérit les importations, alimente l’inflation, creuse le déficit budgétaire et réduit les marges de manœuvre de la politique monétaire.

Une monnaie faible, des effets ambivalents

Une monnaie faible peut, en théorie, stimuler les exportations et le tourisme en rendant les produits tunisiens plus compétitifs à l’étranger. Mais cette logique ne fonctionne que dans les économies à forte capacité productive. Or, la production tunisienne reste largement dépendante d’intrants importés dont le coût augmente avec la dépréciation du dinar. Le gain de compétitivité est donc rapidement annulé par la hausse des coûts.

Les effets négatifs, eux, sont immédiats. Le coût de la vie augmente, les entreprises voient leurs charges s’alourdir, la dette extérieure devient plus coûteuse à rembourser, et la confiance dans la monnaie nationale s’amenuise. La faiblesse du dinar agit ainsi comme le miroir d’une économie vulnérable, exposée à des chocs externes qu’elle peine à absorber.

Redonner de la force au dinar : un chantier national

La solidité d’une monnaie est indissociable de celle de l’économie qu’elle représente. Pour redonner au dinar la force qu’il a perdue, la Tunisie devra s’attaquer à la racine du problème : la faiblesse de ses fondamentaux. Cela passe par la restauration des équilibres budgétaires, la relance de la production nationale, la diversification des exportations et la consolidation de la confiance des investisseurs, nationaux comme étrangers.

 

La solidité d’une monnaie est indissociable de celle de l’économie qu’elle représente. Pour redonner au dinar la force qu’il a perdue, la Tunisie devra s’attaquer à la racine du problème : la faiblesse de ses fondamentaux. Cela passe par la restauration des équilibres budgétaires, la relance de la production nationale, la diversification des exportations et la consolidation de la confiance des investisseurs, nationaux comme étrangers.

 

Une monnaie forte est celle d’un pays productif, crédible et stable. La Tunisie n’a pas perdu cette ambition : elle doit simplement retrouver le chemin de la cohérence économique et de la discipline budgétaire.

In fine, dire que le dinar est une monnaie faible, c’est reconnaître l’épuisement d’un modèle économique qui a longtemps vécu au-dessus de ses moyens. Mais cette faiblesse n’est pas une fatalité. En rétablissant la confiance, en maîtrisant l’inflation et en relançant la création de richesse, la Tunisie peut espérer redonner à sa monnaie la valeur d’un symbole retrouvé : celui d’une économie résiliente, ancrée dans la stabilité et tournée vers la productivité sociale.

 

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Références :

* BCT : Données économiques et financières : https://gosdmx.bct.gov.tn/gosdmx/pnrd?lang=FR

** INS : https://www.ins.tn/publication

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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L’inflation en Tunisie, une analyse augmentée – Une accalmie fragile malgré la détente des prix alimentaires

Après plusieurs mois de tension sur les prix, le mois d’octobre 2025 apporte un léger répit sur le front de l’inflation. Le taux s’établit à 4,9 %, contre 5 % en septembre, marquant un ralentissement qui, s’il reste modeste, traduit un apaisement graduel des pressions sur les prix. Ce repli est toutefois à nuancer : la dynamique reste inégalement répartie entre les différents postes de consommation, et certaines hausses structurelles continuent d’éroder le pouvoir d’achat des ménages.

Une inflation en décélération mais encore diffuse

Le recul du taux d’inflation à 4,9 % résulte principalement d’un ralentissement des prix des produits alimentaires (5,6 % contre 5,7 % en septembre) et de ceux du secteur de la restauration, des cafés et hôtels (7,5 % contre 10,1 %). Cette modération traduit autant des effets de base favorables que l’impact d’une stabilisation partielle des coûts importés et d’une certaine détente du dinar sur les marchés des changes.

Mais la baisse demeure fragile : les prix alimentaires continuent d’augmenter à un rythme élevé, portés par une flambée des légumes frais (+21,4 %), de la viande d’agneau (+18,8 %), des poissons frais (+9,9 %) et des fruits frais (+9,2 %). Ces produits, à forte pondération dans le panier du consommateur tunisien, maintiennent l’inflation du quotidien à des niveaux ressentis bien supérieurs aux chiffres officiels. En contrepartie, la baisse spectaculaire des huiles alimentaires (-22,2 %) allège légèrement la facture globale, soutenue par des ajustements sur les marchés mondiaux des huiles végétales.

Les produits manufacturés et les services restent sous tension

L’autre moteur de l’inflation réside dans les produits manufacturés, dont les prix progressent de 5 % sur un an. L’habillement et les chaussures enregistrent une hausse marquée de 9,2 %, traduisant à la fois la hausse des coûts de production importés et la disparition progressive des rabais saisonniers. De même, les produits d’entretien courant du foyer augmentent de 5 %, reflet d’une inflation persistante des intrants industriels et d’une demande soutenue malgré la contraction du pouvoir d’achat.

Les services, pour leur part, continuent d’afficher une progression de 4,2 %, principalement tirée par le secteur de la restauration et de l’hôtellerie (+7,5 %). Cette évolution illustre le retour progressif à la normale du tourisme domestique et international, mais également une répercussion des hausses salariales et énergétiques sur les prix finaux.

 

L’autre moteur de l’inflation réside dans les produits manufacturés, dont les prix progressent de 5 % sur un an. L’habillement et les chaussures enregistrent une hausse marquée de 9,2 %, traduisant à la fois la hausse des coûts de production importés et la disparition progressive des rabais saisonniers.

 

Inflation sous-jacente : un cœur encore chaud

L’inflation sous-jacente, indicateur plus pertinent de la tendance de fond puisqu’elle exclut les produits alimentaires et énergétiques, s’établit à 5,1 % après 5,2 % en septembre. Cette quasi-stabilité confirme que les pressions inflationnistes demeurent enracinées dans le tissu économique, notamment dans les secteurs non encadrés. Les produits libres augmentent de 6 % sur un an.Tandis que les produits encadrés — tels que les carburants, certains médicaments et denrées de base — n’affichent qu’une hausse de 1,1 %.

Cette divergence illustre le rôle stabilisateur de la politique de prix administrés, mais aussi ses limites : si les produits encadrés amortissent les chocs pour les ménages; ils pèsent sur les finances publiques et masquent partiellement les déséquilibres du système de subventions.

Une hausse mensuelle alimentée par la fin des soldes

En glissement mensuel, les prix à la consommation ont progressé de 0,7 % en octobre, après un quasi-statu quo en septembre. Cette hausse est largement attribuable à la fin des soldes d’été, qui a provoqué une envolée de 6,4 % des prix de l’habillement et des chaussures. Ce phénomène saisonnier, récurrent mais significatif, a pesé davantage que les variations plus contenues des prix alimentaires (+0,1 %).

Dans le détail, les prix des vêtements ont grimpé de 6,3 %, ceux des chaussures de 7,4 %. Tandis que les tissus et accessoires ont progressé respectivement de 1,6 % et 2,1 %. Sur le plan alimentaire, les légumes frais (+1,3 %) et les huiles (+0,7 %) ont légèrement augmenté, alors que les viandes ovines (-1,3 %) et la volaille (-0,4 %) ont reculé.

 

Dans le détail, les prix des vêtements ont grimpé de 6,3 %, ceux des chaussures de 7,4 %. Tandis que les tissus et accessoires ont progressé respectivement de 1,6 % et 2,1 %. Sur le plan alimentaire, les légumes frais (+1,3 %) et les huiles (+0,7 %) ont légèrement augmenté, alors que les viandes ovines (-1,3 %) et la volaille (-0,4 %) ont reculé.

 

Les moteurs sectoriels de l’inflation

En termes de contribution à l’inflation globale, le secteur manufacturier reste le principal vecteur avec 1,9 point, suivi du secteur des services (1,4 point). Ces deux postes concentrent désormais l’essentiel de la dynamique inflationniste, en lien avec la hausse des coûts logistiques, salariaux et des importations.

Du côté des régimes de prix, les produits non alimentaires libres et alimentaires libres contribuent respectivement pour 3,1 points et 1,6 point à l’inflation totale. Autrement dit, la majeure partie de la hausse des prix provient de segments non régulés du marché, où la concurrence reste souvent limitée et la transmission des hausses de coûts rapide.

Une désinflation relative mais pas structurelle

Le repli de l’inflation à 4,9 % marque une étape encourageante, mais il ne saurait être interprété comme une victoire. L’essentiel de la détente repose sur des facteurs temporaires — saisonnalité, base de comparaison élevée et stabilisation de certaines importations — plutôt que sur une amélioration structurelle des équilibres internes.

En l’absence de réforme profonde des circuits de distribution, de la régulation concurrentielle et de la logistique alimentaire, l’économie tunisienne restera vulnérable à la moindre tension externe ou climatique. Pour que cette désinflation devienne durable, il faudra s’attaquer aux causes structurelles : dépendance alimentaire, inefficience des marchés intérieurs et rigidité des prix administrés.

La modération de l’inflation, même fragile, ouvre toutefois une fenêtre d’opportunité pour la Banque centrale de Tunisie : elle pourrait envisager une approche plus équilibrée entre maîtrise monétaire et soutien à la croissance, à condition que l’État consolide sa stratégie anti-inflation par des réformes de fond et non par des mesures de court terme.

 

Pour que cette désinflation devienne durable, il faudra s’attaquer aux causes structurelles : dépendance alimentaire, inefficience des marchés intérieurs et rigidité des prix administrés.

 

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Sources :  INS : https://www.ins.tn/publication/indice-des-prix-la-consommation-octobre-2025 – (Données définitives)

 

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

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Psd-Fondateur de l’Institut Africain D’Economie Financière (IAEF-ONG)

L’article L’inflation en Tunisie, une analyse augmentée – Une accalmie fragile malgré la détente des prix alimentaires est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

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