De la prison algérienne aux soins en Allemagne : le calvaire de Sansal s’arrête
C’est un dénouement qui soulage les cercles littéraires et les chancelleries européennes. L’Algérie a consenti, ce mercredi 12 novembre, à gracier l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, incarcéré depuis un an, et à autoriser son transfert vers l’Allemagne pour y recevoir des soins. La présidence algérienne a fait connaître sa décision par voie de communiqué, mettant fin à des mois d’attente et de pressions discrètes.
Selon le texte officiel, le président Abdelmadjid Tebboune a répondu favorablement à une requête de son homologue allemand, Frank-Walter Steinmeier. Ce dernier avait plaidé pour une libération motivée par « l’âge avancé » et « l’état de santé fragile » de l’auteur, âgé de 81 ans et atteint d’un cancer. Une libération qui s’apparente à un geste d’apaisement, soigneusement négocié dans les coulisses du pouvoir.
Une famille entre inquiétude et espoir
Depuis la Tchéquie où elle réside, sa fille Sabeha Sansal a confié son soulagement. « J’étais pessimiste, mais j’y ai toujours cru. […] Je n’arrivais pas à comprendre pourquoi il était emprisonné. » Des mots qui résonnent comme un écho aux appels répétés de la famille, inquiète des conditions de détention du romancier.
Arrêté puis condamné en appel à cinq ans de réclusion en juillet dernier pour « atteinte à l’unité nationale », Boualem Sansal avait renoncé à se pourvoir en cassation. Une renonciation qui a ouvert la voie à la procédure de grâce présidentielle, seul recours possible.
Une affaire aux racines politiques
L’origine de son emprisonnement remonte à des déclarations faites en octobre 2024 au média français d’extrême droite Frontières, dans lesquelles l’écrivain affirmait que des régions de l’Ouest algérien, comme Oran et Mascara, relevaient historiquement du Maroc avant la colonisation française. Un propos sensible dans un contexte de tensions régionales persistantes.
Pour obtenir gain de cause, le président allemand a insisté sur la dimension « humanitaire » de la demande, mais aussi sur les « bonnes relations entre [leurs] deux pays ». Un argument qui semble avoir porté.
Soulagement en France et en Europe
En France, la nouvelle a été accueillie avec émotion. Le premier ministre Sébastien Lecornu a salué une décision « fruit d’une méthode faite de respect et de calme ». Même tonalité du côté de Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, pour qui « la liberté de penser, d’écrire, de douter et de citrique triomphe aujourd’hui ».
Dans l’opposition, de Laurent Wauquiez (LR) à Marine Tondelier (Écologistes), les réactions convergent vers un hommage à la détermination des soutiens de l’écrivain. Seule ombre au tableau : la situation de Christophe Gleizes, toujours détenu en Algérie, rappelée par Gabriel Attal.
Le rôle de la discrétion diplomatique
L’ancienne ministre Noëlle Lenoir, présidente du comité de soutien à Sansal, a salué sur les ondes de RFI un « immense soulagement » après des mois d’incertitude. Un sentiment partagé par l’ancien président François Hollande, tandis qu’Olivier Faure (PS) a défendu l’idée qu’en diplomatie, « montrer ses muscles ça ne sert souvent pas à grand-chose ».
Aujourd’hui, l’essentiel reste que Boualem Sansal, affaibli et malade, puisse retrouver les siens et recevoir les soins dont il a besoin. Une victoire pour ses proches, pour ses lecteurs, et peut-être aussi un signe d’ouverture dans les relations entre Alger et l’Europe.
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